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VICOMTE OSCAR DE POLI
VOYAGE
AU
ROYAUME DE NAPLES
EN 1862

PARIS
1863

(2)

VIII — L'UNITÉ ITALIENNE........................157
IX — Les Brigands....................................193
X — Les Lieutenants Subalpins................271
XI - FRANÇOIS II.......................................299
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L'UNITÉ ITALIENNE

La Société est instituée pour la destruction indispensable de tous les gouvernements de la Péninsule, et pour former un seul État de l'Italie sous la forme républicaine.»

(Art. 1er des Statuts de la Jeune-Italie)

I

On parle do l'unité italienne, mais on oublie de noter qu'elle n'existe pas plus dans les esprits qu'en fait. L'Italie est peut-être le pays du monde qui compte le plus de partis politiques; aussi passe-t-elle par toutes les douleurs et toutes les humiliations.

Les Autrichiens à Venise, Pie IX à Rome, les réactionnaires armés dans les Deux-Siciles, voilà qui prouve surabondamment que l'unité n'existe pas en fait.

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Il nous reste à prouver qu'elle est encore moins dans les esprits, et nous ne saurions le faire mieux qu'en énumérant les différents partis politiques qui s'agitent dans la Péninsule:

Les légitimistes;

Les unitaristes républicains;

Les républicains catholiques, qui veulent que Rome ne soit qu'au pape;

Les fédéralistes qui veulent le rétablissement et la confédération de toutes les anciennes souverainetés;

Les semi-italiens qui rêvent un royaume du Nord et un royaume du Sud, avec la papauté au centre, comme l'arbre d'une balance;

Les unitaristes piémontais, qui veulent l'Italie une sous le sceptre de Victor-Emmanuel;

Les catholiques sincères, qui rêvent Pie IX et Victor Emmanuel, siègeant côte à côte dans la Ville Eternelle, tous deux également souverains;

Les autonomistes, qui veulent faire de l'Italie une vaste confédération à l'instar de la Suisse, en étendant à l'infini les privilèges municipaux, en rendant l'autonomie et l'indépendance absolues à toute ville jadis souveraine, comme Gênes, Mantoue, Milan, Ferrare, Ravenne, Pise, Florence, Parme, etc.

Voilà donc huit partis qui vivent et s'agitent en Italie, et encore se subdivisent-ils tous en une multitude de fractions et de sous-fractions. Croit-on après cela que l'unité soit dans les esprits et qu'elle serait parachevée le jour on la maison de Savoie entrerait au Capitule?

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Le Piémont aurait dû s'efforcer, depuis la première heure, d'homogénéiser ces divers partis; sans doute ses efforts se fussent brisés tout d'abord contre la fidélité légitimiste et la ténacité démocratique; mais peut-être pouvait-il, sinon anéantir, du moins adoucir la plupart de ses adversaires politiques. Il est vrai que pour accomplir cette lourde tâche, il avait besoin d'un homme de génie, d'un grand homme; mais la cause piémontaise n'est pas assez bonne pour susciter de grands hommes. Tout au plus voyons-nous apparaître un pauvre diable en chemise rouge, qui n'a jamais gagné que des batailles de portes ouvertes; Tyrtée bouffon qui lance des lettres en style de carnaval triste et dont on photographie la botte percée; Achille de parade que ses complices blessent au pied, et puis qui se réfugie piteusement dans son Ilot comme l'autre sous sa tente.

On ne peut comprendre mieux la misère et la débilité de la révolution italienne, la petitesse et l'étroitesse de ses hommes, qu'en examinant ce Garibaldi qu'elle appelle pompeusement le héros des Italiens, ce qui prouverait au moins que la révolution donne des titres pour rien. Mais je ne veux parler du vaincu d'Aspromonte que dans un volume ultérieur.

On ne saurait également mieux voir le but où tend persévéramment l'unitarisme qu'en relisant l'article premier des statuts de la société secrète dite de la Jeune-Italie: «Instituée pour la destruction indispensable de TOUS les gouvernements de la péninsule, et pour former un seul État de toute l'Italie sous la forme républicaine.»

Le gouvernement piémontais sait-il qu'il n'est que le successeur ou plutôt l'homme d'affaires de cette société secrète, société de poignardeurs et de régicides;

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et s'il a lu et compris cet article premier, comment a-t-il osé se lancer dans l'abîme révolutionnaire? On voit des États, comme des hommes, se suicider dans une heure de démence!

Mais pour comprendre quelle infranchissable distance, quelle implacable haine divise les hommes de la Jeune-Italie et ceux du piémontisme, il faut lire encore ces quelque? articles des statuts précités:

«ART. 2. En raison des maux dérivant du régime absolu, et ceux plus grands encore des monarchies constitutionnelles, nous devons réunir tous nos efforts pour constituer une république une et indivisible.

» Art. 30. Les membres qui n'obéiront pas aux. ordres de la société secrète, et ceux qui en dévoileront les mystères, seront poignardés sans rémission.

» ART. 31. Le tribunal secret prononcera la sentence, en désignant un ou deux affidés pour son exécution immédiate.

» Art. 32. L'affidé qui refusera d'exécuter la sentence prononcée, sera reconnu parjure et comme tel mis à mort sur-le-champ.

» ART. 33. Si la victime condamnée parvient à s'échapper, elle sera poursuivie sans relâche, en tout lieu, et le coupable sera frappé par une main invisible, se fût-il réfugié sur le sein de sa mère ou dans le tabernacle du Christ.

» Art. 34. Chaque tribunal secret sera compétent, non-seulement pour juger les adeptes coupables, mais encore pour faire mettre à mort toutes les personnes qu'il aura vouées à la mort.»

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Voilà l'unité italienne, c'est-à-dire le meurtre, le régicide, le sacrilège, et voilà les principes atroces dont le Piémont s'est déclaré le champion et qu'il ose vouloir faire triompher..

L'unité est donc jugée, et la juger c'est la condamner. Ainsi s'explique cette formidable abstention des quatre-vingt-dix-neuf centièmes de la population italienne dans le vote de l'annexion, et leur abstention continue dans tout ce qui constitue les actes de la vie politique. C'est la conspiration du silence, organisée par tout un peuple contre ses gouvernants égarés par une minorité plus infime encore qu'audacieuse. Cependant non? disions que le but du Piémont eût dû être d'homogénéiser les différentes sectes politiques de la Péninsule; or, rien ne pouvait l'amener plus sûrement à ce résultat qu'un gouvernement constamment honnête et bon, respectant toutes les libertés pour que l'autorité fût respectée, ménageant les deniers publics, évitant le scandale d'incroyables dilapidations, diminuant les impôts, améliorant les codes, encourageant l'agriculture et l'industrie, moralisant l'instruction tout en la libéralisant, protégeant l'Église au lieu de la dépouiller, expulsant les saltimbanques, les escrocs et les bourreaux politiques, en un mot, apprenant au peuple à mieux connaître et peut-être à supporter cette unité qu'il avait d'abord repoussée de toutes ses forces.

La condamnation du gouvernement piémontais est tout entière dans les lignes qu'on vient de lire; l'unité était difficile: le Piémont l'a rendue impossible.

II

M. Gladstone, dans un pamphlet trop fameux, appelait

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le gouvernement des Bourbons: «le gouvernement de la négation de Dieu.» Tout dernièrement un publiciste français appelait le gouvernement piémontais: «le gouvernement de la négation de Dieu et de l'homme.»

Le 24 août, dans le quartier populeux de Porta-Capuana, une rixe sanglante éclate entre des citoyens et des soldats et dégénère en émeute. Des centaines d'individus y prennent part; les gendarmes accourent, on les maltraite et on les repousse. Surviennent d'autres soldats qui, dans leur exaspération, font usage de leurs armes contre les ouvriers. Quatorze d'entre eux sont plus ou moins grièvement blessés dans le tumulte que dominent les cris: «Dehors les Piémontais! nous ne voulons pas des Piémontais!»

Dans la soirée du 26 août, d'autres tumultes se produisent au Café d'Italie, dans la rue de Tolède. La police accourt, fait fermer le café et arrête cinq personnes. Le même jour, l'officier de police Metitieri menait en prison un individu arrêté en vertu d'un mandat légal; près du café de la Croix de Savoie, il est assailli par une troupe de gens du peuple qui voulaient délivrer le prisonnier; Metitieri les met en fuite à coups de révolver.

- Le député sicilien Ferrari (1) décrit en ces termes l'état déplorable de la Sicile, qu'il vient de visiter: «Ici, dominent le poignardeur, l'assassin mystérieux que nul ne découvre, le traître pour qui le cours de la justice semble suspendu; là, la répression militaire, la proclamation de lois terribles, les fusillades sans procès. Les populations sont vivement mécontentes de cet état de choses, et dans Palerme je n'ai pas vu un seul portrait de Victor-Emmanuel.»

(1) Séance parlementaire du 29 novembre.

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Le même député s'occupe du nombre effrayant des meurtres commis en Sicile du milieu de septembre au commencement d'octobre. Le premier octobre, en plein jour, treize personnes ont été poignardées à Palerme. Un journal de Turin (1) cite parmi les victimes un sieur Francesco Vassallo, et rapporte les menaces publiques d'extermination prononcées contre tous les modérés, dénomination qui désigne les piémontistes.

- Un des organes les plus populaires des États napolitains (2) s'exprime en ces termes: «La Consorteria raccole dans son cénacle tout ce qui vécut en Piémont, tous les gens qui se posent en martyrs sans avoir subi une seule heure de martyre, serviteurs de la faction piémontaise qu'ils ont aidée à tout détruire chez nous, et qui, par soif de pouvoir et de richesses, ont trahi les intérêts de leur pays natal. Zélés à soumettre au Piémont les provinces méridionales, à placer Naples sous le joug de Turin, ils appellent travail d'unification la destruction des administrations séculaires, la ruine des familles d'employés, la misère universelle. Un petit nombre de Napolitains ont vendu leur patrie pour de l'or comme Judas, ont offert au Piémont la plus belle partie de l'Italie, abaissé Naples, et ont pu s'écrier avec joie: «Nous l'avons anéantie!» Et de fait on peut la dire anéantie, la ville de Parthénope, l'amour de Filangieri et de Vico. La Consorteria et la faction piémontaise ont triomphé et triomphent, elles ont gouverné et elles gouvernent.»

(1) La Discussione, 5 octobre.

(2) La Democrazia, 19 décembre.,


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Sur un ordre du préfet de Naples, en date du 2 janvier, les admirables fabriques et magasins d'armes créés avec tant de peine par le gouvernement napolitain, sont transférés dans les salles du Castello-Nuovo; puis on abat les bâtiments primitifs pour vendre le terrain à des particuliers.

Le 2 décembre, des agents de police escaladent par les fenêtres le palais de la nonciature apostolique à Naples, s'y introduisent de force sous la sauvegarde d'un ordre préfectoral, et s'emparent de toutes les archives relatives à la commission du concordat, et les emportent par les fenêtres, le concierge du palais ayant refusé de se faire le complice de cette brutale violation en leur ouvrant les portes.

Quinze députés des provinces méridionales présentent au ministère piémontais un mémoire (1) où se fait la peinture des déplorables conditions dans lesquelles se trouve le pays: «effet d'un gouvernement mauvais dans toutes ses branches, qui a produit le mécontentement universel, les rébellions dans les villes, les journaux clandestins, les assassinats quotidiens, les folles souscriptions en faveur des prétendants, l'ébullition de projets liberticides, que favorise la fiévreuse inquiétude qui a succédé à l'enthousiasme des premiers temps.»

- La Democrazia du 25 novembre, passant en revue les abus du gouvernement, signale: «les arrestations préventives, la violation de toute loi, le droit du sabre proclamé par des proconsuls uniquement occupés à grossir leur part de butin,

(1) Avril 1862.

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et par des bureaucrates aussi imbéciles qu'avides, qui n'ont que du dédain pour tout et tous... La pensée de l'unité est un songe d'esprit malade, entrevu et caressé en exil, en prison et en face des supplices, pendant trente ans; et en attendant, sous le prétexte d'unifier, on a détruit et on détruit chaque jour administrations et directions, on a ouvert la porte de la misère à des milliers de familles, on a mis sur le pavé de vieux serviteurs de l'État qui avaient nsé leur vie à son service. Aujourd'hui ils demandent du pain; les orphelins et les veuves demandent du pain, et Turin ne répond pas, ou Turin répond d'attendre. Nos finances détruites, le trésor dépouillé, des tribunaux à l'image du chaos, des lois en faveur du fisc, puis des impôts et toujours des impôts, voilà ce que nous a rapporté le plébiscite; voilà ce que nous ont apporté les Farini, les Nigra, les San Martino, les La Marmora et les Rattazzi.»

On sent un cœur ulcéré dans ces lignes tombées hier de la plume d'un polémiste napolitain: «On ne connaissait rien aux choses de l'État, et l'on a voulu tout détruire, mettre tout à neuf, sans respecter aucune des conditions réelles du royaume de Naples, avec l'incroyable furie aujourd'hui proverbiale de créer des lois. L'administration civile dans toutes ses branches diverses, les finances, les douanes, l'instruction publique, la juridiction ecclésiastique, la magistrature, la garde nationale, tout en un mot est devenu matière à exercer la féconde imagination des nouveaux hommes d'État. Leurs ventrées (loro portati) ont si peu de vitalité, qu'en peu de temps ou a vu abroger d'anciennes lois qui étaient cependant excellentes, et qu'on a remplacées par de nouvelles lois de beaucoup inférieures, qui elles-mêmes ont dû céder la place à des lois plus nouvelles et plus mauvaises encore...

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Il est de mode officielle de dire que les peuples des Deux-Siciles étaient tyrannisés, abrutis, barbares, et l'on définit comme un moyen de civilisation l'incessante aggravation des octrois et des impôts. Et cependant ces peuples avaient les meilleurs codes de l'Europe, des institutions plus sages, une parfaite organisation judiciaire, elle secrétaire Nigra lui même, dans son Rapport au comte Cavour (\), a dit: «Que, dans les provinces méridionales, il y a abondance et profusion d'intelligence et de science;» et Sacchi, autre homme d'État piémontais, affirme «que les employés publics des Deux-Siciles sont non-seulement habiles et intelligents, mais même supérieurs en science économique aux employés des divers autres États d'Italie.»

- Comme pour accroître encore la haine des populations siciliennes, la Gazette officielle de Turin, en publiant le nouveau règlement douanier, annonce que, par décret royal, Messine cessera d'être port franc à partir du 1" janvier 1866.

III

Le 2 avril, le consul anglais résidant à Naples, écrit à son gouvernement: «Le mécontement et la jalousie continuent à Naples contre les Italiens septentrionaux ( les Piémontais); ils ont fait augmenter les loyers et les denrées de toutes sortes; la terreur règne dans les provinces; le brigandage est toujours très-étendu dans les Fouilles; il n'a pas encore été efficacement dompté.»

(1) Page 41.

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Un journal de Naples, le Nomade, dans un long article, attribue «au gouvernement piémontais les maux infinis qui accablent les pauvres pays de l'Italie méridionale. L'unité s'est faite; en attendant, cette partie de l'Italie n'en a recueilli aucun avantage, mais, au contraire, de très-graves dommages; l'administration du gouvernement subalpin n'a produit qu'une confusion générale, le brigandage, la misère dans les provinces et le découragement à Naples.»

- Le républicain Francesco Calicchio, arrêté comme suspect, blessé par les sbires d'un coup de pistolet sans qu'il eût opposé la moindre résistance, emprisonné pendant plusieurs mois, puis reconnu innocent, adresse au roi Victor-Emmanuel un Mémoire dont voici des extraits: «...Le pays a fait une triste expérience du mauvais gouvernement de Farini, qui ne s'entourait que de la consorteria ambitieuse de gouverner et non de faire le bien de la patrie. Le désordre administratif débordant de toute part, on expédia Nigra qui, en public aussi bien qu'en particulier et à moi-même, ne dissimulait pas que la lieutenance Farini avait été réprouvable et que lui, Nigra, avait été choisi pour cicatriser les plaies faites par son prédécesseur... Mais Nigra promit beaucoup et ne tint rien; le peuple se vit trompé, le mécontentement s'accrut, et une hostilité déclarée accueillit tout acte du gouvernement Moi, homme du peuple, j'ai promis au peuple monts et merveilles pour renverser le pouvoir bourbonnien; mais, aujourd'hui, je suis découragé en voyant que nous marchons à reculons, qu'on néglige le peuple et que cet infortuné pays est courbé sous un pire despotisme avec plus d'impôts et plus de maux.»

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Le député Nicotera (1) dit que le gouvernement piémontais «viole le statut constitutionnel et viole la liberté des peuples qui l'ont créé, et qu'il entend fonder l'Italie avec un système de répressions arbitraires et son hypocrite et lâche politique extérieure. Les garanties du Statut, la liberté individuelle, l'inviolabilité du domicile, la liberté de la presse n'existent pas pour ce gouvernement, et il pousse le mépris de la loi jusqu'à dépasser en cela le gouvernement bourbonnien. Il est douloureux d'avoir à rappeler certains faits: Le 15 mai 1848, dans la chambre napolitaine, mon ami, le député Stefano Romeo, eut le courage de proposer à la chambre de se changer en Constituante.pour déclarer la déchéance du roi Ferdinand II. Eh bien! messieurs, tant que le Statut ne fut pas suspendu, Stefano Romeo ne fut pas inquiété.»

- Paroles du député Ricciardi (2): «J'avais l'honneur d'être député au parlement napolitain en 1848; constitutionnellement parlant nous étions des rebelles, puisque avant que le parlement ne fût constitué selon la lettre du statut, nous nous étions constitués en assemblée délibérante, et qu'ensuite, sur ma proposition, un comité de salut public fut élu dans notre sein, un comité dont tous les actes furent révolutionnaires. Eh bien! le Bourbon, vainqueur le soir du \ 5 mai, ne fit arrêter aucun député. Il était réservé au général La Marmora, au lieutenant d'un gouvernement constitutionnel, de faire ce que n'avait pas osé un roi absolu!

(1) Séance parlementaire du 25 novembre.

(2) Séance parlementaire du 15 décembre

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Vous voyez donc qu'aujourd'hui ce n'est pas un, mais deux rois qui existent en Italie, l'un constitutionnel à Turin, l'autre despotique à Naples, l'un institué pour le bien, l'autre institué pour le mal.»

- Un journal napolitain (1) parlant de l'administration des établissements publics de bienfaisance, dit qu'elle est si déplorable, qu'un haut personnage en a pu dire en présence de députés: u Je crois que la moitié des revenus de ces pieux établissements napolitains passe aux mains des fripon?.» Le même journal parle en ces termes d'une visite faite au mois d'avril par le roi Victor-Emmanuel: «Le roi et le ministre Rattazzi ont visité le plus grand établissement de charité que nous ayons, l'Hôtel des Pauvres, qui est aussi le plus mal administré, et qui ainsi pour l'esprit et pour le corps est devenu l'hôtel de la mort. Mais prévenus de cette visite, les directeurs, qui sont à genoux devant le nouveau ministère, étouffèrent les gémissements des pauvres sous les fanfares des troupes de musiciens. Les pauvres gens de cet établissement, plus que toutes autres créatures humaines ressemblent à des bêtes tant on les traite brutalement; ils dorment sur une litière vieille et malpropre; leurs vêtements journaliers sont des haillons inutiles; sans bas et sans chaussures, leurs chemises et leur linge sont d'une étoffe dure et brune et fourmillent d'insectes à la honte de l'humanité; leur nourriture se compose uniquement d'une pâte noire et acide, sans aucun assaisonnement... La morale est nulle dans ces établissements, les femmes n'y sont qu'un jouet; plus de trois cents jeunes filles ont été peupler les mauvais lieux en sortant de ces maisons de bienfaisance»

(1) Le Popolo d'Italia, 6 mai.


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Les journaux napolitains du mois de mars publient cette nouvelle: «Jeudi 6 courant, par ordre du gouvernement, les jeunes pensionnaires les plus jolies de l'Hôtel royal des Pauvres ont été condamnées à se laisser photographier dans l'hospice même, pouj que leurs portraits soient expédiés à Turin. Le reste s'entend sans qu'on le dise!...»

- Un journal politico-populaire publie le 10 décembre celte lettre au préfet de Naples:

«Monsieur le général La Marmora,

» Envoyez-moi chercher, si vous avez les entrailles charitables, et je vous montrerai la lettre que m'a remise une malheureuse pensionnaire de l'Hôtel des Pauvres de Naples... Là sont des jeunes garçons et des jeunes filles! l'administration est une camorra... Aussitôt après m'avoir lu, allez-y ou envoyez quelques personnes de confiance, avec ordre de visiter le local, tout le local, même les souterrains, on sont entassés ceux qu'on nomme les misérables. Vous y trouverez des jeunes garçons et des petites filles nus, parce que les haillons ne couvrent pas ces pauvres chairs! Vous les trouverez rongés de vermine sur de la paille pourrie, blêmes, épuisés par la faim, parce que le peu de polenta qu'on leur accorde est souvent enlevé à cinq cents de ces infortunés dans un seul jour sous prétexte de punitions! Vous verrez que ces créatures dans cette rigoureuse saison n'ont pas un drap, une couverture, et sont accroupies comme des animaux sur le sol des chambres humides et malsaines. Interrogez ces malheureux en leur promettant de les garantir des sévices et des tortures...

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Surtout, général, demandez à ces infortunées jeunes filles qui n'ont de. bouclier que leurs larmes, comment on respecte leur innocence!... Allez là, et puis vous me direz si les Napolitains ont raison de maudire Turin!»

Les pensionnaires de l'Hôtel-des-Pauvres, dans une pétition adressée au député Ricciardi (1) pour qu'il la présente au parlement, énumèrent les sévices, les mauvais traitements et les iniquités des administrateurs à la tête desquels se trouve le surintendant de Blazio.

- Sous les Bourbons, les directeurs des établissements de bienfaisance prêtaient gratuitement leur concours; aussi le public napolitain est-il péniblement impressionné de voir les directeurs piémontais s'adjuger de gros traitements. Les revenus étant donc diminués d'environ deux cent mille francs, on saisit ce prétexte pour expulser brusquement une foule d'employé?, pauvres pères de famille qui comptent de nombreuses années de services.

IV

La province de Girgenti est profondément irritée contre le préfet Falconcini qui pousse jusqu'à l'excès les violences et les mesures arbitraires (2).

- A Catane, un soir du mois de mars, près de Leonforte, des gendarmes piémontais en tournée

(1) Gazzetta di Napoli, 5 décembre.

(2) Il Precursore, journal de Palerme

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reçoivent une décharge de coups de fusil qui tue l'un et blesse les trois autres (1).

«L'impôt sur le sel et le tabac a produit dans le peuple une sorte d'ouragan suivi d'un calme mortel à Naples et dans les provinces. Dans les communes de Squillace, Cardinale, Palermiti, Curinga et dans beaucoup d'autres pays, la population se soulève en criant: «A bas les impôts!» et en poussant toute espèce de cris de haine contre le gouvernement piémontais. A Chiaravalle, un terrible soulèvement a eu lieu parmi les paysans armés de haches, de faux et de fusils; Tarante est dans une fermentation qui fait pressentir une émeute; à Quisisana, le peuple a lancé des pierres contre le poste de la garde nationale (2).»

Un député piémontais est bâtonné à Naples, dans la rue de Tolède, et le bruit court qu'un autre a été poignardé pour avoir trahi son mandat. «Disons que ces messieurs ont joué une vilaine partie en jetant la patrie dans le deuil et dans le désespoir: aussi, à l'infamie qu'emporte avec soi la trahison s'ajoutent les vengeances aveugles du peuple (3).

- «L'aversion contre la nouvelle de l'enregistrement et du timbre se développe, dans la province de Salerne, avec une pétition recouverte d'un très-grand nombre de signatures, dans laquelle on prie le roi de ne pas sanctionner ces nouvelles taxes très-lourdes

(1) Journal la Tribuna.

(2) L'Indipendente, journal de Naples, 23 juillet.

(3) Gazzetta di Napoli, juillet 1862.

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pour les provinces méridionales, inutiles et ne servant qu'à fomenter et accroître le mécontentement général (1).»

Le député de Luca démontre au parlement la dureté, la fiscalité, l'injustice de cette loi essentiellement contraire à l'administration de la justice surtout dans les procès de peu d'importance qui sont dans le royaume les plus nombreux et intéressent davantage le menu peuple. La chambre de discipline des avocats napolitains, dans une sorte de protestation publique, expose les désordres inhérents à cette loi, entre autres celui de «faire payer pour la même et seule créance quatre fois la taxe dans le cours d'un procès civil, depuis le jour de la sentence de condamnation jusqu'à l'accomplissement du jugement d'expropriation.

Dans la commune de Squillace, le 27 août, éclate un nouveau soulèvement contre le gouvernement, qui s'en venge en procédant à de nombreuses arrestations.

Dans les premiers jours de novembre, le peuple se soulève à Ururi, commune du comté de Molise, et ne s'apaise que devant les régiments piémontais accourus de Foggia avec de la cavalerie et deux pièces de canon (2).

- La substitution de la monnaie piémontaise à l'ancienne monnaie napolitaine donne lieu journellement aux murmures et aux récriminations du peuple, qui refuse généralement les pièces à l'effigie du roi Victor-Emmanuel. Le gouvernement se voit donc forcé de modifier son décret du premier novembre qui abolissait le cours des anciennes monnaies et d'adopter un moyen-terme par rapport aux monnaies de cuivre.

(1) Le Popolo d'Italia, 13 mai.

(2) Le Nomade, novembre 1862.

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Dans une émotion populaire, le fameux Odoardo Pancrazi, capitaine de la garde nationale, ordonne à ses hommes de faire feu contre la foule. Cet acte odieux provoque l'indignation générale contre Paucrazi et d'autres officiers qui ne s'étaient guère plus noblement conduits. Le député Nicotera en profite pour renvoyer son fusil et sa dague au major du quatrième bataillon de la garde nationale, avec une lettre énonçant les motifs de sa retraite: «la compagnie dudit Pancrazi ayant consommé le plus honteux des crimes, celui de charger à la baïonnette un peuple sans armes.»

Les fils du roi Victor-Emmanuel arrivent à Naples venant de Sicile, et, le 10 juillet, visitent la cathédrale qu'ils trouvent déserte. Un journal napolitain, la Pierre infernale, décrit en ces termes le sentiment public: «Les princes sont arrivés. Le peuple les a regardés. Il a vu, dans l'un d'eux, le futur maître des destinées de la nation. Et le peuple a secoué la tête! Il est resté sombre, inerte, apathique. Un peuple trahi ne chante pas l'hosannah. Oui, prince, ce peuple fut trahi, bassement, honteusement, lâchement trahi. Et les traîtres furent ceux-là mêmes qui prétendent le gouverner au nom de Victor Emmanuel, et qui en trahissant le peuple trahissent Victor-Emmanuel lui-même et l'Italie. On nous promettait d'améliorer le sort du peuple, on nous disait qu'on voulait le moraliser. Ce fut un blasphème: nous l'entendîmes et le sang bouillonna dans nos veines! Cette parole nous fit frémir; les faits qui la suivirent, comme d'autres Ugolins, nous rendirent tous muets!

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On nous insulta d'abord, et puis on nous dépouilla, on nous abandonna, on nous avilit, on nous réduisit à l'état d'un peuple sur qui pèse la malédiction de Dieu.»

Les Piémontais sentent qu'ils ne tiennent que par leurs baïonnettes et leurs canons à la terre des Deux Siciles. Le général La Marmora a fait consigner dans tous les postes militaires de Naples des plis cachetés qui devront être ouverts à la moindre insurrection.

Le ministre de la guerre déclare au parlement (1) que pour contenir les provinces méridionales, ce n'est pas assez d'une garnison de cent vingt mille soldats.

