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OSCAR DE POLI
DE NAPLES A PALERME
(1863-1864)
(3)
TABLE DES MATIÈRES
Les Brigands
Unité et autonomie
Les lieutenants piémontais
Conclusion
page
311
415
468
487

LES   BRIGANDS

Vive le Bourbon, - le fils de la sainte 

qui est de notre religion, 

- de notre sang, de notre cœur,— 

et ne nous a fait du mal qu'on nous quittant!

(Chanson Napolitaine)

C'est aux environ dés ruines d'Auletta, la pauvre ville bourbonienne  saccagée par les piémontais, que j'entendis pour la première fois ce canzone patriotique. J'étais en rase campagne, sous un ciel de fou, et cartes un Napolitain ne pouvait soupçonner qu'un étranger se trouvât en plaine à pareille heure. — Au pied d'un tertre vert et fleuri, j'aperçus un jeune berger qui, en gardant son troupeau, murmurait plutôt qu'il ne chantait ce couplet patriotique, qui lui eût valu les galères ou la mort, s'il eût été entendu d'un Piémontais ou d'un piémontiste. Le petit paysan ne me voyait pas: il disait sans crainte ces paroles si napolitaines, qui me semblèrent l'écho de tous les cœur»:

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«Vive le roi Bourbon, — qui s'est battu pour nous,  — pour nous qui nous battions pour lui.— Vive la jolie reine Marie,— qui nous rappelle sa sainte et courageuse mère!»

—Vive le roi Bourbon! répétai-je en italien.

Le berger se leva brusquement, comme mû par un ressort invisible; son regard lançait des éclairs; un Piémontais n'eût pas eu tort d'avoir peur en cet instant, j'écartai mon manteau, sortis de ma poche un portrait de François II et le tendis à l'imprudent chanteur (1). Il le regarda, puis le saisit, et y appliqua ses lèvres avec une vivacité pleine de joie et de respect.

—Vous n'êtes cependant pas des brigands! me dit-il avec un étonnement mêlé de sympathie.

—Je suis Français, mon ami, mais j'aurais le droit de me dire Napolitain.

—Vous êtes Français? oh! alors vous êtes pour nous sûrement! vous aimez notre François, n'est-ce pas? Nous l'aimons... Si j'osais  je vous dirais: «Monsieur, donnez-moi son portrait.»

—Garde-le, mon enfant, mais garde-le plus encore dans ton cœur!

—Toujours! s'écria le petit berger en y portant de nouveau les lèvres.

Plein de reconnaissance et de confiance, mon jeune interlocuteur me rechanta d'abord sa chanson tout entière, que je transcrivis au crayon; puis, de confidence en confidence, il me prouva qu'il était l'un des agents les plus dévoués des bandes réactionnaires; je frémissais pourtant en me demandant quel eût été le sort de ce courageux enfant s'il se fût trompé dans la confiance qu'il me témoignait, et je tâchais d'oublier alors que les soldats piémontais avaient fusillé déjà des femmes et des enfants.

(1)Je publierai le chant tout entier dans une suite de nouvelles que je dois donner sous ce titre: Les Vendéens des Deux-Sicilies.

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Eh bien! les Piémontais ne se trompent pas, quand ils emprisonnent en masse tous les habitants d'un village ou qu'ils déciment une ville, l'esprit national est plus vivace que jamais dans les Deux-Sicilies; on n'est pas Napolitain sans être brigand, ou tout au moins favorable au Brigandage; il n'est pas un fermier, pas un berger, pas un enfant des champs qui ne soit de cœur ou de fait avec les réactionnaires armés, pas un qui ne se prive d'un peu de nourriture pour la leur porter, pas un par conséquent qui ne risque pour eux sa vie. Ce m'était une joie immense, une joie de tous les instants que d'avancer, à l'ombre d'un adroit pseudonyme, sur ce sol ignoblement conquis, et de trouver à chaque pas le mépris et la haine du nom piémontais. En vérité il faudrait désespérer des hommes de Naples et de Palerme, si, aux premières complications où se trouverait engagé le Piémont, le tocsin ne les soulevait tous comme un seul homme, et s'ils ne rendaient Naples aux Napolitains! mais j'ai trop vu, trop entendu, trop appris pour douter de l'issue heureuse de la question napolitaine. Désespérer serait douter non-seulement de Dieu, non-seulement de ce roi si chevaleresque, si populaire (1), si vraiment roi, ce serait douter du peuple même,

(1) Le marquis d'Afflitto, préfet de Naples, visitait une école nouvellement fondée.

— Quel est le nom de votre pays, demanda-t-il à l'un des enfants qui lui furent présentés.

L'enfant répond  — Portici!

Le préfet: — Je vous demande le nom du pays, de la patrie, de la patrie commune?

L'enfant: — Portici.

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du peuple tout entier, à pari d'ignobles exceptions; en un mot ce serait méconnaître le passé, le présent et l'avenir.

J'aime les brigands, on le voit, comme j'aime tous ceux qui ont un noble drapeau; mais je n'éprouve aucun regret à le dire, il y a brigands et brigands. Les uns sont bien réellement des soldats, les hommes d'une idée, de l'idée d'autonomie et d'indépendance nationales, donnant sans regret leur sang et leur vie pour le Bourbon qui personnifie le peuple. Les autres sont l'ivraie qu'a produite la révolution de 1860, détrousseurs de grands chemins, véritables bandits, sans foi ni loi, sans conscience ni drapeau, la lie des Deux-Sicilies, galériens rendus à la liberté par les régénérateurs subalpins et qui appliquent en petit le système que leurs libérateurs appliquent en grand depuis quatre ans! Il n'y a heureusement entre les brigands et les bandits, d'autre rapport que celui d'être également pourchassés par le Piémont, qui les confond à dessein dans une même appellation; mais il n'est pas rare d'entendre parler de rencontres et de combats acharnés entre les uns et les autres; alors les journaux unitaristes chantent victoire, et crient que les brigands se mangent entre eux; mais qui trompé-t-on? Les lecteurs de l'honorable Havin ou de l'honorable Guéroult peut-être.

Le préfet: — Saurez-vous du moins me dire le nom de notre seigneur?

L'enfant: — Jésus-Christ!

Le préfet: — Ce n'est pas cela: je tous demande le nom de notre souverain sur la terre, le nom de notre roi, le nom du roi, enfin?

L'enfant: Francesco seeondo!

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Quant aux Napolitains et aux Siciliens, ils savent distinguer l'ivraie d'avec le grain, et mettre au panier des mensonges intéressés la plupart des récits piémontais, calomnies ou victoires.

Les brigands n'enterrent pas leurs morts, ils les brûlent, de peur que les soldats ne les déterrent, ne les reconnaissent, et ne molestent les parents des morts. — Voilà où en sont les Deux-Sicilies en l'an de grâce 1865! Pauvre terre meurtrie, noyée dans ses larmes et dans son sang, attendra-t-elle longtemps encore l'heure tant désirée de la résurrection nationale? Reviendra-t-il enfin, dans le palais de ses pères, ce jeune roi-héros, si paternel et si loyal, qui apparaît à tous les cœurs napolitains comme un autre Messie?

Laissons passer les heures douloureuses; le bras de Dieu ne saurait s'appesantir à jamais sur un peuple coupable d'ingratitude par légèreté. Les brigands sont les soldats de l'avenir; ils sont l'avant-garde de la restauration bourbonienne, de la restauration nationale. Un député piémontais l'a dit (1):

«Ce sont des brigands, oui, mais ils ont un drapeau; ce sont des brigands, mais ils sont formidables dans leurs surprises, inaccessibles dans leurs retraite»; oui, ce sont des brigands, mais les pères de ces brigands ont remis deux fois sur le trône les Bourbons de Naples, en 1799 et en 1814!»

(1) Le député Ferrari. Séance parlementaire du 29 novembre 1862.

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TERRE DE LABOUR

Les environs dé Roccaguglielma offrent toujours un sûr asile aux réactionnaires, entré autres à la bande Maccherône, qui n'en a jamais été délogée. Vers les derniers jours de mai, ce chef, à la tête d'une trentaine d'hommes, poussa une pointe du côté de Sessa, et, se réunissant à plusieurs petites bandes, descendues des monts, traversa Riardo, Pietramelara, Latiria, Baja, Pietravairano, eut une rencontre avec la troupe à Mignano, une autre à San-Germano, et, repassant le Garigliano à San-Giorgio, se retira dans sa position habituelle.— A la même époque, une fraction de là bande Picciocchi, descendue des monts Vergine, eut une rencontre prés de Nola, s'avança ensuite jusqu'à Gardito, province de Naples, et reparut le 1er juin à Bajano, d'où elle regagna les monts d'Avella.

— Toutes les forces de la Capitanate, de Molise et de Naples agissant contre les Abruzzes, les bandes se voient forcer de battre en retraite et de se fractionner; les unes gagnent les monts de Valle-Rotondo; les autres les monts d'Arpino et d'Atina.

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Une bande d'une trentaine d'hommes, détachée de celle de Schiavone, dans la Bénévent, se rencontre, le 25 juin, à San-Germano avec la troupe piémontaise et lui tue deux hommes.

—Au mois de juillet, les bandes Fuoco et Maccherone, formant ensemble 80 hommes, paraissent sur le territoire de Tano, se dirigent du côté de Rocca-Montina, se battent le 8 à Mignano, le 11 à Fondi, traversent le Garigliano à peu de distance de Traetto, et s'avancent dans, la terre de Labour.

—Une soixantaine de réactionnaires pénètrent, le 15 juin, dans le bourg de Coreno, de 2,000 habitants, désarment la garde nationale, et vont ensuite à Rocca-d'Evrandro.— Le 18, rencontre avec les gendarmes de Sessa.— Le 22 la bande Guerra se bat en vue de Mignano.— Le 26, la bande Giordano, qui occupe depuis longtemps les  monts de Gerreto, Pietraroja et Gusano,repousse une attaque combinée de toutes les forces du pays. Le capitaine de la  garde nationale de Civitella, le lieutenant de celle de Cusano, et un médecin de cette dernière ville sont au nombre des morts. — Le 28, la petite   ville de Montina est cernée par les bandes Guerra et Fuoco.

—Dans le courant de septembre, rencontre à Tufino entre la troupe et la bande Crescenzo Gravina; attaque de Caruso contre la garnison de Sant'Agâta de' Goti, où un officier et plusieurs soldats piémontais perdent la vie.

—Le 4 octobre, combat au bois de Santa-Croce, où la troupe perd sept hommes; escarmouche aux environs de Piedimonte. Le 22, la bande de Dominique Fuoco envahit le village d'Aqua-Fondata, et impose des rançons aux piémontistes du lieu.

—Le 6 novembre, une troupe d'ouvriers terrassiers rencontre la bande Guerra-Fuoco, près de San-Pietro-in-Fine.

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Trois d'entre eux, anciens garibaldiens sont les autres reçurent des brigand de petite sommes d'argent pour continuer leur route. Près des trois cadavres, les piémontais trouvèrent cette sentence écrite: «Ils ont trahi les Bourbons: Pietro Fuoco les  tués» — Agitation réactionnaire à Monticelli district de Gaête. — Une bande se montre à Cusano, puis à Baja et Latina, où elle brûle la maison du maire, Napolitain piémontiste.

—Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

11 janv. — Un réactionnaire à Cerreto.

6 mars. — Deux, à Maddaloni.

18— Cinq, sur les monts du Matese.

26— Six, à Mignano.

29— Un, à Nota.

23avril. — Clément Ricigliano, à Piedimonte.

27 mai. — Vincent Napoli, à Sarno.

22 juil,— Un prisonnier, à Sora.

9 sept.— Trappi et Caprariello, à Nota.

24nov,— Raphaël Biase, à Cerreto.

4 déc.— Quatre réactionnaires près de Gaète.

7 — Six réactionnaires faits prisonniers.

17— Quatre autres prisonniers.

—Aux environs de Maddaloni, je faisais route avec des paysans. Un d'eux me dit tout à coup:

«Voyez-vous ces arbres au détour de la route? Le, dimanche soir, un pauvre cultivateur, père de famille, menait un peu aviné; il ne répondit pas assez vite au qui-vive d'une sentinelle piémontaise, et reçut une bail en pleine poitrine... Le lendemain, on fit courir le bruit qu'il servait les brigands (1).»

(l)Je n'ai pas la prétention de donner ici la liste complète des combats et des victimes de chaque province cela dix volumes. Les paragraphes suivants seront d'ailleurs plus détailles.

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PRINCIPAUTÉ   ULTÉRIEURE

~ L'agitation politique n'a jamais cessé dans cette province; elle y est maintenue principalement par le chef Schiavone, bien connu des habitants, et plus encore des Piémontais, qu'il a battus en plus d'une occasion. — Au mois d'avril, il s'était fondu avec la bande Andreotti, qui se trouvait alors entre San-Sossio et San-Nicola-Baronia. A l'ouest de la principauté, Picciocchi s'est plusieurs fois approché de Rotondi, Vitulono, Torrecuso et Paupisi. Au commencement de mai, la bande Ciano parcourait le territoire de Montella, et la bande Crescenzo Gravina, dispersée à la suite de quelques rencontres malheureuses, reparaissait entre Avellino et Sa??o, puis allait occuper le bois de Santa Cristina.

— Au moisde mai, la bande Andreotti, qui s'était établie au p. d du Bénévent, bat les Piémontais à Cervinara et à Pratola.— Le 8, combat acharné entre la bande Caruso-Schiavone et un fort détachement.-- Le 10, la méme bande, opérant une retraite habile, attire dans une embuscade plusieurs détachements réunis des 15e et 23 de ligne et 17 bersaillers, et lui fuit éprouver des pertes sensibles. — Lors de la grande expédition entreprise par le général la Marmora et continuée par le général Franzini, la bande Picciocchi se porte rapidemént par Cassano, Castelfranci, Vallata, et San-Sossio jusqu'au val de Bovino, pour prêter secours à Caruso et

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Schiavone, prend part avec eux à plusieurs rencontres sanglantes, puis regagne les sommets du Taburno par Casalbore, Buonalbergo et Paduli.

—En juillet et août, la bande Caruso Schiavone eut les rencontres suivantes: 29 juillet, combat de Sette-Serre, où plusieurs soldats sont tués; 17 août, à quelques milles d'Avellino; 19, à Montemarano; dans lés derniers jours du mois, combats à Cerce-Maggiore, Mirabella et Lacedonia. Vers la même époque, les bandes des monts Vergine et Cervinara devinrent agressives à leur tour, et, dans le combat de la montagne de Costafredda, les brigands portaient l'uniforme de l'ancienne armée royale napolitaine.

—Caruso, poursuivi de tous côtés, bat les Piémontais à trois milles de Bénéyent, où il leur tue onze hommes,à Molinara à Torrecuso, où il tue six gardes nationaux et trois soldats, et à Torre-Palazzo, où cinq Piémontais sont tués, et dix fusillés.

—Le 19 septembre, la bande Martini envahit Montesarchio. Le 28, une attaque est dirigée contre le détachement cantonné à Rochetta Sant'Antonia; un officier, trois sous-officiers et trois soldats sont tués. Autre combat à Lacedonia, où succombent cinq Piémontais. On prête alors au général Pallavicini, vainqueur d'Aspromonte, ce mot significatif:

«Ah! si ce n'étaient que des garibaldiens, j'en aurais bien vite fini!»

—Le 18 octobre, plusieurs bandes réunies entrent à San-Martino, près Cervinara  (4,800 habitants),  et y arrêtent six riches piémontistes qu'ils rançonnent. Le 20, elles repoussent la troupe; le 21  elles battent les Piémontais à Cantano, et se retirent sur le mont San-Rocco.

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—Au commencement de novembre, agitation réactionnaire à Panarano, Sant'Angelo dei Lombardi, Lioni et Vallata, on voit apparaître une nouvelle bande commandée par Luciano-Martino Miseria.—Andretta, petite ville de 4,200 habitants, est envahie par la bande Urtone, qui, attaquée par les bersaillers, la garde nationale mobile- et les gendarmes, ne se retire qu'au bout d'une heure de combat.

Le 12 décembre, Caruso, fait prisonnier Pavant-veille par la. garde nationale de Molinara, est fusillé à Bénévent. Caruso meurt en héros, refusant de se laisser bander les yeux et«n criant une dernière fois: Vive Dieu! Vive le roi! Vive Naples!

— Quelques exécutions militaires signalées par les journaux:

26 février. — Deux réactionnaires à Melito;

5 mars.   — Henri d'Alessandro, à Bénévent;

                 —  Antoine Casciano de Teora, à Avellino;


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6     — Deux réactionnaires à Saint Nicolas d'Ariano.

      —Deux réactionnaires à Saiat-Nicola Baronia.

10— Un réactionnaire à Calvi.

12— Deux à Calitri.

25— Quatre à Avellino.

4 avril  — Quatre à Avellino.

5— Un à Bénévent.

—Antoine Scatilazo et Jean-Barra, à Taurasi.

6— Cinq à Torrecuso.

7— Luigi Quitta de Taurasi, à Avellino.

          — Un à Bénévent.

          — Dominique Lauda et Dominique Russo, à Montecalos.

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19.— Onze réactionnaires fusillés, onze brûlés vifs à la ferme de Cangiano, Bénévent.

21.— Angelo Verdino, à Bénévent.

          — Lorenzo Saggenario, à Pietrallata.

13 mai.     — Vincent Tomasselli, à Bénévent.

23.— Pio di Bella, à Calitri.

26.— Joseph Sidoni, à Montella.

23 juin.    — Generoso Massano, à Summonte.

9 sept.      — Carminé Porcaro, à Bénévent.

En octobre, une femme a été fusillée à Gervinara.

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CAPITANATE

Les bandes Donatelli, Crocco, Caruso, Ninoo-Nanco, Coppa, Sachetiello, Schiavone, Andreotti, Marciano, Varanelli et Villani sillonnent successivement ou conjointement la Capitanate, et livrent aux Piémontais d'incessants combats meurtriers. Il est peu de villages et de petites villes qui n'aient été traversés par elles. Entre autres faits de réaction, nous citerons les combats de San-Nicandro, où la troupe ont neuf blessés; d'Apricena, de Torremaggiore; de Sant'Agata, où tombèrent, le 8 mai, dix-sept brigands et vingt-neuf soldats; de San-Marco la Gattola, de Deliceto, où Caruso détruisit une compagnie tout entière; d'Alberona, où il tua six Piémontais, de Castel-Vecchio, où il eut deux blessés; de Serra Capriola, où fut tué le jeune et héroïques réfractaire Nicandro Barone, d'Apricena, surnommé Nican-druccio; d'Orsara de Troja, où les gardes nationaux perdirent dix-huit hommes, entre autres le maire Grilli, le capitaine Calabrese, un lieutenant, un notaire et le receveur d'Orsara; de San Marco-in-Lamis, où furent tues.

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le 17 août, le capobanda Angelo Maria Villani, dit «l'homme à l'oreille cassée,» et le capitaine piémontiste de Carolis; de San-Bartolomeo in Galdo, où les Piemontais attaqués par les bandes réunies de Caruso et Varanelli, ont trente-quatre morts et i rente el un blessés; de Roseto, de Sun Severo; des environs de Lucera, où, le 21 octobre, la bande Caruso tient tète, pendant deux heures, à la garde nationale, à un détachement de bersaillers et à un peloton de cavalerie, qui perdent quatre hommes et ont blessés.

— Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

6 janvier. — Trois réactionnaires, à Sant'Agata.

8.— Un aux environs de Montefalcione.

9 février. — Neuf en divers lieux de la Capitanate, quatre à Foggia, un à Panni.

6 mars. — Xavier Lungo, à Foggia; le chef de bande Varanelli: quatre à San Marco in Lamis; deux à Troja.

12.— Quatre dans la province.

17       — Michel Vitale, à San-Severo.

18   — K San-Bartolomeo in Galdo, un réactionnaire, dont la tête a été portée à San-Marco la Gattola.

18   — Un à Termoli.

19   — Lorenzo Laina et Rolando Sala, à Castelnuovo.

21.— Domenico Bruno et Francesco Gagnano, à Foggia; un à Torremaggiore; un aux environs de Torre maggiore.

24— Giovanni Lotti et Dominieo Mastrolitti à Torremaggiore.

25— Deux à Foggia; un à Torremaggiore.

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26.— Gaëttno  Ciarmella,  Joseph  Velino, Pelligrino Gepozio et quatre réactionnaires inconnus, à Foggia.

27   — Un à Foggia.

28   — Malmisura, et Pietro Bonito, à Orsara.

29   — Mastrangeio d'Anzano, à Monteleone; six à Ginestra.

30.— Joseph Pisanni, à San-Marco la Gattola.

3 avril.   — Un à Monteleone.

4.— Antonio Rinaldo, Antonio Fattaro, et deux réactionnaires inconnus à San-Marco in Lamis.

5.— Francesco Andreani, à Deliceto.

7.— Pascal  Trojano   et  Luigi Biscaglia,  à Monte-Sant'Angelo.

15.— Cinq à San-Marco in Lamis.

21.— Bianchi de Gasalvecchio, à Torremaggiore.

23.— Joseph et Antoine Miucci, d'Apricena, à San-Marco in Lamis.

24.— Joseph de Nobile, à Foggia; N. Butti, à Serra Gapriola.

30.— Carmino, dit Giardella, à Apricena.

23 mai.     — Joseph-Louis Russo, à Foggia.

27 juillet. — Trois aux environs de Trani.

TERRE DE BARI

Cette province a été traversée, à diverses époques, par les bandes Crocco, Caruso, Coppa, Pizzicchicchio, Trinchero, Cicciarello, et Romano, qui ont occupé militairement un certain nombre d'endroits, entre autres les gorges de Corato et de Ruvo, les territoires de Fasano.

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Monopoli, Conversano, les bois de Gioja à Mottola, les communes d'Acquaviva, Cassano, Altamura, etc.

—À la fin du mois d'octobre, la loi Pica reçoit une première application dans la Terre de Bari; cent personnes sont arrêtées à Terlizzi et Minervino.

—Au mois de novembre, agitation réactionnaire a Canosa, Minervino, Luogorotondo, Bari, Andria, Gravina, etc.

—Le 19 novembre, combat de Gravina. Une forte colonne de troupe, de carabiniers et de garde nationale,rencontre une bande de cent vingt hommes, commandée en chef par Crocco, avec Ninco-Nanco et Tortora pour lieutenants. La lutte dure plusieurs heures, et la troupe,après avoir éprouvé des pertes graves, est obligé de battre en retraite. Les réactionnaires comptent trois morts et cinq blessés. — Cette bande se divise alors en deux groupes, qui ont parcouru le pays entre Minervino, Canosa et le Leccese. Le premier, sous les ordres de Crocco et de Cicciarello tient tête à une colonne de deux cents hommes dans les montagnes de Corato; l'autre, conduit par Ninco-Nanco et Tortora, assiège, pendant quelques heures, un fort détachement dans la ferme de Leps.

—Au mois de décembre, on signale des faits de réaction à Toritto, Bisceglie, Andria, Minervino etBarletta.

—Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

5 janv.     — Vingt réactionnaires fusillés entre Bari et le Leccese. — Huit à Gioja.

8.— Huit à Conversano.

6 mars.   — Quatre à Corato.12.— Trois à Putignano.

11 mai.    — Roeco d'Angelo, à Grumo.

25.— Francisco Pulmisuno, à Luogorotondo.

27 juillet. — Trois à Bari.

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13 sept.    — Sept entre Bari et Lecce.

22 nov. — Francesco-Maria Luigini et quatre autres réactionnaires..

Décemb. — Vingt-deux dans diverses communes de la Terre de Bari.

TERRE   D'OTRANTE

Cette province a été fréquemment agitée par les bandes des frères Pizzicchicchio. Trinchero, Masini, Coppolone, Chiappino, Romano, Laurenzano, Salvatore Cosa, Giuseppe Volpe et Cicciariello.

—Du mois de septembre 1863, à la fin du mois demai 1863, les contrées de Ginosa, Castellaneta, Mottola, Martina, Montalbano, Ceglie et San-Vito ont été agitées par les bandes; puis c'a été le tour de Francavilla, Erchie, San-Donato, Martano, Galatina et Muro.

—Pizzicchicchio est l'organisateur de la réaction armée dans la province. Il se mit à la tête d'une quarantaine de réfractaires, marcha sur San-Giorgio-Piccolo-mare, s'approcha par le bois des Pianelle jusqu'à deux milles de Tarente, passa ensuite à Faggiano, et, tournant la Grande-Saline, prit la route de Montemisola pour gagner ses retraites de Martina. — C'est dans le cours de cette expédition qu'il fusilla deux capucins qui avaient dénoncé un habitant de Mottola, comme donnant asile à des réfractaires. Quand la police piémontaise se présenta chez le pauvre Napolitain, de désespoir il se précipita dans son puits, d'où elle le retira sans vie. Le dimanche suivant, 17 mai, les deux moines furent passés par les armes, devant les pertes des chapelles de Marese et Leporano.

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Aux pieds des cadavres, on trouva ta sentence suivante:

«Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, ont étés condamnés à mort et exécutés les capucins Zaccari, de Tarante, et Pepoli, de Grottaglie, pour avoir vendu un de leurs frères aux Piémontais.»

—Au mois de juillet, on signale l'apparition d'une nouvelle bande, commandée par Salvatore Cosa, ancien sous-officier dans l'année royale napolitaine

—Le 9 septembre, combat de Ttfelissano, où la troupe a deux morts et six blessés. La bande Pizzicchicchio-Coppolone comptait alors vingt hommes de pied et cinquante cavaliers.

—Au mois de novembre, on signale des mouvements insurrectionnels autour de Gallipoli, à Latiano et sur divers points du district de Lecce.

—Quelque exécutions militaires rapportées par les journaux:

4 avril.  — Quatre réactionnaires fusillés à Mure.

18 mai.   — Quatre à Ostuni.

21.— Trois à Ginosa.

21 juin. — Angelo de Bello, à Castellaneta.

22 août. — Leonardo Scocuzza, à San-Vito.

27 octob. — Paolo de Franchis, aux environs de Palaggiano.

12 nov.   — Sept réactionnaires, aux portes de Francavilla.

Décemb. — Trois aux environs de Ginosa.

CALABRES

Les premiers mouvements réactionnaires eurent lieu, en 1862, à Controne et à Spinello, sur les rives du

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Neto, et n'aboutirent qu'au sac de ces deux localités. Ils se renouvelèrent plus tard dans le même district de Contrône, en s'étendant à Caccari, San-Nicola dell'Alto, Santa-Severina, San-Mauro et San-Gandale; puis, remontant le cours du Neto, de petites bandes, sans chefs connus, se montrèrent autour de San-Giovanni in Fiore, et s'avancèrent jusqu'à San-Marco de Cosenza (1).

—Vers la même époque, une bande, sortie de la Barsilicate, envahit le territoire d'Oriolo, et des hommes armés parurent sur les bords du Simari, et occupèrent Sellia, à peu de distance de Catanzaro.

—Au commencement du mois de mai, deux nouvelles bandes se formèrent; Tune, sous les ordres de Monaco, eut une rencontre avec les Piémontais près de Spezzano-Grande  et se retira sur les monts de Rovelleto; l'autre, conduite par Franzese, parcourut sans encombres les pays de San-Marco, Fagnano et Mongrassano, district de Cosenza.

—Dans le courant de juillet, les bandes se montrent près de Corigliano, dans le bois de la Tavola, sur la Regia-Sila, d'où ils repoussent la troupe, ensuite à San Stefano, dont ils capturent le maire, et enfin à Monteleone.

—Dans les premiers jours d'août, des bandes régulières parcourent les campagnes de Castiglione, Cosenza et Catanzaro sous les ordres de la Valle et de Luele.

—Le 30 août, cent réactionnaires, conduits par Salvatore Cosa, qui, depuis un mois, parcouraient le territoire d'Acri, entrent dans cette ville et y capturent dix personnes.

(1)Les bandes les plus célèbres dans les Calabres sont celles de La Valle, Monaco, Franco, Pietro et Seratino, Bianchi, des Saracenari, de Palma et autres.


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(Gazzetta del Popolo de Turin, 1er octobre)

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—En   septembre,  la bande Spinello  parcourt   le deuxième district de Catanzaro. lies bandes Franco.Serafino Bianchi, Pietro Saraceni et Delma occupent les bois de la Sila. — En octobre, la bande Palma campe aux portes de Longobucco, et, le 22, la bande de l'ex-chef Rosanava, dit Scrivano, surprise près d'Acri, perd sept hommes.

—Le 26 novembre, la bande Monaco surprend et désarme le détachement piémontais de Roccanuova, et,le 28, bat la garde nationale mobile d'Acri.

—Un traître de la bande Monaco, gagné par les Piémontais, empoisonne la plupart de ses compagnons.

—Le 20 décembre, la troupe se trouve, sur le mont Ricante, en présence d'une bande de 40 hommes, et engage arec elle un combat qui dure cinq heures. Le même jour, combat de Sant'Ilario,  qui coûte  onze hommes, tués ou blessés, aux Piémontais.

—Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

8 janv. — Un réactionnaire, à Foscaldo.

2 févr.  — Le prêtre Joseph Gribari, fusillé à Falconara.

13.— Dix habitants de Fagnano, fusillés par ordre du commandant Fumel.

19.— Trois à Fagnano, deux à Montazzoli, un à Bocchigliero.

Mars.      — Fumel donne sa démission après avoir arrêté trois mille personnes, et en avoir fusillé trois cent soixante.

Août.      — Ferdinand Sacconnano et M. Vileco, à Cosenza.

15 octob. — Domenico Madeo, à Longobucco.

18 nov.   — Luigi Franceschini, et trois réactionnaires inconnus, aux environs de Reggio.

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27 déc,    — Giuteppe Loro, près Melito.

28.— Deux réactionnaires, à Catanzaro. Coppolone, Egidione, Crocco, Ninco-Nanco, Coppa, Tina, Canosa, Andreotti, Tortore,Masin, Tasca, Schiavone, Caruso, Rubini, Serravalle, Gedeone, Malacarne, Scalceri, Varanelli, et plusieurs autres capipande moins connus parcoururent successivement ou simultanément la province, et je n'hésite pas à dire que, lorsqu'elles se fractionnèrent, la Basilicate eut quelque, temps à déplorer de regrettables excès. C'est aux diverses fractions de la bande Masini qu'il faut les reprocher, à elles seules; l'énergique chef de bande n'étant plus là, tous les mauvais instincts prirent rapidement le dessus et indisposèrent vivement la population d'un petit groupe de localités. Heureusement le mal n'eut qu'une courte durée, ce qui fut un bien pour tous.

—Le 1er juin, Ninco-Nanco soutint une lutte acharnée près de Bradano, et, depuis lors, ne cessa de parcourir, à la tête de 50 cavaliers, toute la partie de la province comprise entre l'Ofante et le Bradano.

—Coppa, Seravalle et Varanelli, sortant des bois de Monticchio et Lagopesole, soutiennent plusieurs sanglants combats, notamment à Avello, le 17 mai, et près d'Atella, le 1er juin, et gagnent Avigliano, où Caruso les rejoint bientôt.

—Dans le courant de juin, Crocco, conduisant une forte bande, cerne successivement Avigliano, Abriola, Marsico-Nuovo, Montemuro, Saponara et Moliterno, être gagne ensuite les bois dé Montevilone, après avoir essuyé de meurtrières rencontres Vers le terme de cette aventureuse excursion, Crocco avait inspiré aux ennemis une si grande terreur qu'ils n'osaient plus sortir des villes pour le poursuivre. Dès qu'on le sut loin de Melfese, on y envoya quelques détachements pour donner la

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chasse aux petites bandes qui s'y étaient attardées; mais aussitôt elles se fusionnèrent sous le commandement de Ninco-Nanco et Varanelli, et soutinrent avec avantage plusieurs combats où les Piémontais essuyèrent de grosses pertes; principalement sur les bords de l'Olivento, non loin de Lavelîo, et près du bois de Rondina, oh périt tout un détachement de chevaux-légers de Saluées.

—Le 6 août, combat sur le territoire de Castelgrande; le 14, deux combats au bois de Serralta; le 15, combat de Palazzo, et, le 26, escarmouche aux environs de Melfi. Du 26 au 31, rencontres à Frapolla, Acerenza, et sur la lisière du bois de Monticchio.

—le 15 mai, la bande Masini, forte de 30 hommes, occupe Marsico-Vetere, petite ville de 3,700 habitants,désarme le poste de la garde nationale, enlève toutes les munitions de guerre qui se trouvent dans là ville, et regagne les bois du Melfese. — Dans le mois d'août, combats aux environs de Potenza, Abriola, Corleto, Montemurro, Moliterno et Marsico-Nuovo.

—Le 31 juillet, de petites bandes réunies sous les ordres de Crocco et Masini, attaquent un fort détachement sorti de Moliterno, qui, après une résistance de deux heures, abandonne les morts et les blessés, et se replie en désordre sur la ville.

—Le 24 septembre, Masini fait décapiter le supérieur du couvent des moines de Marsico-Nuovo et, le père Antoine de Tolve, connus pour piémontistes et dénonciateurs.

—Le 9 octobre, combat de Marsico-Nuovo; le 13, escarmouche près de Avigliano; le 14, combat. près de Potenza. La bande Masini, forte de 70 cavaliers, ne peut être délogée du territoire de ces diverses localités.

—Un détachement d'infanterie et de gendarmerie, qui

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escortait 11 prisonniers politiques, est attaqué près de Matera par les bandes Egidione et Goppolone réunies, et se replie en toute hâte. Le 12 décembre, rencontre entre les bandes et la garde nationale de Vignola, qui a deux blessés. Le 24, un escadron de la garde nationale mobile à cheval est attaqué près de Matera et reconduit vigoureusement jusqu'à la ville.

— Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

4 janv. — Deux à Rotondella.

19— Deux à Genzano.

22— Six à Acerenza et à Genzano.

31— Sept entre Potenza et Avigliano; 14, à Lagopesole.

1er fév.   — Onze à Lagopesole; un, à Francavilla.

16— Joseph Motta, à Montescaglioso.

Avril.— Vito Pacella et Egidio Cosentino, à Senise.

16mai.   — Trois à Matera.

17— Vito Rosa, à Avigliano.

20   — Deux à Atella.

21   — Deux à Avigliano.

26   juin.— Jean Varilota, à Avigliano.    

2    août— Paolo Serravalle, à Potenza.

6— Giulio Pasquale, à Castelgrande.

11— Joseph Lagrippo à Melfî.

9 sept.— Carminé Cillis, à Pietragalla.

30 octob. — Saverio Garone, à Potenza.

11 nov.— Saverio Avitabili, près de Rionero.

25— Pierre Maronito, à Marsico-Vetere.

14 déc.— Quatre dans le Melfese.

19— Deux près de Brienza.

28— Un à Castelgrande.

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PRINCIPAUTÉ ClTÉRIEURE

Cette province a vu de nombreuses bandes la sillonner en tous sens, sous les ordres de Diavolillo, Raphaël Tofano; Matteo Stingo, Gherardo Stella, Joseph de Vito, Crescenzo Gravina, Scialone, Gianci, Tardie, Maratea, Marcantonio, Matteo Struso, Giardullo, Masini, etc.

—Au commencement de mai, la bande Diavolillo, descendue du mont Sant'Angelo, envahit le territoire de Vietri, et pénètre dans cette ville qui est à deux pas de Salerne. A la même époque, trois autres bandes, sortiesdelà Basilicate et conduites par Stingo, Stella et Joseph de Vito, rencontrent la troupe, les deux premières entreSan Gregorio, Buccino et Golliano: la troisième, dans le bois de Schiavo, près Scala. Les bandes Scialone et Cianci, venant de la Principauté ultérieure, repoussent les gardes nationales de Giffoni-Valle-Piana et de Montecorvino-Rovella.

—En juin, la bande Tardie soutient deux combats à peu de jours d'intervalle, la première entre Stio et Campora, contre la troupe, la seconde contre la garde nationale de Gioj: puis elle va subir un échec près de Vallo, et se fractionne.

—En juillet, combats aux environs de Padula. Massascosa, Novi, Vallo, et dans le bois de Persano.

—A la fin d'août, les réactionnaires, descendus des monts de Positano, envahissent divers villages, entre autres Vettica-Mago, Prajano, Furore,  Conca, Àmalfi, Agerola et Campora.

—Dans les premiers jours de novembre, à la suite d'un mouvement réactionnaire, à Agerola, le maire et seize

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habitants sont arrêtés et écroués dans les prisons de Naples. —Le 18, la bande Struso rencontre la troupe près de Palomonte, l'oblige à une prompte retraite et poursuit un détachement de garde nationale jusqu'en vue de Calabritto. Le même jour, la bande Ciardullo, forte d'environ vingt hommes, attire la garde nationale d'Acerno dans une embuscade, où elle laisse quatre hommes. Le 29, la bande Masini rencontre les Piémontais sur la montagne de Sala, leur tue onze hommes, en perd deux et se retire; puis, forte de 60 brigands, elle reparaît, le 27, entre Sala et Padula, où elle capture et fusille un piètre révolutionnaire.

—Le 14 décembre, un fort détachement de troupe, de gendarmerie et de garde nationale, est attaqué dans le bois de Persano, et, le 22, un détachement de bersaillers perd deux hommes dans une rencontre sur le mont de Colliano

— Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

21 janv. — Un à Ottati.

5 mars. — Angelo Cozzi et Francisco Citera, à Buonabitacolo.

6— Un à Ceraso.

28        — Giosue Ferrero, a Laviano; quatre à Vescovado.

8 avril. — Antonio Villeno et Solvatore Cobardeila à Sanza.

15— Pascal Lottieri, Jean Troncone, Janvier Pavillo, à Novi.

8 mai.   — Nicola Stanziola, à Laurito.

30— Quatre à Stio.

Août         — Joseph Amandola, à Agerola.

Octobre.    — Quatre aux environs de Campagna.

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7 déc — Marcantonio Lupi et Giuseppe Dintôrni, à Torchiara.

17— Un à Pisciotta.

31— Pasquale Riccotti, et deux brigands inconnus, aux environs d'Eboli.

PROVINCE  DE   NAPLES (!)

Des faits de réaction sont signalés, dans les premiers mois de Tannée, à Somma, district de Naples, à Gragnano, district de Castellamare, et à Sant'Anastasia.

— Du commencement de l'année à la fin du mois d'avril, la bande Pilone occupait les monts qui dominent Castellamare et s'étendent jusqu'à la pointe de la Campanella; c'est ainsi qu'elle parut successivement dans la campagne de Sorrente, aux portes de Vico-Equense et près de Graganno, qu'elle pénétra dans Pimonte et Lettere, et que, s'avançant jusqu'à Bosco-tre-Case, elle alla camper sur le Vésuve, pour rançonner au passage les libéraux de Naples, et créer des ressources à sa bande. On sait que le marquis Avitabile, directeur de la banque de Na» pies, fut Tune de ses premières captures. Enfin, le 25 février, Pilone adressait la curieuse lettre qui suit à Son Altesse Royale la duchesse de Gênes, belle-sœur du roi Victor-Emmanuel, qu'on avait envoyée à Naples pour rendre un semblant de cour à l'infortunée capitale.

A   S. A. R. Madame la duehesse de Gêne.

«Madame.

J'ose prendre respectueusement la liberté d'écrire à Votre Altesse Royale, sans avoir l'honneur d'être connu

(1)Voir le chapitre Prisons.

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d'Elle; mais j'espère qu'Elle daignera me la pardonner en faveur du motif qui me la dicte.

La légion royale napolitaine, que j'ai l'honneur de commander, s'est juré de faire Votre Altesse prisonnière. J'ose donc L'engager à ne pas s'aventurer trop loin hors de Naples, sans quoi j'aurai la douleur de me rendre maître de Sa royale personne, et, bien que je puisse l'assurer qu'Elle serait traitée avec tous les honneurs dus à une princesse de l'auguste maison de Savoie, je tiens à tâcher de lui épargner, par cette loyale déclaration, des désagréments sur lesquels il serait superflu d'insister.

Que Votre Altesse Royale daigne agréer l'hommage du respect profond de

Son humble serviteur.

PILONE.

Commandant au nom de Sa Majesté

le Roi des Deux-Sicilies.

Camp Royal du Vésuve, 25 février 1863.»

A partir de ce moment, on put remarquer que madame la duchesse de Gênes n'osait plus, en effet, sortir de Naples, qu'elle s'empressa de déserter dès qu'on le lui permit.

—Des partisans de Picciccchi, le vertueux Capobanda, descendant des monts Vergine dans la province de Naples, vers le milieu du mois de mai, pénètrent dans Cardito, district de Casoria, et sont atteints par la troupe près de Qualiano. La bande perd plusieurs hommes. Les Piémontais reconnaissent, parmi les brigands blessés, le fils du commandant de la garde nationale de San-Pietro a Paterno.

—- Au mois de juin, la bande Chiappettello,descendue du mont Sant'Angelo-tre-Pizzi. essuie plusieurs combats meurtriers, notamment au lieu dit «les Franche».

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—A la fin daoût, les bandes, qui avaient un instant battu en retraite devant de fortes colonnes piémontaises, reparaissent sous la conduite des chefs Vuolo et Apuzzo; dans le seul   arrondissement  de  Castellamare, cent treize personnes sont arrêtées comme suspectes d'être sympathiques à la réaction. — Le 28, les bandes Maratea et Marcantonlo imposent plusieurs rançons, puisse retirent du côté de Pimonte et d'Agerola.

—Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

23 janv. — Egidio Lurcchesi, à Sant'Anastasia.

1er mars. — Un réactionnaire, fusillé à Castellamare.

2— Deux entre Scafati et Pompei.

17— Treize, en diverses localités.


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Mai.       — Un à Massa-Lubrense.

23 août. — Un à Castellamare.

25         — Un dans l'arrondissement de Casoria.

Octobre.— Quatre, dans l'arrondissement de Castellamare.

COMTÉ  DE   MOLISE

Cette province n'a cessé d'être agitée, et ses bois, particulièrement celui de Petacciato, ont toujours été pour les bande? un commode et sur asile. Nous nommerons, entre autres, celles de Nunzio Tamburini, Varanelli, Caruso, Schiavone et Ricciardelli.

— Combat près de Campobasso. Caruso, dans une lutte acharnée, se fraye un passage à travers nos hommes accourus pour le cerner. Dans la deuxième quinzaine de mai, il a encore une rencontre dans le voisinage de

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Circello, et sa bande, poursuivie jusque dans le bois dé Dragonara, se retire, sans cesser de combattre, dans celui de Grotta.

—En juin, une rencontre près d'Ielsi coûte la vie àcinq gardes nationaux.

—Le 2 juillet, Caruso, à la tète de cinquante cavaliers, se bat à Campolataro et au moulin de Resino. Le 4, nouveau combat à Sferracavallo; Caruso tue aux Piémontais quinze hommes, qu'ils abandonnent sur le terrain. Le 8, autre rencontre entre Morcone et Sepino,qui coûte la vie à dix Piémontais. Le 14, rencontre avec les gendarmes de Campobasso, qui perdent cinq des leurs. Le 15 et le 18, combats où succombent une vingtaine de soldats et gardes nationaux (1).

—Le 19 juillet, la bande Tamburini arrête, au pont de Monte-Roduni, le commissaire de police Rozzera, et le fusille sur place. Elle repousse ensuite une attaque des Piémontais, près de Roccasicura. et leur tue six hommes, non sans en avoir perdu cinq. — Les derniers jours du mois sont marqués par de fréquentes rencontres, dont le détail serait trop long. La réaction grandissant d'une manière effrayante, le colonel piémontais Galetti, à la tête de toutes les troupes qu'on a pu réunir, est envoyé à marches forcées du côté de Termoli.

—Le 1er septembre, Caruso tue dix-neuf hommes à la garde nationale de Colle; le 7, près de Castelvetere, il tue vingt-sept soldats piémontais dans une lutte de deux heures (2). — Le 19, le maire et le lieutenant de la garde nationale de Palata tombent aux mains des brigands.

(1)On comprend après cela cette joie féroce des Piémontais fusillant l'héroïque Caruso!

(2) Voir la note précédente.

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—Dans la première quinzaine d'octobre, des faits de réaction se produisent à Guardia-Regia et à Riccia. —Le 19, combat près de Fojano entre cinquante réactionnaires et une compagnie du 26% soutenues par plusieurs brigades de gendarmerie; de part et d'autre, on compte des morts et des blessés.

—Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux;

Février. — Gennaro Ferraraccio à S. Groce di Magliano.

2 mars.— Un au lieu précédent.

8   — Trois à Sassinoro; trois à Morcone.

16   — Un à Termoli; Vincent Androli, à Larino;

Gennaro Tedeschi, à Frosolone.

19      — Un à Campomarino; François Bianco, à Palata.

29— Antoine Oriemmo et Antoine Porrazzo, à S. Groce di Magliano.

30— Salvatore Pioto, à Baranello; François Tiacca, à Palata.

13 avril. — Un à Campobasso.

—Onze réactionnaires brûlés vifs, neuf tués, un fusillé près de Lanciano.

23— Trois dans le bois de Cantalupo; Donato de Donato et Vincent de Battista, a Larnio.

8 mai. — Nicola Stanziola, Domenico Lamana et Pieira Paterno, à Vasto.

7 juill. — Luigi Carini et deux réactionnaires inconnus, aux environs de Bojano.

18— Un à Agnone; deux à Venafro.

24— Onze réactionnaires fusillés aux environs de Guardia-Regia. Octobre.— Trois près de Roccamandolfi.

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ABRUZZES

Tristani, Pezzolongo, Stramenga, Fanti, Scamuffo, Tamburini, ont été, dans le cours de 1863, les chefs principaux des bandes réactionnaires. —r Diverses rencontres ont eu lieu aux environs de Carsoli, Aquila, Popoli, à Fonte-Avignano, Tione, Coriano-Valli, Paganica, Colle Alto, etc. En juin, la bande Fanti subit un grave échec à Gesso-Palena. En juillet, la réaction, se manifesta principalement dans le district de Vasto, et une lutte sanglante eut lieu sur le mont de Grotte, danslaquelle onze Piémontais furent blessés ou tués. Au commencement d'août, le commissaire de police Innocent Gamba sua fut tué dans une rencontre près de Caramanico. — La première quinzaine de septembre a été signalée par deux affaires:1a première à Paglieta, la deuxième à Liscia, six gardes nationaux sont restés sur le terrain. — Le 19, nouvelle rencontre à Tufillo.—Le 19 octobre, une bande envahit le territoire de Guardiagrele, dans le Chietino. et. vers la fin du mois, une rencontre a lieu près de Cortino. La première quinzaine de novembre est marquée par un mouvement réactionnaire à Atessa, comme, dans la seconde, à Roccamorice et Lama. En décembre, faits de réaction à Atessa et Vasto..

— Quelques exécutions militaires rapportées par les journaux:

3 janv. — Sept réactionnaires fusillés à Casalbordino.

2 févr. — Un à Liscia.18— Un à Montazzoli.

2 mars. — Felice de Nisia, à Montazzoli.

7— N. Fanti, à Fara.

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20— François Filippini, à Torino.

9 avril. — Les frères Joseph et Louis de Nasio, à Bomba; trois à Vasto.

20— N. Ventreseca, à Popoli.

23—Bellasone,   Morisani   et A-lessandro, à Cantalupo;  trois à Lanciano; Raphaël de Masi, à Aquila.

26— Domenico de Biasi, à Campo di Giove; quatre à Vasto, et cinq à Teramo.

9 mai. — Un à Teramo.

13— François Cardillo, et un inconnu à Montereale.

14  — N. Roccabruna, à Aqnila; quatre à Chieti.

15  — Capponi. et Tagliacozzo, à Chieti.

20— Nicolas de Felice, à Ghieti;  un à S, Stefano; deux à Salle.

25— Trois à Teramo.

6 juin. — Emmanuel Paolucci, à Lucoli.

25— Pascal d'Erasmo, à Atessa.

21juil. — Amédée Andreol et François Nasuti, à Chieti.

10août. — Pierangelo Gacchione, à Torino.

9-13     — Quinze réactionnaires fusillés dans l'Abruzze citérieure.

25— Trois aux environs de Caramino.

13 sept. — Quatre à Paglieta; Angelo Guccioli et cinq inconnus, près de Liscia.

20— Un à Tufillo.

3octob.— Un aux portes de Chieti.

21— Un à Guardiagrele.

11nov. — Trois a Atessa.

28— Luigi S ignore, Domenico Varese, et six réactionnaires inconnus, entre Rocca-et Lama.

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III

On lit dans le Moniteur universel, journal officiel de l'empire français (1):

«Ce n'est malheureusement pas annoncer un fait nouveau que de constater la vivacité du brigandage dans les provinces napolitaines; mais on n'avait point vu depuis longtemps un acte de violence commis avec une audace aussi grande que celle dont Castellamare vient d'être le témoin. Aux portes de cette ville, les voyageurs qui se rendaient au premier train du chemin de fer pour Naples ont été arrêtés par une bande montant à 30 ou 40 personnes. Cette opération a pu être paisiblement poursuivie pendant plus d'une heure, et a donné pour résultat l'arrestation de 120 individus, dont la majeure partie a été simplement dépouillée et le reste emmené dans la montagne jusqu'au payement d'une rançon. Tel est le récit dont Je journal officiel de Naples est contraint d'attrister se colonnes, et qui ne dépare point, du reste, le tableau de la situation dans les autres provinces.

(1)Correspondance de Naples, en date du 30 septembre.

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En vain on s'est flatté de séduire les principaux chefs de bandes et de les engager à se soumettre; partout ils exercent leurs représailles contre la troupe, et les Calabres elles-mêmes, que Ton aimait à croire tranquilles, ne sont guère plus exemptes de ces maux que les circonscriptions qui les entourent. En présence de ce mouvement général les mesures prises par les commandants italiens, quelque rigoureuses qu'elles soient, ne parviennent pas à rassurer les populations. A Bénévent, le général Pallaviccini a cru devoir faire arrêter d'un coup 200 personnes. A Sorrente, 123 individus décrétés de suspicion ont été enlevés et déportés aux îles sous l'inculpation de camorrisme.»

— La confiscation, la prison, la fusillade étant impuissantes à éteindre le brigandage le gouvernement régénérateur ne craint pas de mettre en œuvre les plus odieux moyens, qui ne rappellent que trop l'infâme dictature de Vidocq, dans la Vendée, en 1832, — Un journal anglais, le Tablett (1), publie une correspondance de Rome, qui éclaire pleinement cette sinistre comédie:

«Le major-espagnol Serracante se trouve encore ici en prison, et a fait pleine et entière confession sur l'affaire où il a joué un rôle si considérable. La soi-disant bande réactionnaire qu'il commandait, Le composait presque entièrement, ainsi que plusieurs autres, d'agents de la police piémontaise, à l'exception de quelques malheureux paysans, qu'il a livrés aux autorités pour être fusillés. Toute l'affaire était un coup monté pour servir de base aux assertions du Times et du Morning Post sur la complicité du gouvernement pontifical dans la réaction. Les révélations de Serracante viennent d'autant plus a propos que de récentes tentatives ont été faites pour faire

(1)Juillet 1864

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jouer le même rôle, et avec les mémés déloyales intentions, à de nouvelles bandes réactionnaires espagnoles, qui suivraient le programme des précédentes.»

— L'Osservatore romano donne sur cette infâme tentative des détails encore plus précis

«Un certain Serracunte, la lie de la 4xdèle nation espagnole, acheté par des agents subalpins, fut conduit chez le consul sarde, a Rome, rue Borgognona. On j'ai parla d'une fausse expédition réactionnaire, qui devait bientôt avoir lieu: on lui enjoignit de se tenir prêt sur la frontière napolitaine, en lui promettant des honneurs et de grandes récompenses s'il parvenait à fournir la preuve que les soi-disant brigands napolitains étaient des étrangers envoyés de Rome. Le consul remit ensuite à l'espion une grosse somme en louis d'or, et un portrait photographié portant au bas. les initiales G. G. M. C'était une sorte de contremarque pour prendre, à l'Isoletta, trois caisses de fusils expédiées par l'honorable général la Marmora. Serracante partit donc à Rome avec un grand nombre de pauvres diables, et ils arrivèrent à destination sans que la police française eût rien vu! La bande prit les armes, et commença à faire des marches et contre-marches sur la frontière: mais les Piémontais ne s'inquiétaient pas de la poursuivre. Cependant les journaux piémontistes faisaient grand bruit d'un prétendu débarquement d'Espagnols à Sperlonga. La gendarmerie pontificale se mit alors en campagne, et arrêta bientôt le chef de la bande. Serracante avoua tout: on trouva en effet sur lui le portait, un passe-port piémontais, et des lettres du consul. Il a été écroué au château Saint-Ange (1).»

(1)Un journal unitariste de Naples, le Popolo d'Italia, donna également de curieux renseignements sur cette ignoble expédition.

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—Aucune violation ne coûte au gouvernement piémontais, surtout s'il en doit résulter l'arrestation, puis la mort d'un ennemi. Dans le port de Gênes, sur le bateau français l'Aunis des Messageries impériales, les cinq chefs de brigands napolitains, Cipriano La Gala, Giona La Gala, Domenico Papa, Giovanni d'Avanzo et Angelo Sarno, sont arrêtés arbitrairement par les autorités piémont uses, bien qu'ils fassent porteurs de passeports réguliers pour l'Espagne.   Un journal semiofficiel (1) représente ce fait comme «une atteinte au droit et aux. usages maritimes, profondément regrettable en lui-même et à raison des circonstances.» Le journal officiel lui-même le qualifie d'atteinte ù la dignité du drapeau français, aux principes généraux du droit des gens et d'oubli   inexplicable des conventions de la France avec l'Italie (2). Enfin, il n'est pas jusqu'au parlement piémontais où ne s'entendent des paroles de réprobation;»C'est un événement qui a mis le pays en état d'agitation (3).» Le gouvernement français exige d'abord que les cinq capibande lui soient rendus; mais bientôt il les remet aux mains des ennemis de leur patrie; ce qui permet à un organe ministériel (4); de s'écrier avec une sauvage impudeur: qu'ils ont été rendus «parce qu'on a en effet reconnu que les Piémontais ont le droit de tenir en permanence les fourches patibulaires (5) dans les Deux-Sicilies.»

—La presse révolutionnaire, qui applaudit à ces actes odieux, oublie assurément les clameurs féroces qu'elle

(1)Le Constitutionnel, 20 juillet.

(2)Le Moniteur universel, 39 juillet.

(3)Actes officiels de la Chambre, n. 540, page 524.

(4)Gazzetta del Popolo, 11 septembre.

(5) «... Il diritto tener alta la forca.»

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poussa en 1857, contre le gouvernement royal napolitain, lors de la prise du Cagliari. C'est alors que le ministre piémontais à Naples adressait au comte de Cavour la fameuse dépêche du à juillet 1857, affirmant que «la bande insurrectionnelle de Pisacane, dans la province de Salerne, était presque entièrement détruite;  partout où, elle passait, en outre d'être attaquée et battue par la gendarmerie et parles gardes nationales (1), elle trou voit la plut grande aversion dans les populations, qui tuaient et arrêtaient les débandés.» — En relisant cet écrit officiel, on s'explique l'inexplicable barbarie avec laquelle le gouvernement piémontais traite la province de Salerne depuis la conquête, et l'on ne s'étonne plus du chiffre effroyable de ses détenus politiques.

— A la requête du chevalier Nigra (2), ministre de Turin à Paris, le sous-préfet de Cherbourg fait arrêter comme déserteurs plusieurs marins napolitains, à bord d'un navire anglais, dans le port de Saint-Malo. Le commandant en informe télégraphiquement à Paris lord Cowley, ambassadeur d'Angleterre, qui se plaint énergiquement et sans retard de cette violation au gouvernement français, qui s'empresse de faire remettre en liberté les matelots napolitains (3).»

—Au sein du parlement, lors de la discussion sur l'horrible situation de la Sicile (4), un député dit que «toute sécurité y est morte; il n'y a plus de liberté pour l'individu, plus de garantie pour la propriété; il ne s'agit pas

(1) «... E dalle guardie urbane..

(2) Le sieur Nigra, envoyé extraordinaire du royaume d'Italie, fils d'un chirurgien-barbier de village, excelle à faire des brioches et des petits-fours.

(3) Séance parlementaire du 11 juin.

(4) Ibidem:


vai su


-347 -

de brigandage, mais de vraie réaction, produite et fomontée par le fanatisme politique.»

—Que diront nos descendants, s'écrie le Nomade, en lisant ce fameux rapport, dans lequel le général la Marmora confesse que 700 réactionnaires résistent à 90,000-soldats? Que penseront-ils de ce chef de bande Pilone, qui campe impunément aux portes de Naples, en face d'une garnison de 11,000 soldats, et qui menace la vie des généraux sardes, de la Marmora lui-même, et des membres de la maison de Savoie?»

—Ce n'est pas que dans les campagnes que le gouvernement libérateur voit des brigands et qu'il les fusille La fabrique nationale d'armes de Pietrarsa, un des établissements les plus renommés de l'Europe, ayant été vendue au Lombard Jacques Bozza, les ouvriers sont bientôt en butte à toute sorte de vexations, augmentation de travail, diminution de salaire, paroles injurieuses, etc. Naturellement ils se révoltent; les Piémontais accourent et les mitraillent. Six morts et vingt-deux blessés, tel est le résultat de cette glorieuse journée, qui comptera certainement dans les fastes de la conquête sarde. Encore des centaines d'ouvriers, ne trouvèrent-ils leur salut que dans la fuite en se précipitant dans la mer. Un simulacre d'enquête judiciaire aboutit, non à l'arrestation du premier coupable, le Lombard Bozza, mais à celle d'un certain nombre des malheureux ouvriers napolitains (1). Il n'y a pas de justice pour le peuple, sous le régime des régénérateurs? Au contraire, M. Bozza cède son privilège, moyennant 30,000 francs, à MM. Menricoffre et Macry. Le massacre de Pietrarsa pousse au paroxysme l'exécration du peuple contre l'armée d'occupation:

(1)Séance parlementaire du 23 avril.

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«Nous en avons assez, disent les journaux napolitains; le sens moral du pays se révolte; les malheureux citoyens des Deux-Sicilies sont abandonnés à l'arbitraire du sabre, ils ne sont plus protégés par la loi; pleins d'angoisses profondes, nous élevons la voix; nous relevons en face du pays, en face de l'Europe civilisée, contre un parti qui prétend s'appeler un gouvernement (1), qui viole tenacement la justice, qui nous oblige, pour notre légitime défense, à sortir de la loi (2)...» — Au commencement du mois de juin, dans le district de Campagna, principauté de Salerne, on arrête un paysan porteur d'un rapport à S. M. le roi François II, concernant une fausse expédition de réactionnaires. Ce paysan avoue qu'il a été payé par des piémontistes de la province pour se faire arrêter porteur de ces papiers (3).

(1)«... Contro un partito che vuol chiamarsi governo..»

(2)Voir les journaux napolitains du mois d'août, la Campana del Popolo. le Popolo d'Italia, etc.

(3) l'Armonia, de Turin, 4 juin.

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IV

«Malgré tout ce qu'on dit généralement, je ne crois pas que, fi le roi François II s'éloignait de Borne, le brigandage cessât.... A force de se trouver au feu, les bandes se sont aguerries, et maintenant il arrive fréquemment qu'elles attaquent la troupe et la garde nationale (1).»

—«Le brigandage dans les Deux-Sicilies est une protestation contre ce qu'on appelle le piémontisme (2).»

—Le 16 décembre 1862. le parlement, effrayé de la recrudescence du brigandage, décrète l'envoi dans les Deux-Sicilies d'une commission d'examen, composée des députés Aurelio Saffi, Joseph Sirtori, Antoine Ciccone, Stefano Romeo d'Argentine, Stefano C4astagnola, Janvier Sambiase, duc de San Donato, Jean Morelli, Nino Bixio et Joseph Massari. Les commissaires se mettent donc en route, avec une indemnité quotidienne de 15 ducats par tête (3), ce qui fait 700 francs par- jour, et en

(1) L'Opinione, 14 juillet.

(2)Séance parlementaire du 12 juil.

(3) Environ 70 francs par jour.

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fin de compte, 14,788 francs 62 centimes: c'est encore ce qu'il y a eu de plus clair pour le Piémont dans cette burlesque commission d'enquête. D'abord, au lieu de prendre la voie de terre, la plus naturelle eu égard à sa mission, elle se rend prudemment à Naples par mer sur un vaisseau de l'État; puis, aux premiers renseignements qu'elle demande au proconsul la Marmora, celui-ci répond: «Du mois de mai 1861 au mois de février 1863, nous avons tué ou fusillé 7,151 brigands. Je ne sais rien de plus, et ne peux donc rien vous dire de plus.» La commission se met en route comme Marlborough, mais mieux escortée que lui: 60 hommes de cavalerie, 80 homme; d'infanterie, 24 gendarmes; 96 gardes de police, dont 15 déguisés en cochers en valets de pied, ou même en députés, puisqu'il y en a un dans l'intérieur de chaque voiture, armé jusqu'aux denté, à l'instar de MM. les commissaires parlementaires. Encore je ne compte pas la foule des fonctionnaires publics, préfets, sous-préfets, maires, adjoints, conseillers de ceci, de cela, gardes nationaux, gardes mobiles, etc., qui se font un honneur d'escorter volontairement plus ou moins loin les honorables, peu rassurés malgré tout (1). À Avellino, à Poten2a, à Lecce, on les accueille par des rires, des menaces, des chants ou des cris séditieux; au théâtre, on les siffle, comme de méchants comédiens. Les brigands surtout leur rient au nez: chaque matin, pendant le séjour de la commission d'enquête, le courrier d'Âvellino est arrêté par les bandes. A Bari, l'enthousiasme populaire se traduit par une volée de pierres à l'adresse des honorables (2).