- Au mois de novembre les princes d'Angleterre et de Prusse débarquent à Naples, et peuvent entendre les cris de douleur de la population qui, le lendemain, a l'honneur de leur présenter une adresse où se remarque ce passage: «0 magnanime héritier de la couronne de Prusse, ne vous attristez pas à la vue de nos calamités, à la vue des maux que des sectes infernales ont versés sur cette contrée naguère florissante. Mais quand vous retournerez près de votre auguste père, souvenez-vous de notre désolation, souvenez-vous de nous! Vous lui direz que Naples est bouleversée de fond en comble, opprimée par une féroce domination, avilie, déserte! Vous lui direz que le royaume est gouverné avec une verge de fer par d'infâmes bourreaux en habit de soldats! Vous lui direz qu'elles fument encore, les ruines de vingt-sept de nos villes brûlées par la fureur piémontaise! Vous lui dépeindrez ces Opulentes contrées brutalisées et englouties, ces campagnes blanches des ossements des milliers d'innocents qu'on a fusillés, ces prisons où gémissent cent mille infortunés, ce royaume désert, épuisé, où des multitude»

(1) Séance du 22 novembre.


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de malheureux, dépouillés de leurs emplois, sans abri, sans repos, demandent du pain, et n'ont pas de pain! Vous lui direz que le Piémont, pour la liberté, nous a donné la servitude, pour la loi l'arbitraire, pour la prospérité la misère, pour le bien-être social toutes les calamités! Vous lui direz, en un mot, que nous sommes des orphelins, des citoyens sans patrie, des malheureux sans espoir....»

V

Au sujet des élections parlementaires, on a crié beaucoup contre la corruption des électeurs et des élus; non content de trafiquer pour soi-même, on trafiquait pour autrui; l'on s'est plaint aussi du privilège abusif qu'ont les députés de voyager gratuitement. Une œuvre récente expose en ces termes le sentiment du public napolitain: «C'était assez pour enlever tout crédit au parlement de voir la chambre se changer en une sorte d'arène ou de cirque, où les gladiateurs politiques se disputent le pouvoir au grand scandale de la nation, et d'observer le peu de sérieux des discussions qui ont parfois dégénéré en scènes indignes, nous ne disons pas d'hommes politiques, mais d'hommes bien élevés... Dans mille occasions, on a publiquement, au sein du parlement, foulé aux pieds le nom napolitain, et il ne s'est pas élevé une voix pour défendre ce noble peuple! On a lancé des philippiques plus mensongères encore que violentes contre la corruption, l'ignorance, l'intempérance et l'incapacité civile des Napolitains, et il ne s'est pas levé un homme pour ramasser le gant et réfuter ces indignes calomnies...

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On a attaqué, discrédité, ridiculisé nos meilleures institutions, et nos députés les ont laissé détruire sans conteste. Quoi encore? On a ouvertement outragé la religion de nos pères, et pas une langue ne s'est déliée pour repousser l'offense! Sont ce là, en 1862, les représentants du peuple napolitain, du peuple catholique napolitain (1)».

Le député Ferrari jette ces mots à la face du gouvernement: «Vous avez voulu gagner des villes et des contrées: vous avez perdu en dignité ce que vous avez gagné en territoire (2).» «Nous avons un parlement, des journaux et tout l'attirail qui fait ressembler la liberté à un vain bavardage (3).»

Un journal anglais parlant de la chute du ministère Rattazzi et de la haine qu'il inspirait aux Italiens, l'explique ainsi: «Il commença par encourager Garibaldi, puis il le combattit; toute l'Italie lui reproche cette double trahison.»

- «La défiance et l'apathie ont succédé à de joyeuses espérances; le commerce dépérit, la sûreté publique est détruite, les brigands sont nombreux et vont où il leur plaît, les finances sont épuisées, l'organisation intérieure est incomplète; les sectes s'agitent et conspirent contre le roi et le statut; le gouvernement est sans vigueur. Ajoutez à ce désastre l'immoralité de l'administration intérieure, le mépris des droits mêmes le plus sacrés, le déficit de plus de sept cent millions, et dites si un Farini, même en le voulant, pourra préserver le pays de la terrible catastrophe qui le menace.»

(1) E. Cenni, Delle presenti condizioni d'Italia, p. 266.

(2) Séance parlementaire du 29 novembre.

(3) Séance du 50 novembre.

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Nous avons signalé l'abstention presque unanime de la population des Deux-Siciles dans tous les actes qui constituent la vie publique; sous un gouvernement de suffrage universel, tel député est envoyé an parlement par soixante-seize électeurs ({), et encore la majeure partie de ces électeurs se compose-t-elle d'employés piémontais. II serait trop long d'énumérer tous les cas d'abstention de ce genre, mais pour l'instruction de nos lecteurs, nous tenons à dire qu'au mois de décembre, à Naples, pour la section du Marché, qui compte près de deux cent mille habitants, M. Paolo Cortese fut élu député au parlement italien par quarante-trois voix contre quarante et une données à son compétiteur.

Le parlement décide, en séance extraordinaire (2), qu'une commission élue dans son sein devra se rendre dans les provinces méridionales examiner la situation du brigandage^ et exposer dans un rapport au parlement les remèdes qu'on pourrait appliquer à cette plaie politique. A Bari, la commission des brigands pose ces trois questions à l'un des hommes les plus considérés de la Ville:

1° Quelle est la cause du malaise général?

2° Quelle est la cause de l'abstention politique?

(1) Comme, par exemple, le général Medici:

(2) Décembre 1861.

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3' Quel serait le remède le plus efficace au déplorable état des choses?

Réponses:

1° L'invasion des Piémontais.

2° La haine des Piémontais.

3° Le départ des Piémontais.

Le député Ricciardi écrit au journal génois, le Movimento (1), une lettre qui contient ces lignes «Je voudrais que les hommes d'État de Turin fussent bien persuadés d'une chose par dessus toutes autres, c'est qu'ils ont tout à fait perdu le cœur des vingt-trois provinces italiennes qui constituent l'ex-royaume des Deux-Sicile», en leur causant d'immenses dommages et ne leur apportant aucune sorte de bienfaits.»

- «Un journalisme dévergondé pervertit l'esprit public; les sociétés émancipatrices, comme des plantes parasites, étendent leurs racines des villes aux villages; les hommes du parti d'action prédominent, triomphent dans les élections, sont de préférence élevés aux postes lucratifs, aux charges qui comportent le plus de responsabilité; les hommes du gouvernement les caressent et en sont soutenus dans les luttes parlementaires; c'est un échange de faveurs, mais aussi c'est une confusion d'idées... Il y a anarchie dans les idées, anarchie dans les actes, anarchie en haut, anarchie en bas, pendant que du palais à la chaumière, au bivouac des réactionnaires comme dans la boutique de l'artisan, on ne conspire que pour une seule œuvre: l'œuvre de désordre et de destruction.

(1) 23 septembre.

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Au fond de cette mêlée orageuse grouille., comme une lie infecte. la Camorra... (1)»

A Bénévent, au mois de janvier, la déclaration d'un décret créant de nouveaux impôts, produit dans le peuple une violente agitation; la troupe piémontaise intervient, blesse les uns et arrête les autres.

La subordination des agents inférieurs vis-à-vis du ministère de Turin ressort d'une protestation du municipe de Marsala, dont le syndic était menacé de destitution pour avoir publié un discours de Garibaldi au mois d'août. Le conseil municipal, après délibération, «proteste contre l'arbitraire et l'inconstitutionnalité de la menace, déclarant avec une égale solennité qu'aucun de ses membres n'acceptera les fonctions syndicales, et qu'il s'opposera à toute opération tendante limiter les suffrages du pays et les droits acquis au prix du sang et des sacrifices.»

- On lit dans un journal de Naples: «Dites-moi où est l'unité de l'Italie? Qui rend à tant de mères, à tant de pères, à tant d'épouses, le fils et le mari qui sont morts? Qui nous reconstruit nos villes détruites! Qui sèche les larmes de tant d'orphelins? Qui lave les mains rouges du plus funeste fratricide? Qui rend la richesse à nos campagnes dévastées? Qui rend à notre pays les inépuisables sources d'Or, où se sont plongés ces avides envahisseurs, qui nous ont régénérés en nous en dépouillant et en nous mettant le pied sur la gorge? Où sont nos savantes institutions législatives, nos codes nationaux, fruits de la sagesse et des études des premiers génies napolitains, ces codes qu'admirait l'Europe? (2)»

(1) Gazzetta di Torino, septembre 1862.

(2) Colpo d'occhio pag. 118 et 119.

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VI

Le gouvernement subalpin, menacé de mort dans les provinces méridionales et ne trouvant plus en soi ni dans la loi, ainsi que l'avoue la Gazette de Turin, l'énergie nécessaire au salut, la cherche en dehors de la loi, suspend les garanties constitutionnelles, délègue au sabre des pouvoirs absolus et ose appeler l'état de siège une efficace mesure: arrière dérision qui couronne dignement ^deux années de sacrifices, d'anarchie et de guerre civile.

«.... Blâmons hautement et condamnons le ministère qui ne sut prévoir ni pourvoir à temps, et qui a laissé les choses s'aggraver à ce point que l'état de siège est devenu une nécessité et la seule ancre de salut dans les provinces travaillées par les plus sérieuses agitations (1).»

«Les mécontentements, qui couvaient depuis longtemps, se sont déchaînés à la première occasion; mais le drapeau de tous est le même, la guerre sociale, la guerre du pauvre contre le riche! Sur tous les points, des colonnes mobiles parcourent les provinces siciliennes, et chaque jour est marqué par de nouvelles fusillades (2).»

- L'alarme publique est si grande en Sicile, qu'un journal de Palerme (3) s'écrie dans le même temps: «Sire, on vous a trompé! Sire, vous êtes trahi! L'Italie est trahie!

(1) L'Opinione, journal de Turin, 23 septembre.

(2) L'Indipendente, journal de Naples, 14 septembre.

(3) La M ola.


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vos ministres ne savent ce qu'ils font; loin de vous faire aimer, loin d'entretenir le feu sacro-saint de la concorde, ils agitent la torche de la discorde, dont la flamme allumera la guerre civile qui brûlera et détruira la patrie!»

Le 17 août, le roi Victor-Emmanuel signe le décret suivant:

«1° La ville de Palerme et toutes les provinces de la Sicile sont déclarées en état de siège;

»2° Le général Efisio Cugia, préfet de Palerme, commandant militaire de l'île de Sicile, est nommé notre commissaire extraordinaire avec les plus amples pouvoirs; toutes les autorités, civiles et militaires, sont placées sous sa dépendance immédiate.»

Le comité national secret, dans les premiers jours d'octobre, lance de violentes proclamations dont voici des extraits (1):

«.... C'est vous qui êtes vils, hommes du gouvernement, et non le peuple de Palerme, qui, par juste vengeance, a recours contre vous au poignard. L'état de siège est infligé pour étouffer les justes plaintes de la presse libre et pour persécuter de toutes les manières et par tons les moyens. Pour gouverner despotiquement, la loi ne vous suffit pas: vous recourez à l'état de siège!... vous recourez aux baïonnettes, aux arbitraires et sauvages fusillades!... Tout prouve que la Sicile a été trahie... Au jour de la lutte, qui n'est pas loin, n'oublions pas nos ennemis, traitons-les comme ils le méritent avant qu'ils ne fuient. Le comité voit approcher le temps où il pourra dire: Aux armes! l'heure de la juste et sainte vengeance est sonnée!...»

(1) Voir, pour ces proclamations, L' Opiniime, de Turin, n. 232

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Extrait d'une lettre du député Ricciardi (1): «Avec l'état de siège, et principalement à cause de l'état de siège, le brigandage s'est tellement accru que les populations sont réduites au désespoir; si bien que malheur à l'Italie, si la guerre venait à éclater sur le Mincio, et qu'un prétendant se présentât dans ces pays avec quelques troupes bien organisées!»

Pendant l'état de siège, il arrive à Turin des télégrammes alarmants sur les progrès du soulèvement dans les provinces méridionales. Une démonstration a lieu à Palerme dans la soirée du 30 août; différents points de la ville sont occupés par la troupe. Le 3 septembre, sur de nouveaux désordres, l'autorité procède à de nombreuses arrestations politiques, suivies de protestations et de placards séditieux. Les gendarmes, accourus pour les déchirer, sont insultés par le peuple, et, dans la mêlée, plusieurs d'entre eux sont blessés. A Canicatti, des troubles éclatent à la même date (2).

De sérieux désordres éclatent à Collebuono, à Trapani, à Girgenti et dans l'île d'Ustique. On abaisse et on brise les écussons-piémontais, on incendie les archives, on brûle les correspondances postales, et, près d'Ustique, il s'organise une sorte de piraterie (3).

- Les arrestations augmentent journellement à Naples. Les députés Nicotera, Miceli, Missori, craignant d'être emprisonnés, se cachent et font courir le bruit qu'ils se sont embarqués pour Malte.

(1) Le Diritto. journal de Turin, 29 octobre.

(2) La Perseveranza, journal de Milan.

(3) Le journal la Politica del Popolo, 9 septembre

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L'arbitraire militaire règne partout. Le maire de Vasto est menacé du bâton par un officier du 42e de ligne. A la suite de cet acte brutal, le maire et le conseil municipal donnent leur démission en masse. Les maires des diverses communes du Gargano sont tenus au pain et à l'eau par la troupe. Le maire de Serracapriolo est frappé. Le maire et le capitaine de la garde nationale de San-Paolo, en Capitanate, sont garrottés par des gendarmes et conduits en prison.

Le député de Cesare, blâmant avec énergie le gouvernement, ajoute (1): «L'état de siègea suscité dans les provinces méridionales des accusations, des dénonciations et des calomnies contre les honnêtes citoyens qui, restant désarmés, sont devenus victimes de la vengeance des méchants.»

Le député Nicotera: «Avec l'état-de siège, Reggio de Calabre fut menacé de bombardement, et vit braquer les canons contre ses murs. Catanzaro, Cosenza, toutes les autres provinces méridionales mises en état de siège, et Naples même, furent menacés d'être traités comme une autre ville (2), en 1849(3)».

- La société générale ouvrière de Naples, dans une adresse publiée, le 23 janvier, par le journal la Democrazia, remercie les députés de- l'opposition, et principalement le député Ferrari «d'avoir défendu les droits des ouvriers, droits méconnus dans un parlement où ne peu.

(1) Séance parlementaire du 22 novembre.

(2) Gènes.

(3) Séance parlementaire du 85 novembre.

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vent entrer que les privilégiés du cens, pendant qu'à Naples et en Sicile l'opinion publique juge et condamne ces hommes qui ont conservé le pouvoir malgré la défiance universelle.»

M. Crispi, prend la parole après M. Mordini, qui a déclaré qu'«une grande partie des provinces italiennes sont mécontentes de l'ordre de choses actuel». «Plusieurs fois, dit M. Crispi, ici et dans les journaux, on a dit et répété que quelques provinces de royaume sont moins imposées que d'autres. C'est vrai; mais ces populations peuvent à leur tour vous répondre que notre gouvernement coûte, plus cher que celui qu'elles avaient avant (Interruptions). Notre gouvernement, je le répète, coûte plus cher que celui qu'elles avaient précédemment. Or, je crois que c'est tout le contraire qui devrait arriver; le gouvernement libre doit coûter moins que le gouvernement absolu (Oh! oh! Signes de dénégation). Le gouvernement libre doit coûter moins que le gouvernement absolu. (Rumeurs. Conversations animées.)

BROGLIO. Où avez-vous vu cela?

CRISPI. Je vous le prouverai. Messieurs, plus les peuples sont libres, moins sont grandes les attributions du gouvernement central. Il en résulte donc qu'il ne peut coûter beaucoup. Savez-vous d'où dérive ce phénomène que les cinq gouvernements réunis que nous avons supprimés (sic) et desquels a surgi le royaume d'Italie dépensaient moins que nous? (Mouvements. Interruptions.) (1)»

(1) Séance parlementaire du 25 février 1863.

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VII

Le 29 juin, à Messine, quatre cents portefaix se rassemblent pour demander impérieusement une augmentation de salaire. Le 3 juillet, une centaine de cigarières de la fabrique de Naples font une manifestation tumultueuse pour obtenir le même salaire que les cigarières piémontaises, qui sont favorisées sous ce rapport; l'intervention de la garde nationale devient nécessaire. Le même jour, seize cents ouvriers de l'arsenal de Naples se soulèvent sur le bruit que toutes les manufactures allaient être transférées en Piémont; la force armée intervient. Plus tard, ces mêmes ouvriers, réunis à ceux de la fabrique d'armes de Pietrarsa, vont faire du tumulte sur la place du Castel-Nuovo; la garde nationale arrête les meneurs et disperse le reste.

- Le 14 août, dégoûtés de leur nouveau règlement, les balayeurs de Naples se mutinent, et, pour faire pièce au gouvernement, parcourent les rues en criant: Vive Garibaldi! Mort au bombardeur de Gênes (1)1 On déchire les proclamations affichées par ordre du préfet La Marmora, qui s'empresse de déployer de grandes forces militaires, avec accompagnement d'artillerie, qui campent snr différents points de la ville, depuis le matin jusqu'au milieu de la nuit. Pendant plusieurs jours, à la suite de ces démonstrations, quatre canons et trois compagnies d'artilleurs gardent le Palais royal qui, on le sait, est l'habitation du général La Marmora.

(1) S. M. le roi Victor-Emmanuel II.

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Dans la soirée du 2 septembre, une patrouille de garde nationale du village de Gorga, principauté de Salerne, est assaillie et maltraitée par ses propres concitoyens. Dans le conflit, il y a des morts de part et d'autre.

A Naples, des placards séditieux poussent continuellement la population à l'anarchie. Dans la matinée du 25 novembre, on en trouve un, à tous les coins de rues, dont la conclusion est de se débarrasser de tous les rois et de leur sordide cortège... «A bas les monarchies! vive la république!» Des placards du même genre se produisent dans la journée du 28.

Au théâtre San Carlo, à Naples, dans la soirée du 13 décembre, éclatent de violents désordres dans le sens garibaldien, bien que le gouvernement, averti la veille, eût garni le parterre et les couloirs des loges de piquets de gendarmes et d'agents de police. La représentation cesse à cause du tumulte, et les policiers chassent du théâtre la foule qui se répand dans les rues en criant: «Vive Garibaldi! à bas La Marmora! à bas Victor-Emmanuel!» L'autorité menace de fermer le théâtre si pareil tumulte s'y reproduit.

- Le député Ricciardi (1) se félicite de voir sièger au banc des ministres plusieurs de ses anciens camarades de conspiration, et se plaint qu'aucun d'eux n'ait encore parlé de l'anarchie qui désole les Deux-Siciles «qui se trouvent aujourd'hui dans de bien plus mauvaises conditions que sous le gouvernement bourbonnien.» Il raconte «qu'un citoyen s'étant présenté au préfet La Marmora pour obtenir justice, il lui répondit qu'il avait les mains liées et qu'il fallait s'adresser à Turin.

(1) Séance parlementaire du 15 décembre.


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C'est ainsi quand le préfet doit faire le bien: il a les mains liées; mais pour le mal il les a très-libres, et peut faire fusiller qui bon lui semble.»

Le comte de Derby (1) parlant de la proclamation sauvage du lieutenant-colonel Fantoni, datée de Lucera, 9 février, dit entre autres choses: «Je vous présente, à vous et au monde, dans toute sa nue atrocité, cette proclamation émanée d'un gouvernement qui se vante d'avoir été accepté à l'unanimité du suffrage universel par le pays à qui il applique de telles mesures, qui se vante d'être un gouvernement ennemi de l'oppression, et qui, depuis nombre de mois n'est occupé qu'à réprimer sanguinairement les manifestations d'insubordination et de rébellion dans ce même pays. Je n'examinerai pas la nature de ces rébellions, ni si elles dépendent d'un attachement des populations pour la dynastie exilée... Mais des mesures de ce genre sont une offense à l'humanité; on ne pense point sans frémir à un système qui dévaste, détruit, lue, etc.» Le ministre Russel répond à lord Derby: «J'avoue que je suis pleinement d'accord avec le noble préopinant; je pense que rien ne saurait être plus cruel et plus barbare que cette proclamation, qui confond les innocents avec les coupables, sème la désolation sur un vaste territoire, met des entraves à l'industrie et fait du gouvernement un objet de terreur pour tous... Une telle proclamation n'est pas inspirée par une saine politique, et ne réconcilie pas les habitants avec le gouvernement.»

- «Le gouvernement de Turin répand le sang en masse, et souvent le -sang innocent;

(1) Chambre des lords, 27 février.

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il a fini par mettre ce pays dans la terrible situation de craindre et d'avoir en horreur les agents du pouvoir plus que les brigands. L'arbitraire et l'impuissance sont les seules armes du gouvernement, et ce n'est pas ainsi qu'il pourra jamais détruire le brigandage] par contre il perdra l'affection des populations (1).»

Dans le courant du mois de février, les murs de Naples sont fréquemment couverts d'affiches sur lesquelles se lit alternativement: «Vive François II! Vive Mazzini! A bas le Piémont! (2)»

Le 28 décembre, la garde nationale de Messine se voit dans la nécessité de charger le peuple à la baïonnette et de tirer sur la foule, qui s'agite tumultueusement sous prétexte de faire jouer l'hymne garibaldien par la mu-ique de la garde nationale, qui s'y refuse. Plusieurs citoyens sont emportés avec des coups de baïonnettes, et plusieurs autres sont arrêtés.

Au commencement du mois de janvier, le général préfet La Marmora écrit à Turin qu'il ne croit pouvoir tenir à Naples sans l'état de siège. Sur la fin du mois de décembre, le général Bixio réclame l'état de siège pour la terre de Naples, jusqu'à ce que l'ordre y règne.

- «Le ministère a traité nos populations comme une horde de barbares, ef, aujourd'hui même, il pense que nous devons être conduits comme les Romains conduisaient les étrangers (3).»

(1) Le Monitore, la Patria, 20 février.

(2) Le journal le Popolo d'Italia, 21 novembre.

(3) Lettre adresses de Naples au journal de Turin Les Nationalités, janvier 1862.

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Le 26 août, le roi Victor-Emmanuel part pour l'Italie méridionale. Les ministres et les généraux s'opposent à ce qu'il prenne la route de terre, qui est infestée de brigands, et le font voyager par mer avec une escorte de cinq frégates à hélices et un aviso à vapeur. Le peuple de Naples est miné par la misère, qu'il n'avait jamais connue sous les tyrans: le conseil municipal de Naples vote une somme de deux cent mille francs pour fêter l'arrivée du roi. Victor-Emmanuel étant au bal au palais de Vasto, une bombe formidable éclate sous les fenêtres, aux cris de: «Vive François II!! Vive les Bourbons!» ou de: «Vive Mazzini! A bas les Piémontais! A bas Victor-Emmanuel! Vive Garibaldi! Vive la République!» La police procède à de nombreuses arrestations.

On écrit de Palerme, le 16 mars, au Messager du Midi:

«Il règne en Sicile une mauvaise humeur générale.... Le gouvernement italien, qui devait s'occuper immédiatement des provinces méridionales, dont nous faisons bien certainement partie, semble avoir oublié ses promesses, et les luttes seules de la chambre paraissent absorber toute sou attention. Après l'expulsion des Bourbons par Garibaldi, nous avons sacrifié nos aspirations, nos désirs, notre autonomie, à cette unité italienne prêchée par le libérateur; nous avons eu confiance et patience surtout; mais le moment est venu où nous demandons des actes et non plus des paroles.

» Les officiers et soldats piémontais, au lieu de chercher à prouver qu'ils sont Italiens, s'expriment toujours entre eux dans leur idiome ou en français, et l'on murmure déjà ces mots: «Nous traite-t-on en pays conquis?»

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Cette idée, si on la laisse se propager, suscitera de graves embarras au gouvernement, et les résistances ne manqueront pas dans un pays où les sociétés de Provedimento sont nombreuses et puissantes.

» Le 14, jour de la fête du roi, le mauvais temps et la pluie ont pu être un empêchement à des démonstrations publiques; mais, pour être juste, il faut avouer qu'on a boudé généralement.»

- Que dire enfin pour prouver l'inanité de cette douloureuse unité, pour la montrer maudite de Dieu comme des hommes? Où sont-ils les promoteurs de cette hypocrite et sanguinaire révolution? Où est Cavour? Où est Caputo, l'évêque apostat? Où sont les renégats, le comte de Syracuse et le prince de Capoue? Est-ce une balle ennemie qui a donné le coup de la mort lente à ce pauvre homme de Garibaldi? Châtiment plus terrible encore! Où est la raison du médecin Farini? Quant au gouvernement piémontais, qu'on se souvienne seulement des paroles de son représentant au Congrès de 1856: «Les princes italiens sont haïs parce qu'ils sont des tyrans, et que leurs gouvernements sont condamnables sous tout aspect.» Ces calomnies unitaristes forment un puissant et instructif contraste avec l'histoire de la domination piémontaise dans les duchés et dans les Deux-Siciles. Conservez à chaque État italien son organisation personnelle; «car il est impossible de les réunir en un seul État, parce que les hommes tiennent à leurs habitudes; ni le temps, ni les bienfaits ne peuvent jamais» leur faire oublier leur ancienne organisation (1).»

(1) Machiavel.

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LES BRIGANDS

Ils fusillait, fusillait, Fusillait!....

I

Le Piémont s'est annexé un royaume de dix millions d'individus derrière 25,000 votes affirmatifs; il n'y a pas de cola trois ans, et pour garder sa conquête il a dû, de l'aveu de ses commissaires, fusiller près de dix mille hommes, en emprisonner plus de quarante mille, et perdre lui-même quinze mille soldats environ (1).

(1) Séance secrète du parlement italien, décembre 1862.

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D'ailleurs le Piémont ne manque pas de lieutenants intelligents; on voit ses généraux se déguiser en bourreaux; on voit un Pinelli décréter que tout manque de respect au drapeau de Savoie sera puni de mort; on voit un Cialdini annoncer entre deux coq-à-1'âne qu'il fera fusiller tout paysan suspect, et qu'il a déjà commencé; on voit des Fumel et des Fantoni fusiller le paysan qu'ils trouvent porteur de plus d'une livre de pain. Pinelli, Fumel, Fantoni, sont récompensés par de l'avancement, et l'on met le collier au cou de Cialdini, le collier de l'Annonciade.

Est-il étonnant que la population des Deux-Siciles professe aujourd'hui tant de haine pour le joug subalpin, et qu'elle regrette le calme heureux dont elle jouissait sous les tyrans?

Nous sommes tous brigands! me disait un paysan napolitain.

Et, entr'ouvrant sa chemise, il montrait sur sa poitrine une médaille de cuivre aux effigies de François II et de Marie-Sophie; puis il ajoutait, avec un sourire de fiel et de haine:

Dire que, s'ils me voyaient cela, ils me fusilleraient!

Je le dis, je le répète et je l'affirme avec toute la hauteur, toute l'énergie de l'homme d'honneur convaincu: Le peuple des Deux-Siciles ne veut pas de l'unité, ne veut pas des Piémontais et veut le roi bourbon.

La, tout le monde est brigand, c'est-à-dire anti-subalpin, c'est-à-dire bourbonnien; le conquis n'accepte pas la conquête; chaque jour accroît son horreur du joug piémontais; et si les conquérants jouissent vite, c'est qu'ils pressentent qu'au calme sinistre, un jour, succéderont d'autres vêpres!...

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Ils affectent d'injurier de sobriquets infamants les vaillants Napolitains qui luttent, les armes à la main, pour se rendre une patrie, et pour lui rendre l'indépendance et le bonheur qu'on lui a volés. Un de ces hommes d'État bouffons, que la révolution italienne a jetés sur le pavois, avait l'impudence de tracer ces mots dans une circulaire diplomatique aux agents piémontais à l'étranger: «Les galériens qui font officiellement la guerre à la société, sont au nombre de douze mille.» Quoi! douze mille Napolitains protestent en soldats contre la déchéance de leur patrie! L'aveu ne manque pas d'ingénuité, et c'est même un des plus ingénus qui ait échappé aux laquais du Piémont. Douze mille galériens! s'agit-il du passé, ou n'est-ce qu'une espérance? On sait ce que Turin fait des soldats qui l'ont combattu: le comte de Christen, le chevalier de Caracciolo, M. de Luca et tant d'autres nobles et vaillants soldais sont-ils ailleurs qu'aux galères, avec la chaîne et le boulet au pied?

Le boulet est l'ami du Piémont: il le lance contre les villes et le rive à ses ennemis.