(1)Rapport officiel de la commission d'enquête sûr 1er brigandage, page 908.

(2)Le Contemporaneo, 4e Florence, n° tS8.

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En maint endroit, elle reçoit en guise de compliments des lettres anonymes, remplies de menaces de mort. L'un des commissaires, à Foggia, reçoit en pleine face une poignée d'ordure; à l'autre, dans une foule enthousiaste, on yole son chapeau et sa perruque. Enfin ahuris, harassés, dégoûtés, aux trois quarts morts sous la honte et le ridicule, l'infortuné conseil des Dix s'en revint à Turin, clopin dopant et l'orreille basse, et, neuf mois après, en mal de vengeance, accouchait d'un monstre, appelé la Loi Pica.

—«En vingt mois, dit le général la Marmora, nous avons tué ou fusillé 7,151 brigands.» Ce chiffre, exorbitant déjà, sera double, pour le moins, si on y ajoute les nombreuses victimes des bandes de gardes mobiles; du sac de Pontelandolfo, Casalduni, Auletta, et autres villes ou villages mis à feu et à sang par les Piémontais; du préfet de Luca, qui fit mitrailler à Montefalcione cent cinquante paysans, depuis le premier jusqu'au dernier; et enfin celles du typhus, qui décime depuis trois ans ces prisons horribles, démesurément encombrées, dont le visiteur ne s'approche que pour fuir terrifié et parfois mortellement atteint.

—«En plusieurs cas, la répression a outrepassé les limites, de la légitime défense et a servi de prétexte à l'assouvissement de vengeances personnelles. De là, chez beaucoup d'individus le désir de se venger à leur tour et de laver dans le sang des outrages de sang (1).»

—Le Rapport officiel de la commission d'enquête sur le brigandage n'a pas honte de louer comme actes de bravoure les plus ignobles stratagèmes; ceux, par exemple, que la police piémontaise employait dans les Abruzzes, en déguisant en brigands des bandes de ses agents.

(1)Rapport officiel de la commission d'enquête sur le brigandage» page 887, col. 1.

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chargés de soulever et compromettre les populations et de fournir aux geôliers et aux fusilleurs leur contingent de victimes (1).

— J'arrive au journal du brigandage pour l'année 1863, mois par mois, jour pur jour. Ce n'est trop souvent, hélas  qu'un douloureux martyrologe. Encore n'y ai-je consigné que les faits d'une certaine valeur, laissant dans l'ombre la masse de ceux qui fatigueraient l'attention bienveillante du lecteur sans l'éclairer davantage sur le chaos sanglant dans lequel se débat, depuis la chute de Gaête, l'infortuné royaume des Deux-Sicilies.

(1)Rapport officiel de la commission  l'enquête sur le brigandage, page 896.

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V

JANVIER

1. — Dans les Pouilles, les bandes ravagent les biens des riches propriétaires à Ururi, Santa-Croce di Magliano, Larino, Bonefro et Campomarino, égorgeant les bestiaux et brûlant les récoltes. Les bandes Schiavone et Petrozzi soutiennent divers combats près de Foggia, Lucera, Bovino et dans le bois de San Lorenzo. Petrozzi est tué parle capitaine Spotti.

2. — Le major Calcagnini, à la tête d'une compagnie du 20e bersaillers, surprend   Schiavone à Sant-Agata (Capitanate) lui tue deux hommes et fait un prisonnier,qui est fusillé sur place.

Près de Casalbordino (Abruzzes), une bande de 16 réactionnaires, attaquée par une compagnie du 47e, laisse deux morts sur le terrain, et cinq blessés, qui sont immédiatement fusillés.

5. — Sur les limites des provinces de Bari et de Lecce, la bande du sergent Romano, de Gioja, perd vingt hommes dans un combat acharné avec les chevaux-légers de Saluces, commandés par le capitaine Bolosco.

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Combat près de Conversano. Le lieutenant Ruggiero, à la tôle de gendarmes et de gardes nationaux, tue 8 brigands, en prend deux, et les fusille sur place.

6. — Une bande de 24 réactionnaires cerne et désarme un détachement de la garde nationale de Senerchia, province d'Avellino, qui conduisait des recrues au chef-lieu, et les délivre.

Du 1 au 10. — Escarmouche dans le bois de Tonasca, près de Larino, entre un détachement du 29e bersaillers et une petite bande qui perd un mort et deux prisonniers, reconnus pour réfractaires.

La garde nationale de San Martino, province de No-lise, tue deux brigands à cheval dans un bois voisin.

Huit réactionnaires sont fusillés à Conversano (Pouilles)(1).

Du 11 au 19. — Attaque de la ferme Scovaniellô, entre Gioja et Sant'Erano (Pouilles). La cavalerie piémontaise, entendant de Gioja le bruit de la fusillade, arrive en toute hâte au secours de la garde nationale d'Acquaviva, sabrée et mise en déroute par 50 brigands à cheval. L'arrivée de ce renfort inattendu change la face du combat; les brigands battent en retraite, une demi-heure après, abandonnant huit morts et trois blessés.

Escarmouches à Vallo, province de Salerne qui coûtent la vie à quatre gendarmes.

Escarmouches aux environs d'Orsara et de Foggia. — La bande Celico arbore le drapeau bourbonien, et reçoit un enthousiaste accueil des populations des environs de Cosenza.

Combat d'Altamura (Pouilles). Une compagnie piémontaise attaque une bande de 22 brigands à cheval.

(1)Le journal de Salentino, 15 janvier.

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qui laisse deux morts et trois prisonniers, fusillés aussitôt. Les Remontais ont deux morts et sept blessés.

En vue de Vallata, province d'Avellino, les bandes réunies Schiavone et Andretta attaquent deux compagnies du 13e bersaillers et les mettent en fuite, après un court combat. 3 brigands tués.

Combat à Muro (Basilicate), entre 40 réactionnaires à cheval et deux brigades de gendarmerie. Les gendarmes prennent la fuite, abandonnant un des leurs sur le terrain.

A Ripa, province de Nolise, tout deux jeunes gens sont arrêtés dans les champs par un détachement du 29% et on les fusille.

A Fayale (Basilieate), deux inconnus trouvés porteurs d'armes sont fusillés immédiatement.

Dans la commune de Giugliano, province de Naples, la troupe entre de nuit dans la maison d'un pharmacien qui, croyant qu'elle vient pour l'arrêter prend la fuite; un brigadier de gendarmerie le fait tuer à coups de fusil; la veuve éclate en cris de douleur et en anathèmes; le chef du détachement la fait traîner en prison. Mais on la remet bientôt en liberté, devant l'indignation menaçant de la population.

Les bandes réactionnaires campent aux portes de Castellamare.

Les bandes Diavolillo, Chiappetiello et Leone soutiennent, dans les montagnes de Lettere, un vif combat contre un détachement de soldats et de gardes nationaux; un sergent et 4 soldats tués ou blessés; 4 brigands tués.

Dans les Pouilles, un jeune médecin, qui faisait partie des bandes, est fait prisonnier et meurt avec un héroïque courage.

Le chef de bande Guglielmo Ferraro, déserteur du 2e de ligne, est pris et fusillé.

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Le commandant Fumel fait fusiller 30 Calabrais suspects ou convaincus de brigandage. Il fait grâce de la vie à un réactionnaire possesseur d'une immense fortune.

Combat près de Civitale. Le 1er escadron des chevaux-légers de Lucques, commandé par le capitaine Buccî, escortant un fourgon du trésor de Termoli à San-Severo, est attaqué par 80 réactionnaires sous les ordres de Cîcognetti. La lutte dure trois heures et coûte la vie a 3 soldats et 7 brigands.  Les Piémontais ont en outre6 blessés.

Diverses rencontres près de Greci, province d'Avellino, 4 gardes nationaux tués.

Le chef de bande Ninco-Nanco, en réponse aux insinuations que lui fait parvenir le chef de police de Melfi, dit qu'il veut bien se constituer prisonnier, mais qu'il désire d'abord traiter à table des conditions de sa reddition. Le chef de police, escorté de deux gendarmes, va dans la campagne demander à dîner au capobanda, qui les massacre tous les trais.

A Montemiletto, les gendarmes et les gardes nationaux rencontrent 4 brigands à cheval, dont l'un, Antoine Parziale, ex-soldat, est tué.

20. — Dans la nuit, 12 brigands attaquent le poste du 60e, à Galluccio (Terre de Labour).

A Casalenoli, près de Cisternino, un détachement de gendarmerie et de garde mobile rencontre 5 réactionnaires. La lutte s'engage; mais, au bruit, 25 autres brigands accourent et mettent la troupe en fuite.

21 et 22. — Combat dans le bois de Monticchio (Basilicale), entre la bande Crocco-Caruso et un détachement de 150 hommes. Les brigands vont camper dans le bois de Castiglione.

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Combat près d'Acerenza. Les brigands laissent 3 morts et 2 blessés, quî sont fusillés à terre (1).

Les chefs de bandes Pascal Franzese et Joseph Gallo sont fusillés à Genzano.

François Viceconte, qui avait déserté du 17e avec armes et bagages, est fusillé à Ottati, province de Sale rue.

Du 24 ou 29. — Combat au bois de Matera, entre 30 réfractaires et un détachement d'infanterie. 1 Piémontais tué et 5 blessés. Aucune perte chez les brigands.


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La troupe arrive de nuit à Liscia, commune de 1,500 âmes (Abruzzes), et se dirige vers le poste de la garde nationale. En route elle rencontre un groupe d'honnêtes citoyens, qui célébraient le carnaval à grand renfort de trompettes, et qui, à la vue des baïonnettes, se prennent de peur et jouent des jambes. La troupe fait feu, en tue un, en prend deux autres, et les fusille séance tenante. Le chef du détachement   ne fut même pas

(1)Fusiller des blessés! On pourrait croire que ce n'est là qu'un fait isolé de férocité; non, le gouvernement approuve officiellement tout ce qui est ignominie et barbarie. La Gazette officielle du royaume d'Italie, 26 janvier, contient ce télégramme, daté de Potenza: «Combat entre troupe et brigands. Trois de ceux-ci tués et deux blessés faits prisonniers et fusillés. Faut-il placer en regard de cet odieux télégramme la générosité de certains chefs de bandes? Les journaux salernitains rapportent que le maire et le juge de paix de Castelluccio, capturés par les brigands, ont été renvoyés sains et saufs au bout de trois jours. — Au mois d'octobre 1862, la bande Tardio, dans un combat avec la gendarmerie et les gardes nationales de Centola et Laurito, fait un grand nombre de prisonniers, parmi lesquels le lieutenant Arone leur fait jurer de ne plus combattre contre ceux qui luttent pour l'indépendance de la patrie, les désarme et les renvoie sans aucun mal.

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recherché; il aura reçu de l'avancement... ou la croix du Mérite militaire!

90. — Le marquis Avitabile, directeur de la banque, est pris par Pilone aux portes de Naples. Quelques jour» après, Pilone manque d'un quart d'heure le général la Marmora aux ruines de Pompéia. M. Torelli, lieutenant de la garde nationale de Portici est arrêté comme prévenu de favoriser Pilone. La police procède, à la même époque, à un grand nombre d'arrestations, sous le même prétexte.

Une bande de quarante brigands à cheval campe entre Cerignola et Orta (Pouilles). Une autre de 30 hommes occupe le village de Cellola.

31. — Combat à Lagopesole (Basilicate). Ninco-Nanco perd trois de ses plus énergiques compagnons, Vito Gavillo, Nardiello et Cugino, et quatre autres qui sont pris et fusillés par là cavalerie piémontaise (1). Le même jour, l'agence Stefani annonce télégraphiquement, à la gloire du royaume d'Italie, que 15 brigands ont été tués, 9 faits prisonniers, et beaucoup blessés. — Mentir, toujours mentir!

Le Journal officiel de Naples signale des bandes à Orsara, Martino, San-Demetrio in Tarsia, Monteleone, Fognano; le Nomade, à Torre del Greco, Gampobasso, Grotte, Liscia, San Buono, Accadia, San-Sossio; le Corriere d'Italia, Altamura, Monteforte, Bisignano; le Popolo d'Italia, à Cervinara, San-Martino, Montesarchio, Taburno et Santa-Groce di Magliano. — Un certain nombre de députés napolitains exposent au parlement la déplorable situation des Pouilles, affreusement ravagées par le brigandage. Le ministère répond qu'il est pénétré et promet d'y envoyer des renforts de cavalerie. en attendant, il étudie le projet d'un général, qui

(1)Journal officiel de Naples, n. 26.

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propose la formation d'an corps spécial de bersaillers à cheval pour la chasse aux brigands.

La Gazette officielle de Turin publie une liste de 197 récompenses et de 322 mentions honorables «pour actions de courage contre les brigands.»

FÉVRIER

1. — Combat aux environs- de Lagopesole (Basilicate) Le chef Coppa est blessé à la tète: 11 brigands sont tués, 4 autres sont blessés, pris et fusillés. Le rapport piémontais dit: «qu'il a été pris en outre un cheval et une femme.»

2. — Le jour de l'arrivée à Foggia de la commission d'enquête sur le brigandage, une petite bande de 10hommes enlève au sieur Siniscalchi 28 vaches, et exige pour les rendre une rançon de 2,000 ducats.

3. — Quatre brigands sont fusillés à Foggia.

5. — A. Pastena, près Gaête, la bande Tristani attaque et disperse une compagnie piémontaise.

Du 6 au 9. — Combats dans le Bénévent, Schiavone tue aux Piémontais 45 hommes, en blesse 83, et grossif sa bande de 60 déserteurs.

Le province de Molise est parcourue par de nombreuses bandes. Cent brigands à cheval campent à Sepino. Une bande de 20 cavaliers campe à Centocelle, dans le bois de Ficarola. Les gardes nationales n'osent plus sortir des communes.

10. — Combat de Corigliano (Basilicate). La garde nationale, cernée pais les brigands, perd 11 hommes; 16 autres ne doivent leur salut quà une fuite précipitée.

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Près Paduli, massacre de plusieurs officiers de garde nationale et d'un officier de gendarmerie.

11. — Un détachement à cheval de la bande Tartara arrête le courrier sur la rive de l'Ofanto, et brûle toutes les lettres.

12. — A Fognano, Calabre, le Piémontais Fumel fusille 10 individus suspects ou convaincus de brigandage.

18. — Raphaël Zingone, capitaine de la garde nationale de Prajano, province de Salerne, est arrêté et mis à rançon dans son propre domaine, pendant qu'il surveillait ses ouvriers.

19. — L'arrondissement de Gallipoli est sillonné en tous sens par de nombreuses colonnes do troupes, lancées à la poursuite de la terrible bande Sturno, populaire dans la province. Sturno,  de Parabita, caporal dans l'ancienne armée royale napolitaine, est un jeune homme de vingt-six ans, le type du brigand chevaleresque et héroïque. Le vol et la férocité sont invariablement punis de mort par lui. Il ne combat les ennemis de sa patrie qu'avec des armes royales, et toujours il les met en fuite et disparaît après leur avoir tué plusieurs hommes. Les paysans l'appellent «Sturno, le joli héros.» A Allista, il bat un détachement de gendarmes; puis il entre dans Gagliano, à la tête de sa bande, fait raccommoder ses chaussures et celles de ses  compagnons, paye largement les cordonniers, qui l'appellent Excellence, offre à boire aux siens dans le café du lieu, et se retire paisiblement en apprenant l'approche des Piémontais. Il va se poster sur la hauteur, leur lâche une volée de 150 coups de fusil, et regagne tambours battants la montagne. —Les Piémontais accusent la population de complicité et opèrent un désarmement général.

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— Le commandant de la garde nationale s'est enfui; on arrête à sa place le lieutenant Ritanti, et on le fait passer en jugement; le curé, après la plus rigoureuse visite domiciliaire, est chassé du pays; l'adjoint, faisant fonctions de maire, et le cordonnier raccommodeur, le cafetier et une foule de gens accusés d'admirer Sturno, sont également jetés en prison. — Il faut dire que, depuis quatre ans, Gagliano n'a pas fourni un seul soldat aux Piémontais, bien qu'ils aient emprisonné tous les parents des réfractaires jusqu'au 3e degré; ce qui explique, sans les excuser, les odieuses mesures de la soldatesque subalpine.

20. — Un brigand est fusillé à Panni, Capitanate.

24. — Deux brigands sont fusillés à Melito.

27. —Dans le bois de France villa, près Bénévent, un détachement du 16e de ligne, commandé par le lieutenant Lauro, est cerné par la bande Schiavone, qui tue onze Piémontais, parmi lesquels le chef du détachement (1).

28. —Soixante brigands à cheval attaquent le courrier des Abruzzes, entre Venafro et Isernia, brûlent les lettres et dépouillent les voyageurs, parmi lesquels se trouvaient plusieurs militaires.

A Sciuscello, près Naples, combat qui coûte quatre hommes à Pilone, trois tués, le quatrième pris et fusillé.

Janvier Serraracio est fusillé à Santa-Croce di Magliano, et Félix de Nisio, à Montazzoli, Abruzzes.

Les journaux annoncent qu'à la suite des tournées de gardes mobiles de Frigento, soutenues par la troupe, dans les bois de Sturno, Gesualdo et Grotta-Carife, provinces d'Avellino et Bénévent, on a fusillé douze brigands.

(1) Le journal le Popolo d'Italia, 5 mars.

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MARS.

Du 1e au 3. — La garde nationale de Maddaloni, on détachement d'infanterie et de gendarmerie, attaquent, pré de Cancello, une ferme occupée par les brigands, qui venaient de capturer le maire de Santa-Maria-a-Vico. Le chef de là bande est tué, un brigand est prié et fusillé (1).

La bande Pilone devient la terreur de la province de Naples, surtout depuis qu'elle s'est accrue de quatorze déserteurs du 7e de ligne, en garnison à Boscotrecase. Le colonel piémontais irrité jure de détruire Pilone et sa bande et lance après lui une armée d'espions. Sur leurs renseignements, les Piémontais se mettent en campagne et surprennent Pilone dans une petite ferme, avec trente de ses compagnons. Le combat s'engage: une fusillade bien nourrie décime les assaillants. Tout d'un coup, l'héroïque capobanda, a la tète des siens, se précipite hors de la ferme, le sabre et le pistolet au poing, et passe comme la foudre à travers les rangs ennemis. Trois brigands tombent morts sur les cadavres piémontais. Un quatrième est blessé et fusillé à terre après le combat. Un cinquième, frappé d'une balle à la jambe droite, s'adosse à un arbre et se livre à une défense désespérée; il charge, décharge, et recharge son arme jusqu'à ce que les cartouches lui manquent.

(1)Nos renseignements étant le plus souvent pris aux sources piémontaises, nous ne pouvons que rarement accuser le chiffre des pertes subits par les Piémontais.

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Alors plusieurs gardes nationaux s'approchent de lui, l'insultant, ces braves, mais tremblant encore.—Parmi eux est le prêtre défroqué Bifulco, qui, en voulant lui brûler la cervelle, lui brise une oreille, tant la main de ce misérable lâche était assurée!

«— Va, lui dit le soldat de Pilone, il n'y a pas dé gloire à tuer an brigand déjà mortellement blessé; mais il y a de la gloire à tirer vingt-sept coups de fusil et jeter bas dix-sept ennemis, comme je viens de faire, moi!...»

Les braves Piémontais achèvent ce héros à coups de fusil et de baïonnette; puis ils complètent leur victoire en mettant le feu à la ferme, où ils n'ont pu prendre Pilone!

5. — A Corato, province de Bari, un détachement du 15e de ligne surprend an petit détachement de brigands, dont quatre sont pris et fusillés par derrière (1). — Un Piémontais est tue dons la lutte.

Dans une ferme de Padulli, le maire de Castelbaronia, province d'Avellino, et le sieur Leone, officier de la garde nationale, à la tête de quinze hommes, s'emparent des brigands Philippe Capobianco et Philippe Cipriani, et les fusillent.

A Buonabitacolo, province de Salerne, sont fusillés les brigands Angelo Gozii et Francesco Citera.

Combat de Fusiello, entre la quatorzième compagnie du 38e de ligne et. la bande Andreotti. Le brigand Antonio Casciano, de Teora, est pris et fusillé ensuite à Avellino

Le brigand Henri Alessandro est pris, par la garde nationale de San-Giorgio la Montagna et fusillé à Bénévent.

(1) Bourreaux!

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6. — Quatre brigands sont massacré» par une Compagnie du 55e dans la ferme de Sazano, près Foggia.

Le chef de bande Varanelli et te moine Donato Pacifico périssent dans une embuscade de la garde mobile d'Alberona.

On trouve près de Troja le cadavre de Joseph Palumbo, de Greci.

Le brigand Xavier Longo est pris par les lanciers de Montebello, et fusillé à Foggia.

7. — Un brigand, pris par les gardes nationales de Savignano et Greci, est fusillé à Foggia.

Le chef de bande Dominique Fanti, livré par un espion largement soudoyé, est pris et fusillé à Fara-San Martino (Abruzzes).

Le maire de Sassinoro, province de Molise, est arrêté par deux hardis brigands dans son moulin; son meunier survient et profite de la circonstance pour se faire signer l'acquit d'une dette de 300 ducats; ensuite le maire piémontiste est traîné dans le bois et sommé de payer 20,000 ducats de rançon; sur son refus, il est tué. Le meunier et ses deux complices sont pris et fusillés.

Quatre marchands sont massacrés sur la route de Roccamandolfi à Bojano, province de Molise.

8. — Combat entre lés gardes nationales de Vescovado et Nocera dei Pagani et la bande Diavolillo; un brigand tué; quatre pris et fusillés.

9. — Trois brigands de la bande Pilone sont pris et fusillés.

Schiavone menace d'envahir la commune d'Accadia (Pouilles). La garde mobile l'attaque, le met en fuite, après lui avoir blessé ou tué cinq hommes.

11. — La bande Crocco, forte de 58 hommes à cheval, arrive près de Cerignola (Pouilles), et fait des réquisitions de chevaux, d'armes, de munitions et de vivres.

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12. — Le commissaire de police de San-Severo (Pouilles), à la tète d'un détachement de gardes nationaux et de gendarmes, attaque la bande Villani, tue quatre brigands, et s'empare d'une certaine quantité de fusas et de munitions.

13. — Les brigands sont impitoyables pour les espions et les traîtres. Pascal-Joseph de Biase, de Cusano, convaincu d'espionnage au profit des Piémontais, est arrêté par une bande dans sa maison, entraîné dans les bois et massacré.

14. — Non loin de Melfi, un détachement de dix-huit chevaux-légers de Saluées, commandés par le lieutenant polonais Bianchi, est ataqué et massacré tout entier par les bandes Crocco et Coppa. Immédiatement sont lancées à leur poursuite de nombreuses colonnes de troupes, entre autres l'escadron tout entier des chevaux-légers de Saluées, qui brûlent de venger la mort de leurs compagnons d'armes. Un de leurs officiers, plus bouillant que les autres, se jette eu avant-garde à la tête de plusieurs soldats, rencontre l'arrière-garde des brigands, en tue cinq et en blesse un certain nombre: mais au moment où il passe au pied d'une vieille muraille, un peu plus loin, il est accueilli par un feu de peloton de la bande tout entière, et tué raide avec deux de ses hommes — En relevant les cadavres des cinq brigands, les Piémontais reconnurent parmi eux deux propriétaires piémontistes de Corato, capturés la veille par les brigands, et gardés par eux en otage jusqu'à ce que leurs familles eussent envoyé leurs rançons.

Le sieur Pomarici, capitaine de la garde nationale, fait fusiller, à Montescaglioso, Giuseppe Motta, suspect de brigandage.

A. Termoli, on fusille un brigand de Portocannone.

16. — Vincenzo Asdreotti est fusillé à Lanciano.

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16. — Sur la dénonciation de l'espion Antonio Sarabi, le brigand Michel Vitale est pris par le capitaine Avuto et fusillé à San-Severo.


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Combat près de San-Severo. Le chef débande Mangiacavallo est tué ainsi que son cousin Mercurio, et deux brigands sont blessés.

Attaque de la ferme Colatraglio (Pouilles), occupée par la bande Caruso. Un brigand est pris par les gardes mobiles de San-Marco la Cattola et Volturara, fusillé par derrière, puis décapité; enfin les vainqueurs parcourent le pays portant triomphalement au bout d'une baïonnette cette glorieuse tête de brigand!

18.— Les nouvelles des Calabres annoncent que les bandes parcourent le pays, assaillant les riches propriétaires, massacrant ou emmenant les troupeaux.

19,— Combat au mont Tagliaferro, près Caserte, entra un détachement du 40, commandé par le major Zettini, et plusieurs brigades de gendarmerie. Cinq brigands tués,trois blessés.

Du 20 au 25. — Deux brigands sont fusillés à Castelnuovo de Capitanate.

On fusille à Avellino deux brigands, déserteurs du 13 de ligne.

Caétan Ciarmella, de Rovino, Joseph Volino, de Ragus (Sicile), et Giovanni Giovannini sont fusillés à Foggia.

On fusille un brigand à Torino (Abruzzes); un à Palata; six à Mignano, arrondissement de Sora, faits prisonniers dans un combat avec le 60 de ligne au mont Cesima; un à Frosolone et un à Campomarino.

Depuis le 19, une bande de quarante hommes, armés de carabines rayées, avec deux drapeaux, l'on noir et l'autre rouge, parcourent la campagne de Canicatti, Sicile. Le chef est vêtu militairement.

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La bande se tire heureusement de plusieurs rencontres avec la trempe, entre autres dans la vallée de Casagrande.

Le Hongrois Polsaris, officier d'artillerie au service du Piémont, est massacré aux environs de Canicatti, qu'il gagnait escorté des frères Ortisi et d'Angelo Micoli, soldats à cheval, qui ne doivent la vie qu'à la fuite.

Une brigade de gendarmerie, prise pour une bande de brigands par des gendarmes et des garde mobiles en embuscade dans la campagne de Gravina, est reçue à coups de fusil. Le brigadier Jean Luciano est tué.

Attaque d'une ferme, près de San-Marco in Lamis, Le capitaine du génie Annibal Valentini est tué.

Combat sur le mont Gargano. Le commandant Mari, du 55% tue un brigand, en blesse trois, les prend et les fusille.

Combat acharné près du lac de Lésina entre les lanciers d'Aoste et les brigands. Treize piémontais et dix sept brigands tués ou fusillés.

Combat sur le mont Mutria entre la troupe et la bande Cosmo Giordano. Les brigands reçoivent le renfort inattendu d'une autre bande et mettent en faite les Piémontais, après leur avoir fait subir de grosses pertes.

A Cosenza, un prisonnier fugitif est fusillé,—D'ordre du sous-préfet et du commandant de la garde nationale, on fusille le brigand Cialla.

La garde mobile de San-Marco la Cattole dans la campagne, près de San-Bartolomeo in Galdo, le brigand Joseph Pisani, de Torremaggiore, le blesse, le prends le fusille.

Le brigand Salvatore Pinto est pris à Baranello et fusillé le lendemain.

Combat aux environs de Torremaggiore. Les brigands Jean Lotti et Dominique Mastrolitti son tués par un détachement de bersaillers et de hussards de Plaisance.

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27. — Trois brigands sont fusillés & Foggia.

29. — Combat près de Buonalbergo, province de Bénévent, entre un détachement de bersaillers et la bande Schiavone; quatre brigands blessés.

Deux paysans, Antonio Ariemma et Antonia Porrazzo, sont surpris en armes dans la campagne par la gendarmerie et la garde nationale, conduits à Santa-Croce dî Magliano et fusillés.

Combat sur le mont Griffo, province d'Avellino. Le chef de bande Malamisura est pris, ainsi que son compagnon Angelo de Pietro, et fusillé avec lui; puis on porte les corps au cimetière. Pendant la nuit, Pietro revient à la vie, se traîne jusqu'à Troja, et se présente chez le chef de police, qui le fait conduire à l'hôpital (1).

31. — Le brigand Giosué Ferrero, déserteur, est arrêté dans sa maison, à Laviano, où il soignait ses blessures, et fusillé.

Dans la dernière quinzaine du mois, quatorze brigands ont été fusillés dans la seule province de Môlise (Si).

En Capitanate, dans ce premier trimestre, on compte 135 brigands pris, tués ou fusillés (3).

Un journal piémontiste de Naples résume, comme il suit, ses observations sur le brigandage: «Dans plusieurs localités, les brigands entrent sans être inquiétés, se logent, se fournissent de vivres, et de vêtements, et non-seulement ne sont pas pourchassés, mais au contraire sont traités avec faveur. On ne nie pas qu'il y ait des 1 maires et des officiers de garde nationale qui trahissent volontairement; mais souvent aussi, par peur et par faiblesse qui le font malgré eux.

(1)Le Journal la Nuova Daunia, 31 mars.

(2)Le journal la Forbice di Sicilia, n. 101.

(3)La Nuova Daunia, di Foggia.

—369—

Les conspirations bourboniennes redoublent d'audace et se propagent; eues fournissent les brigands de vivres, de munitions, d& vêlements, de remèdes, et les avertissent fidèlement du nombre des soldats et de leurs mouvements. Qu'on ne croie pas que les brigands opèrent au hasard; ils exécutent un plan préconçu (1).»

AVRIL.

1.— En Calabre, la bande Monaco attaque le baron Salvatore Dramis et son fils, escortés de huit gardes armés, en tuent un et mettent le reste en fuite. Furieux de n'avoir pu s'emparer du baron, les brigands égorgent les bestiaux, ravagent ses terres, et massacrent un pauvre vieillard de San-Severino.

Le capitaine Mauro, à la tête d'un détachement de bersaillers, attaque la bande Schiavone près de San-Giorgio la Montagna, la poursuit trois heures durant jusqu'à Apice, lui tue deux hommes et lui prend trois chevaux.

Luigi-Francesco Notari, de Paterno, espion piémontais, est pris et massacré par la bande Masini.

2.— Combat près de Ginestra, Basilicate. Trois brigands sent tués, sept blessés, onze se constituent volontairement prisonniers; dix-huit chevaux, des armes et des vêtements tombent aux mains de l'ennemi.

Combat sur le mont Cubante, province d'Avellino.

(1)Le journal la Patria, 27 mars.

—370—

entre un fort détachement de bersaillers et 90 brigands à cheval de la bande Schiavone, dont un est tué. Le reste de la bande va dévaster les fermes de San-Giorgio.

3, — La même bande est attaquée par la garde mobile d'Anzano, à Palazzolo, et la met en faite.

Escarmouche entre la petite bande de Pietro Battaglièse et un détachement de la garde nationale de Sanza, commandé par le sergent Rocco Barzelloni et soutenu par la gendarmerie. Sont pris et fusillé à Sanza les brigands Vilani d'Alfano et Salvatore Gabardelia de Centola. Les meurtriers piémontais trouvent sur ce dernier un brevet de caporal dans la bande Tardio.