On se rappelle ce burlesque rapport du proconsul La Marmora, accusant l'existence d'environ quatre cents brigands. Que signifiait donc cette circulaire du préfet de la province de Lecce, en date du 6 novembre 1862, déclarant que «la force militaire qui s'y trouve (1) ne suffit pas pour comprimer le brigandage et que les caisses publiques ne peuvent couvrir les dépenses de la guerre;

(1) Vingt mille hommes el au delà.


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c'est pourquoi il ordonne à tous les maires de recueillir des souscriptions volontaires pour organiser et mettre sur pied un corps de volontaires à cheval.» Le rapport La Marmora, lu au parlement le 11 décembre suivant, réduit à soixante-dix le nombre des brigands de la province de Lecce. Ainsi vingt mille baïonnettes piémontaises, avec tous les deniers publics, ne parviennent pas à détruire soixante-dix brigand». C'est ridicule...

Le député Massari disait au parlement le 21 novembre:

«Non, ce ne sont pas des exagérations; ce sont des faits, des faits positifs, douloureux, indubitables. Je puis vous l'assurer, quand j'étais en province et que je lisais les télégrammes de la Gazette officielle, concernant le brigandage napolitain, qu'ils représentent comme détruit ou dompté, je vous le dis franchement, messieurs, je croyais rêver, parce que je voyais la réalité dans une contradiction si flagrante, si palpable, avec les assertions des télégrammes, que vraiment je ne pouvais m'expliquer dans quel but se publiaient de telles nouvelles.»

Le correspondant napolitain du Times lui écrit en date du 25 janvier:

«Dans la Terre de Labour, de petites bandes se sont organisées. Jeudi dernier , la poste qui va à CampoBasso a été arrêtée près de Cancello, et le courrier a été porté à Naples mortellement blessé. La bande de Crescenzo continue à défier les troupes dans les montagnes de Sarno. On a pris deux ou trois brigands; mais, en revanche, un homme, soupçonné d'être un espion, a été pris par les brigands, lié à un arbre et fusillé.

» Dans la Molise et la Capifanate, il y a des bandes considérables de brigands qui fatiguent les troupes piémontaises.

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On doit augmenter la force, et une nouvelle tactique doit être adoptée par le gouvernement; car il n'y a pas de doute que les autorités locales et la population, soit par sympathie, soit par peur, viennent à l'aide de ces brigands. Comme ces bandes sont principalement composées de laboureurs, ils se dispersent quand la troupe arrive, et aussitôt qu'elle est partie, ils prennent les armes qu'ils ont cachées et recommencent leurs exploits.»

On écrit de Turin au Morning-Herald, le 14 mai:

«.........Je vous affirme aussi et d'une manière bien positive, que ce qu'on appelle le brigandage n'est ni plus ni moins que la guerre civile sur une échelle beaucoup plus vaste qu'on ne le pourrait imaginer, la guerre civile soutenue et encouragée par les habitants.»

«Le mouvement populaire que la faction appelle par mépris le brigandage , est dans l'opinion publique le mouvement régénérateur de l'Italie (1).»

Nous ne voulons pas multiplier davantage les citations établissant la noble complicité du pays avec les brigands, elle nous semble déjà manifeste. Mais il est un autre point sur lequel nous demandons la permission d'insister, celui des massacres, des incendies, des horreurs de toutes sortes qu'a produits l'invasion piémontaise. L'humanité frémit devant cette hypocrisie nauséabonde qui égorge et pille au nom de la liberté.

Le député Ferrari disait (2):

«La répression du brigandage devient un véritable chaos de guerre civile et produit de nouvelles répressions exceptionnelles.

(1) Colpo d'occhio, p. 155.

(2) Séance parlementaire du 29 novembre.

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Vous vouliez à peine me croire, je me le rappelle, quand je vous dis que j'avais visité les provinces méridionales, et que j'avais vu une ville de cinq mille habitants détruite... Et par qui?... Peut-être par les brigands? Non! Maintenant, messieurs, sachez qu'on fusille, qu'on arrête les familles, qu'on emprisonne en masse

On a introduit un droit nouveau sur lequel les déclarations du ministre n'ont laissé aucun doute: le droit de fusiller un homme pris les armes à la main. C'est une guerre de barbarie, une guerre sans quartier.... Je ne sais comment m'expliquer si le sens moral ne vous dit pas que vous marchez dans le sang.»

Au mois de mars, M. d'Israëli, au sein du parlement anglais, interpellait le ministère sur les proclamations sanguinaires des chefs de corps piémontais dans l'Italie méridionale et stigmatisait ces monstrueuses énormités (1).

Un journal napolitain (2) dit, à propos de la commission anglaise qui doit visiter les prisons des Deux-Siciles:

«Nous faisons des vœux pour que cette commission se transporte dans chaque commune de nos provinces désolées: elle se convaincra qu'il n'est de syndic, de juge subalterne, de caporal ou de président de bande libérale qui ne commette chaque jour des actes qui feraient pâlir les monstruosités consignées dans l'histoire de l'invasion des Barbares.»

«Partout ceux qu'on appelle les réactionnaires et même les suspects, et aussi parfois ceux qui ne peuvent

(1) Voir plus loin le chapitre des Lieutenant subalpins.

(2) La Epoca, avril 1862.

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justifier d'un itinéraire quand ils tombent dans des détachements subalpins, sont fusillés sur-le-champ. Dans divers endroits on voit des sacrifices humains de trente à quarante prisonniers.... (1).» On a vu fusiller des enfants et des femmes!

Un journal de Marseille (2) rapporte cet horrible fait:

«Un de me» amis se trouvant, il y a dix-huit mois en mission, était un jour devant la porte d'un café avec d'autres personnes. 11 était deux heures de l'après-midi. Survient un quidam, le fusil sur l'épaule, II jette un regard dans le café, il prie les personnes qui étaient là de se déranger un instant, il épaule, ajuste et tue un individu assis dans le café; puis il met son fusil sur l'épaule et s'en va en disant:

» Voilà un brigand de moins!...»

La sanguinaire anarchie des Deux-Siciles, la cruauté piémontaise, les atrocités et les abominations, hier encore, émouvaient la vieille et généreuse Europe. Cédant à un légitime mouvement d'indignation, l'empereur des Français adressait au général Fleury, alors de passage à Turin, une dépêche devenue fameuse:

«Vichy, 31 juillet, 10 h. 35 m.

» J'ai écrit à Turin pour faire des remontrances. Les détails qui arrivent sont de nature à aliéner contre la cause italienne tous les cœurs honnêtes. Non-seulement la misère et l'anarchie sont à leur apogée, mais les plus coupables indignités sont à l'ordre du jour.

(1) Colpo d'Occhio, p. 126.

(2) Le Semaphore, janvier 1862.

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Un général, dont j'ai oublié le nom, ayant défendu que les paysans emportassent avec eux des provisions quand ils vont aux travaux des champs, a décidé qu'on fusillerait ceux sur lesquels on trouverait un morceau de pain. Les Bourbons n'ont jamais fait quelque chose comme cela.»

A bout de larmes et de sang, le peuple des Deux-Siciles se lèvera tout entier contre ses féroces oppresseurs: la victoire des brigands sera le salut de Naples et de l'Italie! Quoi! ce que naguère n'ont pu faire des soldais français, des Piémontais auraient l'espoir de l'accomplir?... Vain espoir! les conquérants subalpins tomberont sous un effort suprême des soldats de Cliiavone et de Cipriani....

«Ce sont des brigands, oui, mais ils ont un drapeau; ce sont des brigands, mais ils sont formidables dans leurs surprises, inaccessibles dans leurs retraites; oui, ce sont des brigands, mais les pères de ces brigands ont remis deux fois sur le trône les Bourbons do Naples en 1799 et en 1814(0.»

Et maintenant, il ne nous reste plus qu'à tracer, mois par mois, jour par jour, le douloureux martyrologe napolitain de l'année 1862...

Prions pour les morts!

JANVIER.

Du 1er au 3. Escarmouches à Trentinara (Abruzzes). Le chef de bande Daniel Cicchetti est pris et fusillé. Il arrive de Basilicate la nouvelle de petits engagements entre les troupes et les brigands.

(1) Le député Ferrari.

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La bande du champ de Palo, province de Palerme, est défaite, laissant six morts et dix-sept prisonniers. Soixante-neuf brigands de Cipriani font leur soumission à Nola.

2. Attaque des troupes piémontaises par une bande de réactionnaires aux environs de Sora. Domenico Feri est pris et fusillé.

4. Près d'Auletta, commune sise entre les provinces de Salerne et de Basilicate, les réactionnaires soutiennent un longetacbarné combat; les Piémontais perdent beaucoup de monde, mais ils tuent vingt-six brigands, eu font prisonniers dix-huit et mettent les autres en fuile.

5. Le Journal officiel de Naples annonce que le commandant militaire de Capilanale ayant envoyé en tournée un fort peloton de lanciers, sous les ordres du comle Fossati, ce peloton a été massacré dans une embuscade de brigands, au pont de la Sassela, non loin de Foggia. Le journal le Popolo d'Italia annonce qu'un engagement a eu lieu près de Rotello, comté de Molise, entre les brigands et les chevau-légers de Montebello. Les Piémontais perdent cinq hommes et les brigands seize. Près de San-Severo (Pouilles), combat d'un jour entier entre les troupes régulières et de grosses bandes de réactionnaires; résultat indécis; beaucoup de victimes des deux côtés.

6. On écrit de Catanzaro (Calabre), que la bande de Carbone a été détruite dans un combat. Adresse de la garde nationale de Naples à celle de Pietragalla (Basilicate),

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la félicitant de la valeureuse défense qu'elle a soutenue contre les brigands. Les Piémontais jettent des bombes dans Castellamare do Sicile, qui capitule. Ils débarquent et fusillent vingt-sept individus sur la plage.

Du 7 au 16. A Ripacandida, district de Melfl, combat où est tué le chef de bande Michel de Biase. Un autre chef de bande, André de Masi, surnommé Il Miseria, et cinq de ses hommes, près de Bénévent, se rendent au capitaine Capanna, du 18e bataillon de bersaillers. Deux brigands de l'ancienne bande de Masi, après une héroïque résistance, sont pris par la garde nationale et les gendarmes de Colle et fusillés. La garde nationale de Calabritto jointe à celle de Senerchia, province d'Avellino, fait prisonniers douze brigands d'Oliveto, dont quatre blessés. A Angellara, province de Salerne, combat entre la troupe et sept brigands, dont deux sont tués.

Du 17 au 23. Des télégrammes officiels apprennent qu'une bande de cent cinquante réactionnaires à cheval sur les bords du Fortore, fleuve qui sépare les Pouilles de la province de Campo-Basso, attaqqe un détachement piémontais qui se défend à la baïonnette, tue six brigands et met le reste en fuite. Les fugitifs tombent dans un autre détachement qui leur fait subir d'autres pertes. Les télégrammes affirment que les Piémontais n'ont perdu qu'un seul homme. Attaque de la-métairie Lauria, territoire de Serracapriola (Capitanate). Le major Sommani, à la tête d'un bataillon piémontais, engage avec cent brigands à cheval une lutte acharnée, en tue douze et met les autres en fuite.

Du 24 au 31. Une forte bande de réactionnaires occupant le vaste bois de Petacciato, qui s'étend de Larino jusqu'à Vasto,


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est attaquée par la troupe et repoussée dans le bois contigu de Ramitelli, près Termoli. La garde nationale mobile de Molise attaque et disperse, en lui faisant subir despertes sensibles, la bande de brigands commandée par Nicolas d'Alessandro.

FÉVRIER.

2. A Lesina (Capitanale), deux réactionnaires blessés sont pris dans un pailler, où ils s'étaient réfugiés, et sont fusillés.

3. Plusieurs gardes nationales réunies des communes de la province de Campo-Basso, rencontrent un peloton de réactionnaires à cheval, qui s'enfuit dans le bois de Sant'-Agata, sis aux confins des Pouilles, en abandonnant trente-quatre chevaux et divers objets. Près de Mola de Gaëte, on trouve le crâne du maire, François Spina, autrefois fort dévoué aux Bourbons, depuis chaud partisan des Piémontais.

On lit dans un journal napolitain:

«Les postes avancés des volontaires bourbonniens se concentrent dans le bois de Monticchio, près Melfi, s'étendent jusqu'à Toppo de Scilla, et sont commandés par Coppo; d'autres bandes sont à cheval. Dans le Cilento, des manœuvres hardies sont accomplies par la bande que commande le jeune Joseph Tardia, qui, dans plusieurs petites communes, sans causer aucun dommage à qui que ce soit, a rétabli les enseignes et le gouvernement du roi François II, aux acclamations populaires. Dans le comté de Molise, les réactionnaires armés se sont emparés de seize fourgons appartenant au gouvernement.

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Au marché de Caserte, les paysans se soulagent le cœur en - poussant des vivais au roi François II. De Sicile, il arrive des nouvelles fort graves; à tous les coins de rues, on lit des placards excitant le peuple à la révolte; une catastrophe semble imminente.

Du 4 au 5. Près Bovino, une bande de brigands arrête deux officiers piémontais qui se rendaient à Naples par les messageries et les emmènent. On ignore quel a été le sort de ces deux hommes. A Reggio de Calabre, le gouvernement alarmé procèdfi à de nombreuses arrestations, à la suite de la découverte d'un complot légitimiste. Une nouvelle bande de trente brigands se présente en Basilicate et attaque un bourg situé près de Castelvetere. Un peloton de douze brigands est surpris dans les chaumières, sur le territoire de Muro; trois parviennent à s'échapper; les neuf autres sont faits prisonniers.

Du 6 au 26. Une bande d'environ cent soldais bourbonniens, commmandée par Cipriani la Gala, parcourt la Terre de Labour et s'avance jusqu'aux portes de Naples où elle engage plusieurs combats avec la troupe. Une autre bande aussi nombreuse, à pied et à cheval, commandée par de Croce et venant de la Basilicate, renforce la réaction dans la province de Bari.

Le lieutenant-colonel Fantoni fait afficher dans Trani un ordre du jour sanguinaire qu'on trouvera plus loin au chapitre des Lieutenants subalpins. Le lendemain, le commandant piémontais mande le capitaine de la garde nationale de Trani et lui dit d'un air menaçant:

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Il me faut trois brigands au moins pour les faire fusiller, afin que l'ordre du jour affiché ne soit pris pour une vaine menace.

Le capitaine refuse d'obéir à cette injonction; mais le commandant piémontais trouve bientôt des officiers plus complaisants, et trois pauvres paysans, surpris dans les champs avec du pain dans leur bissac, sont fusillés comme suspects de connivence avec les brigand?.

Dans la nuit du 19, le courrier de Girgenti est assailli et dépouillé par quelques brigands à Porlella di Mare; le postillon est blessé, ainsi qu'un soldat de l'escorte et deux autres individus.

«Deux femmes ont été fusillées sur le Gargano, parce qu'elles avaient communiqué avec les ennemis de l'ordre. Une d'elles, se trouvant près d'accoucher, on a eu l'humanité d'attendre qu'elle fût délivrée, et peu de minutes après elle a été fusillée. Comment avaient-elles communiqué 1 on ne le sait. Qu'avaient-elles fait 1 on l'ignore. Ce qui est certain, c'est que c'étaient deux femmes (1).»

27. Dans la nuit, une bande de vingt réactionnaires attaquée par la garde nationale de la commune de SanFelice près la métairie de Castagneto, territoire de Pietra Vairano, district de Caserte, selon la stratégie habituelle des brigands, s'égaille après une courte escarmouche.

(1) Le journal Napoli e Torino, 6 mars, correspondance de Manfredonia.

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29. Aux portes d'Ordona, à quelques lieues d'Ascoli, une bande de cinquante réactionnaires attaque deux compagnies de bersagliers, leur met dix-sept hommes hors de combat et disparaît dans la montagne.

MARS.

2. Le lieutenant Gianini et le sergent-fourrier Verdura, de la garde nationale de San-Giorgio-la-Molara, province d'Avellino, sont attaqués par trois réactionnaires sur la route d'Arpaia à Montesarchio.

4. Non loin des bords du Bradano, fleuve qui sépare la Basilicate de la Pouille, une bande de réactionnaires engage un vif combat avec la troupe, qui a deux hommes tués et six blessés. Les brigands ont vingt-six morts, un certain nombre de blessés, et abandonnent quatre chevaux tout équipés (1).

Du 4 au 7. Dans le bois de San-Vito, la bande de Crocco attaque une compagnie du 50S de ligne et perd vingt-cinq hommes dans le combat, du moins au dire du journal officieux le Nationale, de Naples, qui ne relate pas les pertes des Piéinontais. A Pescolanciano, province de Campo-Basso, dans le bois de Collemelucci, se tient un peloton de brigands à cheval qui, protégés par l'étendue du bois, défient toute attaque des troupes régulières.

A Palma, district de Nola, on signale l'apparition de diverses petites bandes de réactionnaires.

(1) Nous répétons que nous ne prenons la majeure partie de nos renseignements qu'aux sources piémontaises.

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Le territoire d'Avella est parcouru par la bande du Zappatore. Sur les montagnes de Sarno et de Siano, province de Salerne, le chef de bande Gavino, réapparaît avec une quinzaine d'hommes. Une bande d'environ cent réactionnaire?, qui compte deux femmes parmi ses chefs, propage l'agitation dans la province de Bari. Les gardes mobiles de San-Severo capturent et fusillent deux brigands.

11. Télégramme publié par le Journal officiel de Naples:

« Le 49e de ligne poursuit les brigands du Gargano, la plus haute montagne des Fouilles. Près de San-Marco in Lamis, cinq brigands, pris les armes à la main, ont été fusillés, entre autres le chef Vardella. On a pris des chevaux, des munitions et antres objets.»

Du 12 au 14. Un jeune paysan de Bajano, près Nola (Terre de Labour), est fusillé parce que, du haut d'un châtaignier qu'il taillait, il avait signalé aux brigands l'approche de la troupe piémontaise. Antonio Colucci n'avait pas seize ans. Dans le court interrogatoire que lui font subir les Piémontais, il répond ingénument:

J'ai fait signe aux réactionnaires parce que j'avais peur d'un combat où je me serais trouvé entre deux feux.

Le jeune Colucci n'en est pas moins traîné A Bajano et condamné à être fusillé; mais, de crainte que les gardes nationaux, qui connaissaient parfaitement sa simplicité, refusassent d'accomplir cette barbare exécution, on tira au sort à qui assassinerait cet enfant. Huit gardes nationaux furent désignés, entre autres le parrain d'Antonio.

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On obligea son père et sa mère à se trouver présents, et le signal de mort fut donné; et huit coups de fusil partirent, mais aucun n'atteignit l'innocente victime. Alors, pour ne pas prolonger cette scène hideuse, on fit venir quatre soldats piémontais, et, un instant après, Colucci n'était plus. Les bourreaux ramassèrent le chapeau de l'enfant et le mirent en riant sur la tête du père. Le pauvre père riait aussi: il était devenu fou, ce qui n'empêcha pas les Piémontais de l'envoyer en prison.

Quatre femmes sont arrêtées dans les Pouilles sous l'accusation de connivence avec les brigands; en exécution de l'ordre du jour du Fantoni, on en fusille trois, et la quatrième est épargnée sur sa déclaration qu'elle est enceinte.

Dans la campagne de Corato, grosse commune de la province de Bari, soixante gardes nationaux sont massacrés par une bande de réactionnaires.

15. Aux environs de Lacedonia, province d'Avellino, un détachement d'agents de police est massacré par les brigands. Un bataillon piémontais accourt, mais ceux-ci s'étaient repliés sur Biccari, dans les Pouilles, et se trouvaient hors d'atteinte.

Le sieur Louis Franco, capitaine de la garde nationale mobile de Montescaglioso, district de Matera, province de Basilicate, en fouillant le bois de Bernalda, rencontre douze bergers qui gardent leurs troupeaux et leur demande des nouvelles des brigands; ceux-ci répondent qu'ils ne savent rien, n'étant pas du pays. A quelque distance, les gardes nationaux rencontrent les brigands et le combat s'engage.

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Peu de jours après, le capitaine Franco retourne au bois de Bernalda pour se venger des bergers qu'il soupçonne de l'avoir trompé; les bergers n'y sont plus, mais il trouve à leur place dix ou douze paysans et leurs familles, les arrête, leur fait lier les pieds et les mains et les fait enfermer dans une grange; ensuite il donne l'ordre de mettre le feu à la grange, de manière que ces infortunés furent brûlés vifs sous les yeux de leurs mères, de leurs femmes et de leurs enfants. Plusieurs de ces innocentes victimes cherchant à s'échapper du sein des flammes, elles y furent refoulées à coups de fusil.

A la suite d'un ordre du jour du commandant Pumel (1), quatre paysans porteurs chacun d'un demi-pain pour se nourrir en chemin, se rendaient de Policastro à Cotrone, ^leur pays. A peine avaient-ils quitté la première de ces villes qu'ils rencontrèrent un peloton de gardes nationaux qui les fouillèrent, et, ne leur trouvant rien de suspect, leur permirent de continuer la route. Un peu plus loin, les quatre paysans tombèrent dans un détachement piémontais, qui, les trouvant porteurs de ces quelques morceaux de pain, les fusilla sur-le-champ.

Du 16 au 20. Sur le territoire d'Avella, à Montecorvo, plusieurs compagnies piémontaises, dans un combat contre une bande de 150 réactionnaires, perdent deux morts, ont quatre blessés, font des prisonniers et les fusillent.

De nombreux télégrammes annoncent que la réaction grandit dans les Pouilles,

(1) Voir aux Lieutenants subalpins.


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que parcourent en tous sens de petites bandes de guérillos composées la plupart de soldats de l'ancienne armée royale des Deux-Siciles. Ces bandes varient de cinquante à cent cinquante hommes, presque tous montés, et sont commandées par des chefs bien connus: Parise, Pirozzi, Lo Zambro, Chiavone, Peluso, il Turco, Crocco, etc. Deux bandes sont commandées par de hardies amazones. Les troupes piémontaises battent sans relâche les campagnes et sont épuisées par cette guerre, pour laquelle elles ne sont pas faites. Au pied des montagnes de la Fouille appelées les Murge, quatre cents Piémontais, soutenus par un gros détachement de gardes nationaux, font tomber dans une embuscade une bande de deux cents brigands, qui ne leur font pas moins subir des pertes considérables. Les Piémontais s'en vengent en fusillant plusieurs paysans comme suspects de complicité avec les brigands. 11 est juste de dire que la population des Fouilles, en général, favorise le brigandage.

Sur le territoire de Minervino, les troupes essuient de nouvelles pertes dans une rencontre avec un détachement de réactionnaires. Le 17, à San-Giorgio d'Avellino, les Piémontais et la garde nationale perdent beaucoup de monde, tandis que les brigands ne laissent qu'un mort sur le terrain. Les Piémontais, après le combat, fusillent un paysan suspect d'espionnage. Dans les montagnes de la Rocca, près Nola, le Zappatore, n'ayant avec lui que sept hommes, est surpris par plusieurs gardes nationales des pays circonvoisins. Trois des brigands sont pris et fusillés.

Un détachement de troupes se rendant à Bénévent, est attaqué par les brigands, qui le déciment et font prisonnier le commandant piémontais,

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qu'ils entraînent avec eux dans la 'montagne. Sur les larges versants du Matese, l'un des plus hauts Apennins, à égale distance de la Terre de Labour et de la province de Campo-Basso, campent de nombreuses bandes réactionnaires, dont l'une de deux cents hommes, qu'accroît journellement l'arrivée de paysans qui bravent les féroces rigueurs des autorités civiles et militaires. Il faut dire que non loin de là, se trouvent les ruines de Pontelandolfo et de Casalduni, saccagés et brûlés par les piémontais. De fréquentes escarmouches ont lieu dans les montagnes, avec pertes de part et d'autre.

21. Le capitaine Richard, à la tête d'un détachement du 8e de ligne, attaque, près de Bovino, une bande de réactionnaires, qui le tuent, lui et dix-neuf de ses hommes.

22. Sur la route de San-Marco in Lamis, combat acharné qui dure toute la journée et cause, des deux parts, des pertes sensibles. La nuit sépare les combattants, et le succès de la lutte reste indécis.

Un corps de troupes est envoyé à Bisaccia, province d'Avellino, pour détruire la forte bande qui occupe le bois de Castiglione. Les Piémontais passent par Calitri, pour tourner les brigands, et tombent dans une embuscade dressée dans un sentier étroit et ardu. Le combat est long et sanglant; mais la victoire demeure aux brigands, à qui sont venus se joindre beaucoup de paysans des environs.

Du 23 au 27. M. Brieazi, colonel du 8e de ligne, est mis en disponibilité, pour n'avoir pas montré assez de férocité dans la répression du brigandage.

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Le conseil général de la Terre de Labour, institue un fonds destiné à secourir les veuves et les orphelins des nombreux gardes nationaux tués dans les dernières rencontres avec les réactionnaires.

Le gouvernement encourage par tous les moyens la répression de la réaction napolitaine. Les préfets, les conseils généraux et municipaux, les généraux, les plus puissante: et les plus humbles autorités reçoivent de Turin l'ordre de promettre des croix (1) et des gratifications importantes à ceux qui se distingueront dans la chasse aux brigands.

La garde nationale de Caserte rencontre une bande de réactionnaires, l'attaque et fait quatre prisonniers. Sont arrêtés, le brigand Pascarella et tous les brigands de Cervino. La garde nationale de Santa-Maria de Vico arrête Janvier de Lucia, compagnon du chef Cipriani La Gala, et le fusille.

Entre les Pouilles et la Basilicate, les bandes de Crocco el de Ciiiavone opérèrent leur jonction. La presse les représente organisées par bataillons, et aussi par escadrons, avec clairons et tambours. Dans les montagnes de Sant'Angelo, campe régulièrement une bande de cent cinquante hommes, avec drapeau tricolore fleurdelysé, clairons et tambours, dont!e son parvient jusqu'aux habitants des environs.

Chaque jour amène de nouvelles rencontres entre les petites bandes disséminées du Gargano et les troupes piémontaises.

(1) Si l'on veut apprécier la générosité du Piémont, il faut savoir qu'en une seule année il a distribue neuf mille croix des saint Maurice et Lazare.

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Ces bandes se réunissent à l'occasion et forment un noyau de plus de quatre cents hommes bien équipés.

Deux charrettes arrivent des Pouilles, chargées de vêtements militaires et d'armes. Le bruit court qu'ils appartenaient à des soldats tombés dans divers combats contre les réactionnaires.

Dans le bois de Monticchio (Basilicate), dans une seule rencontre, les Piémontais perdent soixante hommes.

Du 28 au 31. Le commandant Pilone, qui occupait les gorges du Vésuve, entre, avec vingt hommes, dans la commune de Terzigno, près Ottajano, à quelques kilomètres de Naples, et désarme la garde nationale. Dans le tumulte, un caporal est tué et deux officiers sont blessés. Pilone reprend ensuite le chemin du Vésuve.

Sur la limite des Abruzzes et du comté de Molise, apparaît une bande nouvelle de soixante-dix cavaliers. Les communes des environs leur fournissent abondamment des vivres et des fourrages.

Les paysans des Pouilles fraternisent avec les brigands.

«Avant-hier, les Landes réunies de Crocco, de Chiavone, de Coppa et Caruso, se trouvaient à Pietratagliata. Le général Franzini, commandant militaire de la province d'Avellino etdes districts de Nola (Terre de Labour), de Melf i (Basilicate), et de Bovino (Capitanate), a commencé des opérations militaires contre le brigandage. Nous verrons le résultat (1).»

(1) Popolo d'Italia , 30 mars.

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A Mezzanone, près San-Severo des Pouilles, deux cents réactionnaires, attaqués par un bataillon d'infanterie, ont d'abord le dessus; mais ils s'égaillent bientôt à l'approche d'un gros renfort de cavalerie.

A Vitulano, province d'Avellino, dans la montagne, les Piémontais ont huit blessés dans une courte rencontre.

Aux bords du Calore, ils éprouvent des pertes considérables dans un combat que leur livrent les brigands, commandés par le vaillant chef François Bottisani.

Près du mont Gargano, une compagnie du 49e de ligne et deux compagnies de gardes nationaux attaquent plusieurs petites bandes retranchées dans de fortes positions. Les Piémontais se retirent, non sans avoir essuyé de grosses perles.

Le lendemain, la bande de Bottisani, revenant d'une excursion sur le territoire de Pontelandolfo, met en déroute plusieurs gardes nationales des environs, qui avaient fait leur jonction pour lui tendre une embuscade.

Les Piémontais sont battus dans les gorges du Macerone, entre Isernia et les Abruzzes.

Un certain nombre de gardes nationaux rentrent blessés à Nola, à la suite d'un engagement avec les hommes de Cipriani La Gala.

Un détachement de gardes nationaux mobiles rencontre, dans les bois de Montemale, près Montecalvo, la bande commandée par Masaniello, tire en l'air quelques innocents coups de fusil, et se retire en toute hâte.

Les bandes de Rozzi et de Crescenzi se séparent. L'une reste dans les montagnes de Palma, district de Nola; l'autre passe dans les montagnes de Prato, près Sarno, principauté de Salerne, et soutient avec avantage deux attaques des Piémontais.

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Entre Ottajano et Boscoreale, la bande de Cozzino force un détachement d'infanterie à rebrousser chemin et à aller en toute hâte chercher du renfort à Naples.

Les brigands du Taburno, district de Caserte, passent pour posséder une petite artillerie de montagne.

Le syndic de Saviano, à la tête de la garde nationale, attaque un peloton de dix réactionnaires, en prend un et le fait fusiller. Quelques temps auparavant, le même syndic avait pris et fait fusiller également le brigand Pascal Strozza.

Les bandes de Nicolas de la Guancia de Pietraroia, de Guitto et de Mastrôfllippo campent dans le district de Piedimonte, Terre de Labour, où n'osent s'aventurer les gardes nationales circonvoisines, qui savent par expérience ce qu'il leur en coûterait. Ces trois bandes sont pourvues par les paysans de vivres qu'elles payent fort exactement.

Entre Altamura et Gravina (Fouilles), une poignée de brigands attaque un détachement piémontais. Le feu dure, avec un acharnement égal des deux parts, depuis le matin jusqu'à la nuit. On compte beaucoup de blessés et une douzaine de morts, dont quatre brigands.

Un détachement de gardes mobiles est mis en pleine déroute, près de Minervino, par la bande d'Orlando Fraccacreta, ancien sous-officier de l'armée royale napolitaine.

Deux escadrons des chevau-légers de Lucques, sous les ordres du lieutenant-colonel del Monte, et un détachement du 17e bataillon de bersaillers, se rendant en garnison à Ascoli des Pouilles; apprennent qu'aux environs se tient une bande de réactionnaires. Un peloton de cinquante chevau-légers est envoyé contre elle, et revient bientôt, ayant perdu quatorze hommes.


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AVRIL.

Du 1° au 4. La bande de Mirto parcourt le territoire de Calvello (Basilicate), et provoque vainement au combat la garde nationale.

Dans le bois de Conversano, commune de Ceglie (Fouilles), les réactionnaires sortent vainqueurs d'un combat qui a duré presque toute la journée. Les Piémontais essuient des pertes graves.

A Policastro (Calabres), Vincent Minelli, (ils de feu Rosario,âgé de quarante ans, agriculteur, marié, père de douze enfants en bas-âge, et jouissant d'une réputation de moralité intacte, est dénoncé, en même temps que trois de ses voisins, comme ayant donné du saucisson aux brigands. A la suite de cette dénonciation verbale, deux heures après, Minelli est arrêté et fusillé avec ses trois complices:

Dominique Scandale, surnommé Colamatteo, muletier, âgé de trente-trois ans;

Dominique Le Rose, surnommé Granpillo, cordonnier, âgé de vingt-deux ans;

François Critozzo, marchand, âgé de soixante ans.

L'exécution se fit sur la colline de San Francesco de Policastro. Les prières de la population, demandant au moins un sursis de vingt-quatre heures pour démontrer l'innocence des victimes, furent vaines aussi bien que les larmes de leurs mères, de leurs femmes et de leurs enfants. A la suite de cette féroce exécution, la plupart des habitants abandonnèrent Policastro.

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Le quadruple crime était ordonné par un sieur Bigotti, capitaine au 17° de ligne, qui tint à cœur d'assister à ce douloureux spectacle. Les décharges n'ayant pas tué raide les quatre infortunés, le capitaine piémontais fit l'office de bourreau, et, s'approchant de Vincent Minelli, il lui fendit le crâne d'un coup de sabre. Après ce noble exploit, Bigotti s'installa à Policastro avec une certaine Maria Sante, surnommée la Polissonne, femme aussi féroce que dépravée. C'est à ce couple bien assorti que Bernard Bevilacqua, Octave Paco, les fils de Pascal Codetta, et quelques autres, durent d'être dépouillés d'une partie de leurs biens.

De nombreuses bandes armées parcourent les routes de la Basilicate et des Pouilles. Une d'elles attaque et met en fuite la garde nationale mobile de Vogliano-Nuovo, qui laisse ses armes sur le terrain. Deux gardes nationaux sont pris et pendus.

Au pas de Gualeta, commune de Montemilone, province d'Avellino, dans un engagement de quelques heures avec les Piémontais, les brigands perdent cinq hommes et un blessé, et se retirent dans la montagne. La troupe a sept morts et sept blessés.

Entre Lavello et Cerignola, la bande de Crocco perd vingt-cinq hommes et est mise en fuite. '

A Montecarafa, la bande de Caruso perd son chef et un brigand.

Du 5 au 7. La réaction grandit de plus en plus dans dans la province de Lecce, et des conflits partiels se produisent chaque jour. Combat de six heures sur la route de Brindisi.

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Comhats en Capitanate, au pont de Candelaro, et au pas de Civitate, près le lac de Lesina. La presse affirme que les troupes n'ont pas un instant de trêve, et que, malgré les nouveaux renforts envoyés de Turin, elles sont encore insuffisantes pour faire face aux besoins de la guerre.

Une bande de brigands attaque Luco, village des Abruzzes, gardé par une vingtaine de soldats piémontais, qui résistent courageusement jusqu'à l'arrivée d'imposants renforts amenés par le capitaine Galli. Les réactionnaires sont mis en fuite, laissant trois morts et un prisonnier, que les Piémontais s'empressent de fusiller.

Une bande à cheval fait son apparition aux environs de Bovino; mais poursuivie du côté de San Marco, elle arrive à Camerelle. La légion hongroise, casernée à Lavello, lui barre le passage; alors elle s'engage dans les bois, en longeant la rive gauche de l'Ofanto, qu'elle passe à gué à Ponte-Venere, en perdant trois chevaux. Le lendemain, la bande de Crocco attaque les Hongrois entre Lavello et Venosa, et leur fait subir un sanglant échec.

La garde nationale de Rocca d'Arce attaque un détachement de réactionnaires, et est battue.

A Carbonara, province d'Avellino, les brigands de Crescenzo Gravina soutiennent bravement le feu des gardes nationales et des gardes mobiles, qui perdent quinze hommes et comptent de nombreux blessés. Les brigands perdent trois hommes et emportent quelques blessés.

8. Le major piémontais Muniechi et deux escadrons de lanciers, près de Torre-Fiorentina, territoire de Lucera, Fouilles, attaquent et battent une bande de deux cents brigands, qui perdent trente des leurs.

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Les lanciers ont quatre morts et trois blessés, dont un lieutenant.

Les journaux officieux disent qu'à Montalbano, province de Lecce, les bandes à cheval connaissant les moindres détours et les moindres sentiers dans les montagnes, font éprouver aux Piémontais des pertes importantes. A peine le bruit se répand-il de la présence de quelqu'une de ces bandes, les paysans deviennent «plus réactionnaires que les brigands mêmes,» courent les rues et les champs en criant: «Vive notre roi Bourbon! Vive François le désiré! Vive notre cher François!» et forcent tous les passants à répéter ces cris.

Du 9 au 11. La troupe et la garde nationale attaquent la bande du bois de Lagopesole, près Potenza, qui perd neuf hommes,.tandis que les Piémontais n'ont à déplorer que quatre morts.

La bande de Bottisani livre un nouveau combat dans les bois de Paupisi, territoire de Vitnlano, avec l'appui de deux autres petites bandes commandées l'une par Giannuzzi, surnommé le Bossu, l'autre par François de Cristofaro, ancien sous-officier de l'armée royale napolitaine. Les Piémontais se replient, abandonnant leurs blessés.

A Paola (Calabre citérieure), dans un combat acharné, les Piémontais, malgré le plus brillant courage, sont battus par une bande de réactionnaires et perdent quelque inonde.

Les diverses bandes du Gargano se fusionnent et deviennent assez imposantes pour que deux compagnies d'infanterie, se trouvant en face d'elles, évitent le combat.

220

Le commandant piémontais écrit en termes pressants au généra], résidant à Foggia, pour obtenir de prompts renforts, qui lui sont aussitôt expédiés.

Du 12 au 13. A Saracena, le major Fumel fait arrêter neuf individus, les fait lier à des poteaux et les fait fusiller. Les cadavres des victimes restent exposés en cet état pendant sept jours, afin d'inspirer à la population une salutaire terreur.

Vingt brigands à cheval attaquent le poste de Torre-Rivoli (Fouilles), enfoncent la porte du télégraphe et bâtonnent un douanier piémontiste; puis, ils vont rejoindre le gros de leur bande dans le bois de Maresca, territoire de Serracapriola.

Les environs de Naples sont infestés de petites bandes, qui poussent leurs excursions jusque sous les murs de la capitale. Une d'elles, rencontrant un piémontiste aux portes de la ville, le somme de crier: «Vive François II!» et, sur son refus, le blesse grièvement.

Dans la soirée du 13, deux voitures pleines d'hommes criant: «Vive François II!» arrivent à l'entrée de Naples, devant le poste de la rue del Campo. Ces hommes veulent forcer le poste à crier comme eux; une lutte s'engage; les policiers surviennent, bâtonnent les uns, arrêtent les autres, et l'ordre est rétabli.

14. Des détachements d'infanterie et de cavalerie piémontaises soutiennent un sanglant combat avec une grosse bande de réactionnaires, entre le Val de Bovino et Ariano des Pouilles.

221

Pré; d'Apricena, campe une bande d'environ deux cents hommes, commandée par Jean Coppola, ancien officier de l'armée royale napolitaine, et grossie des débris de la bande récemment battue dans le bois de Dragonara. Surprise par un détachement du 49e de ligne, elle est mise en fuite, laissant d-eux morts sur le terrain.

Du 11 au 17. Au Pas de Cerasale (Basilicate), quarante-cinq brigands à cheval eu viennent aux mains avec une patrouille de gardes nationaux et de bersaiilers qui parcourait la route de Melfl, et leur tuent quatre hommes, mais en en perdant sept ou huit, dont les cadavres sont emportés, et, comme d'habitude, brûlés par leurs compagnons (i).

Dans le district de Castrovillari, à Bisignano, Fume] fait fusiller neuf brigands, qui s'étaient rendus spontanément.

Dans la commune d'Acri, Fumel fait fusiller deux individus suspects de brigandage.

A Corigliano, Fumel fait fusiller une femme qui n'avait pu lui amener sa fille, laquelle était aux bandes avec son mari.

Fumel fusille quatre suspects à Longobucco et six à Crucolo. Non content de ses assassinats quotidiens, Fumel brûle et jette bas les maisons des champs, les cabanes, les étables, et multiplie les arrestations. La terreur règne dans les Calabres.

(1) Les brigands n'enterrent pas leurs morts, de peur que les Piémontais ne les déterrent, ne les reconnaissent et ne molestent les parents des morts.

222

Le Popolo d'Italia, du l.ï, annonce que le courrier des Fouilles à Naples a été assailli au pont Incoronata, c'est-â dire à sept milles en deçà de Foggia. Les brigands ont brûlé les dépêches gouvernementales et blessé grièvement le courrier François Monelti et un chef de police, que le postillon désignait à leur fureur.

Le journal La Tribuna, du 18, raconte que le courrier, parti de Palerme le 16, arrivé au pont Altavilla, a été assailli par des brigands qui ont blessé à coups de fusil les deux soldats d'escorte, François Azzaro, et Philippe Restiva, tué les chevaux et détruit les dépêches.

Dans les bois de Monticchio (Basilicate), sur les Coste de Gralli, les brigands, tournés et surpris par les bersaillers, en garnison à Rionero, perdent quatre des leurs, ont plusieurs blessés, et prennent la fuite, abandonnant des chevaux, dos armes, des munitions, du bétail, et même une femme de leur bande.

Combat de deux heures aux environs de Venosa les réactionnaires ont cinquante des leurs tués et plusieurs blessés; la troupe a trois morts et sept blessés.

17. Des détachements piémontais de Trentinara, de Roccaviva, Sora, Balzorano, parcourent les positions de Monte-Macchialunga et de Faggiogrosso, occupées par les réactionnaires, qui, dans diverses escarmouches, ont un mort et quatre blessés.

M. Sommati, chef de bataillon au 36e de ligne, en garnison à Larino, comté de Molise, en huit jours fait fusiller vingt-sept individus suspects de bourbonnisme.

18. La bande de Pilone, descend des montagnes de Castellamare, près Naples, dans la commune de Pimonte, et parcourt le pays aux cris de «Vive François II!».


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223

Le capitaine de la garde nationale prend la fuite, et son fils court au chef-lieu d'arrondissement pour demander des renforts qui arrivent trop tard. Les réactionnaires avaient déjà pris plus de 3,000 francs dans la caisse du trésor, brûlé les archives de la nouvelle administration communale, et s'étaient retirés paisiblement sur les montagnes voisines entre Gragnano et Lettere.

19. Combat à Salcito, province de Cumpo Basso. Deux réactionnaires et trois chevaux sont pris par les Piémontais.

Combat à Caccavone, dans lequel périssent quatre gardes nationaux.

20. Les brigands envahissent la commune de Lettere, près Naples, que défendent avec furie un détachement piémontais et une poignée de gardes nationaux. Le capitaine piémontais et quinze de ses hommes sont tués et le reste est mis en fuite. Les brigands se retirent après avoir mis le feu à la mairie.

Un détachement de Piémontais et de gardes mobiles, fouillant le bois de Carbonara, province d'Avellino, est repoussé par une bande de brigands qui lui tue un lieutenant, un sergent et sept soldats, et s'enhardit jusqu'à s'approcher de la ville, oïl le gros des Piémontais et toute la garde nationale sont sous les armes. La bande victorieuse se retire ensuite dans les montagnes, sans avoir été inquiétée.

Combat au bois de Montrone; les gardes mobiles de Fragneto, principauté de Bénévent, ont plusieurs blessés.

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21. A Corbara, district de Salerne, un combat s'engage entre une forte bande de réactionnaires et un détachement de Piémontais et de gardes nationaux. Les Piémontais, battus, se retirent, abandonnant les gardes nationaux, qui sont bientôt cernés et faits prisonniers tous sans exception.

Allez, leur disent les brigands, nous n'avons aucun compte à régler avec vous, parce que vous êtes nos frère.'; ce sont les Piémontais qui sont nos ennemis; nous vous épargnons donc la vie; laissez-nous vos armes, et adieu.

Petit combat sur le territoire de Sora.

22. Le courrier de Lecce est assailli pour la troisième fois et dépouillé de la correspondance. Les brigands se contentent d'emmener les chevaux, sans maltraiter les hommes.

Un détachement du 1er régiment de ligne, parcourant la province de Campo Basso, rencontre à Collemeluccio un peloton de réactionnaires, fait deux prisonniers et les fusille.

Combat à Montelongo, territoire de Salcito; douze gardes nationaux de Caccavone et quatre de Salcito, avec leur capitaine, M. Pascal Antenucci, sont tués par les brigands.

Le major Fumel est envoyé dans les Calabres, pour purger du brigandage les vastes forêts de la Sila.

23. Des télégrammes annoncent que les brigands combattent contre les troupes dans les Abruzzes, près île Campo di Giove et près d'Oisogna, et que beaucoup d'entre eux ont battu en retraite du côté de Morrone et d'Ascoli.

225

Combats dans les Pouilles, à Incoronata, et sur les bords du Fortore. Quatre mille Piémontais sont massés dans le pays; mais leur rôle y est nul, les bandes s'étant fractionnées et subdivisées pour adopter la guerre d'embuscades et d'escarmouches (1).

Près de Sepino, province de Campo Basso, une bande do brigands attaque et met en déroute un corps piémontais, en lui tuant et blessant un certain nombre d'hommes.

La garde nationale de Viggiano (Basilicate), fusille trois brigands, dont l'un était l'ex-gendarme napolitain Angevano.

Une bande de réactionnaires, en cherchant à passer des Pouilles dans les Abruzzes, est surprise par une compagnie du 35* de ligne, dans le bois de Cantalupo, entre Palena et Rivisondoli, et, après une longue résistance, s'égaille, laissant dix morts et quelques blessés.

A Montuori, province d'Avellino, combat où les brigands ont le dessus.

Aux environs de Foggia, la bande de Coppola, grossie des réfractaires et des mécontente, attaque un détachement de chevau-légers de Lucques et de bersaillers, lui tue quelque monde et le met en fuite.

Les montagnes de Monteforte, province d'Avellino, sont réoccupées par les réactionnaires.

La bande de Crescenzio Gravina réapparaît dans les montagnes de Palma, près Nola.

Voir les journaux napolitains du mois d'avril.

226

Du 24 au 26. La bande de Parise bat la garde nationale de Carleto (Basilicate), et se dirige sur Viggiano.

Les réactionnaires désarment la garde nationale de San Giorgio, et mettent en pièces les fils télégraphiques sur une longueur de huit kilomètres. Le même fait se produit sur la ligne de Chieti aux Pouilles.

Le courrier de Foggia est assailli et dévalisé. Les brigands maltraitent les agents de police qui l'escortent.

A Liveri, combat acharné; les réactionnaires perdent beaucoup de monde; leurs blessés s'achèvent mutuellement à coups de pistolet, pour ne pas tomber vivants entre les mains des Piémontais.

27. M. Gaétan del Giudice, préfet de Foggia, fait fusiller vingt-sept brigands, parmi lesquels des enfante. On fête à Naples l'arrivée du roi Victor-Emmanuel (1).

28. Les Piémontais décident d'attaquer la bande de Codipietro, campée sur le Gargano dans une position avantageuse, et de la cerner tout entière. Ils ouvrent le feu un peu avant l'aube, et resserrent de plus en plus leur cercle meurtrier. Les brigands cèdent le terrain et battent en retraite du côté d'un bois voisin. Les Piémontais poussent déjà des cris de joie; mais, avec le lever du soleil, ils aperçoivent au-dessus d'eux de grosses bandes à pied et à cheval, commandées par Codipietro en personne, qui ne tardent pas à les charger furieusement à la baïonnette. Les Piémontais sont contraints de se replier sur Manfredonia, non sans avoir essuyé des pertes sensibles.

Entre Foggia et Cerignola, le général piémontais Regis et son corps de troupes tombent dans une embuscade;

227

le général faillit être fait prisonnier par les brigands; il ne dut son salut qu'à la valeur de ses soldats.

29. La garde mobile de Calvello (Basilicate), se lance à la poursuite de la bande Mirto, qui entretient l'agitation dans le pays. A la vue des gardes mobiles, les brigands s'enfuient en désordre; ceux-ci, se croyant aussi facilement vainqueurs, se précipitent, et tombent dans une embuscade. De quarante gardes mobiles, il en revint neuf.

A Lagopesole, les bersaillers sont battus par les brigands. Le préfet de Potenza s'empresse, à raison de cet échec, de mobiliser cent gardes nationaux d'Avigliano, pour faire face immédiatement aux réactionnaires.

30. Une cinquantaine de réactionnaires, en cherchant à passer, par les montagnes, des Fouilles dans les Abruzzes, rencontre, près de Capracotta, comté de Molise, une trentaine de gardes nationaux, dont la moitié sont tués et le reste mis en fuite. A la nouvelle de cet échec, toutes les forces militaires sont mises sur pied et lancées sur les traces de la bande victorieuse, qui fut rejointe et battue le lendemain.

MAI.

1°. Une patrouille du détachement de Terzigno, arrondissement d'Ottajano, soutient une légère escarmouche contre une fraction de la bande de Pilone, qui, à la faveur de la nuit, se retire dans le bois de Mauro. Le commandant militaire de Castellamare y envoie deux cents gardes nationaux, qui fouillent le bois sans résultat.

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2. La bande de Crescenzo se bat pendant cinq heures dans les champs, entre Mola et Pal ma. 11 y a des morts de part et d'autre.

Un détachement piémontais, allant d'Eboli à Salerne, rencontre dans la campagne un paysan qu'il prend pour un brigand, et le fusille sans rien entendre.

Une bande de réactionnaires occupe quelques points de l'arrondissement de Campagna, à peu de distance d'Eboli; elle fait ses provisions dans les villages voisins, et les paie toujours intégralement.

3.A Francavilla, province de Lecce, on fusille un soldat débanda de l'ancienne armée royale des Deux Siciles, à seule fin (^imprimer la terreur, et aussi pour qu'il serve d'exemple aux autres soldats débandés.

Combat de six heures, dans les gorges du Matese, entre la bande Guitto et la garde nationale de Sepino, qui, vers le coucher du soleil, bat en retraite pour n'être pas surprise parla nuit dansées impraticables forêts, emportant plusieurs blessé?.

Aux environs de Cerignola, les brigands forcent un corps piémontais à rebrousser chemin.

Dans les bois de la Grotta, entre les Fouilles et le comté de Molise, on signale une nouvelle bande, commandée par un certain Guglielmi, que les gardes nationaux sont impuissants à détruire.

A Ceglie d'Ostuni, province de Lecce, les assassinats se multiplient d'une manière effrayante. C'est ainsi que les paysans se vengent des persécutions dont les accablent les lieutenants subalpins.

Une bande de brigands désarme la garde nationale de Campodimele, arrondissement de Gaète.


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229

Le général piémontais Govone lance vainement à la poursuite des brigands deux cents bersaillers et de l'artillerie.

Pico et Civila-Pontino sont menacés par de petites bandes. Les hauteurs du Taburno sont occupées par quatre détachements réactionnaires, qui ne cessent d'entonner des chants bourbonniens, et que n'osent aller attaquer les gardes mobiles et les bataillons piémontais.

Au mont Caruso, combat entre les Piémontais et les brigands; pertes graves de part et d'autre.

4. Une bande de réactionnaires s'enhardit jusqu'à venir s'approvisionner aux portes de Catanzaro.

A Vico, village de la Terre de Labour, canton de Tricola, près Santa-Maria, des femmes étaient occupées, selon la coutume, à arracher l'ivraie dans les champs de blé. Les soldats piémontais surviennent, prennent ces femmes pour des brigands cachés dans les blés, font feu, sur l'ordre de l'officier commandant le détachement, et tuent huit de ces malheureuses.

Du 5 au 8. Une bande de quatre cents brigands à cheval se présente aux portes de Savigliano, arrondissement d'Ariano, et envoie un parlementaire au capitaine de la garde nationale, exigeant qu'on livre sur-le-champ vingt fusils, des munitions, des comestibles, du blé et de l'avoine pour les chevaux.

Les brigands, commandés par Lo Zambro, soutiennent trois combats en quatre jours: le premier au bois d'Ururi, comté de Molise; le second sur le territoire de San Nicandro et de San-Marco in Lamis (Pouilles), et le dernier le pluns important, sur la route de Foggia à Manfredonia.

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Dana ce dernier combat, la bande était commandée par un certain Gabrielli, et quatorze lanciers piémontais y périrent.

Les nombreuses bandes réactionnaires effrayent tellement la Basilicate que le major Petruccelli court jusqu'à Turin pour implorer l'assistance du ministre Ratazzi. A Montemale, la garde mobile se bat pendant cinq heures contre les brigands de Maziello qui, observant une tactique tonte militaire, formant le carré ou se déployant en tirailleurs, mettent hors de combat un certain nombre de Piémontais, et ne perdent que deux hommes.

De fortes bandes armées infestent les territoires de. Pontelandolfo, Casalduni, Circello et Cerreto, comté de Molise, de Vaglio, de Pietragalla, Cancellara et du cheflieu même de la Basilicate. D'autres communes de cette vaste province sont également parcourues par les brigands. Aucune route n'est sûre, et l'audace des bandes jette l'épouvante parmi les piémontistes.

Du 9 au 13. Près de Ripacandida (Basilicate), un détachement de Hongrois attaque un peloton de réactionnaires à cheval. L'avantage est d'abord à ces derniers; mais ils cèdent le terrain, abandonnant plusieurs chevaux, à l'arrivée d'un renfort de cavalerie piémontaise.

Dans les montagnes d'Avitulano, province d'Avellino, une grosse bande de réactionnaires met en fuite les gardes nationaux et les gardes mobiles.

A Torello, près Bénévent, la garde nationale rencontre une quinzaine de brigands contre qui elle ouvre le feu. Ceux-ci résistent avec valeur, et, renforcés du gros de leur bande, parviennent à vaincre et à rester maîtres du terrain.

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Le territoire de Frasso est le théâtre d'incursions de bandes réactionnaires.

Plusieurs engagements aux environs d'Aquila; combat au bois de Dragonara; combat de Ruvo; les réactionnaires perdent cinq hommes, et les gardes mobiles à cheval, commandés par David Mennuni, douze.

Du 14 au 24, A Sant'Angelo, district de Caserte, une compagnie de Piémontais tombe dans une embuscade; les brigands, qui sont militairement organisés et marchent au son du clairon, lui tuent six hommes et lui en blessent quinze.

Du côté de Pizzoferrato (Abruzze citérieure), on signale de nouvelles bandes, outre celle qui, depuis quelque temps, campe aux bords du Sangro.

A la suite des proclamations infâmes de Fumel, le brigandage augmente considérablement dans les Calabres. La province d'Avellino compte plus de brigands que l'autre année, malgré les sanguinaires répressions du préfet N. de Luca (1).

A Ricigliano, combat entre les brigands et la garde nationale.

A la vue des gardes nationales réunies de Sansossio, de Flumeri, Sannicola, Castelbaronia, Sant'Agata, Anzano et Trevico, une bande de brigands s'arrête, pour déjeuner et faire manger les chevaux, sur la colline de Molara, entre Zugoli et Monteleone. Cette bande, qui se compose de quarante-deux cavaliers, est attaquée, un peu plus tard, par cinquante-sept Piémontais, et elle en tue vingt-deux.

(1) La Stampa, de Turin.

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Une bande de soixante brigands à cheval, aux serre de Pietragalla (Basilicate), arrête la musique de la garde nationale de Caposele, la force a jouer des airs bourbonniens, des marches militaires et des danses; la plupart des brigands, enthousiasmés, chantent et dansent gaiement sur la route.

Combat d'Escalonga, près Avigliano; combat de Grottole, arrondissement de Matera, meurtrier pour les Piémontais et la bande Serra-Valle; combat du bois de Monticchio; les Piémontais perdent sept hommes, et les brigands onze. Escalonga, Grottole et Monticchio sont en Basilicate.

Dans les Pouilles, le territoire d'Ariano est le théâtre d'un combat acharné dont le succès est pour les réactionnaires, qui ne perdent que six hommes et douze chevaux, tandis qu'ils font perdre à l'ennemi cinq gendarmes, quarante gardes mobiles, trente gardes nationaux et quatre agents de police.

Combat dans la plaine de Bovino, meurtrier de part et d'autre.

Trente-six brigands font leur soumission au sous-préfet d'Avezzano (Abruzzes).

Le chef de bande Pezzi, déjà blessé, se présente volontairement au maire de Catanzaro.

25. Les bandes réactionnaires parcourent le comté de Molise, à la grande terreur des piémontistes. Une bande de deux cent vingt hommes occupe les montagnes d'Atessa, arrondissement de Vasto (Abruzze citérieure).

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Un chef de police est pris par les brigands entre Cervinara et San-Martino d'Avellino. On lui fait grâce de la vie moyennant une rançon de 4,000 fr.

Les réactionnaires de Cellico, Serra, Spezzanopiccolo et Longobucco (Calabre citérieure), se fondent en une seule bande qui parcourt audacieusement la Sila et les bois environnants.

La bande de Santa-Croce di Magliano, comté de Molise, commandée par Vulpiano, s'étend jusqu'à la Capitanate.