Le capitaine Baudin, à la tète d'une compagnie du 45e prend dans le bois de San Giorgio et Molinara, Antonio Gentilcore, de la bande Schiavone, qui est immédiatement fusillè.

Combat près d'Ariane entre la bande Calabrese et le détachement commandé par le capitaine Borgogna. Est pris et fusillé le fameux Mastrangelo d'Anzano.

Les journaux napolitains annoncent que l'ignoble Fumel a fusillé, en peu de temps, dons les Calabres, trois cent soixante individus.

4. — Le commandant Brero, à la téta d'un détache ment du 33 et de la garde nationale de Monteteone, tue Léonard de Greci, lieutenant de la bande Schiavone, fait trois prisonniers et les fusille.

En six jours, dix-neuf brigands sont pris, tués on fusillés dans la province d'Avellino (1 ).

Des soldats rencontrent dans les champs un paysan de Campobasso, qui, la veille, les avait surpris et chassés. au moment où ils outrageaient sa femme, bien qu'elle allattat son nouveau-né.

(1)Dépêche officielle, Giornale ufficiale de Naples, n. 73.

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Les braves arrêtent lé pauvre paysan, l'accusent de brigandage, et le fusillent (1).

Les brigands Antonio Rinaldi et Fattaro sont arrêtés aux environs de Montecalvo, et fusillés à San-Marco in Lamis. — Un brigand est fusillé à Deliceto

Les communes de Frasco, Solopaca, Sant'Agata de Goti, sont terrifiées par l'audace des bandes réunies d1 Antonio Mazzuto et d'un autre capobanda, qui se fait appeler le général Sproppa.

5. — Deux prêtres de Casal-Trinita sont capturés par les brigands; sept autres personnes sont capturées, non loin de là à Casalbori, et cinq à Agerola, que les brigands renvoient presque aussitôt sains et saufs.

Les environs de Torre del Greco et de Torre Annunziata étant infestés par le brigandage, la police procède arbitrairement à l'arrestation de deux cents suspects, qui sont ensuite déportés à Ischia.

Du 6 au 8 — Combat près de Muro (Basilicate), Mort de Vito Coppola.

Sur la dénonciation de l'espion Joseph Cervoni, largement soudoyé, deux brigands sont arrêtés et fusillés à Muro.

Deux déserteurs armés, Lauda et Ruffo, sont pris par les gendarmes de Montecalvo et fusillés.

Luigi Quecchia de Taurosi est surpris et tué par le commandant de la garde nationale de Morra et le lieutenant d'Ettore.

Un brigand est fusillé à Bénévent.

Une bande à cheval arrête le courrier des Abruzzes, à Bomba, et détruit les lettres.

Une bande de sept individus antre dans la forme du piemontiste Nicolas Cicchetti, et le tue au milieu de vingt-deux des siens.

(1) Le journal le Portafoglio Maltese, 4 avril.

—372—

Quarante brigands entrent par surprise dans Monreale, Sicile, échangent avec la garnison une volée de coups de fusil et se retirent dans les montagnes après avoir tué un gendarme.

9.— A Eboli (Terre de Labour), assassinat du révolutionnaire Antonio Viviani.

Une bande massacre le bétail du baron Perroni, à Sellia, Calabres. Deux brigands sont fusillés au bois de Bomba.

10.— Le brigand Vite Treccine, de Bisaccia est pris par le détachement du commandant Brera et fusillé.

11.— Le chef de bande Pascal Soiazzo, après une défense désespérée contre la garde nationale de Montecalvo, province d'Avellino, est surpris par celle d'Ariano, et fusillé sans jugement.

Un détachement de gendarmes, de soldats et de gardes nationaux, ne pouvant atteindre quatre brigands sur te territoire de Ruvo, déchargent leurs armes dans la direction des fugitifs, et tuent Vito Coppola, de Laviano.

Du 15 au 19. — Pascal Lettieri est arrêté a Novi par la gendarmerie, et fusillé trois heures après.

Rencontre entre un détachement de grenadiers et la bande Puppizzi, aux bords de l'Ofanto. De cinquante brigands, deux sont tués et trois blessés. Deux chevaux, des vivres et des muuitions tombent aux mains de Piémontais.

Dans les Pouilles, le malheureux chef de bande Nicandro Polignone, qui, plusieurs mois plus tôt, s'était enfui de sa prison, est repris avec quatre de ses compagnons, et fusillé par derrière dans une ferme, lui cinquième.

Combat près de San-Severô, Caruso perd son neveu et un muet renommé pour son audace et sa férocité.

Deux brigands sont fusillés à Bénévent; et à Monte-Sant'Angelo, deux paysans, faussement accusée d'avoir favorisé la fuite d'un brigand.

—373—

Escarmouche aux bords de l'Ofanto. Les hussards tuent deux brigands de Caruso.

Egidio Cosentino est pris et fusillé par la garde mobile de Senise (Basilicate).

20. — L'escorte d'un brigand, transféré de Popoli a Aquila, le massacre en chemin.

Vîngt-deux brigands de la bande Cianci sont attaqués dans une ferme, près de Cangiano, dans le Bénévent, par une colonne de bersaillers et de chevaux-légers de Milan, et leur opposent une résistance longue et acharnée. Les Piémontais mettent le feu à la ferme. Déjà dix brigands étaient tombés dans la lutte; onze furent brûlés vifs; le dernier est pris, essayant encore de charger son fusil, à dix pas de la ferme, et est fusillé la tête en bas. Le commandant de la colonne est blessé avec onze de ses hommes, et deux sont tués.

21. — Les ouvriers employés à construire les nouvelles routes du Gargano découvrent dans un endroit, écarté de la montagne, deux canons abandonnés. Les uns veulent qu'ils y aient été cachés par des artilleurs de l'ancienne armée royale napolitaine; d'autres par une' bande à court de boulets: ce qui revient toujours au même.

Quatre brigands sont fusillés, à Bénévent, Torremaggiore, Pietralci et Muro.

23. — Cinq brigands sont fusillés à Piedimonter d'Alife, San-Marco in Lamis et Lanciano.

Les brigands Bellasoma, Mprisani et d'Alessandro sont pris par la garde mobile de Vasto, dans le bois de Cantapulo, et fusillés.

24. — Michel Biscaglia, suspect de brigandage, est arrêté par la police uni à la gendarmerie, et fusillè à Foggia.

—375—

25 — Escarmouche avec les lancieri d'Aoste, pris de Serracapriola. Mort du brigand Butti.

26. - Un brigand est fusillé à Campo di Giove (Abruzzes).

27. - La brigand Raphaël Masi est fusillé à Aquila.


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Le député napolitain San Donato se plaint au parlement de la recrudescence du brigandage et demande instamment au gouvernement d'empêcher les continuels débarquements d'individus qui, de Malte, viennent grossir les rangs de la réaction.

80, — Paolo Carminé, dit Scardessa, est pris par un détachement de soldats et de gardes mobiles, et fusillè près d'Apricena.

Le commandant de la garde nationale de Montemasolfi déclare qu'un détachement de soldats et de gendarmes et un lieutenant du 30e se sont enfuis au premier feu des Brigands.

La bande Cianei massacre Nicolas Mascariello et quatre des siens, pour s'être ralliés aux Piémontais.

Combat de Cervinara, mort de cinq soldats et de trois brigands.

Combat de Pratola. La bande Tamburini n'a que trois blessés; quatorze Piémontais sont tués ou blessés.

MAI.

1. — Recrudescence du brigandage dans la province de Salerne. Vietrî est envahi et saccagé de nuit une seule maison y perd 40,000 francs (1).

(1) Le journal l'Avvenire, 5 mai.

—375—

2. — Combat entre Castellamare et San Vito (Sicile) à la suite d'un débarquement de troupe qui se rencontrent avec une bande de cinquante brigands, contenue des plusieurs autres petites bandes, qui hercelent le Piémontais  et leur barrent les routes.

Escarmouche avec la gendarmerie de Favara.

3. — L'avant-farde d'un corp de troupe, sorti de Castellamare (Sicile) est attaquée par les brigands a Costalengo; un sergent et un soldat sont blessés. La bande bat en retraite devant le détachement, qui arrivait au pas du course.

7. — Dans la nuit, les bersaillers attaquent, aux environs de Teramo, la bande Stramenga, déjà cernée par un fort détachement de gardes mobiles. — Le brigands se défendent avec un héroïque sang-froid, perdent la moitié de leur monde, puis, prenant une énergique résolution, se jettent à travers les lignes ennemies et s'enfoncent du côté d'Ascoli, sans être poursuivis par les Piemontais, barrassés et terrifiés sans doute par tant audace.

Il se répand dans Aquila une proclamation que l'Opinione, de Turin, attribue a chef de bande Tristani:

«Citoyens d'Aquile.

Nos cœurs ne se sont pas endurcis au métier des armes; ils savent toujours éprouver la reconnaissance et l'amour. Nous sommes partis,  brûlant pour vous d'une patriotique affection, partant avec nous la haine éternelle à l'impur gouvernement qui vous domine, et surs d'une généreuse hospitalité dans votre province. Quelles douces impressions éprouvent nos cœurs! Si nous serrons une main, c'est la main d'un ami; si nous

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entendons une voix, c'est la voix d'un ami.— nous, magnanimes citoyens d'Aquila! Nous vous vengerons, nous vengerons le sang de vos, frères morts! Nous venons joyeux, parce que nous sommes appelés à une mission sacrée, qui nous est chère autant que, le nom de notre roi François II. Oui, nous vaincrons, parce que l'Éternel est avec nous! Vous accourrez au bruit de nos armes, à la voix de celui qui nous guide, et après avoir détruit les iniques assassins de nos fils, les vampires de notre sang, nous élèverons au Dieu des armées un autel, sur lequel, entre la gloire et la reconnaissance, l'hospitalité et l'amour, vos noms seront gravés plus durables que le bronze, puisqu'ils le seront dans le cœur de nos descendants, avec cette épigraphe: «Ils sont nos fils, eux qui n'ont pas dégénéré de la gloire des héros de Lodi et autres champs de bataille, où, en versant leur sang illustre, ils prouvèrent que les phalanges françaises, bien que conduites par la nouveau César italien, n'étaient pas invincibles en lace des épées napolitaines. Salut, citoyens, nos frères! Dieu bénit vos bras et les nôtres. Vive notre roi!»

Dans le district d'Avezzano, 106 personnes sont arrêtées comme complices de Tristani.

Du 8 au 10. — Sept hommes de la bande Tristani sont pris et fusillés entre Chieti et Aquila.

Trois réactionnaires sont fusillés à Vallo, province de Salerne.

On fusille à Teramo un inconnu, arrêté près du pont Tedicio, aux portes delà ville, et qui avait refusé de répondre à toutes les questions du chef de la police (1).

Le Journal officiel de Naples relate un engagement, près de Sala, province de Salerne, avec une bande, dont la plupart des hommes étaient habillés un gendarmes et en ben aillers, 4 brigands blessés.

(1) Le Journal le Popolo d'Italia, 9 mai.

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11. — Parmi les bandes du Matese, on en signale une nouvelle, commandée par Caporaso, ancien sous-officier de gendarmerie.

Une bande de 80 réactionnaires, venus de Malte, débarquent aux environs de Pozzuoli.

Combat de Gujano (Abruzzes), à brigands pris et fusillés par derrière.

La garde nationale de Giugliâno, province de Naples, découvre, caché dans les blés, le capobanda Pietro Faraone, frère du commandant de la garde nationale de San-Pietro a Patierno, très-grièvement blessé. Sur son refus de nommer ses compagnons, il est immédiatement fusillé à terre (1).

Escarmouche à Abriola. 5 gendarmes tués.

Aux environs de Marsico, combat entre 60 brigands et un détachement d'infanterie, 5 Piémontais tués, 4 blessés.

Assassinat d'un piémontiste dans la vallée de Montemurro.

Le propriétaire Nicola Pecora, de peur d'être capturé par les bandes, se fait donner une escorte de 12 soldats. En chemin, il est attaqué par une forte bande qui massacre son escorte tout entière et lui impose une forte rançon.

Sac de la ferme Cascini et meurtre du fermier.

Un petit détachement de 11 soldats, envoyé en tournée de chasse aux brigands, se réfugie précipitamment dans Moliterno, pour échappera une bande de 90 piétons et 8 cavaliers.

(1)Le journal Roma, 12 mai.

— 378 —

Une bande de 20 hommes, équipés militairement, campent sur les monts de Roccaguglielma, province de Gaête.

Escarmouche à Atella, province de Melfi. Les bersaillers tuent un brigand, en prennent un autre et le fusillent sur place.

Rencontre, à Avigliano, de la bande Coppa et de 13 gendarmes, dont 4 sont blessés.

Le bruit prend consistance dans les populations, que bientôt une armée étrangère doit envahir le royaume, en chasser les Piémontais et restaurer les princes nationaux (1).

13.— 4 brigands sont fusillés, 1 à Bénévent, 2 à Montereale, 1 à Grumo.

14. — Combat près de Teora, provinoe d'Avellino. Les hussards perdent 1 officier, 1 sous-officier et 6 cavaliers; ils comptent en outre 5 blessés, parmi lesquels le lieutenant Cugia. 3 brigands tués.

Combat à Sant'Agata (Capitanate), sans résultats.

M. Boccabruna, ancien officier napolitain, est fusillé à Aquila.

4 brigands sont fusillés à Ghieti.

Le chef de bande Chioppetiello est fusillè à Graguano.

16, — Combats de Monteverioo, Castelluccio et Taverna-Graziano.

Escarmouche aux environs de Gravina. Un détachement de la garde mobile à cheval, commandé par un sieur Mennuni, prend et fusille 8 hommes de la bande Serravalle.

11. —A Avigliano, un brigand est fusillé par la garde nationale.

Combat pies dé Corleto. La bande Masini, forte de 40 hommes, sort du bois de Lama et tue 7 Piémontaises.

(1)Le journal le Diritto, de Turin, 15 mai.

— 379 —

Combat près de Lavello, entre un bataillon d'infanterie et une bande d'environ 200 réactionnaires, 11 soldats tués et 15 blesses.

Sur le territoire de Nola, un détachement du 8 grenadiers attaque une bande sang résultat.

Le courrier de Martin à Tarante est arrête et dévalisé.

Combat au Cilento, province de Salerne, entre la bande commandée par le jeune Tardio et les gardes môbiles de Centola et Laurito, 9 gardes mobiles blessés.

181 — Près de Massalubrense, province de Naples, une brigade de gendarmerie fusille un réactionnaire.

Le commandant de la garde nationale de Sant'Agata de Sorrente est pris par les brigands.

La gendarmerie d'Ostuni, province de Lecce, prend et fusille 4 brigands de la bande Laurenzana.

Trois hommes de la bande Coppolone sont fusillés près de Ginosa.

Du 19 au 21. — Un journal napolitain (1) représente les Pouilles et la Basilicate comme en proie à une complète anarchie.

Deux brigands de la bande Stramenga sont fusillés à Tagliacozzo (Abruzzes), par les bersaillers.

Un ancien officier napolitain et un autre brigand sont fusillés par Ia garde nationale de Salle (Abruzzes).

Combat près de Calitri, province d'Avellino, mort du chef de bande Pio di Bella.

A Foggia, Joseph Russo est fusillé arbitrairement sans qu'on sache pour quel motif (2).

(1)La Borsa, 26 mai.

(2)Voir  le Popolo d'ltalia.

— 380 —

Du 22 au 31.—Combat dans la campagne de Deliceto (Pouilles).

La garde mobile de Luogorotondo fusille un brigand de la bande Trinchera.

La gendarmerie de Montella, province d'Avellino, prend et fusille un brigand de la bande Qtanei.

Combat au bois de Dragonara. Caruso tue le sous lieutenant de Finis.

Combat entre le détachement composé de 40 hussards de Plaisance, commande par le capitaine Carelli, et d0un bataillon d'infanterie, et une bande de 150 brigands. 7 Piémontais tués. Le capitaine Carelli a son cheval tué sous lui (1).

Un journal semi-officiel (2) donne les noms de 19 brigands, fusillés en mai, rien que dans la Capitanate.

JUIN.

1.— Entre la Basilicate et la province de Salerne, apparaît une bande de 7 hommes, qui, en peu de jours, en compte 60 bien armés avec les fusils des gardes nationaux assaillis isolément ou en corps. Bientôt la bande dépasse 200 hommes et soutient contre la troupe plusieurs engagements de résultats divers. Les populations accueillent favorablement ce commencement de  «résurrection nationale (3).»

(1)Lé journal le Pungolo, de Naples, 4 juin.

(2)Le journal la Stampa, de Turin, 5 juin.

(3)Le Popolo d'Italia, 12 juin.

—381 -

Du 2 au 4.— Le Cilento est en grande agitation, par suite des proclamations du jeune Tardio, chef de bande, appartenant à une famille distinguée du pays, Tardio est accueille partout, non-seulement sans résistance, mais arec faveur. À Campora, où il entre clairon et drapeau national en tête, sa bande de 90 hommes s'accroît, en une heure, de 270 volontaires. On abat les écussons et les couleurs sardes, et on proclame la restauration du gouvernement légitime. Le capucin Joseph, président de la Société émancipatrice de Salerne, gagiste du Piémont, est tué dans le tumulte. Sur l'invitation des habitants de Gorga et Magliano, Tardio s'y rend et y accroît encore le nombre de ses fidèles. Deux régiments sont lances à la rencontre de Tardio, pour écraser dans f œuf ce mouvement général de réaction: le combat se livre entre Stio et Magliano; 52 brigands sont tués ou blessés, le reste gagne les hauteurs.

Combat au bords du Bradano (Basilicatc). Ninco Nanco tue 2 Piémontais.

60 brigands occupent, sans résistance, un village dés environs de Sora. Les deux officiers de la garde nationale sont fusillés.

Du 5 au 12. — Combats ou escarmouches à San Nicandro, Torremaggiore (Pouilles); près de Spezzano (Ca-labres); à Àgerola, province de Naples.

De 10 brigands pris à Agerola, 4 sont fusillés et 6 mis en prison.

Meurtre d'un gendarme déguisé, qui dirigeait une embuscade de gardes nationaux près Frigento.

Un détachement de 20 Piémontais, commandé par uncapitaine, est attaqué dans une ferme et massacré tout entier (1).

(1)Le Corriere mercantile 1 juin.

—382 -

Du 13 au 20 — Combat, prêt d'Ielsi, province de Molise, 5 gardes mobiles de Circello tués.

L'ingénieur des chemins de fer, Àmai, revenant de Conza avec un escorte de 34 grenadier est attaqué, entre Calitri et Monteverde, par une bande de brigands et essuie plusieurs volée de coups de fusil.

Par excès de Sèle, la maire d'Orsara se met à la tète de la garde mobile, pour attaquer la bande Caruso Schiavone; il est tué avec 30 de ses compagnons, entre autres le capitaine Calabrese, le lieutenant 8pentavelli, le notaire Fragassi et le receveur des domaines Buonaffidi, Toute la garde mobile d'Orsara eût succombé sans le renfort subit d'un détachement de Piémontais (1).

Combat aux environs de Campolattaro et du moulin de Resino. Les bandes réunies de Cartuo, Schiavone et Ricoiardelli, battent plusieurs fois les Piémontais.

Combat sur le territoire d'Avellino. 8 officier de la garde mobile tués (2).

La commune de Villarosa (Sicile), est envahie par une bande de 150 hommes, dont 70 à cheval, et fortement imposée. Un propriétaire est taxé à lui seul de 40,000 francs (3).


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Du 21 au 27. — Six brigands sont fusillés À Casteilaneta, Avigliano, Atessa, Sovi (province de Salerne), et Summonte.

Combat près de San Germano (Terre de Labour), 6 gardes de police tués.

Dans les Abruazes, en un seul jour, les bandes Tamburrini et Primiano égorgent 1,600 tètes de bétail»

(1)La Stampa de Turin, 30 juin.

(2)Le journal le Pungolo, 16 juin.

(3)L'Unità politica, de Palerme.

—383—

28 — La bande des frères Ribera, qui infeste l'ile de Pantelleria, saccage plusieurs fermes, blesse Juan Baptiste Marcotta, incendie la maison de Vincenzo Marotto, assassine J. B. Bosetta et Àntonino d'Ancona, et capture plusieurs personnes, dont on n'épias de nouvelle La bandé pais ensuite à Scaferi, où elle tue 3 individus (1). Elle s'augmente bientôt d'un grand nombre de réactionnaires, de déserteurs et d'environ 100 hommes disséminés sur les côtes de Tunisie et dans l'ile de Lampeduse (2).

Le sénateur prince de Sant'Elia est obligé d'abandonner sa villa de Monreale, dont les environs sont infestée.

JUILLET

ï)u 1 au 3. — Une quinzaine de brigands, débris de la bande Pizzicchicchio, occupent le bois de Foresta, dans le Salentin.

Dans la commune de Melissano, province de Lecce, les réactionnaires abattent les écussons de Savoie, imposent des réquisitions et se retirent paisiblement.

Ninco-Nanco campe aux portes de Potenza, défiant la garnison, qui n'ose sortir.

Le brigandage relève partout la tète, plus formidable que jamais. En douze jours, à Vallerotonda (Terre de Labour), on compte plus de 15 victimes, et le massacre de 1,500 têtes de bétail.

(1)Giornale officiale di Sicilia.

(2)Lé journal Caprera, 8 juillet.

—384 —

Du 4 au 8 — Combat près de Morcone, province de Bénévent, 20 Pîemoniais tués. Un journal napolitain (1) s'exprime en ces termes sur cette sanglante affaire: «On ne comprend pas comment le brigandage peut s'accroître tellement en une province, ou 3,000 soldats sont en mouvement perpétuel, conjointement avec d'innombrables gardes nationaux»

Combat près de Sepino, sur la grande route de Sferracavallo. Un détachement de 40 Piémontais attend l'arrivée du courrier de Naples pour l'escorter. Provoqués par 10 brigands à cheval, les Piémontais se lancent à leur poursuite et tombent dans une embuscade de 80 réactionnaires, 15 Piémontais tués; les 25 autres ne doivent leur salut qu'à une fuite précipitée.

7. — Incendie de la propriété du sieur Giavanetta. près San Marco in Lamis, par la bande Villani, pour refus de rançon.

Madame Santarelli est rançonnée de 2,000 ducats par la bande Crescenzo.

Les autorités françaises de la frontière romaine consignent aux autorités piémontaises 6 chefs de bandes (2).

Combat à Sant'Anatolia. Une bande de 53 brigands, entrés dans le royaume par le district de Sora, est attaquée et dispersée aux environs de San-Germano.

Du 8 au 14. — Joseph Gelli, de la bande Caruso, est fusillé à Bénévent.

Calitri, Andretta, Bisaccia, Lacedonia, sont parcourus par les bandes, qui capturent deux individus, égorgent les bestiaux, et font des réquisitions de toutes sortes.

(1)Le journal la Compana del Populo, 9 juillet:

(2)La 8tampa, de Turin, 1 août.

—385 —

15. — Le féroce Fumel, qu'un reste de pudeur avait fait rappeler, est envoyé de nouveau dans les Calabres où la réaction prend d'inquiétantes proportions.

Bans la province de Molise, les bandes opèrent avec tactique, se fractionnant pour rançonner, et se fusionnant pour écraser quelque détachement isolé. Il est juste de dire qu'elles ne rançonnent que les piémontistes enrichis.

Au pont de Monteroduni, attaque du courrier d'Isernia. Mort du chef de police Rozzera.

L'Abruzze citérieure est sillonnée par les bandes, de plus en plus audacieuses. L'opinion regarde, comme dérisoire, ce télégramme officiel du sous-préfet de Vasto: «Très-bon résultat d'une perlustration générale, sou» les ordres du commandant Gorcea, avec 600 gardes nationaux, 500 soldats gendarmes, agents de police, maires et propriétaires. Les brigands poursuivis, mis en fuite, dispersés. Trouvé des vivres, armes, munitions et le cadavre du fameux chef de bande Forgione, L'esprit public relevé. La perlustration continue (1).»

La Nuova Europa (2), Journal de Florence, fait, suivre de ses réflexions ce télégramme burlesque: «On ne sait pas de combien de maux sont accablées les pauvres provinces napolitaines. Il y a trois ans que l'arrondissement de Vasto est devenu un enfer, et, en attendant, la Camorra gouvernementale le représente, à Turin, comme un jardin de délices. Un sous-préfet descend à l'ignominie de mentir solennellement au gouvernement, travestissant ses coupables bouffonneries en actes généreux et patriotiques, dans un télégramme qu'ensuite il a dû démentir officiellement.»

(1)Le Gladiatore, journal des Abruzzes, 10 aout. Numéro du 23 août.

—386 —

Du 16 au 18. — La bande Miseria capture et rançonne le propriétaire Joseph Lombardi, de Bénévent.

La bande Schiavone capture, près d'Ariano, les propriétaires Ansani et Lusi et le fils de ce dernier. Les brigands demandent d'abord une rançon de 30,000 ducats, et se contentent finalement de 2,000, que va chercher M. Lusi. Pendant son absence, la bande est attaquée par un détachement des chevaux-légers d'Aoste. Les brigands se sauvent tous. Les Piémontais ne relèvent que deux cadavres: ceux de M. Ansani et du jeune Lusi (1).

Du 19 au 23. — Combat aux environs d'Avellino. Caruso a un mort et un blessé; les Piémontais, 40 morts et 9 blessés.

Attaque d'un convoi de vivres, escorté par un détachement de grenadiers, sur la route de Calitri. Crocco, vainqueur d'abord, se retire à l'arrivée de renforts piémontais.

Combat dans le Bénévent. 20 Piémontais tués. 14 blessés, parmi lesquels un officier et 3 sous-officiers.

Rencontre avec la bande Salvatore Caso, forte d'enviviron 90 hommes, qui se réunit souvent aux bandes Ninco-Nanco, Gedeone et Scalceri.

Cinq brigands arrêtés à Lanciano sont fusillés à Chieti.

24. — Combat simulé, près de Terelle, province de Sara, entre un détachement piémontais et les faux brigands de l'espion Serracante.

25. — La garde nationale de Colle-San-Magno, n'étant pas dans le secret de la comédie, reçoit à coups de fusil la bande de Serracante, qui s'esquive en criant:

(1)La Borsa, de Naples, 5 août.

—387 —

«Nous sommes frères!» La garde nationale ne l'en poursuit et ne la fusille que de plus belle. Un faux brigand est pris et conduit au commandant piémontais de Pontecorvo, qui le remet immédiatement en liberté. —Bientôt on voit Serracante se promener paisiblement dans les rues de Sora; il avoue lui-même avoir reçu 12,000 ducats pour jouer son rôle d'infamie (1).

Du 26 au 30, — Combat de Spinazzola. La garde mobile à cheval, commandée par le major Tarentini, prend 3 brigands, qui sont fusillés à Bari le 27.

Le Journal officiel de Naples rapporte qu'un détachement de 33 chevaux-4égers de Saluées» tombé dans une embuscade près de Venosa, a perdu 20 hommes, parmi lesquels 1 officier commandant, Borromeo, de Milan. Les autres se sont sauvés à perte d'haleine,23 chevaux sont restés aux mains des brigands (2)

Les Piémontais fusillent, à Tropea (Calabre), 5 brigands, dont les compagnons, pour les venger, tuent 27 personnes à coups de fusil (3).

Combat près de San-Giovanni in Fiore. Pertes égales du côté des bersaillers et des brigands.

On envoie précipitamment de Capone un fort détachement à la rencontre des bandes réunies de Guerra, Maccherone et Fuoco.

Le propriétaire Mascanio, de Roseto, est rançonné de 40,000 ducats, et les sieurs Parisi et Massei de 15,000 (4).

D'après le rapport officiel du préfet de Bénévent, M. Sigismondi, la seule bande Caruso, dans le mois de

(1)Voir le Popolo d'Italia, 25 aout

(2)Le journal  l'Omnibus, 4 aout.

(3)L'Omnibus, 4 août.

(4)La Borsa, 29 juillet.

—388 —

juillet, aurait tué 93 individus, rien que dans cette province, incendié 22 fermes et égorgé 5,000 bestiaux (1).

AOUT.

1.— Les environs de Naples sont parcourus par les bandes. Les délicieuses collines de Sorrente sont également occupées par les brigands (2). Jamais lis n'ont porté plus haut la tête (3).

Les correspondants du Times et du Daily Telegraph conseillent au gouvernement piémontais de rappeler le général la Marmora, pour cause d'incapacité dans la répression du brigandage.

2.— Un jeune homme est capturé, en Basilicate, et rançonné de 2.000 ducats.

Dans la province de Salerne, deux brigands sont pris à Ascea et fusillés à Pisciotta.

Un prisonnier politique, évadé des prisons de Bénévent, est repris et fusillé à Fratto.

A Spinazzola, on fusille trois brigands, dont le plus âgé n'a pas 22 ans (4).

3.-— Attaque du courrier de Naples, qui est dévalisé près de Potenza.

Assassinats et incendies commis par une bande de 25 hommes, à Spezzano (grandes Calabres).

(1)La Patria, de Naples, 3 septembre.

(2)Le journal le Diritto, de Turin.

(3)La Gazzetta del Popolo, 13 août.

(4)Le journal le Paese, 3 août.

—389 —

Près de Giosa (Terre de Labour), les brigands capturent Antonio Cattella, espion au service des Piémontais, lui coupent les oreilles et le nez, et le renvoient (1).

4. —Sac de la ferme de Rocco Lauria, près Pietrapertosa, par les bandes réunis de Masini et Caruso.

Onze marchands, capturés par 30 brigands à cheval, sont délivrés par un détachement de gendarmerie. Les brigands ne gardent prisonnier que le commandant de la garde nationale de Montescagliosq (2).

Mouvement réactionnaire à Caramanico (Abruzzes). Mort du fonctionnaire de police Innocenzio Gambescia (3).

Sur le territoire dû Pomarico (Basilicate), la bande Coppolone brûle la ferme d'un piémontiste et en tue le gardien (4).

Rencontres près de Potenza. La garde mobile prend et fusille deux brigands (5).

Un prisonnier politique évadé est repris et fusillé à Sant'Arsenio (6).

La garnison deTaviana, province de Lecce prend et fusille Salvatore Bello.

Incendie de récoltes appartenant à un piémontiste de Montepeloso (Basilicate) (T).

Du 6 au 9. — Le curé de Zanche est capturé dans son église et rançonné de 13,000 ducats (8).

(1)Le Campana del Popolo, 9 août.

(2)Le journal le Paese, 10 août.

(3)Le Popolo d'Itatia, 10 août.

(4)Journal officiel de Naples, 3 août.

(5)La Patria, 5 août.

(6)Journal officiel de Naples.

(7)La Patria, 11 août.

(8)La Campana del Popolo, 11 août.

—390 —

Un paysan, espion piémontais, est pris par les brigands, qui lai coupent la langue et lé massacrent ensuite (1), dans la campagne d'Ospedaletto, province d'Avellino.