20. A Salerne, un pauvre vieillard épuisé par l'âge et la fatigue tombe en face du couvent des Capucins. Un soldat piémontais le prend pour un brigand et le tue d'un coup de fusil.

27. Combat aux environs de Gragnano, province de Naples, où les réactionnaires ont le dessus.

28. Dans l'arrondissement de Matera (Basilicate), trois brigands arrêtent deux maîtres maçons allant à leurs affaires, et leur laissent la vie sauve sur leur déclaration qu'ils sont d'anciens soldats bourbonniens; de plus, les brigands les invitent à les;uivre jusqu'à la chaumière voisine. Survient la garde nationale: les trois brigands prennent la fuite; mais, sûrs de leur innocence personnelle, les maçons restent et racontent ce qui leur est arrivé. La garde nationale les croit, et, au lieu de les fusiller sur-le-champ, elle les conduit à Matera, où elle les remet entre les mains des Piémontais. Malgré les preuves d'innocence les plus palpables, les Piémontais fusillent ces deux infortunés, coupables seulement de ne pas s'être fait massacrer dans leur rencontre avec les brigands.

234

A Potenza, un pauvre homme, qui parcourait les campagnes en vendant des clous, des fers de cheval et autres objets, est fusillé sur la simple déposition d'un ennemi qui le dénonce comme espion des brigands.

29. Dans les gorges du Vésuve, la bande de Pilone soutient pendant deux heures le feu des Piémontais et s'égaille sans avoir perdu un seul homme,

Combat de Cerretto (Terre de Labour); deux réactionnaires pris et fusillés sur-le-champ.

Récapitulation des faits d'armes les plus importants du mois de mai, d'après les indications des journaux napolitains (1).

Province de Naples. Combats du Vésuve, de Gragnano, aux environs de Castellamare, et de Sant' Anastasia.

Abruzzes. Combats du Taburno et aux environs d'Aquila.

Provinces d'Avellino. Combats de Montemale, Savignano, Vitulano, Cusano, Torre-Cuso.

Terre de Labour. Combats de Sora, du Garigliano, de Cerretto, sur le Matese, de Caserte, Aima, Pastena, Lenola, Campo di Melle, Pico, Nola et encore de Cerretto.

(1) Le Nomade, la Patria, L'Osservatore napolitano, L'Eco di Napoli le Difensore, etc.

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Comté de Molise. Larino, Sepino, Castellone, Cicello.

Basilicate. Montalbano, Melfi, Calvello, Pietragalla, Cancellara, Vaglio, Brindisi di Potenza, Venosa, Monticcio, Lavello.

Pouilles. Manfredonia, Casamassima, Incoronata, aux bords du Fortore, Torremaggiore, Castellanetta, Bovino, aux environs de Foggia, Corato, Martina, Minervino.

Principauté de Salerne. Angri, Laviano, Campagna et Sarno.

JUIN.

Du 1er au 12. Une bande de réactionnaires à pied et à cheval occupe la commune de Morra, à une lieue de Sant'Angelo de Lombard!, chef-lieu d'arrondissement de la province d'Avellino, et est amicalement fournie de vivres et de fourrage par les officiers de la garde nationale.

Les courriers des Abruzzes et des Calabres sont journellement arrêtés.

13. Revenant d'une tournée dans la commune de San Bartolomeo in Galdo (Fouilles), un détachement de onze gardes mobiles et de quatre gendarmes est massacré tout entier, à l'exception d'un seul homme, par une bandn de quarante réactionnaires.

Le courrier des Fouilles est arrêté près de Troja, et tontes les correspondances sont brûlées sur la route.

Du 14 au 30. Les bandes réactionnaires augmentent et grossissent partout, mais principalement dans les Fouilles et dans la Basilicate.


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236

Les gardes mobiles-sont effrayées, et les troupes ne suffisent pas à courir sur tous les points menacés; chaque jour amène des escarmouches terminées par une fuite simulée des réactionnaires, qui ne s'égaillent que pour reparaître à ('improviste sur d'autres points.

Le comté de Molise, les arrondissements de Sora et de Gaëte sont sillonnés par de fortes masses de brigands. Les journaux sont remplis de nouvelles décourageantes pour les piémontistes.

JUILLET.

1er. Un détachement de Piémontais attaque la ferme de Joseph Casella, qu'occupe un piquet de gardes nationaux de Rapolla que les soldats prennent pour des brigands. Le garde national Biaise Casca est tué.

2. Une compagnie de bersagliers arrivant en bateau pour cerner les brigands sur la plage de Sapri, principauté de Salerne, fait feu sur la foule qui encombre la plage, c'est-à-dire sur les gardes nationaux qu'ils ont pris pour des brigands.

4. Télégramme officiel:

«Un certain nombre de brigands débarquent aujourd'hui près de Futani, principauté de Salerne. Immédiatement la bande, grossie d'autres brigands du pays, occupe la commune de Camerata, où elle se fortifie. Elle sera attaquée par le cinquième bataillon de bersagliers et par deux compagnie» de grenadiers parties de Naples.»

D'autres bandes se dirigent d'abord sur San Giovanui a Piro, puis sur Celle, Montano, Saurito, et enfin sur Alfano.

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5. Sur les confins de la Basilicate et des Fouilles, dans l'arrondissement de Melfl, Crocco massacre presque en entier dans une embuscade une colonne composée d'environ deux cents soldats et gardes mobiles. L'ardeur des brigands est telle que plusieurs d'eux poursuivent et tuent sous les murs de Melfi même trois gardes mobiles qui s'enfuyaient.

Du 6 au 10.Combat dans les Fouilles entre les brigands et la 6a compagnie du 8° de ligne, à qui son ignorance des lieux fait perdre beaucoup de monde.

A Celenza Valfortore (Capitanate), un détachement de Piémontais est à moitié détruit parles brigands.

Combat sanglant au Volturne.

La bande à cheval, commandée par Cavalcanti, ancien officier de l'armée royale napolitaine, parcourt librement les environs de Stigliano (Basilicate).

Les eûtes d'Amalfi sont au pouvoir des bandes armées. Une d'elles entre dans Agerola, désarme la garde nationale, délivre les prisonniers et menace de donner l'assaut à Amalfi même.

Combat sanglant près de Foggia; les brigands battent une compagnie du 48e de ligne.

Du 11 au 20. Une bande de cinquante réactionnaires livre le combat aux troupes et aux gardes nationaux d'Alessa (Abruzzes).

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Les courriers des Calabres et des Fouilles sont assaillis et dévalisés (1).

Les bandes de Crocco, de Coppa, de Ninco-Nanco, Serravalle, Cavalcanti et autres valeureux chefs de brigands commandent complétement la Basilicate. Les montagnes de Corbara, Tramomti, Ravello, Positano, Agerola, dans la principauté de Salerne, sont militairement occupées par les bandes.

L'effroi est si grand parmi les piémontistes, le long des côtes d'Amalfi que les maires de Furore, de Praiano, de Tramonti et Conca abandonnent leur poste en toute précipitation.

21. Cent cinquante réactionnaires occupent Scanzano et sont reçus par les habitants avec la plus parfaite cordialité. A Solopaca, principauté de Bénévent, combat à l'avantage des réactionnaires.

22. Les piémontistes d'Andria sont consternés du départ des troupes qui vont repousser une invasion de brigands. En marche, six soldats désertent avec armes et bagage?.

Un détachement de soixante hommes, formé de gardes mobiles de Lucera et Volturara et de gendarmes, en parcourant le territoire de Lucera, aperçoit quatre brigands fuyant à son approche. Vingt gardes sont lancés à leur poursuite, tuent l'un des fuyards, mais tombent presque aussitôt dans une embuscade où ils sont tous massacrés.

(1) Le Moniteur de Naples, 18 juillet.

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Du 23 an 31. Télégramme officiel:

«La légion hongroise a valeureusement battu la bande de Tortora, et lui a tué douze hommes.»

La commune de Ginestra (Basilicate), est envahie par une bande de cent cinquante réactionnaires. Le capitaine de la garde nationale fait sonner le tocsin, mais il ne réunit pas quinze hommes; il envoie demander du secours à Castelfranco; mais la troupe répond qu'elle s'y trouve bien. Les brigands se rendent à l'église et veulent faire chanter le Te Deum par l'archiprêtre et son vicaire, qui s'y refusent, sans doute par peur du lendemain. Les brigands les arrêtent, ainsi qu'un officier de la garde nationale du nom de Martucci; mais, à leur départ de Ginestra, ils les relâchent sans leur avoir fait subir ni dommages ni outrages (1).

Combats d'Ariano, de Piazzano, près de Bénévent, près de Potenza, de Pietragalla, de Valva, de Nola, d'Amalfi, de Carpineto, de San Marco-la-Catola, de Macchiagodena et de Pietrapertosa.

A Campomaggiore (Basilicate), une bande de quatre-vingts brigands désarme les gardes nationaux qui, dans leur frayeur, se sont retirés et barricadés dans leurs maisons et rendent leurs armes par les fenêtres. Les statues de Victor-Emmanuel et de Garibaldi sont mises en pièces.

AOUT.

1er. Dans les cantons de Montalbano, province de Lecce et de San-Lupo, comté de Molise, les maisons des champs sont toutes occupées par les réactionnaires.

(1) Voir au chapitre Religion comment les Piémontais traitent les prêtres qui refusent de chanter le Te Deum en leur honneur.

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Une petite bande parcourt les environs de Piaggine Soprana. Les brigands envahissent la commune de Gesualdo. La garde nationale de Matera, dans un vif engagement, tue quinze brigands et en blesse un grand nombre.

2. L»s Piémontais fusillent un paysan comme espion des brigands. Aux environs de Felitto, les Piémontais fusillent comme brigand un paysan qui cherchait dans les champs un vase qu'il avait perdu.

Les Piémontais fusillent à Orsogna un âne chargé de foin qui s'avançait sur la route sans répondre aux sommations des sentinelles.

L'arrondissement d'Ariano est parcouru par quatre-cents brigands à cheval.

3. Deux cents réactionnaires entrent dans Guglielmi (1), petite ville de 3,000 âmes, désarment la garde nationale, brûlent les archives municipales, et, d'accord avec un certain nombre des habitants, mettent le pays en état de siège. Le maire Jean Ruggiero, son père et ses deux fils sont mis à mort, comme traîtres à l'indépendance nationale; Nicolas Bisio et Alexandre Lancia, officiers de la garde nationale, qui avaient envoyé demander du renfort à Atessa et avaient tiré du haut du clocher sur les brigands, sont fusillés. Les réactionnaires passent ensuite à Villa-Alfonsina, où ils brûlent la maison d'un piémontiste, et parcourent successivement les communes de Roio, de Colledimezzo et de Pennadomo.

(1) Arrondissement de Vasto (Abruzzes).

241

D'autres bandes occupent les gorges du mont Majella, sur les versants duquel se trouvent les grosses communes de Palena, Lama, Faro San Martino et Palombara, naguère enrichies par de florissantes manufactures d'étoffes de laine, maintenant réduites i la mendicité parles libérateurs piémontais.

a. Dans l'après-midi, au milieu de la place publique de Vallo, principauté de Salerne, en présence de toutes les autorités civiles et judiciaires, qui restent indifférentes, un jeune garde national de San Biase, Vincent Gatto, est fusillé parce qu'on l'avait trouvé hors de la ville avec deux cartouches dans la poche, cartouches qu'il avait oublié de rendre la veille, qu'il avait été de service. Les bersagliers piémontais qui arrêtèrent l'infortuné jeune homme ne répondaient autre chose à ses protestations d'innocence que: «Allons, tourne les épaules!» Et huit coups de fusil l'étendirent sur le sol.

A Casalnuovo de Capitanate, dans l'après-midi, plusieurs bandes de réactionnaires en viennent aux mains entre elles. Les gardes nationaux accourent avec les gendarmes pour mettre à profit la discorde. Mais les brigands cessant instantanément leurs querelles, qui n'étaient évidemment qu'une ruse de guerre, se réunissent contre les gardes nationaux, se battent pendant cinq heures et eussent remporté un éclatant succès sans l'arrivée de la 11a compagnie du 8e de ligne.

6. Une bande envahit les communes d'Altino et de Roccascalegna (Abruzzes), et fait des réquisitions d'armes.

242

7. Combat près de Sora. Combat sur le territoire d'Acerenza (Basilicate), à l'avantage du chef de bande Agatiello.

La bande qui parcourt la campagne de Montesarchio, province d'Avellino, est attaquée sur le Taburno avec furie, et après un combat acharné réussit à garder ses positions.

Dans la campagne d'Ostuni, province de Lecce, on signale divers crimes politiques. Le garde national Riccardo Tanzarella qui, plusieurs jours auparavant, avait arrêté un soldat débandé, est tué de cinq coups de fusil, et MM. Mirancilo sont assassinés comme piémontistes.

Combat de la Pianella, près Martino, entre les Piémontais et une poignée de brigands à cheval.

Une grande quantité de brigands sont fusillés à Cerignola, à Guardia-Lombarda et à Ripalda, arrondissement de Sora.

Du 8 au 10,, Des bandes apparaissent pour la première fois dans l'arrondissement de Penne (Abruzzes), arrêtent le secrétaire de la commune, et le relâchent aussitôt -sur les instances généreuses d'un brigand. Les réactionnaires consignent entre les mains du secrétaire une certaine somme destinée au curé du pays, afin qu'il dise une messe des morts. Ils se retirent ensuite du côté de Céliera, rencontrent les Piémontais et leur tuent sept hommes.

Du 11 au 16. Une bande dis deux cents brigands fait, à Foggia, une réquisition de cent chevaux, le nombre de ses hommes s'étant doublé en deux jours.


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La garde nationale de San Giorgio-la-Montagna, province d'Avellino, se tient sous les armes nuit et jour, parce que la nombreuse bande, qui campe sur le Montemale, a fait savoir qu'avant peu elle envahira le pays; elle compte d'ailleurs ne trouver aucune résistance, puisqu'elle ne passera par San Giorgio que pour opérer des mouvements stratégiques combinés simultanément avec d'autres bandes, afin de tenter nn grand coup.

Combats acharnés aux environs de Teora, province d'Avellino, de Miglierina et d'Amato, près Catanzaro, de la Castellana di Cafarelli, près Manfredonia, et dans les arrondissements de Gaële et de Sora.

A Rotondella (Basilicate), les Piémontais trouvent dans une cabane un réactionnaire blessé et le fusillent.

Le chef de bande Agatiello et deux de ses hommes sont pris les armes à la main et fusillés.

Un brigand de la bande du Vésuve (1) est arrêté à Boscotrecase, et fusillé.

Quatre brigands, pris dans un fourré sur les indications d'un espion, sont fusillas une demi-heure après à Montesarchio (2).

Quatre soldats du 34e de-ligne, natifs des Romagnes, désertent pour passer aux brigands; mais arrêtés en vue de Frigento, ils sont immédiatement fusillés.

Dans le canton de Cannitello, près Capoue, les Piémontais surprennent, dans les gerbes on ils s'étaient cachés, les cinq brigands Pascal Capozzo, Pierre Panella, Louis de Lauro, Pascal Cipolla, et Vincent Mola. Les deux derniers «ont jetés en prison, et le? trois premiers fusillés.

(1) La bande de Pilone.

(2) Les journaux l'Omnibus et L' Indipendente

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A Rocchella, un brigand est fusillé; le soir même, un habitant lie la commune passait aux bandes armées.

A Sant'Agata, les Piémontais fusillent deux brigands; le lendemain, un habitant de la commune allait s'enrôler dans les bandes.

L'atrocité des Piémontais et l'exaspération des brigands pallient les représailles de ces derniers contre les Piémontais et les espions.

A Santa-Sofia (Calabre), Raphaël Molito et Basile Cardamone, connus pour annexionnistes, sont pris par les brigands, qui coupent au premier une oreille et exigent de l'autre une forte rançon. Cinq cent cinquante bœufs sont égorgés dans les fermes d'un sieur Vara, canton de Cerreto; seize, à M. Amato, au Tufo-de-Pietraroja; trente, à M. Achille del Giudice, frère du préfet de Foggia (1); un autre frère du même préfet, Alexandre del Giudice, voit incendier un de ses bois sur le Matese; les étables du capitaine de la garde nationale de Rotello sont saccagées.

La commune de Campodigiove (Abruzzes), est envahie par soixante réactionnaires à cheval, dont les deux chefs sont tués, et qui emportent plusieurs blessés.

La seizième compagnie du 34e de ligne, capitaine Berardi, à Scampitella, près Anzano, attaque cinquante réactionnaires à cheval, qui disparaissent dans le bois de San Pietro.

17. Dans la province de Foggia, apparaît une bande nouvelle, commandée par Michel Azzarone, dit le Casso naro. Une bande de cent quatre-vingts hommes occupe le vaste bois de Dragonara.

(1) Voir le chapitre des Lieutenants subalpin.

245

De nouvelles bandes sont signalées dans les Abruzzes et dans la principauté de Bénévent, en même temps que des engagements journaliers entre les brigands et les Piémontais.

A Penna-Piedimonte (Abruzzes), pendant la fêle de Sainte-Brigitte, une bande réactionnaire est attaquée dans le voisin bois de Catania, par un détachement de gardes mobiles, qui perdent quatre hommes, dont un jeune lieutenant, et ont plusieurs blessés.

18. Dans le canton de Ruvo (Pouilles), un détachement de bersaillers et de gardes nationaux attaque une vingtaine de réactionnaires, qui perdent trois hommes dans le torrent du Lianto et en tuent un aux Piémontais.

A Bitonto, province de Bari, on affiche une proclamation promettant comme certaine la restauration du roi légitime, et appelant le peuple à se soulever contre les envahisseurs.

19. Combat de Tiriolo (Calabre); un brigand tué, un autre fusillé.

Les gendarmes et la garde nationale de Scanno (Abruzzes), fusillent un brigand pris dans une embuscade.

Le fameux chef Daniel Hordant-Cichelti, le même qui en 1860 tira sur le général piémontais Pinelli, est pris à Pizzoli (Abruzzes), et fusillé.

Combats du bois de Migliano, près Sanl?Angelo de Lombardi; les Piémontais ont quatre morts et quelques blessés, dont un sergent.

Le capitaine de la garde nationale de Bisaccia, province d'Avellino,

246

arrête un brigand et le consigne aux mains du commandant du 33e de ligne, qui, sans autre formalité, le fait fusiller.

20. Une petite bande désarme, dans la nuit, le poste de garde nationale de Fragagnano (Terre de Bari), et emporte seize fusils.

21. Le poste de la garde nationale de Montaquila, arrondissement d'Isernia, est désarmé par les brigands.

22. A Visciglito, entre Foggia et Lucera, combat entre un détachement de bersaillers et les bandes réunies de Pirro, Varanelli, Petrozzi et Chiavone.

23. Un détachement sorti d'Apricena attaque dix brigands à cheval, en tue un, en blesse trois, et leur prend quatre chevaux.

Près de la ferme du Reggente, combat entre les Piémontais sortis de Lucera et les brigands, qui perdent trois hommes et deux chevaux.

A Pavoni, propriété du marquis Nicaslro,les Piémontais attaquent une cinquantaine de brigands, en tuent et en blessent un certain nombre, et poursuivent le reste de la bande jusqu'à Montearatro.

Le capitaine Baralis, du 8e de ligne, embusqué avec sa compagnie aux environs de la ferme du marquis de Luca, arrête, dans la nuit, le chef de brigands Antonio Campanossi, et le fusille à Serracapriola.

Une bande de quatre-vingts réactionnaires entre dans le village de Zapponeto (Capitanate), désarme la garde nationale, lève des contributions énormes sur les piémontistes, et établit un gouvernement provisoire.

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24. Dans la nuit, cent trente brigands envahissent Castelluccio (Terre de Labour), et y encouragent les vengeances politiques. La garde nationale, retranchée dans la tour, tire au hasard pendant quatre heures.

25. Le capitaine des bersaillers en garnison à Carbonara, province d'Avellino, va au devant d'une petite bande de brigands, l'attaque et la met en fuite; il n'y a que quelques blessés de part et d'autre.

Aux environs de Cosenza (Calabre), et dans les populeuses communes de Celico et de Spezzano, éclatent des complots réactionnaires à main armée.

26. Une bande de quatre-vingt-dix brigands tente d'envahir Motta, mais est repoussée.

A Latronico (Basilicate), escarmouche entre les brigands et les gendarmes.

Vito Angelini, de Noci, est pris par les brigands et fusillé comme piémontiste.

Combat de Castelfranco; le capitaine Mondino, du 45* de ligne, attaque et met en déroute une bande de soixante-dix hommes.

27. André Mondella, de Bojano, est pris par les brigands et fusillé comme piémontiste.

Entre Marsiconuovo et Marsicovetere (Basilicate), combat entre les gardes nationaux et la petite bande d'Angelantonio Masini, qui est blessé, lui et un de ses hommes.

28. A Cervinara, Pascal Valente est pris par les brigands et fusillé comme piémontiste.

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A Ricigliano, Michel de Nicola est tué par les brigands comme piémontiste.

Les brigands enlèvent quatre cents têtes de bétail appartenant au capitaine de la garde nationale de San-Massimo, comté do Molise, et menacent d'envahir le pays; mais les gardes nationales réunies de Bojano et de RoccamandoIQ les repoussent en leur reprenant tout le bétail.

Un détachement du 21e de ligne et les gendarmes de Bovino attaquent et mettent en fuite, à Facto, une bande de quatre-vingts brigands, et procèdent à l'arrestation de beaucoup de suspects.

29. Combat du pont de Melito, entre la 9e compagnie du 22° de ligne, capitaine Borgogna, appuyée de la garde nationale de Grottaminarda, et la Lande d'Andreozzi, qui, après une lutte acharnée, est tué avec quatre de ses compagnons.

30. Le lieutenant Benevelli, avec un détachement du 22e de ligne, attaque, sur le territoire d'Ariane, uue bande de cinquante réactionnaires qui, informés à temps, se retirent en lieu sûr. Les Piémontais exaspérés arrêtent et fusillent sur place plusieurs paysans suspects d'avoir donné des informations aux brigands.

31. Une bande de quatre-vingts réactionnaires tente de surprendre le détachement de bersaillers, caserné à Castronuovo, près Avezzano (Abruzzes); mais elle est repoussée par une vive fusillade. Le bersailler Josejih Pelimonte est tué.

La fête de Montefusco, province d'Avellino, est troublée par l'arrivée d'une vingtaine de brigand?, qui se donnent


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comme l'avant-garde d'une l'or te bande. Les gardes nationaux épouvantés s'enfuient du pays, et les brigands prennent paisiblement part à la fête.

SEPTEMBRE.

1. Hue compagnie du 18e bataillon de bersaillers, capitaine Philippe Carlocci, à deux milles d'Apice, attaque et met en fuite quarante-cinq brigands, qui laissent sur le terrain quatorze morts, un cheval, onze fusils et quatre pistolets.

Dans les Abruzzes, attaque d'un fourgon du trésor, escorté par les Piémontais; les brigands sont repoussés.

Le capitaine Mangiaracina met en fuite une bande de cent cinquante brigands, en lui causant de graves dommages (1).

Cavalcanti et cent hommes envahissent Castelsaraceno (Basilicate), désarment la garde nationale, molestent les piémontistes, et se retirent paisiblement.

La garde nationale de Lauria, redoutant une invasion, reste toute la nuit sous les armes.

2. Les réactionnaires attaquent San-Sossio, Calabre, et sont repoussés par la garde nationale; mais ils n'en campent pas moins à une demi-lieue du village.

Quatre brigands sont fusillés à Avellino. Trente-huit ducats, trouvés sur eux, sont partagés entre leurs bourreaux.

(1) Giornale di Napoli.

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Combat de San-Fele (Basilicate); les gendarmes et les bersaillers attaquent la petite bande de Coppa, lui blessent quatre hommes et prennent deux chevaux.

A Biccari, un brigand est pris dans la nuit et fusillé par les gendarmes.

3. Une forte bande menace Flumeri; mais elle est tenue en respect par les bersaillers de Roccaminarda.

Dans les villages de Cave et de Catailli, près Conca, arrondissement de Gaële, le poste de la garde nationale est désarmé, et la maison du piémontiste Ange Masi, dévastée. Les gendarmes arrêtent comme complice de ces faits le lieutenant Antonio Galdieri.

A Serrastretta (Calabre), trois gendarmes prennent et fusillent un brigand.

La garde nationale de Serrastretta arrête et fusille quatre brigands.

A Monteleone (Calabre), sont fusillés comme suspects de brigandage, les soldats débandés Benedict et Raphaël Scalese, de Castagna, Vincent Ponlieri et Dominique Ceranda, de Carpenzana.

5. La bande commandée par Néron saccage et désarme les villages de San Pietro, de Polocia et de Campinola, principauté de Salerne.

La garde nationale de San Martino (Basilicale), et les gendarmes poursuivent une bande de soixante réactionnaires, en tuent un et en blessent deux.

Dans l'après-midi, à un kilomètre de San Severo, une bande de cent brigands fait une razzia de chevaux. Une compagnie d'infanterie est envoyée contre elle, mais arrive trop tard.

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6.Dans une escarmouche de nuit, Sébastien Caliendo, sergent de la garde nationale de Cicciano (Terre de Labour), est tué par les brigands.

7. Deux cents réactionnaires sont attaqués aux Canestrelle, canton de Candela (Pouilles), par le colonel piémontais Balzani, à la tète d'un détachement de bersaillers et de chevau-légers de Lucques. Les brigands s'égaillent, emportant leurs blessés, et laissant sur le terrain quinze des leurs, dix-neuf chevaux et des armes.

Près de San-Paolo (Pouilles), soixante gardes nationaux de San-Severo, commandés par le lieutenant Thomas La Cicilia, se battent pendant cinq heures contre une bande de quatre-vingt-dix réactionnaires, et se retirent avec plusieurs blessés, dont le lieutenant lui-même. Le lendemain, d'ordre du commandant militaire des Pouilles, les gendarmes arrêtent le maire et le capitaine de la garde nationale de San-Paolo, et les traînent en prison, comme prévenus d'avoir empêché leurs concitoyens de marcher contre les réactionnaire?, qui se battaient à cent pas du pays.

Le courrier de Piedimonte à Capriati est dévalisé par les brigands.

Combat du Mont Cesina (1); un brigand est pris et fusillé.

A Scamso, un brigand est pris et fusillé par les Piémontais.

8. La bande qui occupe les montagnes de San Muro et do San-Gregorio (Basilicate), exerce des représailles contre les piémontistes.

(1) Terre de Labour.

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Le courrier de Lanciano est attaqué; un des brigands est pris et fusillé à Roccaraso.

9. Un détachement du 4fie attaque les brigands, non loin de Sora. en tue un et en blesse un petit nombre.

Combat de Rendinara; Tristan! bat un détachement de bersaillers, blesse leur commandant et tue un sergent; deux brigands blessés vont se faire soigner à Pollepario.

Un gendarme est grièvement blessé sur la route de Torchiara à Salerne.

L'arrondissement de Vasto est occupé par une audacieuse bande de deux cents réactionnaires, que grossit chaque jour l'arrivée des jeunes gens des environ?. Des représailles sont exercées contre les piémontistes.

10.Nicolas d'Ulisse, brigand, ex-soldat au 55e, est pris par les troupes de Torricella, après une résistance terrible, et fusillé sur-le-champ.

Dans l'après-midi, une bande menace Casalbore; la garde nationale résiste et blesse deux brigand?. Le capitaine Gloag accourt d'Ariano, dans la nuit, avec de la troupe et du canon; mais les réactionnaires se retirent après l'échange de quelques coups de fusils, ayant tué un artilleur.

Combat du pont de San Venère, près Lacedonia; un détachement de vingt bersaillers, commandé par le jeune sous-lieutenant Paul Pizzi, est massacré tout entier par les brigands.

11. Combat des Corcelle, près Agerola; aux environs île Melfi, Basilicate; sur les liauleurs de Torciero; de Montecalvo; de San Gregorio; de Taverna San Felice, et de Roccarasa, Abruzzes.

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12. Combat de San Bartoloineo in Galdo; les brigands occupent et défendent pendant quatre heures cette petite ville.

Les brigands occupent pendant deux jours la commune de Montefalcione, où toutes les sympathies sont pour eux, malgré les atrocités commises, l'année dernière par les Hongrois et le préfet de Lnca, pour réprimer le brigandage. Les écussons de Savoie et les statues de Victor-Emmanuel et de Garibaldi sont mises en pièces dans la boue.