Escarmouche près de Castelgrande (Basilicate). Mort du brigand Giulio Pasquale.

Combat près de Mignano (Terre de Labour); entre un détachement de gendarmes et de soldats du 60. Un brigand tué.

La bande Crocco, forte de 150 hommes, impose des rançons et des réquisitions aux environs de Corato (terre de Bari), avec le concours d'un officier de la garde nationale.


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Du 10 au 13. — Attaque de la ferme de Santa-Teresa, prés Ruvo. Un détachement du 50e, soutenu par un peloton de chevaux-léger s de Saluces et commandé par le lieutenant Carlo Morani, tue 4 des brigands de Crocco.

Attaque de la ferme de Trassinetto, près Ariane 2 brigands tués; un pris et fusillé (2).

Le chef de bande Cacchiano est fusillé dans les Abbruzzes.

Lé propriétaire Joseph Lombardi, prisonnier de la bande Miseria depuis un mois, est renvoyé, les oreilles coupées, pour n'avoir fourni que 4,160 ducats au lieu des 15,000 qu'elle lui demandait en rançon.

Incendie du domaine de Cacciafumo, dans le bois de Selvapiana, près Voltarino;

La bande Varanelli capture le féroce garde mobile piémontiste, Giuseppe Bianchi, de Baseliçe, et brûle son cadavre avec ses récoltes (2).

(1)Journal officiel de Naples.

(2)Le journal le Passe, 3 août.

(3)Le journal Roma, 16 août.

—391 —

Incendie de la ferme de Rivera, près Trani. Le fermier et sou fils sont égorgés (1).

Un détachement de gendarmerie, menant un prisonnier d'Alcamo à Trapani, est attaqué par une bande de 30 brigands, qui tuent 3 gendarmes et délivrent le prisonnier.

Louis Fiorelli, de Massascusa, est capturé par une bande, près de Ceraso, et rançonné de 800 ducats; sa famille ne les envoyant pas assez promptement, les brigands lui envoient les oreilles de leur prisonnier (2).

Sac du domaine de Castellaneta (Pouilles).

Combat aux environs de Fondi. Le porto-drapeau des brigands est grièvement blessé, mais il est relevé et emporté par ses compagnons.

Du 14 au 17. — Coreno est envahi par une bande de 60 hommes, équipés militairement, dont le chef, portant les insignes de lieutenant, après avoir désarmé la garde nationale, distribue les fusils à ses hommes et aux pauvres de la commune les meubles du maire et du commandant de la garde nationale.

Sac d'une métairie de Rocca-d'Evandro. Assassinat du métayer.

Le fils du sieur Lapenta, piémontiste en renom, est capturé à Corleto (Basilicate), et imposé de 3,000 ducats.

Les domaines des piémontistes de Guardiaregia, province de Molise, sont ravagés et les bestiaux égorgés. De même, à Palazzo (Basilicate).

18. — 4 gendarmes tombent dans une embuscade, près de Sersa (Terre de Labour),

(1)La Patria, 16 août.

(2)La Stampa, 1 septembre.

—392 —

Le brigadier Brambilla (1) et le gendarme Paolo Bodaglia sont tués; les deux autres grièvement blessés.

Le bois de Petaociato, provinoe de Molise, est occupé par de nombreuses bandes (2).

Combat de Monticchio (Basilicate). Le colonel Linati tue, à Crocco, deux hommes et lui enlève 35 chevaux, des vivres, des munitions, des papiers et des vêtements (3).

Du 19 au 20. — Vincenzo Cazoli, espion piémontais, est pris, aux environs de Padula, province de Salerne, et fusillé par un détachement de la bande Masini.

A Padula, on relève un cadavre portant dans la poitrine un papier, fixé par un poignard, et portant que la victime avait été condamnée à mort pour s'être fait espion piémontais, et avoir promis de livrer la bande Tranchella au prix de 20,000 ducats(4).

Six brigands sont fusillés, un à Montescaglioso, un à Rogliano par ordre du général Orsini, un à Melfi, un à Cosenza, un de la bande Caruso à Foggia et le sixième aux environs de Montesantangelo.

Le chef de brigands Pàolo Serravalle tombe dans un guet-apens de policiers déguisés en brigands et commandés par l'agent Solera, et est massacré par eux. Les misérables se disputent ensuite son cadavre et portent sa tête en triomphe dans les rues de Potenza (5).

(1)Ce Brambilla serait-il-le même que l'agent de police piémontais Curletti accuse de s'être engagé dans les troupes pontificales pour assassiner, à Castelfidardo, l'héroïque général de Pimodan?... La punition ne se serait pas fait attendre.

(2)Le journal la Borsa, de Naples, 18 août.

(2)Le journal la Patria, 18 août.

(3)Le journal le Paese, 27 août.

(4)Le journal le Pungolo, de Milan, 2 septembre.

—393 —

Escarmouche aux environs d'Agerola, avec la garde mobile. Mort du brigand Joseph Amendola, de la bande Apuzzo.

Un assassin (1) reçoit de la justice promesse de la vie et de la liberté s'il parvient à tuer deux chefs de bandes; ce qu'il exécute à l'aide d'ignobles stratagèmes (2).

Dans la province de Bénévènt, la garde nationale de Civitella perd dans une embuscade trois hommes tués, quatre blessés, et un certain nombre de prisonniers.

22.— Le marquis Donnaperna et plusieurs autres personnages, avec leur famille, se rendant des bains de mer de Maratea en Basilicate, suivis d'une escorte d'environ 60 hommes, bien que la route eût été battue dans la matinée par là garde mobile, sont attaqués, au milieu du bois de Magnano, par 70 brigands, qui ont bientôt le dessus, je veux dire après un combat d'une heure et demie. Les femmes et les enfants sont presque tous blessés Onze gardes nationaux sont tués ou blessés,le reste se rend à discrétion. Les brigands relâchent les autres avec les femmes et les enfants, et se retirent sur les hauteurs, emmenant en otage le chef de chaque famille, jusqu'à ce   qu'ils aient payé en commun une rançon de 425,000 fr. (3).

23.— Le lieutenant Domi, commandant un détachement du 8e de ligne, s'arrête à la pore d'une ferme, sur1b route de Paterno (Basilicate}, et demande au gardiens il y a des brigands aux environs. Les premières réponses sont évasives; puis, tout à coup, ce paysan crie aux

(1)Il avait assassiné son fils.

(2)Le journal la Bona, 29 août.

(3)Les journaux le Nomade, 27 août, et la Borsa, 1 septembre.

—394 —

armes, et un feu de peloton, parti de l'intérieur de la ferme, abat l'officier et un de ses hommes (1).

24. — Combat près de Bisaccia, entre une quinzaine de brigands et une dizaine de gendarmes, heureusement secourus à temps par la garnison et la garde nationale d'Andretta: trois brigands tués (2).

Du 25 au 29. — Le maire de Parco, près Palerme, est capturé par une bande qui occupe la commune.

Quarante gardes nationaux de Cusano, revenant de la fêta de Civitella-Lizimo avec leur lieutenant, Michelàngelo Caselli, le médecin Joseph de Saro, et le capitaine Nunziante Ciffarelli et cinq gardes nationaux de Civitella, sont attaqués par la bande Giordano; le lieutenant, le médecin et le capitaine sont tués; par dérision, les brigands taillent au cadavre du dernier la barbe à la piemontaise (3). Le lendemaint on trouve le cadavre d'un sergent de la garde nationale de Cusano, et l'on ignore le sort de quatre autres gardes nationaux. La bande menace Cusano, qui réclame vainement le secours de la troupe (4). L'audace des brigands croît au point d'attaquer Calviso, défendu par un poste d'une quarantaine d'hommes du 46 de ligne, qui s'enfuient, laissent un de leurs sous-officiers aux mains des brigands. Les brigands se contentent de le désarmer et le renvoient sain et sauf (5).

Escarmouche à Prajano. Mort du brigand Scortica-ciaccio (6).

(1)Le journal le Pungolo, de Naples, 26 août.

(2)Le journal la Libértà Italiana, 29 août.

(3)L'Opinione de Turin, 2 septembre; la Borsa, 28 août.

(4)Le Popolo d'Italia, 30 aôut.

(5)Le Popolo d'Italia, 2 septembre.

(6)La Campana del Popolo, 31 août.

—395 —

Combat au mont Caminô, entre Cesima et Caspoli (Terre de Labour). Une centaine de gardes nationaux, soutenus par la troupe et la gendarmerie, attaquent une bande de 80 brigands qui, grâce à leur pleine connaissance des lieux, se retirent sans avoir perdu un seul homme. La veille, ils avaient enlevé les fusils de quatre gardes nationaux de Mottola, dans leur maison de campagne (1).

Le fameux brigand Michel Desiata, de Bovino, est pris, dans le bois de San-Lorenzo, par la garnison d'Orsara, et fusillé.

Le propriétaire Lucantonio Merola est capturé, près de Paduli, par la bande Pecola et rançonné de 22,000 fr.

Meurtre du paysan Antonio Rizzo, de Policastro, par le chef de bande Spinelli.

Escarmouche aux environs de Pietramelara, avec la nouvelle bande Giuliano, d'environ quarante hommes (2).

Soixante brigands de la bande Masini capturent huit paysans de Brienza (Basilicate), incendient l'abitation de Joseph Paladino et tuent quatre de ses juments.

Quatre brigands envahissent les domaine de MM. Simonelli et Palombaro, emmènent 18 bœufs et demandent une rançon de 1,800 ducats. La troupe accourt; mais les brigands ne se rôtirent qu'après avoir égorgé les bœufs (3).

Incendie de la ferme de Joseph de Léo, territoire de Frigento, par la bande Galluccio.

Combat au mont Cervinara, province d'Avellino, entre un détachement du 59e et une bande de 60 brigands, qui compte 3 morts et 4 blessés. Les autres s'enfuient.

(1)Le Popolo d'Italia, 31 août.

(2)Le journal le Nomade. 31

(3)Le Paese, 2 septembre.

—396 —

abandonnant plusieurs objets d'habillement, entre autres trois bonnets rouges de zouaves, avec un gland d'or (1).

30 et 31. — Un capucin piémontiste est massacré entre Massafra et Tarente (2).

Attaque de Galluccio (Terre de Labour), par une forte bande. La garnison, composée d'un dépôt du 57e, se retire après un combat de deux heures, qui lui coûte un homme et trois blessés. La bande ne regagne la montagne qu'après avoir abattu les écussons de Savoie (3).

Meurtre du sieur Jacques Tancrêdi, dans sa propriété de Stigliano (Basilicate) [4).

La bande Rosanova envahit Acri, ville de 15,000 âmes (Calabres), et capture dix des notables, qui ne sont relâchés qu'après payement de fortes rançons, à l'exception de deux d'entre eux, l'évêque de Tropea et le chanoine Benvenuti (5). La famille Falcone, pour racheter un de ses membres, envoie 1,300 ducats et son argenterie. La troupe survient, chasse les brigands, s'empare de l'argent et de l'argenterie, et refuse de les rendre. Aux réclamations de la famille le préfet répond que, «par ordre du général, le butin appartient à la troupe (6).» Un journal napolitain qualifie ce procédé militaire de «brigandage à deux (7).»

SEPTEMBRE.

Du 1er au 5. — Assassinat du courrier de Genzano.

(1)Le Nomade, 2 septembre.

(2)Le Cittadino Leccese, 31 août.

(3)La Gazzetta di Milano,... septembre.

(4)Journal officiel de Naples.

(5)Le Lombardo, 2 septembre.

(6)La Campana di San Martino, 30 octobre.

(7)L'Azione, 16 novembre.

—397 —

Deux prêtres sont capturés et rançonnés par 12 brigands, aux environs de Çotrone, près d'Avellino (1).

Massacre aux environs de Barile (Basilicate) d'une famille de six personnes, dont une femme et un enfant. Tous les parents des brigands soupçonnés de ce crime sont arrêtés en représailles et mis en prison, au nombre de 40.

Escarmouche près de Foggia. Trois brigands de la bande Caruso sont tués.

Le chef de bande Carminé Ranacero-Sturzo est pris à Montefusco, pendant qu'il mettait des sangsues à une de ses blessures, et fusillé à San-Nazaro.

De nombreux recruteurs de brigands enrôlent les conscrits à Naples même (2).

Cinq brigands attaquent sept gardes nationaux de Siscia (Abruzzes), revenant de Palmoli, et en tuent six (3).

«La fête de Lanciano a eu le plus triste résultat. On a acheté peu, ou point. On n'y voyait plus de bétail, qui en faisait autrefois le principal commerce. Qui veut-on qui s'aventure sur des chemins infestés par des bandes de 80 brigands! Dans une seule semaine, on a rançonné sept citoyens de Gissi et d'autres de Scerni, où l'on a incendié 3 fermes et enlevé une fille de 13 ans, pour la délivrance de laquelle on demande à son père 350 ducats (4).»

Treize négociants de Craco, revenant de la fête d'Anglona, sont capturés et dépouillés de 4,000 francs, près de Montalbano (Basilicate) (5).

(1)Journal officiel de Naples.

(2)Le journal le Nomade, 8 septembre.

(3)Le journal le Pungolo, 13 septembre.

(4)Le Popolo d'Italia, 13 septembre.

(5)Le journal le Conciliatore, 15 septembre.


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—398 —

Meurtre du muletier France3oo Forte par la bande Masini, près Viggiano.

Incendie des maisons de campagne de Marsico; les bestiaux sont égorgés.

A Serre, près de Salerne, les brigands fusillent le berger Luigi Tarco. On trouve sur son cadavre un écrit, constatant que telle est la peine réservée aux espions piémontais (1).

Du 6 au 8. — Par suite de la loi Pica, 500 suspects sont emprisonnés en Basilicate (2).

Télégramme officiel envoyé de Basilicate à Turin: «À Rionero, Crocco, Ninco-Nanco, Caruso, Tortora et un autre capobanda se présentent au commandant Paoli du 62e.  Ils demandent un sauf-conduit de 8 jours pour amener leurs 350 brigands à se présenter aussi. Ils partent de Rionero pour Lagopesole, en criant: Vive Victor-Emmanuel! — et en portant des drapeaux aux couleurs nationales.» — Pour dire le vrai, les autorités piémontaises étaient tout simplement dupes de la plus adroite mystification. Le soir même, la bande Caruso massacrait 24 gardes nationaux de Caslelvetere et Tufano (3). Deux jours après, elle battait les gardes mobiles et les gendarmes de San-Bartolomeo in Galdo, en leur tuant hait hommes et en blessant une trentaine. M. Catalano, commandant de la garde nationale, ne doit son salut qu'à la vitesse de son cheval (4).

Le chef débande Tissa, que les Piémontais prétendaient s'être également rendu, bat, à la tête 20 brigands, aux

(1)Le journal le Conciliatore, 15 septembre.

(2)La Borsa, 19 septembre.

(3)Le Popolo d'Italia, 12 septembre. N

(4)Le Popolo d'Italia 14 septembre; la Borsa, du 15.

—399 —

environs de Rionero, un détachement de gardes mobiles et de gendarmes (1).

Combat sur le route de Torrecuso à Bénévent. La bande Tissa attaque les 32 soldats d'escorte du conseiller général Bianchi et des propriétaires Mellali, père et fils. Ces deux derniers sont tués dans le combat, qui dure plus d'une heure. Dix soldats faits prisonniers sont fusillés, 90,000 fr. de rançon sont exigés du conseiller Bianchi (2).

Arrestation de deux voitures de voyage sur la grande route de Naples, à Montemarano, province d'Avellino. Les gendarmes accourent, sont battus et mis en fuite.

Le père Antonio, gardien du couvent de Marsico, exhorte le chef de bande Maslni à faire sa soumission aux Piémontais, dont il se dit le chaud partisan. Masini feint d'adhérer à ses avances, vient dîner avec sa bande au couvent, puis emmène amicalement le père Antonio dans le bois et lui coupe la tête (3).

Télégramme officiel: «Les chefs de bande qui se sont présentés à Rionero ont déjà fait constituer prisonniers, 40 des leurs, blessés, et soignés à leur hôpital, c'est-à-dire dans une caserne du bois de Monticchio (4).» Comment les Piémontais n'ont-ils pas compris qu'en leur livrant leurs blessés, les brigands ne faisaient que se débarrasser à bon compte d'un inutile fardeau? Allobroges!... Le jour indiqué pour la présentation générale des chefs et de leurs bandes est arrivé; personne ne se présente, et les sarcasmes de se multiplier contre les autorités dérisoires du Nord-Italie,

(1)Le Nomade.

(2)La Patria, 9 septembre.

(3)Le Popolo d'Italia, 27 septembre.

(4)La Patria, 14 septembre.

—400 —

—  «Crocco a ramassé 84,000 ducats; il voudrait amener ses compagnons à se présenter, et passer en Dalmatie avec ses plus fidèles; mais personne ne l'a écouté. En attendant, dans leur cavernes du bois de Monticchio, les brigands possèdent toutes les commodités d'un quartier général, des journaux, des vivres exquis, des vins étrangers, des médicaments, etc. (1).» — «Crocco et ses compagnons ont dévoré un bon dîner aux frais du gouvernement eu poussant des cris dérisoires de Vive l'Italie! Ils ont été courtois pour tous, et généreux au point de jeter des piastres et des pièces d'or à ceux qui se trouvaient près d'eux, et leur tenaient la bride quand ils remontèrent à cheval. Voilà les brigands traités en chevaliers, grâce au sang et à l'or de tant de victimes qu'ils ont assassinées! Chercher à transiger et pactiser avec des gens de potence, c'est une ignoble comédie, et toutes les autorités militaires en sont dupes; elles ont agi à l'insu du préfet, s'en sont rapportées à Crocco et aux siens, leur ont offert à dîner, puis les ont laissés retourner aux incendies et aux meurtres.... (2).»— Furieux d'avoir été joué, le gouvernement met en disponibilité le général Fontana et le commandant Paoli et les fait passer en conseil de guerre (3); puis, en manière de représailles, on fusille le brigand Philippe Avitabile, d'Agerola, malgré la promesse qu'on lui avait faite de la vie sauve et de 500 fr. de récompense (4).

9 et 10. — Attaque de la maison de campagne de Saverio d'Arienzo, près Tufnio, par un détachement du 18e bersaillers. Les brigands surpris à table, se défendent avec une héroïque énergie.

(1)La Patria, du 21 au 26 septembre.

(2)Le Popolo d'Italia, 27 septembre.

(3)Le journal Roma, 10 octobre.

(4)Le Popolo d'Italie 22 janvier 1864.

—401 —

Un Piémontais est tué et deux sont blessés. Le capobanda Nicolas Napolitano, dit le Caprariello, et deux des siens sont pris et fusillés.

La femme, les fils et les sœurs du chef de bande Caprariello sont arrêtés et condamnés, par le conseil de guerre, aux travaux forcés, les uns à perpétuité, les autres à temps (1).

11. — Le brigand Carminé de Cillis est fusillé à Piétragalla.

12. — Combat aux environs de Ripacandida. La garde mobile tue un brigand, en prend deux et les fusille.

15. — Trois brigands, poursuivis par les gendarmes sur le territoire de Paglieta (Abruzzes), les attirent dans une embuscade. Les gendarmes se sauvent à toute vitesse, vont chercher du renfort à Atessa, et reviennent avec une compagnie du 47e; mais les brigands ne les ont pas attendus. Dix-neuf paysans suspects sont arrêtés dans la commune.

Du 16 au 18. — Meurtre du cordonnier Noël Rinaldi, dans une ferme de Martina (Pouilles).

Le garde champêtre d'Avezzano (Abruzzes), est massacré.

Incendie des fermes du maire de Guardiagrele (Abruzzes), par la bande Scienna (2).

Combat de Vallata. Beaucoup de blessés de part et d'autre.

Combat dans la campagne d'Andretta, entre les bandes réunies de Schiavone et Tortora et un détachement de hussards et de bersaillers. 2 Piémontais et cinq chevaux tués (3).

(1)Le journal le Pungolo, de Naples.

(2)Le Nomade, 27 septembre.

(3)La Patria, 29 septembre.

—402 —

Du 19 au 27. — Combat à Marzano, près Gaête. Mort du brigand Antonio Lubrigo.

La plupart des courriers, dans chaque province, sont arrêtés, dévalisés et quelquefois massacrés.

Combat de Pietralina. Caruso perd trois hommes.

Meurtre de deux paysans de Montemale.

Combat près de Castel di Sangro. Un détachement du 41 tombe dans une embuscade. Un brigand est tué et reconnu ensuite pour être Salvatore Spinazzola, dés Pouilles.

La bande Antonio Porrelli occupe le village de San-Gernaro (Terre de Labour), se fournit de vivres et munitions en les payant, et se retire sans avoir causé aucun dommage (1).

Meurtre d'un paysan de Marsico (Basilicate), par la bande Masini (2).

La campagne de Rossano est parcourue par une bande vêtue militairement, armée de fusils à deux coups et de revolvers. Le paysan Ludovico Massa est blessé mortellement par elle (3).

Attaque de Celico. Les gardes mobiles se retirent, emportant des morts et des blessés. Les brigands fraternisent avec la population (4).

La bande Masini envahit le village de Ressa-Sciandra, commune de Montefano, et y commet des atrocités (5).

Meurtre d'un négociant de Cerreto, province de Bénévent, pour refus de rançon.

(1)Journal officiel de Naples 29 septembre.

(2)La Patria, 30 septembre.

(3)Le Nomade, 1 octobre.

(4)La Borsa, 27 septembre.

(5)Journal officiel de Naples, 30 septembre.

—403 —

Sac des domaines des frères Minchella, de Cervaro, près Sora, par 40 brigands.

Meurtre de deux paysans de San-Fele, par 16 brigands.

Incendie de deux domaines de la Basilicate par la bande Mazzariello.

Deux riches propriétaires de Cotrone (Calabres) sont capturés et fortement rançonnés (1).

Escarmouche en Basilicate. Deux gendarmes de Croperni, Frontini et Cocozza, sont grièvement blessés, par la bande Spinelli.

Massacre du bétail de Montefalcone (Bénévent), par la bande Caruso.

Massacre de deux bersaillers du 17 bataillon, bot la grande rouie de Bénévent.

Du 28 au 30. — Combat près de Sant'Agata dei Goti (Terre de Labour). Un officier et plusieurs soldats sont tués.

Combat de Lacedonia. Un détachement du 4 grenadiers, sorti de Rocchetta-Sant'Àntonio, est cerné par une nombreuse bande. L'officier commandant Fumiani, 3 caporaux et 3 grenadiers sont tués. La bande poursuit vivement le reste du détachement jusque dans la commune, en criant: «Dehors, dehors les brigands de Victor-Emmanuel!» La garde nationale se montre sympathique à la bande victorieuse (2).

Effrayé de tant de faits si graves, le ministre de la guerre accourt de Turin à Naples, partage les prisonniers en deux zones militaires, remet le commandement de Tune au général Pallavicini, le vainqueur d'Aspromonte, l'autre au fameux Franzini. Mais le brigandage n'en décroît pas pour si peu.

(1)Le journal la Libertò Italiana, 2 octobre.

(2)La Libértà Italiana, 2 octobre; le Conciliatore du 6.

—404 —

En vue de Naples, sur la route riante qui va de Sorrente à Castellamare, plus de cent personnes sont rançonnées par un détachement de brigands, parmi lesquels un sieur Ruggiero, se disant député au parlement de Turin. Leur chef est un beau et élégant jeune homme, qui se sert d'un vieux paysan comme interprète. Les rançonnés sont emmenés dans la montagne, où campe le gros de la bande, 150 hommes environ. Le commandant en chef est un homme mûr, parfaitement habillé, et que ses gens appellent «le comte (1).» Un Prussien capturé par eux, ayant publié qu'il avait été rançonné de 3,000 ducats, qu'il avait chargé un sieur C... de porter aux brigands, leur chef adresse au sieur Goetzloff la rectification suivante: «Monsieur, nous sommes trop honnêtes pour mentir et paraître profiter de ce que nous n'avons pas reçu. On ne nous a remis de votre part que 2,000 ducats, et non 3,000. Nous prions donc l'autorité compétente de punir le malfaiteur qui a abusé de votre bonne foi et de la nôtre. Nous avons l'honneur d'être, Monsieur, vos détournè et reconnaissants serviteurs.» — M. C...., qui avait détourné le tiers de la rançon dé M. Goetzloff, est immédiatement arrêté à la requête du consul de Prusse (2).

A Torchiara, province de Salerne, 124 suspects sont emprisonnés dans un seul jour.

Dans la Terre de Labour, 44 familles de suspects sont arrêtées dans un seul jour.

Arrestation du juge d'arrondissement de Palata, province de Molise, suspect de favoriser le brigandage.

(1)L'Opinione, de Turin, l'Indipendente, de Naples, 29 septembre 1864.

(2)Le journal l'Omnibus, 8 octobre.

—405 —

Le nombre des suspects emprisonnés dans le mois s'élève à 1,400 (1).

À ce propos un journal napolitain s'écrie: «Ce chiffre donné par un journal officiel est très-éloquent.... Nous nous attendons à lire, un jour, dans quelque journal de Turin: Le nombre des suspects arrêtés dans les provinces napolitaines est de neuf millions (2).»

OCTOBRE.

1. — Embuscade tendue par la garde mobile de Ripacandida. Le chef de bande Jean Fepice est tué et plusieurs de ses hommes sont blessés.

2. — La musique de la garde nationale de Martina province de Lecce, tombe dans une bande de 80 brigands,qui la relâche sans lui faire aucun mal, ce qui ne l'empêche pas de porter plainte au commandant piémontais. qui répond: «Je ne peux agir sans ordres supérieurs (3).»

Le territoire d'Ugento est au pouvoir des bandes; meurtres à Graco; rançons à Pontelandolfo et Castelgrande.

Combat dans la campagne de Piedimonte. Les gendarmes blessent une femme habillée en brigand.

Arrestations opérées à Arpaja par des gendarmes piémontais, que la garde nationale feint de prendre pour des brigands et reçoit à coups de fusil.

(1)Journal officiel de Naples, 24 octobre.

(2)La Campana di San Martino, 25 octobre.

(3)Le journal le Popolo, 7 octobre.


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—406 —

Escarmouche à Marzano. Trois brigands tués, deux blessés.

Un berger de Presenzano, convaincu d'espionnage, est fusillé par les brigands.

La bande Cristella, bivouaquant dans un bois de Lateza, province de Lecce, est attaquée par la gendarmerie (1).

Combat au bois de Santa-Croce, (Terre de Labour), entre un détachement du 6° grenadiers et les brigands, qui ont un tué.

Le chef de bande Albanese Libero écrit au commandant de la garde nationale de Guardiaregia, province de Molise, qu'il désire se constituer prisonnier, et l'invite à se rendre dans la montagne avec huit notables du pays désignés par lui. Le moire de Guardiaregia, l'adjoint Dominique Mariano, le lieutenant Charles Carbonaro et quelques autres se rendent dans la montagne, sont capturés et rançonnés fortement sons peine de la vie (2).

Du 8 au 11. — Le général Pallavicini jure sur l'épée d'Aspromonte qu'il vaincra le chef de bande Caruso, et le pourchasse à outrance. Combat à Bonito. Combat au pont du Calore; cinq brigands tués, deux blessés. Combat au prés de Mirabella, gardé par trois compagnies du 21° (3).

Carminé Porcaro est fusillé par In garde nationale de Bénévent.

12. — Meurtre du prêtre Mancusi.

(1)En quinze mois, le Piémont a envoyé plus de 3,600 gendarmes dans le royaume de Naples.

(2)Les journaux le Conciliatore, du 15 octobre, et le Pungolo, du 16.

(3)La Libértà Italiana, 8 octobre.

—407 —

Le chef de bande Varanelli fait fusiller un paysan convaincu d'espionnage (1).

Du 13 au 18. — Combat entre la garde nationale de Pietragalla et la bande Ninco-Nanco, qui perd trois hommes;

Les brigands fusillent un berger des environs de Melfi, suspect d'espionnage (2).

Meurtre d'Àngelo Giovaniello (3).

Un détachement de la bande Caruso envahit Volturara, brûle les fermes et égorge les bestiaux (4).

Combat près de Torremaggiore. Les lanciers d'Aostë ont deux morts et trois blessés, entre autres le lieutenant Beretta. Les brigands ont un mort et trois blessés. Plusieurs chevaux des Piémontais restent entre leurs mains (5).

Meurtre du propriétaire piémontiste Joseph Genovese, par la bande Ninco-Nanco.

La bande Ninco-Nanco attaque une ferme occupée par un détachement du 46°, qui, malgré des prodiges de valeur, bat en retraite, laissant un mort, le soldat Jules Funchesi (G).

Combat non loin de Volturara. Les brigands, serrés de près par les lanciers d'Aoste et les bersaillers, se jettent dans un chemin impraticable à la cavalerie, où ils rencontrent treize paysans, qu'ils capturent et massacrent ensuite, de peur de trahison (7).

(1)Le Nomade, VI octobre.

(2)Le journal la Patria, 21 octobre.

(3)Le journal le Pat se, 20 octobre.

(4)Le journal la Patria, 18 octobre.

(5)La Libértà Italiana, 18 octobre.

(6)La Patria, 19 octobre.

(7)La Libértà Italiana, 22 octobre.

—408 —

Embuscade près de Calitri, province d'Àvellino. Un détachement du 8» grenadiers y perd un bomme.

Le brigand Domenico Madeo, de la bande Palma, est fusillé à Longobucco (Calabres). Quoique seul, Madeo se défend avec un héroïque sang-froid, et, avant de tomber tue deux soldats et en blesse trois (1).

Les domaines des propriétaires piémontistes de Corleto (Basilicate), sont saccagés.

Soixante brigands envahissent Aquafondata (Terre de Labour). Le commandant de la garde nationale se sauve. Sa maison est saccagée. Les écussons et le drapeau piémontais sont brûlés (2).

Le chef de bande Fuoco feint de se rendre au préfet de la Terre de Labour, qui lui donne un sauf-conduit, dont il profite pour causer aux Piémontais les plus grands dommages (3).

Du 19 au 24. — Les bandes Maratea et Marcantonio Saccagent, incendient et tuent sur le territoire d'Eboli, province de Salerne (4).

Un détachement d'infanterie et de lanciers, en tournée nocturne, rencontre une bande de gens à cheval et engage avec eux une vive fusillade. Le combat dure jusqu'au jour, où on s'aperçoit que ce sont des chevaux-légers de Lucques, qui avaient été mis en embuscade. Beaucoup de blessés de part et d'autre (5).

(1)Journal officiel de Naples, 26

(2)Le Nomade, 30 septembre.

(3)Idem.

(4)La Patria, 23 octobre.

(5)Le journal la Nuova Daunia, 21 octobre.

—409 —

Incendie de quatre fermes de Longobucco, dont une appartenant au maire Gaétan Nicoletti, par la bande Dominique Straface (1).

25. — Meurtre de Nicolas Simeone, et d'un officier de la garde nationale de Stigliano, par la bande Masini (2).

Du 26 au 31. — Quarante soldats du 27e détachés aux travaux de construction du télégraphe, le long du fortore, sont provoqués par cinq brigands à cheval de la bande Caruso, qui les attirent dans une embuscade, ou ils seraient tous restés sans le secours inespéré d'un bataillon, accouru au bruit de la fusillade (3).

Sac d'un domaine de Prunisco (Terre de Labour), par 45 brigands. Un détachement du 7e grenadiers accourt et est repoussé avec pertes (4).

Sac d'une ferme de Camporéale, province d'Avellino. Meurtre du fermier (5).

Le district de Lanciano (Abruzzes), est ravagé par les bandes Cannone et Romagnoli (6).

On lit dans les journaux napolitains que, du 1er janvier au 31 octobre, six cents combats ont eu lieu entre les brigands et les Piémontais.

NOVEMBRE.

Du 1er au 3. — Combat près de Pietragalla. Mort de Donatuccio de Forenza. Son compagnon Saverio Garone est pris et fusillé à Potenza.

(1)Le Conciliatore, 1er novembre.

(2)Le journal Roma, 7 novembre.

(3)Le Pungolo, 30 octobre.

(4)Le Conciliatore, 1 novembre.

(5)Ibidem.

(6) La Libertà Italiana, 31 octobre.

—410 —

Les journaux reproduisent des lettres menaçantes adressées parle chef de bande Michel Canosa aux maires et commandants de la garde nationale, leur enjoignant de cesser immédiatement toute espèce de poursuites contre les brigands (1).

Du 4 au 9. — Les bandes Guerra et Fuoco arrêtent une troupe d'ouvriers du chemin de fer, près de San-Pietro, (Terre de Labour), qu'elles renvoient en leur donnant 60 francs, à l'exception de trois ouvriers suspects d'espionnage, anciens garibaldiens de Marsala, qui sont fusillés (2).

10. — Les bandes Fuoco et Giuliano envahissent la commune de Baja-Latina, cernent la maison du maire, et le brûlent avec sa famille (3).

La garde nationale de Baja-Latina, forte de 80 hommes, est dissoute, pour avoir assisté impassiblement à l'auto-da-fé du maire Scotti et au meurtre des siens (4). Il avait donc bien raison, ce sous-préfet à qui le ministre demandait: «Combien y a-t-il de brigands dans les provinces méridionales? — De brigands? répondit-il, zéro. De brigands amateurs, tout le monde l'est (5).»

Du 11 au 17. — Combat près de Gravina (Pouilles), entre les bandes Crocco et Ninco-Nanco, et un détachement de gardes mobiles, de soldats et de gendarmes. Les Piémontais ont deux morts et deux blessés (6). Le Journal officiel de Naples ajoute que les brigands ont eu trois morts et cinq blessés.

(1)La Campana di San-Martino 18 novembre.

(2)Journal officiel de Naples, 10 novembre.

(3) Ibidem, 12 novembre.

(4)Le journal d'Italia, 17 novembre.

(5)Veri briganti, zero; Dilettante tutti.

(6) Le Popolo d'Italie, le Roma, 24 novembre.

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Du 18 au 23. — Combat prés d'Acerno (Principauté citérieure). Mort du brigand Ferdinando-Francesco Pepoli. Cinq gardes mobiles tués.

Du 24 au 26. — Un brigand est fusillé à Correto.

Ortone, province d'Avellino, est envahi par une bande que repousse un fort détachement de bersaillers, de gendarmes et de gardes mobiles d'Andretta (1).

Du 26 au 30. — Sac d'une auberge, entre Sala et Paduli, province de Salerne, par la bande Masini.

Combat près de Gaête. Les bandes Tommasini et Guerra perdent quatre morts, cinq blessés et quatre prisonniers, qui sont fusillés à genou et par derrière.

Sac des propriétés du sieur Telesio, de Calabre, par la bande Monaco, pour refus de rançon (2).

Vincent Marrozzo, moyennant grâce de la vie, de la liberté et une prime de 100 ducats, s'engage à empoisonner la bande Monaco, et mêle de la strychnine aux aliments de ses compagnons. La troupe accourt avec la police pour constater le résultat de cette odieuse trahison; mais les brigands sont allés, à quelques lieues de là, saccager les domaines de piémontistes. Marrazzo est mis en prison, puis relâché sur l'affirmation d'un miséricordieux médecin, que la strychnine peut parfois, au lieu 4e l'empoisonnement, produire le môme effet que la tarentule

DÉCEMBRE

Du: 1er au 10. — Cinquante brigands envahissent Castelnuovo (Terre de Labour,) se disant les agents du

(1)Le Popolo d'Italia, 1er décembre.

(2)Dans quille triste alternative se trouvent les propriétaires napolitains! S'ils refusent rançon, les brigands les ruinent; s'ils payent rançon, les Piémontais les ruinent ou les fusillent.

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gouvernement, se font ouvrir les habitations, les saccagent, principalement celle du sous-lieutenant de la garde nationale Gennaro Gaio, et se retirent emportant un butin énorme.

Sac de la métairie de César Delizzi, près Ferrandina, par les bandes Coppolone, Canosa et Auletla.

Combat au bois de Sila. Les bandes Monaco et Palma sont chassées par les bersaillers et se retirent sur les bords de la mer Ionienne (1).

Un détachement du 21e conduisant, de Craco aux prisons de Matera, toutes les familles de brigands, est attaqué et mis en déroute par une bande de soixante hommes (2.)

Trois brigands sont fusillés dans la Leccese.

L'héroïque Michel Caruso est trahi et livré aux Piemontais, en même temps que ses deux lieutenants, Testa et Gabriel Canicola.

11. — Le chef de bande Caruso est fusillé à Bénévent. Il meurt en héros, en criant une dernière fois: «Vive Dieu! Vive le roi! Vive Naples!»

Du 12 au 20. — Une vingtaine de brigands, entre autres le chef de bande Liberato de Lellis, sont fusillés à Ginoza, Potenza, Casano de Calabre, Gioja de Piedimonte, Cerréto de Bénévent, et Solopaca (3). Par représailles, les brigands massacrent, aux environs de Melfi, plusieurs femmes de Rionero et deux piémontistes.

Cinq brigands de la bande Cosmo Giordano, dit le Cosmiello, se présentent volontairement aux autorités

(1)Journal officiel de Naples, 12 décembre.

(2)Le journal d'Italia, 9 décembre.

(3)La Libértà Italiana et le Pungolo, 13 décembre.

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piémontaises, sur les conseils d'an déserteur du 39e, et reçoivent promesse de la vie sauve. Quatre d'entre eu sont fusillés à Pietraroja (Terre de Labour). Le cinquième parvient à s'évader (1).

Sac de la ferme Visciotti, près Candela (Pouilles), par la bande Tasca (2).

Combat, près de Graco, entre un détachement du 21e et la bande Coppolone, qui se retire dans le buis de Caprarico (3).

Sac de la ferme du Piémontiste Branca, aux environs de Potenza, par les bandes Ninco-Nanco et Malacarne. Massacre de 200 têtes de bétail (4).

Le nouveau préfet de Basilicate, M. Veglio, amène avec lui, 150 nouveaux gendarmes (5).

Le Conciliatore et le Pungolo, de Milan, du 29, signalent l'apparition de nouvelles bandes, remarquables par leur férocitfé.

La bande Calabrese capture un officier de la garde nationale de Roccarainola, et le rançonne; puis elle arrête et dévalise, entre Mugnano et Avellino, deux voitures de voyage, où se trouvaient des officiers de gendarmerie


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Du 21 au 31. — Une femme des environs de Monte-forte, province d'Avellino, est arrêtée par la garde mobile dans un chemin écarté, portant avec elle un pain de six livres, et fusillée sur place comme suspecte de porter à manger aux brigands.

Le prêtre apostat Pasquale Cugia est fusillé par la bande Canosa.

(1)La Borsa, 21 décembre.

(2)La Campana di San Martino 24 décembre.

(3)L'Italia, 11 janvier 1864.

(4)La Borsa, 1 janvier 1864.

(5) Le journal le Paese.

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Combat entre la bande Colasurdo et un détachement de gendarmerie près d'Avellino. Un brigand blessé, pris et fusillé pendu par les pieds.

Escarmouche aux environs de Catanzaro. La bande Corea perd trois hommes.

Embuscade de la bande Scoca, presque aux portes d'Avellino. Meurtre de deux négociants. Un garde mobile est pris et massacré.'

Combat près de Lecce. La bande de Trisolino perd deux hommes et blesse deux bersaillers et un gendarme. Le lieutenant du chef de bande Sacchetiello, Tommaso Bicciocchi, est pris blessé dans la neige, sur la montagne, et fusillé à terre.....................................................................

Prions pour les morts!

UNITÉ  ET AUTONOMIE

L'unité était difficile: le Piémont l'a
rendue impossible.
(Voyage au royaume de Naples a Palerme
en 1862, page 161
)

Dans le cours de mes fréquentes excursions en Italie, il m'est arrivé de rencontrer par-ci par-là quelque unitariste convaincu, — rara avis! — et d'engager franchement avec mon précieux interlocuteur une discussion, que j'étais heureux de pouvoir approfondir, sur le principe de l'unité italienne. — L'un la basait sur l'unité des races. Qu'a de commun, répondais-je, le Sicilien de la Grande-Grèce avec l'Allobroge du Piémont? — L'autre s'appuyait sur la conformité des idiomes: qu'a de commun l'atroce patois de Turin avec l'idiome pur de Florence et de Rome? — Celui-ci basait l'unité sur le suffrage universel: Ignorez-vous, répondais-je, ou croyez-vous que j'ignore que l'unité italienne n'a été votée que par 180,000 citoyens, dont plus de 80,000 étaient aux arrhes ou aux gages du Piémont?

—416 —

— Celui-là tâchait de m'éblouir par l'énumération emphatique des innombrables félicités que devait rapporter aux populations italiennes Puni lé de direction intérieure et de représentation extérieure, sans parler d'un porte-respect de 300,000 hommes: Vous payez quatre ou cinq fois plus d'impôts, répliquais-je; votre armée ne peut venir à bout, depuis quatre ans, de quatre bu cinq mille brigands napolitains, qui renaissent sans fin comme le phénix ou l'hydre de la Fable, et vous croyez qu'elle viendra à bout d'un million d'Allemands, dont le courage se centuple de la rancune de victoires (1) que vous n'avez pas gagnées! Quant à vos félicités hyperboliques, je ne sais si vous avez oublié d'allumer votre lanterne: mais je déclare que je ne les distingue pas très-bien.—Un italianissime de Pracchia, fut avec moi d'un franchise brutale, et je lui en sus gré; car sa déclaration résumait au mieux le sens et la portée du mouvement unitariste depuis les Alpes jusqu'à l'Adriatique:

— «Je sais aussi bien que vous, répondit-il à mes arguments, que l'unité n'est pas dans le sang italien, que le culte des franchises municipales prime chez nous les autres, et que tout notre parti tiendrait autour d'une table de vingt-quatre couverts; mais que nous importe la conformité de race, de langage ou de vœux? Le suffrage universel n'est entre nos mains qu'un rouage, un moyen temporaire. Il pêche par sa base, d'ailleurs: Si demain le suffrage proclamait la loi agraire, l'accepterions-nous donc? Non. Ce que nous voulons, c'est mener le peuple, les peuples à l'unité universelle. Nous dédaignons les partis en faveur des principes, des seuls principes que nous reconnaissions.

(1)Magenta, Palestre, Montebello, Solferino, etc — L'armée piémontaise est convaincue qu'elle a plusieurs fois sauvé l'armée française d'une défaite imminente. C'est burlesque.

417 -

Nous demandons l'unité pour n'avoir plus qu un roi, parce qu'un roi est moins long et moins difficile à jeter bas que cinq ou six. Nous ne voulons plus de roi, parce que quand il n'y aura plus de roi, il n'y aura plus de Dieu. Ce sont les rois qui ont inventé Dieu. On gouverne, depuis cinq mille ans par la terreur (1); nous gouvernerons par l'égalité, par l'absolutisme de l'égalité, si vous voulez que je le dise. L'unité italienne mènerai l'unité universelle, parce qu'elle détrônera le pape, qui est le Cerbère de la société moderne. Le pape parti, nous, arrivons. Je n'ai rien à vous dire de plus.»

Et moi je n'avais rien de plus à demander aux adeptes de l'unitarisme. Je les pris tous en pitié, aussi bien mes quatre pauvres raisonneurs que mon franc utopiste; mais les aveux du dernier éclairaient pleinement à mes yeux la question italienne, et, de ce jour, je ne songeai plus à questionner mes adversaires de rencontre.

Voilà donc le but où tendent les doctrinaires de la jeune Italie: démonarchiser le monde pour le déchristianiser. C'est à une sorte de paganisme municipal; grouillant entre le sophiste et le gendarme, qu'on veut amener la patrie des papes, et l'univers à sa suite. Et quels sont les initiateurs, les entraîneurs, dans ce casse-cou religieux et social? Un assassin, Mazzini; une ganache, Garibaldi, et derrière eux, la tourbe des enfants prodigues de l'Italie, à qui leur âge vaudra le repentir et le pardon, puis la lie des déclassés et des sots. Pauvre humanité! seras-tu donc la dupe éternelle des fous dangereux et des meneurs intéressés?

(1)Le mot était heureux, dans la bouche d'un révolutionnaire.

-418 -

II

Dans tout cela, il n'est question du catholicisme que comme d'une bicoque à détruire pour cause d'utilité publique; et cependant, je l'ai exprimé dans Y Introduction de ce livre, sur quel terrain l'unité italienne se fût-elle fondée plus aisément que sur le terrain de l'unité religieuse, de l'unité catholique, la seule qui existe depuis Venise jusqu'à Messine?

Si tous les Italiens sont frères, pourquoi les agents piémontais, étant admis bénévolement que les Piémontais soient des Italiens, — traitent-ils les hommes de Naples et de Palerme comme des ilotes et des parias? «Les Siciliens sont des barbares; les Napolitains sont des sauvages ingouvernables (1)!» s'écrie un député piémontais. Un autre menace de les fusiller jusqu'au dernier pour avoir leur dernier sou. On en fusille 10,000, on en jette en prison près de 100,000, on en force 200, 000 à l'exil. — Est-ce là de la fraternité? est-ce là l'unité?

Au moins le Piémont, qui parlait, qui se targuait de délivrer, de régénérer les Deux-Sicilies, leur a t-il apporté

(1)Actes officiels du Parlement. Séance parlementaire du 1 décembre 1863.

—419 —

de ces irrécusables bienfaits, qui à la longue peuvent voiler, sinon effacer complètement le péché originel? Non. Les populations sont unanimement hostiles aux innovations piémontaises; je dis unanimement, car je compte-pour rien la voix des valets et des mercenaires. Tout le monde est brigand dans les Deux-Sicilies, c'est-à-dire anti-piémontais, anti-unitaristes, autonomiste. Comment voulez-vous que le roi de Turin soit le roi de Naples? Chaque année, le gouvernement dissout des centaines de gardes nationales et de conseils municipaux ou généraux. Chaque année, il emprisonne des milliers de suspects, il confisque, il pend, il fusille, il décime ce qui reste de chaque population. Je ne sais pas de village où les réactionnaires n'aient trouvé à fraterniser gratis, pas de ville où l'on n'ait vu répandre à profusion des placards, des proclamations, des appels bourboniens. Il est doux de voir encore ce glorieux nom de Bourbon synonyme d'honneur et de patrie, d'indépendance et de liberté. Entre mille, je choisirai la lettre suivante, non parce que l'auteur a bien voulu s'y rappeler mon nom, mais parce quelle résume admirablement les griefs et les espérances du peuple des Deux-Sicilies.

Lettre d'un Napolitain à M. Gladstone.
«Naples, 8 janvier 1864.

Monsieur.

Voulez  vous permettre à un Napolitain de vous exprimer les sentiments qu'a fait naître en lui la lecture de votre réponse à la remarquable brochure de M, de Brimont, Justice pour la Pologne et Naples? Le premier sentiment, je l'avoue, a été la stupéfaction car il est plus qu'étonnant que ce recueil sérieux d'arguments et de faits irréfragables n'ait provoqué, de la part du chancelier Gladstone, qu'une courte série de phrases banales et de vulgaires faux-fuyants.

—420 —

Quand un gentilhomme français faisait appel à la loyauté du trop fameux auteur de l'Examination, le peuple des Deux-Sicilies était en droit de s'attendre à d'autres paroles que celles que les champions de l'unité, par une juste pudeur, n'osent plus même prononcer au sein du parlement de Turin.

C'est donc au nom de notre infortunée monarchie de notre indépendance nationale, de l'honneur napolitain, que j'adresse un appel suprême à votre loyauté.

Vous paraissez regretter, Monsieur, que l'alliance anglo-française semble moins durable que vous ne le voudriez. Hélas! nous autres hommes de Naples et de Palerme, après trois années de larmes et de honte sans résignation, nous regrettons bien davantage la rupture des rapports affectueux entre les Deux-Sicilies et la Grande-Bretagne; — rupture qui suivit, comme vous le savez, le refus de notre Roi de livrer à l'Angleterre, en 1838, les soufres de la Sicile. Aussi a-t-on dit, Monsieur, que dans votre «voyage de santé» vous ne fûtes rien que le commissionnaire des rancunes britanniques, — rancunes mortelles, à en juger par l'histoire de ce siècle.

Vous arguez «des obligations immédiates de vos devoirs» qui ne vous permettent pas de vous livrer à une nouvelle et moins légère examination de l'état des Deux-Sicilies. Un second «voyage de santé» vous aurait bien vite prouvé, — selon la parole énergique de l'Empereur des Français, que «les Bourbons n'ont jamais fait» quelque chose comme cela.»

Je suis Napolitain: ce n'est donc pas «des lèvres d'un» étranger que sort aujourd'hui le cri de l'humanité.» Depuis trois ans, quel est le bilan de l'annexion piemontaise, de l'unification d'un peuple de vingt-cinq millions d'âmes votée par moins de 200,000 électeurs, dont la moitié était aux gages du Piémont?

—421 —

Depuis trois ans, qu'ont produit «ces germes de prospérité répandus sur l'Italie?»

Dix mille Napolitains fusillés ou massacrés;

Des femmes égorgées ou outragées;

Des enfants et des vieillards torturés et mis à mort;

Plus de vingt villes ou villages mis à sac ou brûlés;

Un déficit que chaque heure augmente et rend plus impossible à combler;

Soixante-dix mille prisonniers entassés inhumainement dans les cachots des libérateurs;

Cent vingt-neuf journaux indépendants supprimés par suite de comédies judiciaires ou d'agressions soudoyées;

Environ cinq cents saisies, amendes, condamnations, frappant la presse véridique;

Une magistrature ignare et servile;

Une armée de policiers, recrutée dans la boue des bagnes de l'Italie entière;

Un parlement composé de saltimbanques et de mercenaires, votant à genoux des lois de tyrannie stupides et de sang!....

Où donc avons-nous, Monsieur, «le pouvoir d'exposer et de réformer nos abus?» Que peut notre presse, frappée d'impuissance par d'incessantes menaces de mort? Que font nos juges, nés d'hier, complices forcenés de nos bourreaux? Que fait le Parlement-Pica? C'est la négation de Dieu et de l'homme, de l'honneur et de la liberté, que ce gouvernement spoliateur, hypocrite et barbare. C'est, le rouge au front et la douleur au cœur, que, moi Napolitain, je récapitule la somme de nos hontes et de nos misères!

Vous l'avez dit, Monsieur, et justement cette fois: «chaque heure ajoute au total de la vaste somme de nos

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souffrances;» et c'est à vous-même que nous en appelons, à vous, le premier ouvrier de notre ruine et de notre abaissement!

Que nommez-vous «les quelques accusations reproduites contre le gouvernement italien?»

Il est un ouvrage signé d'un nom estimé, Voyage au royaume de Naples en 1862, dont je prends la liberté de vous recommander la lecture. Puisés aux sources piémontaises mêmes, les nombreux documents, que renferme l'œuvre généreuse de M. le vicomte de Poli, vous convertiront mieux que tous autres à la cause de l'indépendance napolitaine. Non, dans l'histoire des peuples, il n'en est pas un sur qui, dans un laps de trois années, aient fondu plus de fléaux, pas un dont on ait fait tant couler les larmes et le sang, pas un dont on ait plus unanimement essayé d'étouffer la voix, et pas un cependant qui soit plus digne de la sympathie et de l'aide des hommes de cœur de toutes les nations et de tous les partis!

Que pourriez-vous répondre, Monsieur, à tant de laits odieux et infâmes accumulés comme à plaisir par les agents subalpins? Nous avons vu dépouiller nos musées, dépouiller nos églises. Ce n'est pas assez d'avoir ruiné la fortune publique; il faut encore que toutes les horreurs aient leur sanction dans ce parlement de valets de bourreaux, et que la confiscation soit mise à l'ordre du jour. Nous avons vu un général piémontais, le marquis de Faverges. cravacher un factionnaire, par cela seul qu'il le savait Napolitain, puis renvoyer à la torture....

A ce mot, je me sens frémir d'indignation et d'horreur. Plus que tout autre, Monsieur, vous avez servi, dans le passé, et vous servez encore à produire, contre notre gouvernement légitime et national,

—423-

une série d'accusations chimériques, telles que la fameuse coiffe du silence et autres instruments fabriqués par l'imagination de quelque voyageur malade. Je vous rends cette justice que vous avez rétracté déjà un certain nombre des assertions calomnieuses de votre pamphlet, et cela même me fait compter davantage sur votre loyauté, qui n'a besoin sans doute que d'être éclairée. Ainsi vous avez naguère publié les déclarations suivantes:

«Je n'ai rien appris confirmant l'assertion par moi rapportée comme probable que Settembrini avait été torturé. Je crois de mon devoir de la retirer.

J'avais commis une grave erreur en disant qu'il avait été condamné aux doubles fers pour la vie. Les fers ne font pas partie de l'ergastolo qu'il a dû subir par suite de la commutation de la première peine.

J'ai dit que six juges avaient été révoqués à Reggio, pour avoir acquitté des prisonniers politiques. C'est une erreur: trois d'entre eux ont été seulement changés de poste.

J'ai dit que dix-sept malades avaient été massacrés à Procida, lors de la révolte de cette prison; je crois aussi que c'est une erreur.

J'ai prétendu que certains prisonniers, acquittés dans le procès de l'Unità Italiana, étaient encore en prison. Cette assertion pourrait faire croire qu'ils ont été retenus en prison un temps considérable après leur acquittement, ce qui est inexact.»


vai su


Que n'avez-vous rétracté jusqu'au bout, Monsieur? On a pu égarer l'opinion de l'Europe, à l'aide de ces horribles récits créant des martyrs à trois sous la ligne et à tant par tête; mais c'est à la sincérité de MM. Poerio, Settembrini et consorts que nous nous adresserons en dernier appel, et nous ne savons que trop combien les soixante-dix mille prisonniers politiques du roi

—424 —

Victor Emmanuel II voudraient voir assimiler leur sort à celui des «sept mille prisonniers du roi Ferdinand II!»

Mais est-ce donc une chimère, un conte fantastique, Monsieur le Chancelier, que ce récit atroce et navrant des tortures infernales infligées à ce pauvre sourd-muet de Palerme, coupable d'être accusé de feindre le mutisme et la surdité pour échapper à la conscription piémontaise? Votre cœur d'homme et d'honnête homme n'a-t-il pas frémi d'horreur et de pitié, à la lecture de ces raffinements d'une cruauté inconnue aux plus mauvais âges? Vos jeux ont-ils compté les cinquante-deux plaies dont est pour ainsi dire moucheté ce squelette vivant? Avez-vous vu passer sa mère, vraie femme napolitaine, montrant au peuple un mouchoir trempé dans les plaies de son enfant? Avez-vous vu tomber de grosses larmes, non des yeux de cette mère, éloquente dans son silence, mais des yeux de ces hommes napolitains que vous, Monsieur, vous avez contribué à jeter dans la ruine, dans l'asservissement, dans les tortures?

Heureux encore ceux qui peuvent mourir, l'arme au poing, pour la défense et l'honneur du pays qui les a vus naître! Cent vingt mille baïonnettes étrangères ne suffisent pas, depuis trois années, à comprimer le brigandage, à déplanter, de la cime de nos montagnes, le drapeau national des Deux-Sicilies! Et ne nous redites pas encore que cet état douloureux prend sa source dans le brigandage même, et que le brigandage est le produit des largesses du roi légitime! François II est pauvre, pauvre comme son peuple, naguère si florissant; pauvre comme le gouvernement même qui lui donne une noble hospitalité. Non, les Vendéens des Sicilies n'ont pas besoin d'or pour combattre et mourir. Le brigandage est le réveil d'un peuple hier trahi, vendu et enchaîné, mais non vaincu.

-425-

Demain peut-être, l'Europe nous entendra sonner de nouvelles Vêpres... Dieu est avec tons les peuples qui veulent être libres!

Revenez donc à Naples, Monsieur, et vous deviendrez l'un de nos plus ardents défenseurs, vous qui naguère avez trouvé tant de chaleureux accents pour des prisons fantastiques et des martyrs de contrebande. Revenez parmi nous, et vous ne pourrez que joindre votre voix à la voix de ce peuple bâillonné, torturé, dépouillé, qui réclame, au prix de son sang, son chevaleresque souverain et son indépendance nationale.

Veuillez me pardonner la longueur de cette réplique, Monsieur, et agréer l'expression de ma haute considération, en me pardonnant de ne pas signer autrement, pour de triâtes motifs qu'un nouveau voyage à Naples vous mettrait à même d'apprécier.

Carlo Luigi R..................»

—426 —

III

On me demande comment la conquête piémontaise a pu s'effectuer, si l'unanimité des populations lui est hostile.

Le général Bonaparte disait un jour:

«J'ai vu quatre hommes maîtriser un département.»

Voilà justement ce qui s'est passé dans les Deux-Sicilies. La verge des meneurs soudoyés ou des traîtres a maîtrisé un instant les populations. Et puis, pourquoi ne pas l'avouer, le bataillon des- mécontents, — où n'existe-t-il pas? — s'est bien vite rallié au nouvel ordre de choses. Enfin la caste égoïste des indifférents n'a pas vu venir d'abord sans une certaine curiosité sympathique la révolution piémontiste. — L'Ignoti nulla cupido est un non-sens chez les peuples: ils ne désirent que ce qu'ils ne connaissent pas. — Mais bientôt les meneurs, repus, se retirèrent; les traîtres conspués s'enterrèrent vivants, comme ce misérable Liborio Romano; les mécontents furent plus mécontents que jamais; quant aux égoïstes, aux indifférents, ils devinrent rapidement les ennemis d'un gouvernement qui ne s'appuyait que sur les perquisitions domiciliaires, les confiscations.

—427 —

les emprisonnements en masse, les fusillades, et pour toute compensation, quintuplait le chiffre des impôts. De là à regretter le passé, à regretter le doux et chevaleresque Français II, le roi national et paternel, il n'y avait que l'espace d'une comparaison.

Je m'en rapporterai d'ailleurs aux organes mêmes du Piémont; leurs aveux édifieront davantage que tout ce que je pourrais dire de la révolution de 1860.

«Le peuple, le vrai peuple italien n'a pas une part directe à notre mouvement.... Nous lui avions promis mieux qu'il n'avait, il a eu pis: des impôts très-lourds d'argent et de sang, la misère, des tracas de toute sorte; on a violenté son caractère et offensé ses croyances... Puis nous sommes restés un parti divisé en fractions, un parti peu nombreux même;le peuple, spécialement dans les campagnes, est resté étranger au mouvement et n'en a ressenti que les désavantages.... D'ailleurs, en Toscane comme dans les Romagnes en Lombardie, comme dans les Deux-Sicilies, c'est toujours la même chose: le peuple est étranger à notre mouvement; il ne l'a pas compris, il l'a supporté avec une vague espérance; il le réprouve, et s'en plaint maintenant avec la dure expérience des maux qu'il a causés (1).»

«Certainement les provinces méridionales sont agitées: 1° par le parti bourbonien, fort nombreux, qui veut la restauration de François II; 2° par une fraction de ce parti qui se déclare prête à accepter n'importe quel prince, pourvu qu'il délivre Naples des Piémontais; 3 par le parti républicain. Le Piémont n'a pour lui que ceux qui émargent à son budget (2).

(1)Le journal le Diritto, de Turin, 4 décembre 1868 et 4 janvier 1868.

(2)Le Corriere mercantile, avril 1883.

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«Le parti bourbonien-autonomiste est le pivot principal autour duquel se meuvent tous les autres; mazzinien, fédéraliste, républicain-unitariste, profitent de la haine et du mécontentement universels, et grossissent les rangs du parti bourbonien (1).»

«La Sicile n'est pas tranquille, et l'on redoute quelque conflagration. Les bourboniens, les mazziniens, les cléricaux s'agitent, et, s'il ne s'est rien produit de positif jusqu'ici, on l'attribue à ce que, si tous sont d'accord dans le but, ils diffèrent dans le choix des moyens. Que Dieu nous sauve, et je dis Dieu, parce qu'ici le gouvernement n'a plus de force morale, et la force matérielle est peu de chose au besoin (2).»

Comment! ce n'est pas encore assez de cent vingt mille baïonnettes pour contenir ce peuple conquis, trahi, désillusionné, pour barrer à ses ardentes aspirations le chemin du palais Farnèse (3), pour lui inculquer l'amour ou la patience du joug unitariste? Je pourrais multiplier sans fin les citations de ce genre; mais que diront-elles de plus significatif et de plus concluant?

Le résultat de cette intolérable situation se traduit annuellement par l'envoi à Rome de nombreuses adresses d'hommage et fidélité, noires de signatures. Que le Piémont se trouve engagé au nord dans une guerre qui le force à dégarnir de troupes l'Italie méridionale, et je ne lui donne pas un mois pour l'avoir perdue.

Dieu le veuille, pour ce peuple si attaché à jsa foi et à son roi! Car la restauration de François de Bourbon sera celle de la patrie napolitaine.

(1)La Politica del Popolo, de Milan, mars 1863.

(2)La Discussione, de Turin, 20 avril.

(3)Est-il besoin de dire que le palais Farnèse est la demeure de François II, à Rome?

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IV

Conseils municipaux dissous en 1863:

Terre de Labour, — San-Giorgio a Liri, San Giovanni in Carico, Faicchio, Boccarainola, etc.

Principauté ultérieure. — Paoli, Mojana, Montalla, Milita, Castellotti, San-Giorgio k Molara, etc.

Capitanate. — San-Marco in Lamis, San-Bartolomeo in Galdo, Ripatransene, etc.

Terre de Bari. — Monopoli, Gravina, Luogorotondo, Castellana, Putignano, etc.