Du 13 au 14. De petites bandes se montrent aux environs de Naples; une d'elles entre à Chiaiano, village de la banlieue de la capitale. L'alarme est excessive parmi les piémontistes. Les cinquième, sixième, septième et huitième bataillons de la garde nationale et quarante gendarmes, sous les ordres du général Carrano, sont envoyés à Capodimonte contre une forte bande de réactionnaires.

15. Au pont de San Tommaso, le courrier est dévalisé; deux personnes sont tuée;.

Du 16 au 22. Depuis quatre mois, la principauté de Bénévent et la province d'Avellino font parcourues par une bande de cinquante réactionnaires à cheval, qui lèvent de grosses impositions sur les propriétaires piémontistes, comme à Buonalbergo, San Giorgio, Ginestra, Montecalvo, etc.

Le courrier de Foggia est arrêté, et les correspondances sont brûlées sur la route.

Le courrier de Naples à San Severo (Fouilles), est arrêté et dépouillé.

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23.A Pescopagano, chef-lieu de canton de Basilicate, les brigands exercent des représailles contre les propriétés des piémontistes et des députés.

Au bois de Rocca-Rainola, près Nola, sont fusillés Antonio Gasparo, de Conca, Nicolas Martelli, de Vico, et un inconnu, arrêtés par les bersaillers et suspects d'espionnage.

Un détachement de gendarmes et de soldats du 12e de ligne arrête a Campoli trois individus et les fusille (1).

24. Le brigand Michel Notarangelo est pris et passé par les armes.

Crocco et ses cinq cents hommes occupent les bois de Monticchio, où les populations envoient des vivres en abondance,

25. Jean de Martino, déserteur, Augustin Jamsotta et deux femmes sont arrêtés et fusillés à Sant'Agata de'Goti.

Du 26 au 30. Les bandes deviennent journellement plus audacieuses. Les Piémontais soutiennent de nombreux combats, mais sans résultat aucun; car, selon l'expression des journaux officiels et officieux, «les brigands n'engagent jamais de sérieux combat, et fuient avec la plus grande agilité; ils ont la connaissance des pays et les sympathies des populations.»

(1) Journal officiel de Naples.

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OCTOBRE.

1. Rapport officiel du général piémontais comte Mazé de la Roche, commandant dans les Fouilles (1):

«Dans la seule province de Foggia, pendant ces onze derniers jours, il y a eu treize combats entre les troupes et les réactionnaires, et quatre de ces derniers ont été fusillés sans procès.»

2. M. Vincent Caferro, de Siculiana, chassait dans les champs; la troupe survient; le chasseur, craignant quelque mâle aventure, se réfugie chez un paysan, à qui il remet son fusil. Les Piémontais arrivent après le départ de M. Caferro, trouvent un fusil chez le paysan, et, d'ordre du préfet, le fusillent (2).

Du 4 au 12.Le journal de Turin, le Diritto (3), publie les lettres de quelques députés qui représentent l'état des provinces méridionales comme plus que déplorable: les récoltes sont brûlées, les paysans ne travaillent plus, les propriétaires sont ruinés, et les brigands s'avancent jusque sous les murs des villes. Il y a des bandes de deux cents réactionnaires à cheval.

(1) Ce rapport a été publié par la plupart des journaux de Turin,

(2) Discours du député Nicotera, séance parlementaire du 25 novembre.

(3) Numéro 310.


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La liberté et la vie tiennent au caprice d'un général, d'un caporal ou d'un simple soldat. On persécute les honnêtes gens, et on protège la canaille. On croirait que les agents du gouvernement ne cherchent qu'à le rendre odieux et impossible.

5. Les troupes d'Andretta, province d'Avellino, escortant un certain nombre de prisonniers, sont attaquées par vingt brigands près de Guardia Lombarda. Les brigands sont repoussés et abandonnent un cheval.

13. Fumel se rend à San Fili (Calabre), pour opérer contre les brigands. Le journal de la province, le Calabrese, « attend en toute sécurité les faits qui seront dignes comme toujours de l'illustre commandant Fumel.»

Du 14 au 26. Le brigandage se rit de l'état de siège; le canton de Toricilla est parcouru par la bande de Dominique Fanii. M. Emidio Sambuco vient d'être massacré comme piémontiste. M. Garzia Pelliciotti vient de se brûler la cervelle pour pour ne pas payer aux brigands une forte rançon.

Trente-sept réactionnaires débarquent sans être inquiétés sur la plage de Lesina, sans armes et «ans munitions; mais, arrivés à Apricena, ils se trouvent fournis de tout ce qui leur manquait, et vont grossir les diverses bandes des Fouilles (1).

Une bande de réactionnaires réapparaît dans les montagnes d'Amalfl, et, le 26, entre dans Ravello, où elle célèbre 1° fête de Saint-Bonaventure

(1) Lettre du député Ricciardi, publiée par le Diritto.

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et prend part a un somptueux banquet. La garde nationale d'Amalfi arrive à Ravello, mais trop tard.

27. Onofrio Santoro, Thomas Sciortino, Gaëtan et Onofrio Scardina sont pris les armes à la main au pas de Torremuzza et fusillés le lendemain à Baghcria (1).

NOVEMBRE.

Le capitaine Rota et le lieutenant Perrino, avec un détachement du 36e de ligne, attaquent la bande des bois de Santa Croce d'Imagliano, qui séparent le comté de Molise et les Pouilles. Les deux officiers et vingt soldats sont tués dans le combat; onze soldats disparaissent; cinq hommes seulement parviennent à se sauver. Un détachement d'infanterie et de cavalerie est envoyé de Caserte sous les ordres du capitaine Berti; une première rencontre avec les réactionnaires a lieu dans le bois de Petacciato; trois brigands sont pris et fusillés à Termoli.

A San Fele, des bersagliers et des gardes nationaux arrêtent et fusillent le brigand Carlo la Rossa.

Dix paysans des Abruzzes, selon l'ancienne coutume du pays vont travailler aux champs sur la frontière pontificale. Après le travail, ils s'étendent sur-la terre et s'endorment. Un détachement de Piémontais, violant le territoire romain, arrête sept de ces laboureurs, les emmène et les fusille comme brigands.

(1) Journal officielle Sicile, 2 7 octobre.

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6. Aux environs de Foggia, les lanciers de Montebello, attaqués par les brigands, en tuent vingt et mettent les autres en fuite (1).

7. Le commandant piémontais Aychelburg prend et fusille, près de Melfi, le brigand Frecina de Bisaccia.

Un détachement de 50 gardes mobiles fusille quatre porchers de Pedace (Calahre), coupables d'avoir donné de fausses informations sur les brigands.

8. Le capitaine Rossi, à la tête d'un détachement de soldats du 5oe, de gardes nationaux et de gendarmes, rencontre aux environs de San Severo (Pouilles), une grosse bande de réactionnaires à cheval, tous anciens soldats de l'armée royale napolitaine; quatre gardes nationaux et un gendarme sont tués. A la tombée de la nuit, les brigands s'égaillent et disparaissent.

Du 9 au 10. Les bandes Pio et Andreotti sont attaquées dans le bois de Monticchio par la brigade du général Franzini, nn escadron de chevau-légers de Lucques, la 1" compagnie du 13e bersagliers, une compagnie du 33e de ligne, et un bataillon du même régiment commandé par le major Brera. Les brigands perdent vingt-trois chevaux équipés et beaucoup de vivres, de munitions et d'ustensiles de cuisine.

11. Un détachement piémontais surprend, endormi dans une ferme près de Celliano, principauté de Salerne,

(1) Gazzetta di 'Farina

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un vieillard de soixante-douze ans, nommé Joseph Vecchi, le conduit en prison et le fusille le lendemain, comme coupable d'avoir voulu embrasser son fils qui fait partie des bandes réactionnaires.

On lit dans le Journal officiel de Naples: «Nous annonçons avec plaisir que le colonel Fumel a déjà commencé ses opérations contre le brigandage. Nous pouvons encore annoncer qu'à San Fele on a déjà commencé à fusiller les voleurs occultes et les correspondants des brigands.»

13. Les environs de Tarente sont parcourus par des bandes armées; Staiti et Crispiani sont complétement en leur pouvoir.

Du 14 au 15.On lit dans le Journal officiel de Naples: «Outre les réactionnaires tombés dans les rencontres avec les troupes, du mois de septembre au mois de novembre, quatre-vingt-dix brigands ou suspects ont été fusillés.»

17. Une bande de réactionnaires envahit la commune de Grottaglie aux cris de: Vive François II! s'empare des armes de la garde nationale qui s'est enfuie, délivre les prisonniers et saccage les maisons des piémontistes épouvantés. La population est favorable aux brigands qui restent à Grottaglie jusqu'au lendemain. Les troupes arrivent avec les autorités de Tarente, mais trop tard. Le maire est arrêté comme suspect d'avoir favorisé le mouvement réactionnaire. Il faut dire en effet que les brigands avaient été reçus avec force illuminations, et que le maire et les adjoints étalent venus au devant d'eux en tète de la population.

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18. La garde nationale de Francavilla se tient sous les armes pour éviter le sort de Grottaglie, et pour imposer au peuple qui semble prêt à acclamer les brigands, qu'on peut apercevoir à une demi-lieue de la commuue.

10. Antoine de Lucu, capitaine de la garde nationale de Sant'Anastasia, près Naples, promet 400 francs au paysan Xavier Sbaretella, s'il veut lui livrer trois soldats débandés de l'armée royale napolitaine, cachés dans les environs. Le paysan accep'e, et feignant comme d'habitude de porter à ces malheureux les vivres que leur envoyait leur famille, il en tue deux et traîne leurs cadavres jusque sur la place de Saut' Anastasia, où ils restent exposés jusque dans la soirée du 20. Le lendemain, le misérable touche le prix du sang et le dépense en orgies avec des soldats piémontais.

21. Dans la nuit, les réactionnaires, commandés par Enrico Romano de Gioia et par la Veneziana, entrent dans Carovigno au milieu des acclamations et des illuminations; on n'entend que les cris de: Vive François II! Les bustes de Victor-Emmanuel et de Garibaldi sont brisés, et les gardes nationaux désarmés; mais les brigands ne molestent en rien ceux des habitants mêmes qu'on leur signale comme piémontistes. Dans la matinée, la bande entière, suivie de la population, sort de Carovigno, et va prendre part aux fêtes religieuses dans l'église de la Madone du Belvédère.

La garde nationale de Melito. commandée par le çapitaine Catunio, se bat pendant trois heures contre une bande de vingt réactionnaires, en blesse un, et lui prend trois chevaux.

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22. Combat entre les réactionnaires et la garde nationale de Villa-Nova, province d'Avellino.

Le député Castro-Médiano (1)dit au parlement qu'il a vu des gardes nationaux de la commune de Cellino, à qui les brigands ont outrageusement coupé les oreilles.

Le député Massari ajoute que, dans l'arrondissement de Tarente, les brigands assistent paisiblement aux feux d'artifice qu'on tire dans les campagnes les jours de fêle. Le député Ara dit que les habitants sont désarmés, mais que s'ils ne sont pas brigands, ils sont pour le moins les amis des brigands.

Combat de San Pietro a Bevagna, entre la garde nationale de Manduria et cinquante réactionnaires à cheval.

Une autre bande de cent cinquante réactionnaires à cheval menace Manduria; un escadron des chevau-légers de Lucques est envoyé contre elle, mais n'ose l'attaquer (2).

23. Le général Franzini, à la tête de soixante-quinze chevau-légers de Lucques, poursuit sans relâche pendant douze lieues une bande de réactionnaires à cheval, qui perd dix-huit hommes et quatre chevaux.

25. La route de Naples à Lecce est au pouvoir de nombreuses bandes de brigands; les cou.-riers soat eu retard d'une semaine.

(1) Député des Fouilles.

(2) Il Cittadino, journal do Lecce, lettre du député Nicolas Schiavone.

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Fumel fait fusiller quatre paysans suspects de connivence avec les brigands.

Le vieux brigand Dominique Andreoli, après une résistance acharnée, e-t blessé et pris par le chef de la police de Lanciano (Abruzzes), et fusillé deux heures après sur la place publique.

Un détachement de la garde nationale de Rionero et. de gendarmes attaque les brigands dans les bois de Monticchio, en tue un, en blesse plusieurs et prend quatre chevaux et des vivres.

26. Dans la séance parlementaire d'aujourd'hui, le député Ricciardi déclare que le député napolitain Cannavina n'a pu quitter Campo-Basso pour venir à Turin, malgré son escorte de cent cinquante soldats, parce que, à une lieue à peine de Campo-Basso, ils ont dû reculer devant une bande de plus de trois cents brigands.

Dans la même séance parlementaire, le président du conseil des ministres, Ralazzi, dit qu'une grosse bande de brigands des Pouilles avait promis de se rendre à condition d'avoir la vie sauve, et que celte grâce avait été promise à ces brigands, mais qu'ils changèrent d'avis et la refusèrent.

27. Dix-huit cents gendarmes de renfort sont envoyés dans les provinces méridionales.

Deux soldats débandés se présentent spontanément à l'officier piémontais qui commande à San Germano, se fiant à là double amnistie royale qui a été proclamée; le jour même on les fusille, et comme l'un d'eux, quoique criblé de balles, résistait encore à ses bourreaux, l'officier piémontais l'achève à coups de revolver.


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263

Une forte bande de réactionnaires menace San Vito, province de Lecce.

28. Trente fourgons piémontais, allant de Naples dans les Pouilles, sont arrêtés et dévalisés par les brigands.

29. Quarante fourgons sont arrêtés sur la méme roule et confisqués par les réactionnaires armés.

30. Le général Franzini écrit an maire de Flumeri, que le brigandage relève la tête, et qu'il va prendre dès mesures énergiques de répression.

Un télégramme officiel, en date de Sant'Angelo de Lombardi rapporte que le général Franzini, i la tôle de sa brigade, à Vallo, à Bovino, Formicoso et Matera, dans divers engagement avec les brigands, en a tué vingt-lrois, leur a fait beaucoup de prLonniers et leur a pi is des armes et des munitions.

A Sferracavallo, près Palerme, aux portes d'un poste de police, quarante fourgons sont dévalisés pendant lu nuit.

DÉCEMBRE.

1. On lit dans la Gazette officielle de Turin: «Environ cent cinquante brigands, commandés par leur chef, le sergent Romano, s'étaient fortifiés dans la ferme des Dominicains, entre Alberobello et Noci, arrondissement d'Altamura (Terre de Bari).

264

La 16e compagnie du 10" régiment les a attaqués aujourd'hui à trois heures de l'après-midi, et a pris la ferme d'assaut, tuant quatre brigands et en prenant un certain nombre. Soixante-dix chevaux équipés sont tombés au pouvoir de la troupe; dix autres chevaux sont blessés ou morts; les brigands ont abandonné des armes et autres objets; la bande est dispersée et en fuite. Parmi les blessés sont deux chefs de brigands, Valente et Pizzichicchio. Du côté de la troupe, deux hommes ont été blessés (1).»

Les journaux napolitains ajoutent que dix brigands faits prisonniers ont été fusillés sur-le-champ, et que le reste de la bande, s'étant immédiatement reconstitué, a envoyé un défi aux troupes; puis elle s'est partagée en deux bandes, dont l'une, commandée par Capraro, parcourt la Basilicate, et l'autre, par Gioja, la province de Bari, sans que les gardes nationales réussissent à les atteindre.

2. Le courrier d'Avellino est arrêté et dépouillé de la correspondance officielle par une bande de réactionnaires à cheval.

Une bande de brigands s'arrête à peu de distance de Montrone,

(1) Nous avons dit que nous empruntions les détails de cette guerre douloureuse aux organes rie l'annexion. Rien ne dévoile plus clairement, à notre avis, l'esprit de fanfaronnade et de mensonge qui dicte les bulletins piémontais que cet impudent récit de la Gazelle officielle du royaume d'Italie. L'atroce et l'absurde remplissent simultanément la lugubre histoire de l'invasion subalpine. Nous ne ferons pas à nos lecteurs l'injure de relever les ridicules assertions de pareils bulletins.

265

province de Bari, et envoie en éclaireurs quatre de ses hommes qui, assurés des dispositions sympathiques de la garde nationale, continuent paisiblement leur étape jusqu'à Mangiavacche, tout près de Bari.

3. M. Januarelli, capitaine de la garde mobile de Potenza, attaque sur le mont Pallino la bande d'Antonio Frauco, la met en fuite, fait un prisonnier et le fusille.

4. La bande commandée par d'Elia, poursuivie pendant deux jours par les troupes d'Ariano, de Campo-Reale et d'Orsara, accepte le combat dans le bois de Magliano, et perd trois hommes, six.chevaux, des armes, des munitions et des vêtements.

Combat près de Canosa (Fouilles), à l'avantage des réactionnaires.

7. La garde nationale de Bonefro, comté de Molise, fusille Dominique Antoine Vèrna, de Sant'Elia, pris les armes à la main dans le bois de Ficarola,

8. La garde nationale de Bojano arrête deux brigands et les fusille.

A Lanciano (Abruzzes), les Piémontais fusillent un vieillard de quatre-vingt-six ans, suspect de connivence avec ses deux fils qui font partie des bandes réactionnaires.

9. Une partie de la bande Caruso enlève vingt-huit bœufs appartenant au piémontiste Paolucci.

266

10. Dans la province de Cosenza, Fumel tue cinq brigands dans différents engagements, fait cinquante-deux prisonniers et en fusille dix-sept.

13. A Gioja (Calabre), un inconnu, suspect de faire partie de la bande d'Antoine Pellegrino, est pris et fusillé.

14.Les bersaillers de Pal ma fusillent Biaise Simonetti, surnommé Capotiello, ancien soldat de l'armée royale napolitaine.

La garde nationale de Faëlo fusille deux brigands de la bande de Carlo Addosio.

17. Pilone fait fusiller deux de ses brigands, convaincus de vol au préjudice d'un paysan de Torricello.

A Conca, près Amalfi, une bande de seize réactionnaires désarme le poste de la garde nationale et emporte trente fusils et des munitions.

Combat aux environs de Palata, comté de Molise; le capitaine Fersa, avec un détachement du 26e bataillon de bersaillers et de gardes mobiles, bat la bande Giorgi et lui tue cinq hommes.

Du 18 au 20. Séances secrètes du parlement de Turin. Les rapports officiels établissent que, depuis l'invasion, le royaume des Deux-Siciles a coûté déjà au royaume de Piémont quinze mille hommes, tués ou mis hors de combat. Le brigandage prend des proportions telles, que le parlement décide l'envoi, dans les provinces méridionales, d'une commission choisie dans son sein et chargée d'étudier la situation de l'État napolitain.

267

Quelque temps après, la commission parlementaire du brigandage part pour le Midi, et, malgré son escorte de deux escadrons de chevau-légers, il s'en faut de peu, à plusieurs reprises, qu'elle ne tombe au pouvoir des bandes. Elle eût pu étudier ainsi la question d'après nature. Celte commission était d'ailleurs morte sons le ridicule avant son départ même. A- Bari, le peuple l'a reçue à coups de pierres; à Foggia à coups de siffles, etc.

La garde nationale de Mignano (Terre de Labour), arrête et fusille Alexis Puoco, brigand de la bande du mont Cesima.

Le commissaire de recrutement et le secrétaire du conseil, Gaétan Giampietro, escortés par quatre-vingts bersaillers piémontais, sortent de Torre-Maggiore (Fouilles), et. tombent, à un kilomètre de la ville, dans une forte bande de réactionnaires à cheval. Aux premiers coups de fusil, le capitaine piémontais est tué raide; un sous-lieutenant prend le commandement du détachement; le combat se prolonge; le secrétaire du conseil de reclutement, à moitié mort de peur, se jette et se cache dans un fossé; puis il en sort à plat ventre, et court demander du renfort. La garde nationale arrive bientôt, en même temps que cent soldais piémontais, qui venaient de couper le pont de Civitate, pour barrer la retraite aux brigands; mais ceux-ci se retirent en bon ordre, sans avoir perdu un seul des leurs.

Les brigands égorgent dix-sept buffles et vingt-six vaches appartenant au piémontiste Paolucci, pour qui c'est une nouvelle perle de 3(1,000 francs.

La garde nationale de Vallata rencontre, sur le Formicoso, la bande Andreotti, prend un brigand et le fusille sur place.

268

Divers chefs de bandes, entre autres Galardi, se présentent spontanément aux autorités piémontaises, promettant de guider les troupes jusqu'aux campements des brigands. On s'aperçoit bientôt que ces prétendues soumissions ne sont que des stratagèmes, à l'aide desquels les bandes se grossissent de nouvelles recrues.

Du 21 au 23. Un détachement de cavalerie et de garde nationale atlaque et brûle la ferme de Barcana, près Venosa (Basilicate), où s'est réfugiés la bande de Carbone. Quatre brigands sont tombés dans le combat, et quinze sont brûlés dans la ferme. Onze chevaux tombent au pouvoir des Piémontais, qui ne perdent qu'un homme et n'ont qu'un blessé.

Une forte bande envahit la ferme de Nicastro, territoire de Lucera, et y fait une réquisition de cinquante chevaux.

Dans le bois de Brienza (Basilicate), les gendarmes piémontais et les gardes nationaux rencontrent quatre brigands, dont trois sont tués en se défendant, et l'autre, pris et fusillé.

24. Aux environs de Vallo, principauté de Salerne, court engagement à l'avantage des brigands; plusieurs gendarmes sont tués.

Combat d'Ariano, entre les brigands de la bande Petrozzi et les gardes mobiles.

25. A Ceglie (Rouilles), un bon nombre de réactionnaires armés se réunissent, arborent le drapeau royal napolitain, et défient les troupes piémontaises.

269

Chaque jour amène de nouveaux combats sur le territoire de Bari.

26. Combat d'Orsara.

Les réactionnaires exercent, aux environs de Foggia, de terribles représailles contre les piémontistes.

Le rapport du général La Marmora sur le brigandage ne signalait l'existence que d'environ quatre cents brigands dans le royaume des Deux-Siciles. Le préfet de Foggia publie le tableau nominatif de cinq cent neuf individus, de sa seule province, appartenant aux bandes réactionnaires.

Le préfet de Lecce, par un avis public, promet une récompense de cinq cents francs à quiconque arrêtera un chef de brigands, et deux cents francs à qui arrêtera un simple brigand, un soldat débandé ou un déserteur.

27. Nicolas de Morni est fusillé, à Grottaglie, comma brigand.

Combat de Finelli, près Chieti; un détachement du 48e de ligne bat une petite bande de réactionnaires, lui tue deux hommes, lui prend quatorze chevaux, et fait cinq prisonniers, qui sont fusillés sur place.

28. Cinq fourgons de marée, envoyés de Lesina à Naples, sont confisqués par les brigands, qui prennent aussi les chevaux.

29. Circulaire du ministre de l'intérieur, donnant aux préfets des provinces napolitaines la faculté de dissoudre tous les municipes et toutes les gardes nationales qui refusent de concourir à la destruction des bandes armées.

270

LES LIEUTENANTS SUBALPINS

«... Ici nous voulons établir un gouvernement en donne les garanties d'une vie libre aux peuples, et de probité sévère a l'opinion publique. Je compte sur le concours efficace de tous les honnêtes gens. Partout où la loi met un frein au pouvoir et garantit! liberté, le gouvernement peut autant pour le bien public que le peuple pour la vertu Nous devons démontrer a l'Europe que, si la force irrésistible des événements a surmonté les traités établis pour le malheur séculaire de l'Italie, nous savons restaurer dans la nation unie l'empire de ces dogmes immuables sans lesquels toute société est malade, sans lesquels toute autorité combattue est incertaine....

( Proclamation du roi Victor-Emmanuel aux peuple des Deux-Siciles.)


Ordre du jour du général piémontais Cugia, préfet de Palerme.

Palerme, 20 août 1862.

ARTICLE 1°

Le territoire de l'île de Sicile est mis en état de siège.

ARTICLE 2.

Les généraux commandant les troupes de la division de Palerme et des subdivisions de Messine et de Syracuse, réuniront, dans les limites de leurs circonscriptions respectives, les pouvoirs militaires et civils.


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272

ARTICLE 3.

Toute bande armée et toute réunion tumultueuse seront dissoutes par la force.

ARTICLE 4.

Les mêmes pouvoirs sont conférés au général commandant les troupes d'opération, sur le territoire occupé par elles.

ARTICLE 5..

La liberté de la presse est suspendue pour les journaux et autres feuilles volantes. La police procédera à l'arrestation de quiconque imprimera ou distribuera tie semblables feuilles.

Ordre du jour du général piémontais Brignone.

Messine, 22 août 1862.

ARTICLE 1°

Il sera procédé à un désarmement général immédiat dans les provinces de Palerme et dans toute la Sicile.

ARTICLE 2.

Sont prohibées l'exposition et la vente de toute espèce d'armes offensives.

273

ARTICLE 3.

Toutes les armes seront consignées, dans les trois jours, entre les mains de l'autorité.

ARTICLE 4.

Les contrevenants seront arrêtés, et, selon le cas, fusillés.

Ordre du jour du général piémontais

de La Marmora, préfet de Naples.

Naples, 85 août 1862

ARTICLE 1°

Le territoire des seize provinces napolitaines et des Iles qui en dépendent est mis en état de siège.

ARTICLE 2.

Les généraux commandants de divisions ou de zones militaires réuniront les pouvoirs politiques et militaires, dans les limites de leurs circonscriptions territoriales respectives.

ARTICLE 3.

Tout attroupement factieux et toute réunion tumultueuse seront dissous par la force.

274

ARTICLE 4.

Le port ou la détention non autorisée d'armes de toutes sortes est défendu, sous peine d'arrestation. Les détenteurs d'armes devront donc les consigner, dans les trois jours qui suivront la publication de cet arrêté, entre les mains de l'autorité militaire dont ils dépendant.

ARTICLE 5°.

Nulle impression typographique, publication ou distribution de journal, feuilles volantes ou semblables, ne peut avoir lieu sans une autorisation spéciale de l'autorité politique du lieu, laquelle aura en outre la faculté de saisir, suspendre ou supprimer quelque publication que ce soit.

Ordre du jour du député Gaetan del Giudice, préfet de la Capitanate.

Foggia. 18 avril 1862.

Pour hâter l'extinction du brigandage, le préfet est dans l'intention ds recourir à la coopération des garde? à cheval des propriétés privées. Désunis, ils ne peuvent rien, ni pour eux-mêmes, ni pour ceux qu'ils servent; et d'ailleurs, devant le nombre toujours croissant des voleurs, ils ont été forcés d'abandonner les campagnes et de se renfermer dans les villes.

275

J'ai pensé à en former des escouades, qui pourront rendre d'importants services à la sécurité publique, vu la pratique qu'ont ces hommes des sentiers les plus écartés. Les propriétaires, j'en suis sûr, ne manqueront pas de'se rendre à cette invitation du gouvernement. J'ai engagé le commandant de la province, colonel Materazzo, à recueillir les noms de ceux qui se présenteront et à les organiser par escouades. Les gardes doivent avoir des armes et un cheval.

Les premiers citoyens ont volontairement ouvert une souscription pour subvenir aux frais de cette nouvelle milice, et, en deux jours, dans la seule ville de Foggia, elle a atteint le chiffre de 5,000 ducats. Les autres villes suivront ce patriotique exemple. Ainsi les forces vives du pays en se réunissant pourront nous rendre promptement la sécurité intérieure que nous avons perdue (1).

(1) On sait que le gouvernement subalpin a décrété des souscriptions volontaires en faveur des victimes du brigandage. Cet ordre du jour préfectoral et ce décret ministériel ne sont-ils pas d'irréfutables aveux d'impuissance?

275

Ordre du jour du directeur de la police

de Païenne, Achille Basile.

Palerme, 4 janvier 1862, 8 h. du matin.

Citoyens,

Un officier de l'armée royale, venant de Castellammare, apporte les nouvelles suivantes:

«Les troupes commandées par le major-général Quintini, débarquées à Castellammare, ont attaqué les insurgés qu'ils ont mis en fuite. D'autres troupes ont été expédiées, ce matin, pour achever de détruire entièrement tout vestige de rébellion. Déjà on procède à de rigoureuses exécutions à Castellammare.