Terre d'Otrante — Castrifranco, Melendugno, Cutrofiano, Carmiano, Cannale, San-Marzano, Monteparana, Fragognano, Gagliano, Villa-Picciotti, Persicci, Matina, Giuggianella, Minervino, Mura, Ovitrano, Otrante, etc.

Calabres. — Gosenza, Rocca-impériale, San-Lucca, Motta di Jucia, San - Giuseppe, Rogaladi, Saracena, Nicastro, etc.

Basilicate. — Brienza, îluvo, Marsico-Vetere, Mar-sico-Nuovo, Golobraro, Rionero, etc.

Principauté citérieure. — Santa -Menna, Sarno, Gova, Fiuminata, Àlbanella, etc.

Province de Naples. — Ottojana, Boscarcale, Casola.

?430 —

Vico Equense, Procida, Mento, Cardito, Àrzana, Piana di Sorrento, etc.

Province de Molise. — Comune de Molise, Salcito, San-Lupo, Guglionisi, Colle, Riccia,Campochiaro, Boc-camandolfi, etc.

Abruzzes. — Barisciana, Castelvecchio, Sicinaro, Montereale, Bagno, Lucoli, Cagnano, Torriaparte, Apri, Connelongo, Pescina, Scurcola,San-Vincenzo,Civitella-Roveto, Fiaminiana, etc.

-431  -

V

Un journal de Turin (1), écrit en français, — en mauvais français, — annonce que les populations siciliennes envoient une adresse couverte de nombreuses signatures à l'empereur Napoléon III, pour lui exposer la déplorable situation du royaume, la haine croissante du peuple pour le régime piémontais, et conjurer le vainqueur de Solférino de faire exécuter a la lettre le traité de Villafranca.

— Le 7 et le 8 janvier, des députations de notables Napolitains, à l'occasion de la nouvelle année, présentent, à Rome, au roi François II, des adresses de toutes les provinces, parmi lesquelles il remarque celle de la capitale, volume de 400 pages couvert de plus de quarante mille signatures,. C'est avec un sentiment de joie, mais non de surprise, que nous avons obtenu l'honneur de feuilleter ce précieux recueil et d'y lire plusieurs milliers de noms illustres à des titres divers, génie, naissance, richesse, prélature, négoce, et jusqu'aux noms de certains meneurs de 1860, franchement convaincus alors, franchement désillusionnés aujourd'hui.

(1)Les Nationalités, juillet 1863.

—432 —

Les signataires dépeignent sous les plus tristes couleurs, la situation de leur patrie, trompée, trahie, vendue, exploitée, par une minorité sans foi ni honneur, et expriment Tardent désir de la restauration monarchique et nationale.

— François II, profondément ému des termes affectueux de ces diverses adresses, et des témoignages enthousiastes des députés napolitains et siciliens, remercia ses peuples en leurs personnes avec ce langage du cœur,ce langage de roi qu'il possède si bien, et daigna ajouter ces mots: «Ce n'est pas la perte de mon trône qui m'attriste, mais le spectacle de l'oppression, de la ruine,de l'esclavage de mes peuples. Le souffle du pays natal, si doux à l'exilé, ne m'apporte ici que l'écho des fusillades, les étincelles des villes incendiées, la plainte des prisonniers et le cri des laboureurs dont on a ravagé les champs. Nous avons confiance en Dieu... Nous attendons avec douleur, mais avec calme. Laissez ceux quine croient pas dans la Providence compter sur le triomphe de l'iniquité... Comme vous, je n'ai jamais douté de mon retour dans votre patrie. Et comment en douter, quand je contemple ce noble peuple, abandonné de tous, sans appui, sans que je l'y pousse, vous le savez, lutter seul contre l'oppression étrangère, et mourir en prononçant mon nom? Je me dis alors qu'une cause soutenue par la justice, enracinée dans tant de loyaux cœurs, ne peut succomber et que l'avenir lui appartient. Dites à ceux qui vous envoient, que mes principes sont inaltérables, que mes intentions sont immuables. Amnistier, pardonner tous les faits politiques passés, tel est le sentiment de mon cœur, telle est la maxime première de ma politique. Sous l'égide d'un régime sincèrement représentatif, le pays pourra intervenir efficacement dans son administration et son gouvernement.

—433 —

La Sicile aura, de son côté, son indépendance économique, administrative et parlementaire, et Palerme partagera avec Naples le droit d'être la résidence du monarque.»

La presse indépendante de tous les pays applaudit ce discours si paternel, si royal, qu'elle considère comme le programme de la restauration future.

—Le 5 janvier, une émeute éclate dans la Via Santa Lucia, à Naples, aux cris de Vive François II! Vive notre roi! Vive le héros de Gaête! La police piémontaise procède à de nombreuses arrestations.

—Le 16 janvier,  anniversaire de la naissance de M. le roi François II, en dépit de toutes les précautions et de toutes les menaces de la police, une imposante manifestation se produit à Naples et dans les villes avoisinantes, Santa-Maria, Portici, Torre del Greco, etc. Sur plusieurs points on voit flotter les drapeaux bourboniens; les rues sont semées de fleurs de lis dorées et d'emblèmes nationaux; partout des inscriptions, des proclamations, des placards, des poésies même en l'honneur «des héros de Gaête, Francesco et Sofia.» La police procède à des arrestations en masse, et passe vingt-quatre heures à faire disparaître tous ces témoignages de l'amour du peuple napolitain pour le roi national.

—Il court dans Palerme un hymne imprimé et répandu à des millions d'exemplaires, invoquant le prompt retour de François II, «le Roi-frère» et lui demandant de rendre à l'infortunée Trinacrie le calme et le bonheur imprudemment risqués et perdus. En voici la première strophe:

-434-

Son gli altari profanati,

il pudore è calpestato.

Ogni dritto è violato.

E viviamo in schiavitù (1)!

Et voici le refrain;

Fuori i ladri.

I Piemontesi!

Cacciam l'usurpator (2)!

—On recherche avidement, dans toutes les classes de la société, les monnaies d'argent à l'effigie du roi François II, portant en exergue «Confederazione italiana 1860.»


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—L'église royale de Santa-Chiara reçoit l'ordre de ne pas célébrer certaines fêtes traditionnelles, «qu'une catégorie de gens voudraient convertir en manifestations hostiles au gouvernement du royaume.» J'ajouterai, pour l'édification du lecteur, que l'église royale de Santa Chiara renferme le tombeau de la sainte mère du roi (3), et qu'il est journellement le prétexte de pieuses manifestations royalistes. L'auguste et sainte Marie-Christine de Savoie est devenue comme la patronne des Deux-Sicilies, et j'affirme qu'il n'y existe pas de nom saint plus populaire que le sien. Un journal turinois (4) s'inquiète de ces manifestations incessantes, et crie au gendarme.

(1)Les autels sont profanés, — la pudeur est foulée aux pieds,— tout droit est violé, — et nous vivons dans l'esclavage.

(2)Dehors les voleurs, — Les Piémontais — Chassons l'usurpateur!

(3)Je n'ai pas besoin de noter que partout où je dis «le Roi» je veux dire: «François II» qui, du reste, n'est pas appelé autrement dans les vingt-trois provinces des Deux-Sicilies.

(4)Le journal la Discussione, 20 avril.

—435 —

—Le 4 octobre, à l'occasion de sa fête (1), le roi reçoit à Rome d'innombrables témoignages de foi et de dévouement, entre autres une adresse de Naples, couverte de 27,108 signatures.

—Le 6 septembre, anniversaire du départ du roi; les rues de Naples se trouvent inondées d'imprimés royalistes. «Ce jour néfaste, dit l'un, marque la troisième et dernière année de notre esclavage. Nos chaînes sont brisées. La légitimité triomphe. Vive François II, roi des Deux-Sicilies!» — «Dehors, les Piémontais! Dit l'autre. A bas Victor-Emmanuel! Vive François II!»— Un troisième, plaisantant amèrement, assure que «la vermine du Nord ne saurait s'acclimater sous le ciel de Parthénope.»

—L'ouverture du chemin de fer de Naples à Rome, 25 février, rappelle aux Napolitains un dernier bien fait des Bourbons, à qui l'on doit l'initiative de cette importante voie de communication.

—Paroles d'un député piémontais:

«S'il y a, dans les Deux-Sicilies, des traditions de brigandage, si l'on y croit que le Bourbon puisse revenir, il faut incarner l'idée que le gouvernement est stable, enraciner dans les populations la pensée que tout est possible; brûlons jusqu'à la dernière des villes, mais, per Dio! ne reculons pas (2)!»

—Extrait de la Discussione (3), journal de Turin: «Le brigandage doit finir, coûte que coûte; les parôles sont hors de saison; brûlez les bois, les forêts, les maisons...»

(1)Saint-François d'Assise.

(2)Séance parlementaire du 1er août.

(3)Août 1863.

—436 —

Que pense le Napolitain qui compare ces appels sauvages et les paternelles proclamations du jeune Roi-Bourbon, quittant sa capitale pour ne pas l'exposer aux horreurs d'un bombardement, et allant s'y exposer lui-même (1)?

—Paroles du député italianissime La Farina (2):

«La révolution italienne a offensé beaucoup d'intérêts, beaucoup de traditions, et jeté dans l'exil des princes vivants encore et sympathiques.»

—Le sentiment de l'autonomie et de la résurrection inévitable de la monarchie est si puissant dans le cœur des populations, qu'elles regardent comme traître à la patrie quiconque ne hait pas l'usurpation piémontaise. L'unité ne se soutient, à Naples, que comme un cadavre galvanisé: elle est morte, mais elle n'est pas encore enterrée. Un député furibond va jusqu'à demander au parlement de proposer à l'empereur Napoléon III d'enlever de Rome le roi François II (3).

—«L'idée générale est que le roi des Deux-Sicilies peut revenir. (4)»

—L'Europe n'entend-elle donc pas les cris de douleur de ce peuple trahi, vendu, décimé? Une adresse des Napolitains au parlement anglais contient ces douloureuses paroles: «.... Si le peuple des Deux-Sicilies pouvait  élever librement la voix, librement donner  sa signature,  vous n'entendriez qu'un cri d'indignation contre le Piémont; vous liriez par millions les signatures des Napolitains en faveur de leur légitime souverain François II.

(1)Voir le  Discours prononce par le Roi en présence de l'ambassadeur de France, 10 décembre 1861.

(2)Séance parlementaire du 27 février.

(3)Séance parlementaire du 12 juin.

(4)Rapport de la Commission parlementaire d'enquête sur le brigandage, page 893.

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Ces 41,000 signatures, que vous lisez au bas de cette adresse, recueillies sous le regard vigilant d'une police féroce et non sans les plus horribles craintes, vous font facilement comprendre combien plus elles seraient nombreuses, si nous avions tous la liberté d'exprimer notre vœu. Nous avons cru inutile de recueillir les signatures de notre aristocratie-: l'émigration napolitaine de Paris, de Rome, parle assez haut...

Dans quel état de désolation est plongé le royaume de Naples! Les lois sont détruites, aussi bien que les institutions, les finances, la liberté, les hommes même, le pays, tout en un mot; chaque coin de la terre classique est rougi du sang de ses fils qu'on a fusillés; le mécontentement est profond et général; et si une main amie ne prend pas la défense de ce peuple opprimé, il faut redouter un désastre sans exemple dans les fastes même les plus sanglants de l'humanité... Le peuple des Deux-Sicilies ne se reposera jamais, jamais, jamais, tant qu'il ne sera pas délivré du joug des envahisseurs subalpins (1).»

— Le Times dit à ce propos: «Il est inutile de nier plus longtemps que la haine contre les Piémontais ne-soit grande dans les Deux-Sicilies, et que les efforts pour arriver à la destruction du brigandage n'aient été infructueux. Ces faits sont admis même par les plus fervents soutiens du gouvernement, et ils sont contraires non-seulement à l'idée de l'unité, mais à beaucoup d'au-ires idées. Naples se rappelle avec douleur sa cour souveraine, et son sang bouillant se glace au contact des froids Piémontais.

(1)Cette adresse a été publiée en entier par le Morning Herald.

—438 —

Les provinces du Sud se voient comme transformées en un fief du roi de Sardaigne, et sont indignées de ce vasselage (1).»

—Le roi François II a noblement refusé 16,000 ducats que lui offraient les réactionnaires (2).»

—«Réduits à nos seules forces, et sans le secours des artifices du Piémont, nous ne serions jamais venus à bout de faire insurger le royaume (3).»

—«De 1846 à 1848, partagés en plusieurs gouvernements, nous étions plus unis et plus Italiens qu'aujourd'hui; il n'y avait pas deux étrangers en Italie; Nice n'était pas française; on ne conspirait pas pour plusieurs princes et plusieurs principes; on n'avait pas la guerre civile; la discorde religieuse n'existait pas sur les places publiques, dans les salons, dans les villages et dans les chaires... Le Piémont n'est pas le type d'une Italie, et ne peut l'être; parce que, même chez des nations plus uniformes de nature et de mœurs, ce n'est pas sans secousses ni douleurs, sans pertes ni périls que le tout se modèle sur la partie.... L'unité ferait de l'Italie un gros champignon, un mollusque ou un reptile, mais jamais un homme (4)...»

—Discours du ministre de l'intérieur: «Là, les populations rurales favorisent le brigandage, et les gardes nationaux de certains pays fournissent eux-mêmes des fusils aux brigands (5).»

(1)Le Times, avril 1863.

(2)Rapport officiel  de la Commission parlementaire d'enquéte sur le brigandage, page 909.

(3) Cronaca delle guerre d'Italia, del 1859-1860, 2 partie, p, 651 à 657.—La Verità intorno agli nomini ed alle cose d'Italia, par Curletti, p. 9. — Atti editi ed inediti del Cavour, publiés par Nicomède Bianchi.

(4) Tommaseo, Lettera ad Errico Cenni sulle presenti condizioni d'Italia. Lucca, tipografia Landi, 1863.

(5) Séance parlementaire du 4 avril.

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— Un député s'empresse d'ajouter que «quand un gouvernement (comme celui du Piémont) est haï des populations, il n'y a police qui puisse maintenir la sûreté publique, et les dépenses qu'on fait pour cela sont inutiles.»

— Des bombes éclatent dans le palais du général Topputi, commandant la garde nationale de Napies, au seuil du théâtre San Carlo, et sous les fenêtres du Palais royal, pendant les fêtes de la duchesse de Gênes

—La duchesse de Gênes fait faire pour les pauvres 24,000 pains. Malgré la misère croissante, plus de la moitié de ces pains restent entre les mains de la municipalité.

—Le Journal officiel de Naples, du 86 février, annonce la découverte de complots bourboniens, suivie de l'arrestation d'un grand nombre d'officiers de l'ancienne armée, entre autres le général Sergardi, son fils,le commandant Piranti, etc. — Nombreuses arrestations à Môntella d'Avellino.

—«Tout conspire pour accroître la répugnance générale pour ce gouvernement, le pire de tous ceux qui furent et seront. Les paysans, condamnés à regarder la destruction de leurs biens, n'ont d'autre espérance qu'un changement de dynastie, à l'exception du petit nombre des salariés du Piémont; et, pour changer de roi, ils appelleraient jusqu'au diable. Dans la caste professionnelle, il y a peu de gens non corrompus et vraiment Italiens; la jeunesse, en partie désillusionnée par tant de mensonges, de scandales et d'erreurs, se montre aujourd'hui plus vieille que les vieillards mêmes... En un mot, nous sommes en pleine réaction (1).»

(1)La Nuova Europa, de Florence, correspondance de Fôg-gia, 10 janvier.

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—«Meeting de sénateurs et députés demandant au gouvernement de faire cesser la déplorable situation du pays. — Pétition populaire réclamant le transfert de la capitale de Turin à Naples (1).

—Le gouvernement fait construire un certain nombre de barques, qu'il destine en pur don aux mariniers de Santa-Lucia et de Chiaja, qui les refusent (2).

—La grande majorité du peuple napolitain refuse de recevoir la nouvelle monnaie piémontaise, qu'il appelle, avec une spirituelle ironie, «la monnaie de passage.»

(1)Le Nomade, 9 janvier; le Corriere d'Italia, 13 janvier.

(2)Le journal Roma, n° 73.

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VI

A Monte Sant'Angelo, près du Gargano, dans les Pouilles, la population se soulève contre les agents et les favoris du Piémont Plusieurs gendarmes, parmi lesquels le brigadier, sont massacrés.

—La situation de la Sicile s'aggrave tous les jours, et le joug subalpin y devient de plus en plus insupportable. Dans une des nombreuses proclamations réactionnaires qui inondent à chaque instant les murs de Palerme et des villes moins importantes (1)y on lit ce qui suit: «Non, ils n'arriveront pas à leurs uns, ces voleurs qui veulent dépouiller la maison qu'ils savent devoir être forcés d'abandonner. Montrons encore une fois que nous sommes le peuple des Vêpres, et que les Vêpres italiennes sont bien plus terribles que les seules Vêpres siciliennes!»(2).

—Le 30 mars, on signale deux autres proclamations,dont l'une exhorte les Siciliens à ne pas se laisser plus longtemps séduire, le mécontentement universel étant à son comble, et l'heure de la punition étant proche.

(1)Appel au peuple de Palerme, 28 mars.

(2)Le Precursore, de Palerme, 2 avril.

—442 —

—Une huitième proclamation réactionnaire est affichée dans Palerme. La police piémontaise fait en vain les plus minutieuses perquisitions dans les imprimeries.

—«.... Le 5 avril, on répand dans Naples le bruit que Victor-Emmanuel, lui aussi, incline à la fédération et qu'il se dispose à abdiquer (1).»

—Interpellation au parlement (2) sur la triste situation de la Sicile, dont on loue le patriotisme constant, «malgré la réprouvable conduite du gouvernement et ses excès, si grands et si nombreux que ses organes mêmes sont forcés de les reconnaître.» On a laissé en place les fonctionnaires de l'état de siège; on déplore le dualisme de la gendarmerie et de la police, et la férocité de cette dernière dans ses perquisitions et ses arrestations.

—Paroles du député sicilien d'Ondes (3): «Parce qu'on dit qu'un peuple a voté le plébiscite, croit-on pouvoir en faire ce qu'on veut? À ses vieilles institutions, à ses excellentes lois, on en substitue d'autres totalement contraires au génie italien. Pour être sincère, il faut confesser que la Sicile a été de mal en pis depuis l'abolition de la lieutenance. Il faut changer de système; autrement la Sicile aura des jours douloureux, non-seulement elle, mais l'Italie entière.» Le ministre de l'intérieur avoue que «le mécontentement est réel en Sicile,» et un autre député ajoute: «Il n'y a pas jusqu'aux poignardeurs condamnes pur las tribunaux de Sicile qui n'aient été exécutés par un bourreau inexpérimenté, et d'une manière révoltante.»

—La grossière ignorance des agents piémontais de tous les rangs prête admirablement aux mordants

(1)La Gazzetta del Popolo, 8 avril.

(2)Séance parlementaire du 17 avril.

(3)Ibidem.

—443 -

sarcasmes du peuple napolitain, qui les appelle vulgairement «les mauvais ânes.»

— La duchesse de Gènes ayant fait piteuse figure à Naples, et le peuple regrettant de plus en plus haut l'ancienne cour, le ministère imagine d'y dépêcher S. A. R. le prince de Piémont. Il inaugure le chemin de fer de Pescara (Abruzçes), derrière une circulaire secrète du ministre de l'intérieur, recommandant aux préfets «de faire en sorte que l'accueil populaire soit digne de l'héritier du trône.» Le peuple brille, en effet, par son absence. Le prince piémontais et son frère se rendent le 1er novembre au théâtre Fiorentini, à Naples; l'orchestre, en les voyant entrer dans la loge royale, entonne la marche de Savoie; mais le public éclate en sifflets et en hurlements, et réclame à grands cris l'hymne de Garibaldi. Les princes, visiblement blessés, se retirent immédiatement, et tout rentre aussitôt dans l'ordre.

— Le prince Humbert ayant réussi moins encore que sa noble tante (1), les ministres envoient Victor-Emmanuel môme dans les provinces méridionales. Le roi de Sardaigne. inaugure le chemin de fer de Foggia, qu'on a construit à la hâte et à grands frais (2); il passe en revue les gardes nationales, ouvre les bals et parle de visiter la flotte italienne; mais le ciel napolitain fait comme le peuple et ne se met pas de la partie. La revue maritime tombe dans l'eau, et Victor-Emmanuel doit se contenter d'un bal si grotesquement composé qu'il ne peut retenir ses plaintes.

(1) S. A. R. la duchesse de Gênes, belle-sœur de S. M. le roi Victor-Emmanuel, a épousé en secondes noces, il y a quelques années, un de ses domestiques.

(2), Des milliers d'ouvriers y travaillaient de nuit comme de jour, à la lumière électrique. Le convoi d'inauguration dérailla.


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—444 —

«Sire, lui répond le général la Marmora, l'aristocratie napolitaine n'est pas avec nous, et le petit nombre de ses membres qui se sont ralliés nous feraient plus d'honneur en nous abandonnant. Sans tout ce bas-monde qu'aperçoit Votre Majesté, il n'y eût peut-être eu au bal... qu'elle et moi.»

Victor-Emmanuel n'ose aller à Palerme et s'empresse de regagner Turin par terre, avec une escorte vraiment burlesque, tant elle est nombreuse (1). La peur des brigands tourne la tête à tout ce pauvre monde armé jusqu'aux dents. La voiture de l'ambassadeur anglais s'étant embourbée, mylord lâche une volée de coups de revolver à son cocher, qu'il suspecte d'entente avec Pilone, Schiavone, et tutti quanti. Un long passage de la route est inondé de chardons, et, comme toujours, les populations brillent par leur absence. On dit partout que le roi de Sardaigne n'a exécuté cette triste excursion que pour permettre à ses agents de feindre sur son passage un immense enthousiasme populaire, et fermer ainsi la bouche aux députés français anti-unitaristes (2). Il pleut, par contre, à Naples comme ailleurs, des proclamations légitimistes (3). Une d'elles est placée, par une main inconnue, sur le bureau même de Victor-Emmanuel, qui ne peut contenir sa surprise et sa colère (4). On répand à profusion un opuscule portant pour titre: Au roi Victor-Emmanuel. Hommage des Napolitains, et décrivant avec une noble énergie les maux issus de l'invasion sarde.

(1)50,000 hommes étaient massés sur le parcours royal.

(2)Voir le Monitore, de Naples, 14 novembre.

(3)Voir le Corriere mercantile, de Gênes, et, en général,tons les journaux napolitains du mois de novembre.

(4)Le Contemporaneo, de Florence, 17 novembre.

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Le fameux La Cecilia lance une sorte de manifeste où il invite «le roi à soulever le pavillon de soie sous lequel l'ont mis les ministres, et à observer la misère universelle, le manque de travaux, la ruine du commerce, la Monnaie,, les fonderies, les manufactures fermées, le triomphe d'une infime minorité, la terreur de tant de citoyens menacés, l'état de siège dans les trois quarts du royaume, etc.» Le Popolo d'Italia (1) fait remarquer que, de 30,000 étudiants napolitains, une trentaine à peine allèrent au-devant du roi. —La Campana di San-Martino (2), s'adressant à Victor-Emmanuel, lui dit que «les vrais maîtres du pays sont Caruso, Crocco, etc.» —La police, avant l'arrivée du roi de Sardaigne, arrête en masse tous ceux qu'elle suspecte de ne pas trouver tout pour le mieux dans le meilleur des royaumes. Chaque lazzarone reçoit quatre carlins par jour pour crier et faire de l'enthousiasme sur le passage de Victor-Emmanuel, ce qui n'empêche pas des cris réactionnaires de se faire entendre jusque dans cette foule salariée. L'Unità Italiana, de Milan, avait dit, le 9 novembre: «Hier, le roi est parti pour Naples, où il est précédé par tout un convoi d'acclamateurs enthousiastes, voyageant gratuitement aux frais de l'État.» Les émigrés vénitiens reçoivent une solde double; la police menace de fermer les magasins qui ne se pavoisent pas, et chasse les prêtres qui no veulent pas laisser carillonner à l'approche du chef de la maison do Savoie. Lé préfet invite les personnages napolitains à former dans leurs voitures un imposant cortège à Sa Majesté, ce qui fait éclater de rire le peuple, puisqu'à Naples les corléges do voitures ne sont en usage que dans les convois funèbres. 45,000 pétitions sont adressées au roi d'Italie, qui les met toutes au panier en bloc.

(1)11 novembre.

(2)30 novembre.

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Bref, le plus clair et la morale de ce voyage royal, c'est qu'il coûte à l'Italie près de 6 millions de francs (1).

—Le jour de Noël, une émeute éclate à Naples. Un bataillon de bersaillers, soutenu par un détachement des sbires et de gendarmes, la dissout aussitôt. Deux sbires et un gendarme sont tués (2). On signale de nombreuses arrestations (3).

—«Des provinces entières sont abandonnées aux voleurs et aux assassins, et se  débattent au milieu d'actes d'atrocité et de vandalisme (4).»

—«La révolution changea les maîtres du pays sans apprendre la moralité aux masses, qui lièrent les mains aux vrais libéraux; on brûla les condamnations, on ouvrit les prisons, on substitua à l'ancienne bureaucratie une nouvelle moins instruite et vénale; le pouvoir se trouva aux mains de gens ne possédant rien; personne ne s'occupa plus de la sûreté publique, et ainsi se perdit le bien-être qu'assurait au pays la sûreté publique sous le gouvernement bourbonien... (5). La Sicile gémit dans un chaos sériai... Tout pays est tyrannisé par le petit personnage qui le domine; la populace règne souvent dans les plus grandes villes; les honnêtes citoyens, qui voient la justice et l'impartialité continuer à n'être que de vains mots, la sûreté des biens et de la vie en perpétuel péril, perdent leur attachement pour

(1)Le Contemporaneo. de Florence, 20 novembre.

(2)Le Diritto, de Turin, 29 décembre.

(3) Journal officiel de Naples, 26 décembre.

(4) Enrico Falconcini, Cinq mois de préfecture en Sicile. Florence, 1863, pages 149 et 151.

(5) Ibid., pages 21 et 22.

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un gouvernement dont la liberté semble être la licence (1).»

— «En Sicile, tout est désordre et terreur... Une crise est inévitable. Nous dirons une parole dure, mais vraie, qui nous est arrachée malgré nous par la douleur que nous éprouvons comme Italiens, comme amis sincères de la Sicile: Les populations étaient plus heureuses sous les Bourbons (2).»

(1)Enrico Falconcini, p, 24

(2)Le Diritto. de Turin, août 1863.

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VII

«Les exilés qui mendient leur pain sur la terre étrangère ne sont pas moins de 30,000; dans les provinces méridionales; il y a 8,639 employés destitués et réduits à la misère; on a fusillé ou égorgé 18,000 individus; environ 7,000 officiers de l'ancienne armée ont été licenciés au mépris de la capitulation de Gaête; 14,000 Napolitains ont été emprisonnés en une seule année. Ces chiffres officiels ont été communiqués par le ministère de Turin et ont été rapportés par plusieurs feuilles italiennes.... Et voilà le gouvernement qui se vante d'être populaire! Mais où voit-il le peuple, s'il est emprisonné, fusillé, déporté ou exilé(1)?»

— «.... Les abus de pouvoir sont si nombreux, leurs effets si désastreux, le mécontentement si général, l'opinion publique si pervertie, que, par amour pour la patrie, je crois devoir non pas excuser ou cacher les fautes commises, ce qui serait coupable, mais ne pas les exposer au peuple de manière à amener de pires conséquences. Je désire pourtant que les gouvernants connaissent le

(1)La Campana di San-Martino, 4 novembre.

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fruit de leurs œuvres, et qu'elles soient jugées par les représentants de la nation. C'est dans ce but que je vous conte les faits dont je peux, par suite d'informations, sûres, assumer la pleine responsabilité. Je ne parlerai pas des déplorables faits de Pietralia: ils sont trop connus; j'en signalerai d'abord d'autres non moins déplorables: 1° A Palazzo-Adriano, on arrête les frères Dura, très-riches propriétaires, comme suspects de vols et de complicité avec les malfaiteurs (1) et les réfractaires; on veut arrêter aussi un sieur Mancuso, leur parent. La junte municipale les renvoie avec un verdict d'innocence. 2° La même mésaventure arrive aux frères Maccalajo, de Caccamo, l'un secrétaire de la commune, l'autre avocat; la junte les remet en liberté. 3° A Ganci, le commandant Volpi, du 4 de ligne, entre en dispute avec le commissaire de police Anelli, auquel il demandait de lui indiquer le domicile de certains bâtards inconnus à celui-ci. Je ne saurais dire qui le premier en vint aux injures; mais ce qui est certain, c'est que le commandant fit arrêter le commissaire, quoiqu'il. fût ceint de son écharpe. Il resta trois jours en prison, et maintenant il intente une action contre le commandant. 4°A Geraci, le même Volpi arrête un sieur Bartolo Sciaini, ou Roscellini, maestro, qui, donnant du raisin à des soldats passant près de son domaine, priait le commandant de lui laisser une garde pour empêcher les soldats de se servir eux-mêmes. Le commandant, au contraire, arrête Sciaini comme calomniateur, le conduit à la ville et ne le délivre qu'après lui avoir fait signer un écrit par lequel il déclarait que les soldats ne lui avaient pas enlevé un seul grain de raisin, quand, en réalité, ils avaient ravagé sa vigne.

(1)Lisez: «les réactionnaires.».

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5° A Geraci, un capitaine du même bataillon exigeait de la femme da cafetier Sattl del Vecchio qu'elle lui portât le café chez lui; celle-ci s'y refusa. L'officier entra brusquement dans son appartement, essaya de l'outrager, mais n'y réussit pas. Par vengeance, il défendit aux officiers et soldats sous ses ordres d'aller à ce café. 6° A Gerda, un capitaine entre dans une auberge et demande un logement; on lui prépare deux chambres qui ont le malheur de lui déplaire; il en voit une fermée, l'ouvre et y trouve deux voyageurs: «Cette chambre me plaît, s'écrie-t-il, faites-la vider.» Ainsi fut fait. Le lendemain, le capitaine s'aperçoit que les draps du lit sont usés et s'en venge en faisant emprisonner l'hôtelière. 7° A Piana di Greci, on arrête le prêtre Ferrare, on le conduit à Palerme comme un malfaiteur; l'autorité politique le met alors en liberté comme innocent (1).

Signé: FRANCESCO PERRONE-PELADINI.

Palerme, 10 novembre 1863.

«... En cas de guerre, si notre situation intérieure reste la même, comment ferons-nous pour rappeler nos troupes des provinces méridionales (2)?»

— «L'Italie est déshonorée aux yeux du monde. Il y a en Italie des soldats pires que ceux de Mourawieff... Il y a un gouvernement qui viole ouvertement la loi, et qui en est approuvé par les représentants du pays. Il y a un ministère qui insulte toute une province italienne, au milieu des applaudissements et des sourires de mépris des députés des autres provinces.