» Continuez à garder votre calme habituel, et comptez sur la sollicitude et l'énergie du gouvernement.»

Ordre du jour du lieutenant-colonel piémontais Fantoni, commandant les troupes de Lucera.

Lucera, 9 février 1862.

État-major du détachement du 8e régiment de ligne eu garnison à Lucera.

En exécution des ordres de M. le préfet de la Capitanate, ayant pour but d'arriver par les moyens les plus efficaces à la prompte destruction du brigandage.

Le soussigné arrête:

277

ARTICLE 1° .

Dorénavant personne ne pourra entrer dans les bois de Dragonara, de Sant'Agata, de Selvanera, du Gargano, de Santa Maria, de Pietra, de Motta, de Volturara, de Volturino, de Sammarco La Catola, de Celenza, de Carlentino, de Biccari, de Vetruscelle et de Caserotte (1).

ARTICLE 2.

Chaque propriétaire, intendant ou fermier sera tenu, immédiatement après la publication du présent avis, de faire retirer desdites forêts tous les travailleurs, bergers, chevriers, etc., qui s'y pourraient trouver, ainsi que les troupeaux; ils seront tenus également d'abattre toutes les bergeries et les cabanes qui y ont été dressées.

ARTICLE 3.

Dorénavant personne ne pourra importer des pays voisins aucun comestible à l'usage des paysans, et les paysans ne pourront avoir en leur possession que la quantité de vivres nécessaire à la nourriture d'une journée pour chaque personne de leur famille.

(1) Il faut connaître la situation topographique des bois ci-désignés pour comprendre toute l'horreur de cet ordre du jour féroce. Des millions d'habitants, appartenant aux Abruzzes, aux Fouilles et au comté de Molise, vivent littéralement du rapport de ces bois. La défense d'y pénétrer équivaut à un arrêt de mort, de mort par inanition, puisque, en outre, ces bois barrent presque entièrement la terre de Naples.

278

ARTICLE 4.

Les contrevenants an présent ordre, exécutoire deux jours après la publication, seront, sans exception de temps, de lieu ou de personne, traités comme des brigands, et comme tels, fusillés (1).

En publiant le présent ordre, le soussigné invite les propriétaires à en donner promptement connaissance aux personnes qu'ils emploient, afin qu'elles puissent se mettre en mesure d'éviter les rigueurs dont elles sont menacées, les avertissant en même temps que le gouvernement sera inexorable dans leur application.

Ordre du jour du commandant piémontais Fumel.

Ciro, 12 février 1862.

Le soussigné, chargé de la destruction du brigandage, annonce que quiconque donnera asile ou des moyens de subsistance ou de défense aux brigands sera instantanément fusillé, ainsi que ceux qui, voyant les brigands ou sachant l'endroit de leur demeure, n'en donneront pas connaissance à la force publique, ou aux autorités civiles et militaires.

(1) Un ministre piémontais disait en riant à un diplomate anglais qui blâmait sévèrement les ordres du jour des lieutenants subalpin»: «Le» Deux-Siciles, ce sont nos Indes, a nous!»


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279

Il est bon que, pour la garde des animaux, on établisse plusieurs centres avec une force armée suffisante; car le cas de force majeure ne sera pas considéré comme une excuse valable.

Toutes les chaumières doivent être brûlées; les tours et les maisons de campagne, qui ne sont pas habitées ou occupées par la force, doivent être découvertes en trois jours, ou l'on doit en murer toutes les portes. Après ce terme elles seront brûlées, et seront tués tous les animaux qui ne seront pas gardés par une force suffisante.

Il est aussi défendu de porter du pain ou des vivres hors des murs de la commune, et quiconque contreviendra à cet ordre sera considéré comme complice des brigands. Provisoirement, et pour cette circonstance, les maires sont autorisés à accorder des ports d'armes sous la responsabilité des propriétaires qui en feront la demande.

La chasse aussi est provisoirement interdite, et l'on ne pourra faire f*eu que pour donner avis aux postes armés de la présence ou de la fuite des brigands.

La garde nationale est responsable du territoire de sa propre commune. Plusieurs propriétaires de Longobucco ont fixé une récompense de six cents ducats pour la destruction de la bande Palmo.

Le soussigné ne reconnaît aujourd'hui que deux partis: brigands et contre-brigands. Ceux qui veulent rester indifférents seront considérés comme brigands, et des mesures énergiques seront prises contre eux, car c'est un crime de se tenir à l'écart dans les cas d'urgence.

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Ordre du jour du commandant piémontais Fumel.

Celico, 1" mars 1862.

Le soussigné, chargé de la destruction du brigandage, promet une récompense de cent francs par brigand qu'on lui amènera mort ou vif.

Pareille récompense, en outre de la vie sauve, sera donnée au brigand qui aura tué un de ses compagnons.

Le soussigné notifie qu'il fera immédiatement fusiller quiconque donnera aux brigands soit un asile, soit un moyen quelconque de subsistance ou de défense. Sera fusillé immédiatement quiconque, ayant vu des brigands ou connaissant le lieu de leur retraite, n'en aura pas donné sans retard avis à la force publique et aux autorités civiles et militaires.

Toutes les meules de paille doivent être brûlées. Les tours et les maisons de campagne qui sont habitées et gardées doivent être découvertes dans les trois jours, et avoir leurs ouvertures murées. Passé ce délai, elles seront brûlées, de même que seront abattus tous les animaux que ne protégera pas la force publique.

Il reste interdit de porter hors du village du pain et quelques vivres que ce soient; le contrevenant sera considéré comme complice des brigands.

L'exercice de la chasse est prohibé.

La garde nationale est responsable sur le territoire de sa commune.

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Le soussigné n'entend voir en cette circonstance que des brigands et des contre-brigands. Aussi considèrera-t-il comme brigands tous ceux qui resteront indifférents et prendra-t-il contre eux d'énergiques mesures.

Seront considérés comme brigands les soldats débandés qui ne se seront pas présentés dans un délai de quatre jours (1).

Ordre du jour du général piémontais Bojolo (2), commandant des troupes actives dans la province de Capitanate.

Foggia, 29 août 1862.

Par suite de la déclaration de l'état de siège, j'assume dans cette province les pouvoirs politiques et militaires, et me prévalant des pouvoirs à moi conférés par la susdite proclamation, j'ordonne ce qui suit:

ARTICLE 1er,

Il est défendu à qui que ce soit de vendre des armes et des munitions de guerre d'aucune sorte.

(1) Un membre du Parlement anglais a qualifié ces ordres du jour de chefs-d'œuvre d'inhumanité.

(2) Le nom de ce lieutenant subalpin a pour étymologie Bnja, qui veut dire bourreau.

282

ARTICLE 2.

Le port et la détention non autorisés d'armes et munitions de toutes sortes sont défendus sous peine d'arrestation.

ARTICLE 3.

Sera considéré comme complice du brigandage et puni comme tel (c'est-à-dire fusillé), quiconque sera trouvé porteur d'armes, ou de munitions, ou de vivres, ou de vêtements, enfin de tontes choses destinées à être données en rançon aux brigands.

ARTICLE 4.

Dans chaque ville ou village, de onze heures du soir jusqu'à quatre heures du matin, il est défendu de parcourir les rues et les routes sans une permission spéciale de l'autorité militaire, ou sans de graves motifs parfaitement justifiables. Dans les pays où il n'y a pas de troupes, cee permissions seront données par les maires.

ARTICLE 5.

Toute personne en voyage devra être munie d'une carto de circulation, sans quoi elle sera arrêtée. Les boulangeries éparses dans les campagnes seront fermées à partir du premier septembre, et, à partir de ce jour, les ustensiles qu'on y trouvera seront saisis, et les personnes qui y servent seront mises en état d'arrestation.

283

J'espère que les gardes nationales joindront leurs efforts 'à ceux de la troupe pour parvenir dans le plus bref délai au but si désiré par tous (1).

Ordre du jour du commandant piémontais Martini.

Montesantangelo (2), 16 septembre 180-2.

Tous les propriétaires, fermiers, laboureurs, bergers, abandonneront leurs propriétés, leurs bestiaux, leur? champs, leurs industries, tout enfin, et se retireront dans les vingt-quatre heures, dans les pays où ils ont domicile.

Ceux qui ne se conformeront pas au présent ordre seront arrêtés et conduits en prison.

Ordre du jour du commandeur Nicolas de Luca, préfet de la province d'Avellino.

Avellino, 11 octobre rca.

Dans le but de mettre un terme au brigandage, et aussi afin d'empêcher qu'il ne reçoive ultérieurement

(1) On comprend l'excès de zèle de la plupart des lieutenants subalpins, quand on sait que le général della Chiesa, commandant les provinces du Salerne et Basilicale, et le général Doda, commandant la Capitanate, ont été mis en disponibilité pour n'avoir pas montré assez if énergie dans la destruction du brigandage. Pour les mêmes raisons, le colonel Brienzi, commandant militaire des Fouilles,»st également mis en disponibilité. Mars 1862.

(2) Pouilles.

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des secours d'hommes, d'armes, de vivres et d'argent, le soussigné invite les maires à observer et faire observer les suivantes dispositions, en leur donnant la plus grande publicité.

ARTICLE 1er.

Les maires et les commandants des gardes nationales sont tenus, sous la plus sévère responsabilité, de désigner dans un délai de six jours, au préfet de la province, tous ceux qui sont en connivence ou en correspondance avec les brigands de leur commune. La faculté de les désigner est également attribuée à tout honnête citoyen, quand toutefois il pourra irréfragablement prouver qu'il appartient à la classe de ceux qui auraient le devoir de dénoncer les susdits.

ARTICLE 2.

Est remise en vigueur la circulaire préfectorale enjoignant aux maires de dresser le tableau de tous les absents, en indiquant le lieu de leur séjour et le motif de leur absence. Ce tab'eau devra être dressé dans les cinq jours, et copie en sera envoyée au préfet, aux sous-préfets, et. aux commandants militaires de l'a province. Une colonne sera laissée en blanc, pour ajouter les noms des individus qui s'absenteraient après la formation de celte liste, dans lequel cas ils devraient être immédiatement dénoncés aux autorités susdites. Cette liste comprendra aussi les noms des brigands connus.

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ARTICLE 3.

Les autorités locales devront procéder promptement à l'arrestation ou à l'interrogatoire des brigands et des individus qui, après une absence non justifiée, reviendront dans leur commune.

ARTICLE 4.

Les mêmes autorités devront encore procéder indistinctement à l'arrestation des parents des brigands et voleurs occultes, jusqu'au troisième degré civil, à moins qu'il ne donnent des indications utiles pour découvrir et arrêter leur parent brigand, et que quatre bons citoyens ne garantissent personnellement leur conduite (1).

ARTICLE 5.

Les troupes en tournée fouilleront minutieusement toutes les maisons de campagne, et arrêteront ceux qui détiendraient des objets criminels ou des armes sans autorisation.

ARTICLE 6.

Tout laboureur, qui ira travailler aux champs, devra se munir d'un certificat signé de son maire, où seront indiqués de la façon la plus claire son signalement, l'endroit où est situé le champ qu'il cultive, et le genre de travail qu'il accomplit, afln que les brigands, arrêtés par la force légitime, ne puissent impunément mentir en se déclarant laboureurs.

Tout paysan est responsable pour ses enfants mineurs, pour les femmes et pour les domestiques qui porteraient des vivres ou des munitions aux malfaiteurs.

(1) A première lecture, on n'en croit pas ses yeux.

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ARTICLE 7.

Seront sévèrement punis les laboureurs qui, allant travailler aux champs, emporteraient avec eux plus de vivres qu'il n'en faut pour un seul repas. Les mêmes peines (1) seront appliquées aux paysans qui, avant do semer des céréales quelconques, ne les enduiront pas Je chaux, pour empêcher qu'elles servent do nourriture aux brigands.

ARTICLE 8.

Toutes les maisons de campagne devront être closes et murées dans le délai absolu de quinze jours; les paysans qui les habitent actuellement devront rentrer dans leur commune, oïl, par les soins et sous la responsabilité du conseil municipal, ils seront pourvus d'un logement s'ils n'en ont pas.

Dans lu même délai, ces paysans transporteront dans leur nouvelle habitation tous li urs effets, fourrages, récolte?, et aussi leurs bestiaux qui, en raison de l'espèce et du nombre, seront enfermés dan.3 l'enceinte de la commune, ou dans un endroit assez rapproché pour qu'ils soient en sûreté et ne servent pas de proie et nourriture aux brigands. Tout propriétaire de bestiaux se conformera strictement à cette prescription.

ARTICLE 9.

Les maires, les officiers et soldats de la garde nationale, seront tenus de rembourser les dommages causés par un nombre moindre de dix brigands, ou quand ils ne seront pas accourus à temps pouf les prévenir, ou que ces dommages se seront produits dans le voisinage des habitations,

(1) Lesquelles?.., Cela ne se dit pas, hélas! et se devine!..


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ou qu'avertis ils ne se seront pas empressés de purger leur territoire d'un nombre si restreint de malfaiteurs.

Toute exagération du nombre susdit, tendant à excuser l'inobservation de cette disposition, sera sévèrement punie.

ARTICLE 10.

Seront immédiatement arrêtés, désarmés, rayés des registres de la garde nationale, et destitués de tout emploi public, civil ou ecclésiastique, tous ceux qui refuseront de se rendre aux réquisitions des autorités militaires, aussi bien que des autorités politiques et municipales.

ARTICLE 11.

Des mesures rigoureuses et exceptionnelles (1) seront adoptées contre les espions, recéleurs et correspondants des brigands, ou contre ceux qui seront en possession d'objets incriminés.

ARTICLE 12.

Ceux qui, sans preuves irréfutables, seront néanmoins suspects d'être correspondant?, recéleurs ou espions des brigands, devront être attentivement surveillés.

La même surveillance devra se porter sur le clergé, sur l'attitude duquel il sera hebdomadairement adressé un rapport au préfet, aux sous-préfets et commandants militaires, et des rapports extraordinaires dans les cas graves qui appellent de promptes mesures.

(1) Lesquelles?...

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En même temps, seront signalés à la reconnaissance publique, les prêtres qui, dans l'exercice de leur pieux ministère, prêcheront d'exemple et de conseils l'obéissance au gouvernement, et combattront par la parole les excès de toute sorte qui peuvent troubler la tranquillité publique et privée.

Ordre du jour de M. G. Gemelli, préfet de la province d'Otrante.

Lecce, 23 octobre. 1863.

Il est urgent d'en finir avec les brigands. Dans ce but les suivantes dispositions devront être observées:

ARTICLE 1ER.

Dans chaque commune, et dans le délai de cinq jours, il sera dressé par les maires et les commandants des gardes nationales deux tableaux, l'un de tous ceux qui firent partie des bandes de brigands, ou en furent les fauteurs, les complices, les recéleurs et les correspondants d'une manière quelconque; l'autre de toutes les personnes absentes de leur commune sans un but connu.

ARTICLE 2.

Ces tableaux seront immédiatement transmis au préfet, aux sous-préfets, au commandant militaire de la province et au major commandant la gendarmerie à Lecce.

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ARTICLE 3.

Après cette transmission, toutes les gardes nationales seront immédiatement mises en mouvement. De forts détachements parcoureront, sans autre formalité, le territoire de chaque commune, donnant la chasse aux brigands et se tenant en communication directe entre elles et avec le colonel Marcheti, commandant les colonnes mobiles d'infanterie à Tarente; ainsi que le prescrit la circulaire du 21 courant.

ARTICLE 4.

Les gardes nationales en tournée pourront passer du territoire d'une commune sur une autre sans autorisation préalable du préfet, et les administrations municipales des communes les plus menacées pourront, soit de leur propre ressource, soit en faisant contribuer les propriétaires à l'aide de souscriptions volontaires (1), soit par tout autre moyen, venir en aide aux soldats fatigués ou pauvres.

ARTICLE 5.

Outre le service de tournées, il y aura le service de détachement, qui sera ordonné par le préfet ou le souspréfet, et rémunéré par l'État.

ARTICLE 6.

S'il arrive que plusieurs détachements ou colonnes aient à agir de concert, le commandement appartiendra a l'officier le plus élevé en grade, et en cas d'égalité de grade, au plus âgé.

(1) Voilà de l'impudence poussée jusqu'à la démence! On peut apprécier après cela quel enthousiasme préside, dans le royaume d'Italie, à la libre expression de toute volonté.

290

ARTICLE 7.

En même temps, il sera procédé à l'arrestation ou à la recherche:

1° Des complices des brigands et des vagabonds de toute sorte;

2° De ceux qui auront donné asile aux brigands;

3° Des réfractaires et des soldats débandés;

4° Des porteurs et détenteurs d'armes sans autorisation;

5° Des parents des brigands jusqu'au troisième degré, à moins que quatre citoyens recommandables n'en certifient la bonne conduite;

6° Des propagateurs de fausses alarmes et de fausses nouvelles;

7° De ceux qui, s'étant absentés de leur commune, y reviendraient sans justifier du motif de leur absence.

ARTICLE 8.

Pourront également être arrêtés ou recherchés tous ceux qui, sans être évidemment fauteurs ou espions du brigandage, seraient néanmoins réputés tels par l'opinion; ou qui susciteraient et conseilleraient occultement la désobéissance aux ordres émanés de l'autorité pour la répression du brigandage. Dans de tels cas, cependant, l'arrestation devra être directement ordonnée par le préfet, ou délibérée entre le maire, le commandant de la garde nationale et le commandant de la gendarmerie.

291

ARTICLE 9.

Le clergé régulier ou séculier pourra également être sujet à l'arrestation comme aux perquisitions, et il sera activement surveillé.

ARTICLE 10.

Les mesures suivantes seront adoptées dans les communes les plus menacées:

1° Défense aux propriétaires, fermiers, laboureur.?, serviteurs à gage et autres, d'aller dans les champs ou d'y travailler sans être munis d'une carte de sûreté délivrée par le maire, portant tous les signalements accoutumés;

2° Fermer et murer, au frais des propriétaires, les fermes et les maisons de campagne, après en avoir enlevé toute récolte, comestible?, fourrage, et avoir transféré les bestiaux dans des lieux où ils soient moins exposés à être volés;

3° Forcer la main aux propriétaires qui s'y refuseraient par des moyens administratifs et expéditifs.

Il est donné ample faculté aux commandants des gardes nationales d'infliger, en dehors des conseils de discipline, aux officiers et soldats qui refuseraient d'obéir à leur appel, les peines portées par l'article 118 de la loi du 4 mai 1848, outre la privation de grade, le désarmement et l'expulsion du corps.

De telles mesures répugnent peut-être (1) à la civilisation actuelle; mais aux grands maux les grands remèdes!

(1) Peut-être!...

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Ordre du jour du député Gaétan del Giudice, préfet de la Capitanate.

Foggia, 28 avril 1862, 6 h. du soir.

Hier, la colonne expéditionnaire commandée par le général Ferrero s'est rencontrée avec le gros de la bande de Nunzio Tamburini, près de la ferme de Barretta. Tamburini s'était séparé de sa bande, quelques jours avant, avec cinq de ses hommes. Il en restait dix-huit. Chargés par un peloton de lanciers de Montebello que commandait le lieutenant Mussi, les brigands se dispersèrent laissant trois morts et six prisonniers. Quatre de ces derniers ont été passés par les armes ce matin, à San Leonardo, les deux autres dans l'après-midi, à Foggia. Parmi les morts, la garde nationale de Manfredonia a reconnu Gabriel Calasso et Pascal Gioffreda, surnommé Giordaniello. La troupe continuera à battre les campagnes jusqu'à l'extermination complète des malfaiteurs.

Voici maintenant la liste des brigands fusillés à Ascoli des Fouilles, le 23 de ce mois d'avril:

1° Thomas Melcangi, empailleur, âgé de 19 ans, natif de Cerignola;

2° Fidèle Festo, réfractaire, âgé de 22 ans, de Montecalvo;

3° Michel Marinaccio, réfractaire, âgé de 22 ans, de Savignano;

4° Matteo Conti, réfractaire, âgé de 22 ans, de Deliceto;

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5° Antoine Santarelli, réfractaire, àgé de 21 ans, de Casaltrinita ;

6° Gaétan Macone, àgé de 24 ans, de Montagnto ;

7° Gaétan d'Amato, àgé de 26 ans, de Montaguto;

8° Francois Lena, àgé de 10 ans, d'Andretta, près Avellino;

9° Laurent Saporito, ago de 25 ans, de Pratola, près Ave! lino;

10° Jacques Giliberti, àgé de 33 ans, de Trani;

11° Ruggiero Cappeggia, àgé de 40 ans, de Barletta;

12° Felix Barucci, àgé de 24 ans, de Trani ;

13° Donato Volpi, agé de 25 ans, de Castiglione, près Chieti;

14° Angelo Valentino, àgé de 29 ans, de Zapponeto;

15° Vito Ciottariello, àgé de 27 ans, de Laviano;

16° Pascal Rafìno, àgé de 26 ans, de Barletta;

17° Ruggiero Boraccino, àgé de 27 ans, de Barletta;

18° Bernardino de Simone, àgé de 19 ans, de Mirabella;

19° Benjamin Spinelli, àgé de 21 ans, deCaposele;

20° Joseph Defurio, àgé de 26 ans, d'Ariano;

21° Francois Luiso, àgé de 24 ans, de San Giorgio.

Ce qui, ajouté aux six premiers, forme un total de vingt-sept hommes fusillés.

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Circulaire du général piémontais comte Mazé de la Roche, commandant en chef des troupes actives de la Capitanate et de l'état de siège.

(Confidentielle)

A Messieurs les commandants de corps et de détachements.

Foggia, 1er octobre 1861.

Le soussigné a quelques raisons de croire que tous les militaires placés sous ses ordres ne sont pas pénétrés de la mission de l'armée dans ces provinces; s'il est 'vrai que cette mission exige malheureusement trop l'application de mesures de rigueur, elle n'exclut pas toutefois les moyens propres à relever l'esprit des populations, et spécialement de la classe la plus misérable et considérée comme la plus abjecte, c'est-à-dire des cultivateurs et des bergers. La mission civilisatrice du soldat d'un gouvernement libre est de montrer, môme à la classe infime, par la cordialité des rapports, comme un reflet du soin paternel que l'État a de tous les citoyens indistinctement. Cela, je le répète, n'exclut pas la plus ferme altitude quand elle est nécessaire pour obtenir tout ce qui a rapport aux soldats, ou tout ce qui peut être utile aux opérations exigées pour la sûreté publique. Cela n'exclut point, comme j'ai dit p^us haut, l'application des plus. Lévères mesures et je dirai même des mesures extrêmes de rigueur.


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295

Mais cependant il ne faut jamais s'abandonner à d'injurieuses et dégradantes qualifications se rapportant à une population entière, ou à une catégorie de citoyens, pas plus qu'à de mauvais traitements provoqués souvent par cela seul qu'on ne comprend pas le dialecte des habitants, quand eux-mêmes, à plus forte raison, ne comprennent pas le nôtre, et entendent à peine la langue italienne (1).

Les commandants des corps placés sous mes ordres sont donc invités à faire en sorte que leurs inférieurs do tout grade se conforment scrupuleusement aux intentions du soussigné, qui, en quelque sorte, les en rendra responsables, et qu'ils comprennent que ce qu'on attend d'eux n'est pas une attitude de mansuétude poussée jusqu'à la. faiblesse, mais que l'on veut exclure d'inutiles et insultantes duretés.

Dans les prisons gisent un grand nombre d'individus à l'égard desquels on ne sait quelle mesure prendre, parce que l'on n'a absolument aucune donnée sur leur incarcération, si ce n'est 1 imputation vague de connivence avec le brigandage. Souvent même il se voit que des individus ainsi arrêtés démontrent jusqu'à l'évidence qu'eux mêmes, au contraire, ont été victimes des brigands d'abord, et ensuite de dénonciateurs par vengeance particulière.

(1) Ces mois, dans la bouche d'un jargonneur subalpin, provoquent lu fou rire chez tous ceux qui ont visité les Deux-Siciles, ou qui seulement ont pu comparer la langue italienne avec le patois piémontais.

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Outre l'affront que reçoit l'autorité en les mettant en liberté, à moins de s'obstiner dans un évident déni de justice, ces individus augmentent le nombre des ennemis du gouvernement par lequel ils sont traités si arbitrairement. Ensuite l'autorité supérieure elle-même fait triste figure, n'ayant aucune donnée en main pour prouver leur culpabilité, et parfois ignorant pendant longtemps le motif de leur arrestation, qu'il soit ou non fondé.

Les commandants de corps ou de détachements sont donc invités à joindre toujours au procès-verbal des arrestations qu'ils opèrent, un rapport succinct sur les faits qui donnent au moins la possibilité de prouver la culpabilité du détenu.

Bien entendu qu'à l'égard des brigands pris les armes à la main ou en flagrant délit de rançonnement, d'espionnage ou d'asile donné aux malfaiteurs, on continuera toujours, comme par le passé à se servir de mesures extrêmes, le commandant de la force qui aura opéré l'arrestation on la capture en assumant la responsabilité sans qu'il ait besoin d'aucune autorisation.

Enfin, le soussigné sait que, dans les tournées ou dans l'occupation militaire des fermes, les soldats se permettent de s'approprier furtivement des volailles et autres comestibles, donnant ainsi mauvaise opinion d'eux-mêmes aux habitants, qui, dans de tels actes d'arbitraire, peuvent reconnaître la répétition des rapines que nous sommes au contraire appelés à réprimer.

Sur ce point aussi, j'appelle l'attention des commandants de corps, de détachements ou de colonnes mobiles que je rendrai d'ailleurs pécuniairement responsables des dommages justement signalés.

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Il est évident que quand la troupe a besoin de vivres, elle doit en prendre où elle en trouve; mais c'est le commandant qui doit faire régulièrement les réquisitions, et jamais le soldat arbitrairement.

Ordre du jour de M. de Ferraris, préfet de la Capitauate.

Foggia, 14 mars 1863.

A partir de demain , la guerre aux malfaiteurs sera reprise de plus belle sur tous les points de la province. Les gardes nationales parcourront le territoire de leurs communes; les carabiniers et les troupes les soutiendront vivement au besoin.

Tous les animaux qui sont dans la campagne seront de suite concentrés en un petit nombre de localités pour être protégés plus facilement; toutes les petites fermes seront abandonnées sans vivres, sans fourrages et solidement closes.

Personne ne pourra aller dans la campagne?ans un permis signé du maire et légalisé par le commandant des carabiniers.

Personne ne pou»ra emporter des vivres, des provisions, des armes on des munitions sans l'autorisation écrite du maire et sans une escorte suffisante.

Quiconque contreviendra à ces dispositions sera aussitôt arrêté comme fauteur du brigandage, et mis en prison à ma disposition.

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Syndics et délégué» tiendront exactement informées la préfecture et les sous-préfectures de l'exécution de la guerre sainte qui, grâce aux efforts de tous, sera courte et définitive.

Nous ne ferons suivre ce rare amas d'audacieuses monstruosités que de quelques mots empruntés à un italianissime, le député Crispi, séance parlementaire du 20 novembre:

- «Je répète que les ordres du jour des généraux piémontais rappellent ceux des généraux autrichiens et surpassent ceux des généraux bourbonniens.»

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FRANÇOIS II

Il y avait une fois un roi et une reine....

Ordre du jour du Roi aux troupes de la citadelle de Messine.

Gaëte, 14 septembre 1860.

Soldats,

Loin de vous et des braves et loyaux officiers qui vous commandent, j'éprouve le plus vif désir de vous exprimer la satisfaction que me causent la bonne tenue et le zèle de la garnison au milieu des circonstances actuelles.

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Les privations et les fatigues que vous avez endurées, celles que vous supporterez probablement encore dans l'avenir augmenteront votre gloire et feront la réputation des armées napolitaines.

Obéissez toujours aux ordres de vos supérieurs, c'est la première condition pour obtenir la victoire. Souvenez-vous que, roi-soldat, j'ai été élevé au milieu de vous, et que mon cœur palpite de joie à la seule pensée de vos succès. Sachez, en outre, que vous êtes appelés à défendre une forteresse historique.

Toutes mes pensées sont pour vous. Courage! le ciel bénira vos armes, et, un jour, vous pourrez dire avec orgueil: J'étais, en 1 860, un des défenseurs de Messine.

Signé, FRANÇOIS.

Proclamation du Roi à ses peuples.

Naples, 6 septembre 1860.

De tous les devoirs d'un Roi, ceux des jours de revers sont les plus grands et les plus solennels. Je compte remplir avec une résignation exempte de faiblesse, avec un esprit calme et confiant, ceux qui sont imposés au descendant de tant de monarchies.

A cette fin, j'élève encore une fois la voix pour parler au peuple de cette ville, dont je dois m'éloigner avec regret.

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Une guerre injuste, contraire au droit des gens, a envahi nos États, quoique je fusse en paix avec toutes les puissances de l'Europe.

Mes réformes gouvernementales, mon adhésion aux grands principes nationaux et italiens n'ont pu l'éloigner; de plus la nécessité de défendre l'intégrité de l'État a entraîné avec elle des événements que j'ai toujours déplorés. Je proteste solennellement contre ces hostilités inqualifiables, sur lesquelles l'âge présent et l'avenir prononceront leur sévère jugement.

Le corps diplomatique résidant auprès de moi sait, depuis le commencement de cette invasion, de quels sentiments mon esprit était animé pour mes peuples et pour cette illustre cité que j'aurais voulu garantir de la ruine et de la guerre; j'aurais voulu de même sauver les habitants et leurs propriétés, les temples sacrés, les établissements publics, les musées, tout enfin ce qui forme le patrimoine de sa civilisation, de sa grandeur, et qui appartient aux générations futures, dominant les passions d'un moment.

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J'ai parlé; maintenant, il faut agir; la guerre approche des murs de cette ville, dont je m'éloigne avec douleur pour me transporter, avec une partie de mon armée, où la défense de mes droits réclame ma présence.

L'autre partie restera ici pour veiller, de concert avec l'honorable garde nationale, à la sécurité et à l'inviolabilité de la capitale, que je recommande comme un palladium au zèle du ministère. Je confie à l'honneur et au civisme du syndic de Naples et du commandant de cette même garde nationale le soin d'éviter à cette chère patrie les horreurs des désordres intérieurs et les désastres de la guerre voisine; à cette fin je leur donne les pouvoirs les plus étendus.. Descendant d'une dynastie qui, pendant cent vingt-six ans, régna sur ces contrées après les avoir délivrées d'un long gouvernement vice-royal, mes affections sont ici. Je suis Napolitain, et je ne puis sans douleur adresser des paroles d'adieu à mes peuples bien-aimés, à mes chers compatriotes.

Quel que soit mon destin, prospère ou adverse, je conserverai toujours d'eux un souvenir ineffaçable. Je leur recommande l'union, la paix et l'accomplissement de leurs devoirs de citoyens.

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Qu'un dévouement excessif à ma couronne ne devienne pas une cause de troubles. Si le sort de la présente guerre me ramène au milieu de vous, si, dans un temps plus éloigné qu'il plaira à la justice divine de fixer, je reprends le trône de mes ancêtres devenu plus illustre par les libres institutions dont je l'ai entouré, je n'ai qu'un désir, c'est de retrouver mon peuple uni, puissant et heureux.

Signé, FRANÇOIS.

MANIFESTE DU ROI A SES PEUPLES

Gaëte, s décembre 1860.

Peuples des Deux-Siciles,

De cette place où je défends plus que ma couronne, l'indépendance de la patrie commune, votre souverain élève la voix pour vous consoler dans vos misères et vous promettre des temps plus heureux. Trahis également, également dépouillés, nous nous relèverons ensemble de nos infortunes. L'œuvre de l'iniquité n'a jamais duré longtemps et les usurpations ne sont pas éternelles.

J'ai laissé tomber dans le mépris les calomnies, j'ai regardé avec dédain les trahisons, tant que trahisons


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et calomnies se sont attaquées seulement à ma personne. J'ai combattu non pour moi, mais pour l'honneur du nom que nous portons. Mais quand je vois mes sujets bien-aimés en proie à tous les maux de la domination étrangère, quand je les vois, peuples conquis, porter leur sang et leurs biens en d'autres pays, foulés aux pieds par un peuple étranger, mon cœur napolitain bat d'indignation dans ma poitrine, et je suis consolé seulement par la loyauté de ma brave armée, par le spectacle des nobles protestations qui, de tous les points du royaume, s'élèvent contre le triomphe de la violence et de la fourberie.

Je suis Napolitain; né parmi vous, je n'ai pas respiré un autre air, je n'ai pas vu d'autres pays, je ne connais pas d'autre sol que le sol natal. Toutes mes affections sont dans le royaume; vos coutumes sont mes coutumes, votre langue est ma langue, vos ambitions sont mes ambitions. Héritier d'une antique dynastie qui, pendant longues années, régna sur ces belles contrées après en avoir reconstitué l'indépendance et l'autonomie, je ne viens pas, après avoir dépouillé les orphelins de leur patrimoine et l'Église de ses biens, m'emparer parla force étrangère la plus délicieuse partie de l'Italie.

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Je suis un prince qui est votre, et qui a tout sacrifié à son désir de conserver parmi ses sujets la paix, la concorde et la prospérité.

Le monde entier l'a vu: pour ne point verser le sang, j'ai préféré risquer ma couronne. Les traîtres, payés par l'ennemi étranger, s'asseyaient dans mon conseil, à côté des fidèles serviteurs; dans la sincérité de mon cœur, je ne pouvais croire à la trahison. Il m'en coûtait trop de punir; je souffrais d'ouvrir après tant de malheurs une ère de persécutions; et ainsi la déloyauté de quelques-urs et ma clémence ont facilité l'invasion, qui s'est opérée par le moyen des aventuriers, paralysant la fidélité de mes peuples et la valeur de nos soldats.

En butte à de continuelles conspirations, je n'ai pas fait verser une goutte de sang; et l'on a accusé ma conduite de faiblesse. Si l'amour le plus tendre pour mes peuples, si l'horreur instinctive du sang méritent ce nom, oui, certes, j'ai été faible. Au moment où la ruine de mes ennemis était sûre, j'ai arrêté le bras de mes généraux pour ne pas consommer la destruction de Palerme. J'ai préféré abandonner Naples, ma maison, ma capitale chérie, sans être chassé par vous,

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pour ne pas l'exposer aux horreurs d'un bombardement comme ceux qui ont eu lieu plus tard à Capoue et à Ancône. J'ai cru de bonne foi que le roi de Piémont, qui se disait mon frère et mon ami, qui me protestait qu'il désapprouvait l'invasion de Garibaldi, qui négociait avec mon gouvernement une alliance intime pour les vrais intérêts de l'Italie, n'aurait pas rompu tous les traités et violé toutes les lois pour envahir mes États en pleine paix, sans motifs ni déclaration de guerre. Ce sont là mes torts; je préfère mon infortune aux triomphes de mes adversaires.

J'avais donné une amnistie, j'avais ouvert les portes de la patrie à tous les exilés, j'avais accordé à mes peuples une constitution; je n'ai certes point manqué à mes promesses. Je me préparais à garantir à la Sicile des institutions libres qui auraient consacré, avec un parlement séparé, son indépendance administrative et économique, et écarté d'un seul coup tous les motifs de défiance et de mécontentement. J'avais appelé dans mes conseils les hommes qui me semblaient les plus acceptables par l'opinion publique en ces circonstances, et autant que me l'a permis l'incessante agression dont je suis devenu la victime, j'ai travaillé avec ardeur aux réformes, au progrès,

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à la prospérité de notre commun pays.

Ce ne sont pas les discordes intestines qui m'arrachent mon royaume, mais je suis vaincu par l'injustifiable invasion d'un ennemi étranger. Les Deux Siciles, à l'exception de Gaète et de Messine, ces derniers asiles de leur indépendance, se trouvent aux mains du Piémont. Qu'est-ce que cette révolution a procuré aux peuples de Naples et de Sicile? Voyez la situation que présente le pays. Les finances, naguère si florissantes, sont complétement ruinées, l'administration est un chaos, la sécurité individuelle n'existe pas. Les prisons sont pleines de suspects; au lieu de la liberté, l'état de siège règne dans les provinces, et un général publie la loi martiale, décrète la fusillade instantanée pour tous ceux de mes sujets qui ne s'inclinent pas devant le drapeau de la Sardaigne. L'assassinat est récompensé, le régicide obtient une apothéose; le respect au culte de nos pères est appelé fanatisme; les promoteurs de la guerre civile, les traîtres à leur pays reçoivent des pensions que paye le pacifique contribuable. L'anarchie est partout. Des aventuriers étrangers ont mis la main sur tout pour satisfaire l'avidité ou les passions de leurs compagnons.

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Des hommes qui n'ont jamais vu cette partie de l'Italie, ou qui dans une longue absence en ont oublié les besoins, constituent notre gouvernement. Au lieu des libres institutions que je vous ai données et que je désirais développer, vous avez eu la dictature la plus effrénée, et la loi martiale remplace maintenant la constitution. Sous les coups de vos dominateurs disparaît l'antique monarchie de Roger et de Charles III, et les Deux-Siciles ont été déclarées provinces d'un royaume lointain. Naples et Palerme seront gouvernées par des préfets venus de Turin.

Il y a un remède à ces maux et aux calamités plus grandes encore que je prévois: la concorde, la résolution, la foi dans l'avenir. Unissez-vous autour du trône de vos pères. Que l'oubli couvre pour toujours les erreurs de tous; que le passé ne soit jamais un prétexte de vengeance, mais une leçon salutaire pour l'avenir. J'ai confiance dans la justice de la Providence, et, quel que soit mon sort, je resterai fidèle à mes peuples comme aux institutions que je leur ai accordées. Indépendance administrative et économique entre les Deux-Siciles, avec des parlements séparés, amnistie complète pour tous les faits politiques, tel est mon programme.

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Hors de ces bases, il ne restera pour le pays que despotisme et anarchie.

Défenseur de l'indépendance de la patrie, je demeure et combats ici pour ne point abandonner un dépôt si saint et si cher. Si l'autorité retourne dans mes mains, ce sera pour protéger tous les droits, respecter toutes les propriétés, garantir les personnes et les biens de mes sujets contre toute sorte d'oppression et de pillage. Si la Providence, dans ses profonds desseins, permet que le dernier boulevard de la monarchie tombe sous les coups d'un ennemi étranger, je me retirerai avec la conscience sans reproche,

avec une résolution immuable, et, en attendant l'heure véritable 'de la justice, je ferai les vœux les' plus fervents pour la prospérité de ma patrie, pour la félicité de ces peuples qui forment la plus grande et la plus chère portion de ma famille.

Le Dieu tout-puissant, la Vierge immaculée et invincible, protectrice de notre pays, soutiendront notre cause commune.

Signé, FRANÇOIS.

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ORDRE DU JOUR DU ROI

Gaëte, U. février 1861.

Généraux, officiers et soldats de l'armée de Gaëte,

La fortune de la guerre nous sépare. Après cinq mois de souffrance pour l'indépendance de la patrie, pendant lesquels nous avons partagé les mêmes fatigues et les mêmes privations, le moment est venu pour moi de mettre un terme à vos héroïques sacrifices. La résistance était devenue impossible, et si d'un côté mon devoir de soldat était de défendre avec vous le dernier boulevard de la monarchie, mon devoir de roi, mon amour de père, me commandent aujourd'hui d'épargner l'effusion d'un sang qui, dans les circonstances actuelles, ne serait que la manifestation d'un héroïsme inutile.

Pour vous, mes fidèles compagnons d'armes, par égard pour votre avenir, par considération pour votre loyauté, votre bravoure et votre constance, je renonce à l'ambition de repousser les derniers assauts d'un ennemi qui, pour s'emparer d'une place défendue par de tels soldats, eût été obligé de semer des cadavres sur son chemin.

Soldats de l'armée de Gaëte, depuis dix mois vous avez combattu avec un courage sans pareil!

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La trahison intérieure, l'attaque des bandes révolutionnaires, l'agression d'une puissance se disant amie, rien n'a pu arrêter votre bravoure, ébranler votre constance.

Au milieu des souffrances de tout genre, traversant les champs de bataille et affrontant les trahisons, plus terribles que le fer et le plomb, vous êtes venus à Capoue et à Gaëte. Vous avez laissé sur les rives du Volturne et du Garigliano les traces de votre héroïsme, et vous avez défié pendant plus de trois mois. dans ces murs, les efforts d'un ennemi qui dispose de toutes les forces de l'Italie. Grâce à vous, l'honneur de l'armée des Deux-Siciles est intact; grâce à vous, votre souverain pourra lever la tête avec orgueil, et, sur la terre d'exil où il attendra la justice du ciel, le souvenir de l'héroïque fidélité de ses soldats sera la plus douce consolation de ses malheurs.

Une médaille spéciale vous sera distribuée en mémoire du siège, et, quand mes chers soldats rentreront dans leurs familles, tous les hommes d'honneur courberont la tête à leur passage; les mères montreront à leurs fils pour modèles les braves défenseurs de Gaëte.

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Généraux, officiers et soldats, je vous remercie tous; je vous serre la main avec effusion d'affection et de reconnaissance. Je ne vous dis pas adieu, mais au revoir. Conservez toujours intacte votre loyauté, comme se conservera la gratitude et l'affection de votre Roi.

Signé, FRANÇOIS.

LETTRE DU ROI AU MARÉCHAL FERGOLA

Rome, 10 mars 1861.

Le porteur de la présente sera le général Thomas Clary.

L'intérêt que je ressens pour cette brave garnison m'a fait penser à lui procurer un avenir moins dur; j'ai fait proposer pour elle et pour beaucoup d'autres, qui jusqu'aujourd'hui ont combattu sous mon étendard, les conditions dont vous trouverez ici copie.

Je ne crois pas qu'elles seront toutes consenties, mais je ne pouvais faire mieux; si toutes ne sont pas acceptées, ce ne sera pas ma faute. Vous devrez, en premier Heu, chercher à sauver l'honneur militaire, et à obtenir ensuite les meilleures conditions possibles.


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Faites en sorte que ce que je fais demander soit bien connu de tous, afin que chacun voie que, jusqu'au dernier moment, je n'ai eu qu'un seul et unique désir, celui de rechercher, autant que les circonstances l'ont permis, l'avantage et le bien de tous.

Signé, FRANÇOIS.

P. S. Sous ce pli vous trouverez l'ordre que j'ai donné pour la cessation des hostilités et l'ordre du jour à la garnison.

ORDRE DU JOUR DU ROI AUX TROUPES DE LA CITADELLE DE MESSINE

Rome, lu mars 1861.

Généraux, officiers et soldats de la garnison de Messine,

Pour épargner votre généreux sang, pour vous assurer les honorables et avantageuses conditions que méritent votre courage et votre constance, j'ai auto

risé votre général en chef à fixer les conditions de la capitulation. Je sais qu'avec la fermeté, la loyauté, dont vous avez donné un si long et remarquable exemple, vous étiez décidés à défendre notre drapeau tant qu'il vous resterait un pouce de terrain pour y poser les pieds; mais, dans les circonstances actuelles,

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ce serait un sacrifice inutile, comme père et comme roi, je sens qu'il est de mon devoir d'éviter un péril qui mettrait en danger la vie de mes sujets sans donner des espérances de succès.

Le monde a admiré votre persévérance à toute épreuve. Mon plus grand regret est de ne pouvoir vous remercier tous personnellement; mais il viendra un jour où les tristes événements qui m'éloignent de mon royaume ayant changé, je pourrai appeler autour de moi mes braves vétérans, pour reconquérir l'indépendance de la patrie et secouer le joug de l'envahisseur. Alors je n'oublierai pas mes braves soldats de Messine, dont l'héroïque fidélité m'inspire des sentiments d'éternelle reconnaissance.

Signé, FRANÇOIS.

ORDRE DE S. M. LE ROI AU MARÉCHAL FERGOLA

Rome, 10 mars 1861.

Mon sieur le Maréchal,

L'honneur des armes napolitaines se trouvant sauvegardé par l'héroïque défense de Gaëte et par la conduite de la garnison de Messine, je crois inutile de prolonger la défense de cette citadelle;

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car elle pourrait causer de grands dommages à la ville, en sacrifiant inutilement la vie de ces braves soldats, qui ont soutenu avec tant de constance mon drapeau dans cette partie du Phare.

Fidèle au sentiment qui me fit arrêter le bombardement de Palerme et abandonner la ville de Naples, je crois de mon devoir de préserver à tout prix l'entrepôt de la Sicile.

Quant à vous, général Pergola, qui avez donné un aussi noble exemple d'attachement, de courage et de fermeté, je vous confie le soin de traiter avec l'ennemi à des conditions honorables et avantageuses pour la garnison. Je veux conserver le sang de mes soldats, mais je veux en même temps sauver leur honneur et assurer leur avenir.

Signé, FRANÇOIS.

LETTRE DU ROI A S. E. LE CARDINAL DE RIARIO-SFORZA

ARCHEVÊQUE DE NAPLES

Éminence,

Comme pasteur du diocèse dont Torre del Greco fait partie, je transmets à Votre Éminence une somme de huit cents scudi, tant en mon nom qu'en celui de la Reine,

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pour venir en aide aux malheureuses victimes des dernières calamités. Il n'y a pas une larme de mes sujets qui ne retombe sur mon cœur, et je ne pense à ma pauvreté que dans les circonstances comme celle-ci, parce qu'elle m'empêche de faire tout le bien auquel je me sens naturellement porté.

Cette nouvelle calamité, qui est venue se joindre à toutes celles qui affligent mes peuples, me montre les habitants d'une ville, voisine de ma capitale, souffrant de la rigueur de l'hiver autour de leurs foyers détruits. Torre del Greco peut être comparé à Pontelandolfo et à Casalduni, moins à plaindre peut-être, en ce sens qu'elles ne peuvent rejeter sur les hommes les désastres dont elles sont victimes.

Votre Éminence sait déjà ce que l'iniquité et la trahison ont fait de ma couronne. Souverain exilé, je ne puis m'élancer au milieu de mes enfants pour soulager leurs maux. La puissance du roi des Deux-Siciles est paralysée, et ses ressources sont celles d'un monarque déchu qui n'a emporté avec lui, loin du sol où reposent ses aïeux, que son impérissable amour pour la patrie absente.

Mais quelque grande que soit ma ruine, et si faibles que soient mes ressources, je suis roi, et, comme tel,

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je dois la dernière goutte de mon sang et mon dernier écu à mes peuples. L'obole du pauvre que je leur offre aujourd'hui aura certainement plus de prix à leurs yeux que tout ce que, dans des temps plus prospères qui renaîtront un jour, je pourrais leur offrir dans la nécessité où ils se trouvent.

De Votre Eminence, etc.,

Signé, FRANÇOIS.

Rome, 11 janvier 1862.

DISCOURS DE FRANÇOIS II

Aux délégués des villes de Naples et de Palerme, des provinces continentales et insulaires du royaume (1).

Messieurs,

Au moment où de tous les coins du territoire napolitain et sicilien me parviennent des adresses couvertes de milliers de signatures, témoignage flatteur de confiance et d'attachement, je suis on ne peut plus sensible aux expressions d'affection et de fidélité, qu'au nom des vingt-deux provinces du royaume, vous venez me présenter à l'occasion du jour de l'an, et ces vœux de souhait et d'espoir sont d'autant plus chers à mon cœur

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qu'ils manifestent les sentiments de nos loyales et malheureuses populations.

Je vous remercie avec toute l'effusion de mon âme, et je vous prie de transmettre à ceux qui vous ont faits les organes de leurs vœux les témoignages de ma plus vive reconnaissance.

Exilé du trône et de la patrie, tous mes sentiments et les pensées constantes de mes jours se tournent vers mes sujets bien-aimés et malheureux, vers la terre paisible où je suis né et où reposent les cendres de mes aïeux. Ce n'est pas la perte du trône ni les misères inhérentes à l'exil qui attristent le plus mon âme. Au milieu des malheurs personnels, je sens que mon cœur resterait fort et serein si je ne devais assister avec une angoisse inexprimable au spectacle de l'oppression, de la désolation et de l'esclavage de mon peuple. Le vent qui souffle de mon pays, si agréable pour tout exilé, ne m'apporte que l'écho des fusillades qui, tous les jours, atteignent d'obscures et fidèles victimes, les étincelles des villes brûlées par l'envahisseur, les cris de douleur des malheureux entassés dans les prisons, ou les plaintes des agriculteurs dont les champs sont dévastés, grâce aux proclamations féroces des préfets piémontais.

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Ayons confiance en Dieu. Vous voyez que, comme toutes les œuvres de l'iniquité humaine, l'œuvre piémontaise est atteinte de stérilité, preuve évidente de décadence et de mort. Tant de décrets, tant de règlements, tant de changements de régime dans les Deux Siciles, une fois la dictature, une fois la lieutenance, maintenant la préfecture, tous ces essais faits en deux ans, à quoi ont-ils servi? A quoi ont abouti les flatteries, les calomnies et la terreur? A quoi ont servi l'incendie de pays désarmés, les hécatombes humaines renouvelées sans cesse dans nos provinces? Les pri sons sont littéralement remplies de prisonniers, et l'on se plaint qu'on conspire encore. L'état de siège a été, pendant plusieurs mois, le seul moyen pour gouverner, et les maux et les dangers qu'il devait extirper ont au contraire augmenté. La vie des malheureuses populations se trouve à la merci du dernier caporal commandant un détachement; les ordonnances des autorités nouvelles, les lois inhumaines des suspects, soumettent à la passion et au caprice la vie et la fortune des propriétaires et des paysans, et cependant les milices royalistes s'étendent et combattent tous les jours avec plus d'ardeur et d'acharnement. Les contributions ont été multipliées,

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les biens de l'Église usurpés et vendus; toutes les richesses réunies au moyen d'un sage système d'économie, ont été dilapidées, et le trésor de l'usurpation est toujours à sec. Son budget présente un déficit normal épouvantable, et la rente est cotée à peine un peu plus que la moitié du prix auquel était cotée la nôtre dans les dernières années de notre monarchie.

Attendons avec douleur, mais avec calme. Laissez ceux qui ne croient pas en Dieu compter sur le triomphe de l'iniquité; laissez ceux qui ne croient pas aux leçons de l'histoire croire à l'annexion violente de la plus importante monarchie italienne; à la mort d'un royaume qui, pendant tant de siècles et tant de dominations étrangères, a soutenu toujours son autonomie, et a conservé ses frontières, tracées par ses fondateurs; de ce royaume qui a vu passer tant de changements et de conquêtes, marchant toujours dans l'œuvre de l'indépendance nationale; laissez-leur croire qu'un accident purement révolutionnaire puisse établir le sort d'un grand royaume; laissez-leur rêver qu'on puisse déraciner si facilement des dynasties et tuer des nations.

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Ainsi que vous, je ne doute pas et je n'ai jamais douté de mon retour. Je n'en ai pas douté lorsque, au milieu des trahisons et des malheurs, j'abandonnais Naples, ma patrie et ma capitale, ainsi que ma fortune privée et les ressources du gouvernement, pour préserver ma bien-aimée métropole. Je n'en ai pas douté lorsque, défenseur de l'indépendance nationale, je combattais pour l'honneur de mon nom et de mon drapeau sur le Volturno et sur les murs de Gaëte.

Cette confiance entière dans la justice de ma cause, cette résolution de reconquérir absolument l'indépendance de mon pays me soutiennent et me consolent dans mon exil.

Comment, en effet, en douterais-je, lorsque plus de deux ans se sont écoulés depuis mon départ et que de tous les côtés me parviennent des témoignages d'amour et de respect, de confiance et de souvenir de mes sujets; quand je vois que la plus grande partie de la noblesse du royaume s'est condamnée volontairement à l'exil pour suivre ma cause; quand, sauf de très-rares exceptions, l'aristocratie qui n'a pas quitté le pays s'abstient de faire cause commune avec l'usurpateur; quand, de toutes les communes du royaume,


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les propriétaires et les paysans mettent à ma disposition leur vie et leurs services; quand je vois ce noble peuple abandonné de tout le monde, sans appui, sans qu'il soit poussé par moi (et vous le savez bien), combattre contre l'oppression étrangère et accourir, en prononçant mon nom, je me dis à moi-même qu'une cause soutenue par la justice, et enracinée dans un si grand nombre de cœurs loyaux, ne peut pas succomber, et que l'avenir lui appartient.

Mais lorsque arrivera le moment inévitable de la Restauration, ne nous y méprenons pas, messieurs, rendre la paix et la prospérité à un pays ruiné sera une rude et grande tâche. J'aurai besoin des lumières et du concours de tous. Dites à ceux qui vous ont envoyés que mes principes sont inaltérables, et mes intentions immuables. L'amnistie et le pardon pour les faits politiques sont les sentiments de mon cœur, et la règle principale de ma politique. Sous la sauvegarde d'un régime franchement représentatif, le pays pourra prendre part efficacement à son administration et à son gouvernement, appliquant toutes nos forces à la grande œuvre de la régénération politique.

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La Sicile, de son côté, aura l'indépendance autonomique, administrative et parlementaire, et Palerme partagera avec Naples l'honneur de la résidence des rois.

Inculquez et répandez partout ces idées. Dissipez les craintes que la révolution cherche à insinuer de réactions personnelles, de châtiments et de vengeances. Mon cœur ne permettrait rien de tout cela.

Recommandez de ma part à tous l'union et la paix. Répétez à tous que je ne veux pas voir d'ennemis parmi ceux qui sont nés au delà du Trente. Je ne verrai en eux que. des fils et des compatriotes dont l'union est indispensable pour guérir les plaies de notre pauvre pays.

Rappelez à toutes les forces indigènes qu'elles ont été instituées pour sauvegarder la propriété et la sûreté des citoyens, et non pour combattre leurs aspirations de patriotisme et d'indépendance; qu'elles se rappellent qu'elles sont napolitaines et siciliennes, et que bientôt arrivera le jour où le pays aura besoin de leur dévouement: alors elles mériteront bien de la patrie, et je serai heureux de leur manifester mon estime et ma reconnaissance.

» Que les peuples des Deux-Siciles considèrent leur puissance, leur population,

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l'extension de leur territoire par rapport au reste de l'Italie; qu'ils se rappellent leur histoire, et ils y puiseront de nobles exemples. Qu'ils n'espèrent pas obtenir de l'étranger seulement leur rédemption. Lorsque le moment sera arrivé, la justice de Dieu et l'équité des peuples seront pour eux. Qu'ils sachent faire par eux-mêmes; et le monde entier applaudira et approuvera leurs efforts.

» Je vous remercie encore une fois, Napolitains et Siciliens, de votre attachement et de vos souhaits, et de cet asile où je suis comblé des plus affectueuses démonstrations et de la paternelle hospitalité de celui qui représente sur la terre la justice éternelle et à qui la Providence a confié la défense de la vertu opprimée; j'espère sous peu me rendre au milieu de vous, vous revoir autour de moi tranquilles, forts et heureux, lorsque, donnant une main amie et fraternelle aux autres Etats de l'Italie, je serai heureux et fier d'ouvrir les portes de parlements vraiment nationaux dans les deux grandes capitales du continent et de la Sicile.

Palais Farnèse, 19 janvier 1863.

FRANÇOIS.

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TABLE DES MATIÈRES


INTRODUCTION


I — Religion

1

II — Finances

25

III — Armée

47

IV - Justice

75

V — Prisons

89

VI — Instruction Publique

131

VII — Presse

147

VIII — L'UNITÉ ITALIENNE

157

IX — Les Brigands

163

X — Les Lieutenants Subalpins

171

XI - FRANÇOIS II

299

1 — Ordre du jour du Roi aux Troupes de la citadelle de Messine

299

2 — Proclamation du Roi à ses peuples

300

3 — Manifeste du Roi à ses peuples

303

4 — Ordre du jour du Roi

309


5. — Lettre du Roi au maréchal Pergola

312

6 — Ordre du jour du Roi aux troupes de la citadelle de Messine

313

7 — Ordre de S. M. le Roi au maréchal Fergola

315

8 — Lettre du Roi à S. Em. le cardinal de Riario-Sforza, archevêque de Naples

316

9 — Discours de François II aux délégués des villes de Naples et de Palerme, des provinces continentales et insulaires du royaume

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