(1)Cette lettre a été lue au parlement dans la séance du 1 décembre. Actes officiels, n° 288, page 1104.

(2)Séance parlementaire du 8 décembre. — Est-il possible d'avouer plus ingénument que le Piémont ne reste à Naples que grâce à ses 120,000 baïonnettes?

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En Italie, il y a le mensonge substitué à l'histoire, et les hommes les plus éclairés ne voient de salut pour la patrie que dans un coup d'État. En Italie, peuple, parlement, presse, tout est désordre, tout est confusion, tout est anarchie: politique, morale intellectuelle. Quelle est la synthèse suprême de la discussion? Nous tenons la Sicile de force. D'un côté on dit: Vous fûtes mal d'employer la violence; essayez d'employer la douceur. De l'autre on répond: La douceur ne sert à rien; la force est nécessaire pour dompter les bêtes sauvages. Voilà donc le parle ment, le pays, l'Europe, qui savent désormais que l'unité est le fruit de la violence Que deviennent alors le suffrage universel, la volonté nationale, la paix des esprits? Vous gouvernez, et vous ne pouvez gouverner que par la force? Alors François II a raison: vous êtes des usurpateurs et des tyrans (1)!»

—«Je vois tout, en Italie, dans la confusion et le chaos... Messieurs les ministres, vous vouliez unifier, et partout vous divisez; vous vouliez la sûreté publique, et partout vous avez le brigandage; vous vouliez la conciliation, et vous avez travaillé à créer le dualisme; vous vouliez des économies, et vous créez de plus grandes dépenses; vous vouliez l'indépendance, et vous vous liez de plus en plus à l'étranger... Chanter à tout propos le nom de l'Italie pour légitimer toute supercherie et toute erreur est une plaisanterie que les enfants mêmes tournent à présent en ridicule (2).»

—«Ces maîtres gouvernent l'Italie comme les cupides et cruels barons du moyen âge; depuis quelque temps, que d'actes de violence, de corruption et de sang nous avons à enregistrer!

(1)Le Diritto de Turin, 12 décembre.

(2)Séance parlementaire du 11 décembre

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Nous racontons des faits d'injustice qui semblent d'autres temps et d'autres lieux; nous décrivons des supplices infligés à des populations tout entières; nous montrons des pays et des villes abandonnés à l'arbitraire militaire; la faute des fils punie dans les pères, dans les mères, dans les sœurs; des jeunes filles arrachées de leurs pensions et détenues en otages dans les casernes dans les prisons, et dans de plus tristes lieux encore. Et ces faits, nous ne les inventons ni ne les amplifions; ils sont vrais, ils sont racontés par les journaux de l'Italie méridionale, affirmés par d'innombrables témoins, prouvés en justice, admis tout bas par les organes mômes du gouvernement (1).»

—La commission d'enquête sur le brigandage recueille sur son passage un certain nombre de documents palpitants d'intérêt... pour elle: 1e l'adresse des Pouilles à l'Empereur des Français, signée de 11,157 noms de la province, et demandant l'expulsion des Piémontais et le retour des Bourbons; 2° la dépêche suivante du préfet d'Avellino, Nicolas de Luca (2), au ministre de l'intérieur: «Messieurs les ministres, finissons-en avec ces gens qui abusent de la liberté, mais finissons-en radicalement; détruisez la constitution, sauvez l'Italie comme Napoléon sauva la France au 2 décembre (3).»

—M. Romeo, membre de la commission d'enquête, proteste «qu'il ne peut dire tout ce que la commission a vérifié dans le cours de son mandat, parce qu'on ne peut tout apprendre au public.»

(1)L'Unità Italiana, de Milan

(2)Ancien apothicaire.

(3)Séance parlementaire du 8 décembre. — Actes officiels, n. 293, page 1123.

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Le ministre de l'intérieur, dans sa réplique, dit également ne pouvoir montrer à la chambre tous les documents dans lesquels se lisent des choses qu'il est impossible de divulguer (1).» — En réalité, le gouvernement tient secrets la majeure partie des renseignements et documents recueillis par la commission d'enquête, «parce que la lecture de tels documents ferait connaître combien est ardue la situation dès provinces méridionales, et quelles sont les causes du profond mécontentement qui y règne (2).» — Malgré la plus vive opposition, l'infâme loi Pica est proposée, discutée et votée à la hâte, dans la même journée, le 1er août, dans les deux chambres. Il fallait, n'est-ce pas, que cette horrible loi d'exception sur le brigandage fût bien indispensable et bien urgente? — «C'était chose de vie ou de mort, me disait un député italianissime, un Pica quelconque.—Vous vous trompez, répondis-je: en ne la votant pas, vous mouriez tout simplement; vous l'avez votée, vous mourrez plus tôt, et déshonorés à tout jamais.» Les députés dès Deux-Sicilies la mettaient au-dessous des lois les plus infâmes de 93. Et bien! c'est là votre punition, hommes du blason et hommes de la blouse: vous avez trahi ou abandonné un roi chevaleresque, bon, généreux, paternel, un gouvernement honnête, patriotique, national, et vous vous êtes jetés dans la gueule du taureau piémontais. Le châtiment vous écrase aujourd'hui, et vous regrettez dans les larmes et le sang, le passé que vous avez détruit ou laissé détruire. L'homme d'honneur peut vous plaindre, mais il ne peut que trouver justes votre douloureuse punition, vos tortures, votre martyre (3).

(1)Ibidem. — Quel est donc ce mystère?

(2)Séances parlementaires des 15 mai, 5 et 10 juin.

(3)Le texte de la loi Pica se trouve au chapitre des lieutenants piémontais.


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VIII

La police piémontaise se vante d'avoir arrêté à Palerme quatre individus commandés par un nommé Russo, qui les payait vingt~cinq francs par jour pour organiser une nouvelle société de poignardeurs, forte de 200 hommes, avec huit commandants de compagnies. Le 14 ou le 19 mars, au dire de la police, tous les soldats et tous les employés du Piémont devaient être massacrés, les palais et les banques pillés, les prisons ouvertes; en un mot, ce n'était rien moins qu'une seconde édition des Vêpres siciliennes. La ville, à cette nouvelle, est plongée dans la stupeur; la garde nationale inonde les rues de patrouilles; la consternation est partout, à en croire les feuilles soudoyées par le Piémont (1)»

— Adresse des citoyens de Palerme au gouvernement piémontais:

«.... Si notre espérance d'un remède à tant de maux n'a pas le bonheur de rendre au gouvernement toute son énergie, nous, dès à présent, protestons solennellement.

(1)Voir les journaux siciliens, entre autres, la Politica del Popolo

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en face de l'Italie, de l'Europe et du monde civilisé, contre ce mauvais gouvernement de parti pris et l'inexorable abandon dans lequel on a voulu nous précipiter. Nous émigrerons avec toutes nos familles, pour trouver ailleurs cette paix et cette tranquillité que nous sommes si ardemment désireux de recouvrer; nous fermerons nos mines, nous abandonnerons nos champs, avec la conscience de n'être pas responsables des effets qui en résulteraient pour la société, pour plusieurs milliers d'ouvriers qui seraient mis sur le pavé, en quête de travail et de pain (1).»

—Les prisonniers de Lagonegro s'évadent en masse et gagnent la commune de San-Martino de Basilicate, qu'ils mettent en pleine réaction; les écussons piémontais sont détruits, ainsi que les drapeaux; le souverain légitime est proclamé, et un gouvernement provisoire est aussitôt créé.  Les garnisons voisines accourent pour écraser la réaction (2).

—«La majorité vote, mais le pays juge; le pays ne compte pas les votes, mais il pèse les raisons; enfin le pays n'est pas moralement  représenté par la chambre actuelle (3).»

—Le députe ministériel Paternostro est accueilli en Sicile par des démonstrations d'une hostilité si menaçante, qu'il s'empresse d'abandonner son pays et de se réfugier à Turin.

—Le même accueil est fait au député La Farina, qui se voit également forcé à la fuite, non sans faire: escorter sa voiture par la gendarmerie, le sabre au poing, de sa demeure au port.

(1)Séance parlementaire du 17 avril.

(2)Le Movimento, de Gênes, le novembre.

(3)Séance parlementaire du 11 décembre. — Ces paroles d'un député sicilien sont fortement applaudies par les tribunes.

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— Dans les élections au parlement, on voit des députés étus par moins de 100 voix, comme le général Medici par exemple, député par la grâce de 72 électeurs. C'est grotesque et navrant. Des collèges de 3,000 citoyens ne fournissent pas 200 électeurs; l'abstention en masse, qui est la seule protestation possible actuellement contre l'usurpation sarde, est le point de ralliement de toutes les populations et de l'immense majorité des citoyens. «Sur 40 collèges que nous avons examinés lors de la vérification des élections au parlement de Turin, nous avons trouvé que dans huit collèges, représentant 400,000 citoyens, on n'a inscrit que 6,840 électeurs; dans huit autres collèges, 7,908, 7,873, 8,658, 8,418; en un mot, pour quarante collèges représentant 3 millions de citoyens, on a inscrit 39,627 électeurs; moins de deux citoyens sur cent ont eu le haut honucur de pouvoir élire leurs représentants!... Mais ce n'est pas tout, un peu plus de la moitié des électeurs inscrits se sont présentés au scrutin, de façon que sur les 39,627 inscrits de ces quarante collèges, il s'est trouvé 20,050 votants. Et ce n'est pas tout encore: de 20,050 votes, 14.155 ont été donnés à 40 députés élus; ce qui veut dire qu'un député, devant représenter 50,000 citoyens, a été nommé par 353 votes. Et ce n'est pas tout: il y a au parlement des députés élus par moins de 100 voix, et qui ont l'avantage dé  représenter 50,000 citoyens... Pouvons-nous donc dire que nous ayons une représentation nationale? Non... (1).»

— L'historien catholique Cesare Cantù est plusieurs fois élu député par diverses populations italiennes,

(1)Le journal le Dovere, avril 1863.

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et repoussé du parlement, comme catholique, parles séides gouvernementaux; ce qui prouve surabondamment cette vérité, que le parlement ne représente pas moralement les populations et qu'il leur est imposé par une audacieuse et infime minorité. Le 20 avril, Cantù est élu député par le canton de Polistena (Calabre). Le maire lance un ordre du jour sauvage, déclarant que «qui votera pour Cantù sera considéré comme bourbonien, et comme tel fusillé (1).»

—Encore si les 400 élus, —les honorables, comme il nous importe peu de les appeler, — se rendaient tous à leur poste plus ou moins patriotique; mais, au contraire, la majorité s'abstient de paraître au parlement, peut-être sans trop s'en rendre compte, parce qu'elle représente en réalité des populations abstentionnistes, et souvent il faut ajourner des discussions et des votes d'importance, faute d'un nombre légal de votants. Le public raille ou méprise cette chambre pour rire. Quant au gouvernement, il la dissoudrait bien; mais il redoute non sans raison qu'un nouvel appel au peuple ne lui mette sur les bras un parlement catholique,  et lui aussi il fait comme tout le monde en Italie: il s'abstient (2).

—«Un très-petit nombre d'individus suffisaient autrefois à Naples pour y exercer la police; tandis qu'aujourd'hui une nuée d'agents ne suffisent pas pour nous procurer quelque sûreté (3).»

—«Dans les provinces méridionales, on n'entend que blâmes et malédictions contre le Piémont; on n'y peut

(1)Voir la séance parlementaire du 23

(2)Voir le Diritto du 18 octobre, la Preste du 5 mars, la France du 20 juin, la Monarchia nazionale du 5 mai, etc.

(3)Séance parlementaire du 11 décembre.

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dire un peu de bien des Piémontais sans soulever une tempête d'injures (1).»

—Ils veulent faire l'unité: elle n'est pas même entre eux. Quel risible et instructif spectacle que le duel de ces deux pauvres diables de ministres, Rattazzi et Minghetti, se battant au sabre le 21 juin! Ainsi le scandale et la division sont partout, du haut en bas de l'échelle unitariste.

—Quels sont les hommes sur lesquels le gouvernement usurpateur peut baser sa confiance dans les Deux-Sicilies? «Sont-ce les ministres, les employés, les officiers? Ils poussent les soldats à la désertion. Sont-ce les chefs d'institutions? Us apprennent aux élèves à crier que le roi d'Italie et Garibaldi sont excommuniés. Sont-ce les geôliers et les escortes des détenus? Ils font évader les prisonniers et s'enfuient de compagnie. Sont-ce les magistrats? Ils acquittent les coupables. Sont-ce les employé ministériels? Ils volent les circulaires secrètes et les dépêches. Sont-ce les employés des préfectures? Ils sont en correspondance avec les brigands. Sont-ce les maires, les officiers des gardes nationales? Ils sont complices des rançons du brigandage, et distillent partout le poison du bourbonisme... Et cependant ils ont tous prêté serment au roi d'Italie (2)!»

—Le gouvernement refuse des passe-ports aux habitants des Abruzzes, privant ainsi de sang-froid des milliers de malheureux d'aller gagner sous un ciel plus clément le pain qui leur est refusé sous le ciel de leur patrie.

—«Il n'y a pas d'homme de bonne foi qui puisse nier le mécontentement général; la conduite des divers ministres qui se sont succédé dans le gouvernement de l'Italie a été folle, injuste, ingrate, pour ne pas dire antinationale.

(1)Le Diritto, de Turin, 4 janvier.

(2)Le journal Roma, 6 octobre.

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Les injustices se sont commises par centaines de mille; les actes d'arbitraire ne se comptent pas (1).»

—Le 12 mars, le gouvernement dissout le conseil municipal de Naples. Les nouvelles élections sont pour le Piémont un dur échec. 6,590 voix sont données à l'opposition, et 2411 seulement aux candidats officiels. Par suite du refus de tous les adjoints, la junte municipale ne peut arriver  à se constituer  pendant  plusieurs mois (2).

—Le municipe et la garde nationale d'Ottajano, province de Naples, sont en pleine dissolution, 16 des 30 conseillers et 20 des officiers de la garde- nationale donnent leur démission (3).

—A Catane; sur les 60 conseillers, 19 se présentent; des 6 adjoints et des 12 suppléants, il en vient quatre; le maire est odieux; les impôts sont excessifs,les chemins impraticables, le mécontentement universel (4).

—Dix conseillers sur 14 de Santa Nemea, province de Salerne, donnent leur démission.

—«Il n'y a pas un individu arrêté que la force publique ne se voie disputer par des gardes nationaux du même lieu, et souvent même par des gardes nationaux de service (5).»

—Dans la province de Bari, sur 200 électeurs inscrits,il s'en présente ordinairement une vingtaine. On voit des conseillers généraux élus par 38 voix, et des conseillers municipaux par 12.

(1)Le Precursore, du Palerme.

(2)Le Nomade, 3 janvier 1864.

(3)La Patria, 31 janvier 1863.

(4)Le Diritto, de Turin, 22 mars.

(5)Falconcini, p. 72.

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La confiance est éteinte, et le sens moral des populations se pervertit de plus en plus (1).

—A Cosenza, sur 850 électeurs il s'en présente 60 (2).

—Le gouvernement fait arrêter successivement les maires de Moggiano, province de Lecce, — de Santa-Caterina-Albanese, condamné ensuite aux galères pour complicité avec les brigands; — de Saracina, en même temps que son prédécesseur, avec 60 de leurs administrés; de Luogorotondo, avec plusieurs propriétaires, enfermés au fort de Bari pour brigandage; de Longobucco (3); de Marsicovetere et trois officiers delà garde nationale (4); de Piaggine, province de Salerne (5), de Sant'Anastasia; de Roccamandolfo, comme camorriste,en même temps que le conseil municipal est dissout; de Rossano (Calabre), avec le juge, le commandant de la garde nationale et 7 propriétaires; de Casaletto, avec son frère, prêtre, et son domestique (6); de Cervinara, etc. En résumé, on compte 34 maires, 61 magistrats et 80 officiers de la garde nationale emprisonnés pour complicité avec les brigands (1). Les chefs de police de Rionero, Cerreto et Venosa sont condamnés aux galères (8).

—Recueillons, en passant, un des précieux aveux arrachés par l'évidence à nos adversaires mêmes: «C'est le sentiment unanime que l'état de choses actuel ne peut durer et qu'il n'est pas à souhaiter qu'il dure.

(1)Le Diritto 8 septembre.

(2)La Borsa, de Naples, 29 juillet.

(3)Le Monitore, 12 décembre.

(4)La Patria, 23 septembre.

(5)La Patria, 27 septembre.

(6)Journal officiel de Naples, 21 octobre.

(7)Ibidem.

(8)La Borsa, 5 novembre; le Popolo d'Italia, 7 novembre.

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Les masses, qui décident en réalité de la guerre ou des révolutions dans les moments suprêmes, ne sont pas avec nous... Nous n'avons su ni les captiver, ni les avoir avec nous; nous ne gouvernions ni avec la loi, ni avec la justice. Dans de telles conditions, il est facile de sonder le danger qui nous menace: une bataille perdue dans les plaines de la Lombardie peut être le signal d'une funeste séparation. Les partis opposés à l'unité, dans ce moment de malheur, peuvent se rendre maîtres des populations mécontentes, incertaines, de foi douteuse, et les entraîner à un acte d'audace désespéré qui serait la fin de l'Italie (1).»

Dieu le veuille!

(1)Le journal le Diritto, 27 décembre.

LES LIEUTENANTS  PIÉMONTAIS

Vous êtes aveugles si vous

ne voyez pas que vous marchez
dans le sang!
(Paroles du député piémontais Ferraris)

I

LOI PICA.

ARTICLE PREMIER.

Jusqu'au 31 décembre de la présente année, dans les provinces infestées par le brigandage et qui seront déclarées telles par décret royal, les individus faisant partie d'une troupe ou d'une bande armée composée au moins de trois personnes, parcourant les chemins publics eu. les campagnes pour commettre des crimes ou d& délits, et leurs complices, seront jugés par les tribunaux militaires, avec le code et la procédure militaire.

ARTICLE 2.

Les individus coupables de brigandage, qui auront opposé résistance à main armée à la force publique, se roat fusillés ou punis des travaux forcés à perpétuité s'il y a des circonstances atténuantes: Ceux qui n'auront

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pas opposé de résistance, ainsi que ceux qui auront abrité les brigands et leur auront fourni des vivres, des renseignements et tme aide quelconque, seront condamnés aux travaux forcés à perpétuité, et seulement au maximum des travaux forcés à temps s'il v a des circonstances atténuantes.

ARTICLE 3.

La diminution de trois degrés delà peine sera accordée à ceux qui se seront déjà constitués ou se constitueront volontairement prisonniers dons le délai d'un mois à partir de la publication de la présente loi. La publication en sera faite par le crieur public dans chaque commune.

ARTICLE 4.

Le gouvernement aura toutefois la faculté, après le délai fixé dans l'article précédent, de recevoir encore des prisonniers volontaires en diminuant leur peine d'un degré.


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ARTICLE 5.

Le gouvernement aura en outre la faculté d'assigner, pour un temps de mains d'une année, un domicile forcé aux oisifs, aux vagabonds, aux personnes suspectes, aussi bien qu'aux camorristes et gens suspects de favoriser le brigandage, sur la décision d'une commission composée du préfet, du président du tribunal, du procureur du roi et de deux conseillers généraux (1).

(1) Il est opportun de noter que les victimes sont frappées' sans avoir été entendues. C'est la plus odieuse négation du droit naturel de défense. «Toutes les nations, même les plus barbares, ont concédé ce droit, et, sous le régime des Bourbons, on n'est jamais arrivé à cet excès de nier la défense aux coupables...» Séance parlementaire du 12 janvier 1864.

—465 —

ARTICLE 6.

Les individus dont il est question dans l'article précédent, s'ils sont trouvés hors du domicile qui leur aura été assigné, seront soumis à la peine établie par le paragraphe 2 de l'article 29 du Gode pénal, qui sera appliquée par le tribunal de l'arrondissement.

ARTICLE 7.

Le gouvernement du roi aura la faculté de former des compagnies de volontaires à pied et à cheval, d'en décréter les règlements, l'uniforme et l'armement, d'en nommer les officiers et d'en ordonner le licenciement. Les volontaires auront une solde fixée par l'État; le gouvernement pourra toutefois accorder une augmentation de solde, qui sera à la charge de l'État (1).

ARTICLE 8.

Quant aux pensions pour cause de blessures ou mutilations reçues en service pour la répression du brigandage par des volontaires et des gardes nationaux, seront appliquées les dispositions des articles 3, 22, 28 à 32 de la loi sur les pensions militaires, du 27 juin 1850. lie ministère de la guerre, par un règlement ultérieur, établira les règles qui seront suivies pour certifier les faits donnant lieu à la pension.

ARTICLE 9.

En augmentation du chapitre 95 du budget, il est ouvert au ministère de l'intérieur un crédit d'un million de francs pour subvenir aux frais de répression du brigandage (2).

(1)Ainsi, ce n'est pas môme le Piémont, ce sont les communes napolitaines qui doivent payer ordinairement ces bandes,aussi lâches que féroces, de prétendus volontaires. Le Piémont ne se charge que des gratifications extraordinaires.

(2)A la suite de la promulgation de la loi  Pîca, un décret

466 —

Circulaire aux maires et chefs de municipes.
PRÉFECTURE DE GIRGENTI.

Girgenti, 1er octobre 1803.

Désirant que tout Sicilien se persuade qu'il vit sous un gouvernement fort, je vous ordonne absolument de veillor à ce que les huissiers agissent avec zèle dans la communication des ordres de payement soit en faveur du gouvernement, soit en faveur des particuliers. Sous votre responsabilité personnelle, vous me rendrez compte de leur conduite, et je vous avertis qu'en cas que vous ne le fassiez pas, vous serez inexorablement traité comme un traite aujourd'hui, en conformité des lois exceptionnelles du moment, ceux qui paraissent suspects de tendances criminelles (1). Je vous fuis remarquer, en dernier lieu que, comme jusqu'alors vous n'avez présenté aucune demande soit de congé, fort de démission, si vous en faites une désormais, je la considérerai comme nue déclaration formelle de refus de service dû légalement par vous, et je me verrai contraint d1 agir avec tous les moyens de rigueur que notre temps exige et autorise (2).

Le préfet, Falconcini.»

Circulaire aux gardes nationales et aux municipes

de la province de Foggia.

Foggia, 14 mai 1863.

A partir de demain, la guerre aux malfaiteurs sera

royal, en date du 20 août, déclare en état de brigandage onze provinces, les deux tiers du royaume Le nom dit dépoté Pica passera à la postérité chargé d'une ineffaçable tache de sang.

(1)les procès de tendances n'avaient jamais encore osé revêtir cette forme naïvement impudent.

(2)C'est-à-dire fusillé.

—467 —

reprise do plus belle sur tous les pointe de la province. Les gardes nationales parcourront le territoire de leurs commîmes; les carabiniers et les troupes les soutiendront vivement au besoin.

Tous les animaux qui sont dans la campagne seront de suite concentrés en un petit nombre de localités pour être protégés plus facilement; toutes les petites fermes seront abandonnées sans vivres, sans fourrages et solidement closes.

Personne ne pourra aller dans la campagne sans un permis signé du maire et légalisé par le commandant des carabiniers.

Personne ne pourra emporter des vivres, des provisions, des armes ou des munitions sans l'autorisation écrite du maire et sans une escorte suffisante.

Quiconque contreviendra à ces dispositions sera aussitôt arrêté comme fauteur du brigandage, et mis en prison ù ma disposition.

Syndics et délégués tiendront exactement informées lu préfecture et les sous-préfectures de l'exécution de la guerre sainte qui, grâce aux efforts de tous, sera courte et définitive.

Circulaire à toutes les gardes nationales et aux
municipes de la Capitanate.

Foggia, 18 mai 1863.

Un petit nombre d'assassins, guidés par le très-vil Michel Caruso, menacent de nouveau ces populations. Il ne sera pas dit, par Dieu! qu'une poignée de misérables voleurs compromettra encore le repos du pays (1).

(1)Ce ne sont pas ces misérables voleurs-là, monsieur le préfet, qui ont compromis le repos du pays.

—468 —

Aux armes, tous! Les gardes nationales sont commandées de détachement dans chaque commune. Le gouvernement récompensera généreusement qui fera son devoir, et punira sans miséricorde les transgresseurs de ses ordres. Tous les voleurs et tous leurs complices seront ignominieusement fusillés. Tous les suspects arrêtés seront immédiatement mis en prison, pour subir les mesures rigoureuses qui seront jugées opportunes. Que personne n'oublie qu'en pareils cas la pitié est un crime (1)!

Le préfet.
De Ferrari.

Circulaire aiux commandants de la force publique
aux maires, etc.
PRÉFECTURE DE BENÉVENT.
Bénévent, 11 septembre 1863.

ARTICLE PREMIER.

Tous chevaux et juments qui sont dans les champs, et tous foins, avoines et fourrages à leur usage, seront enfermés dans l'intérieur des communes.

ARTICLE 2.

Il est défendu de conserver des comestibles dans les maisons des champs, et tout ce qui sert de subsistance humaine.

ARTICLE 3.

Les contrevenants seront soumis à la récente loi sur le brigandage (2).

(1)Un bourreau ne voudrait pas signer ces lignes d'un haut magistrat du Piémont!

(2)C'est-à-dire fusillés ou déportés.

—469 —

CIRCULAIRE MINISTÉRIELLE.
Le ministre de l'intérieur à MM. les préfets des provinces méridionales.
Turin, mars 1863.

... Je vous engage à susciter une souscription nationale ou collecte d'argent, pour récompenser les actes de courage et indemniser ceux qui auront souffert du brigandage, qui, depuis deux ans, est un mal réel pour l'Italie et une tache à la pureté du vote national, auquel il enlève toute sa vigueur... Il faut faire sentir aux Napolitains que leur mal est un mal dont souffrent pareillement toutes les provinces italiennes; que les remèdes les plus efficaces seront pris pour arriver à l'extinction de la complicité avec le brigandage, et qu'il sera formulé un projet de lai pour récompenser les actes de courage et provoquer le concours spontané de la nation... (1).

Circulaire à tous les chefs de municipes
de la province de Capitanate.

PRÉFECTURE DE FOGGIA.
Foggia, 13 janvier 1863.

Dès la réception de cette circulaire et de celles qui y sont annexées, vous employerez tous vos soins à instituer dans votre commune une commission composée du maire, des officiers de la garde nationale, du curé, du juge de paix et de trois patriotes actifs et influents (2). Elle commencera aussitôt à quêter les offrandes (pour la

(1)Que d'aveux dans ces lignes ministérielles!

(2)Je défie n'importe quel préfet piémontais de me citer une commune des Deux-Sicilies où il se trouve trois italianissimes influents.

—470 —

répression du brigandage). Sur les tableaux imprimés que je vous envoie, seront marqués les noms des souscripteurs, qui seront ensuite publiés, afin que je puisse avoir connaissance de ces éléments pour juger les justes titres de benemerenza acquis par chaque souscripteur (1). Je veux que la première liste d'offrandes volontaires parte du municipe; aussi vous le convoquerez immédiatement en séance extraordinaire. Je crois superflu de vous recommander la plus grande activité et les plus grands soins pour assurer le succès de la souscription, ce qui sera pour moi un sujet de contentement et de satisfaction, et pour la commission un grand et précieux honneur, suffisant pour la faire déclarer comme ayant bien mérité du pays.

Le préfet, De Ferrari.

Avis préfectoral aux communes de la Capitanate.
PRÉFECTURE DE FOGGIA.

Citoyens.

Une souscription nationale est ouverte pour amener l'extirpation du brigandage. Pour rendre splendide le succès de cette grande œuvre humanitaire, il ne faudra certainement rien moins que votre concours général, qui sera une preuve de courage civique, de foi et de sacrifice. Montrons à la patrie et à l'Europe que le pays concourt unanimement (2), par tous les moyens, à la destruction

(1)En d'autres termes: c Bons Napolitains, donnez-nous de l'argent pour tuer vos frères, beaucoup d'argent, et nous vous donnerons la croix des saints Maurice et Lazare!

(2)On sait que, malgré tous les efforts, la souscription nationale n'a produit qu'une somme ridicule.

—471 —

définitive des voleurs (1). Il s'en offre aujourd'hui une solennelle occasion. Entre l'indifférence passive et l'abstention qui indiquent la complicité avec les assassins (2), et les généreuses souscriptions spontanées, qui témoignent de vertu morale et civique, vous ne pourrez, vous ne saurez hésiter!

Le préfet, De Ferrari.
SOUS-PRÉFECTURE DE SAN-SEVERO
Province de Capitanate
San-Severo, 22 janvier 1863.

Monsieur le maire.

L'Italie offre de l'argent pour soulager les victimes du brigandage; les municipes concourent à cette œuvre philanthropique, appelée à bien juste titre le Denier de l'unité. Je suis convaincu que les maires de mon arrondissement ne voudront pas que leurs municipes se montrent inférieurs aux autres, en réfléchissant surtout que les sommes recueillies seront employées au bénéfice de leurs propres administrés. Le maire préparera l'opinion publique et réunira ensuite le conseil municipal pour délibérer sur ce point. J'attends de votre zèle et de votre patriotisme le plus brillant résultat.

Le sous-préfet, Righetti

(1)Voilà un beau titre d'honneur aux yeux de l'Europe, s'il fallait, prendre au mot M. le préfet. Mais il y a heureusement voleurs et voleurs.

(2)Cette impudente menace officielle équivaut au dilemme fameux: «Payez, ou vous serez fusillés!»

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AUX HABITANTS DBS PROVINCES MERIDIONALES.
La commission centrale, chargée de réunir les

souscriptions pour l'extirpation du brigandage.

ORDONNE: UnE pension annuelle de 300 francs sera accordée à qui consignera à l'autorité, en quelque état que ce soit, un chef de brigands.

La moitié de ladite pension sera accordée à qui consignera, en quelque état que ce soit, un brigand (1).

Dans les deux cas, il sera payé deux années de pension par anticipation.

Le président, Bellelli. Le secrétaire, Racioppi.

Vu: le préfet, D'Afflitto.

AUX HABITANTS DE LA PROVINCE DE LECCE.
La commission centrale de la province, chargée de recueillir, etc., accorde les primes suivantes:

1° 100 francs à qui présentera un brigand vivant.

2° De 800 à 600 francs à qui prendra ou présentera un brigand mort (2). Si le mort est un chef de bande, la prime montera à 1,000 francs.

3° Outre la prime indiquée, celui qui aura tué un brigand sera recommandé à la clémence royale s'il est un brigand lui-même.

4° De 100 à 900 francs à qui indiquera la retraite ou le lieu de passage des brigands, ou fera connaître leurs espions, Logeurs, complices et fauteurs de toute sorte. Le président, F. Zaccaria. Le secrétaire, Martori.

Vu: le préfet, Gemelli.

(1)De quels termes qualifier cette prime au meurtre. Tuez lepremier venu; dites t «C'est un brigand,» et vous êtes payé et considéré.

(2)Ainsi, le meurtrier qui apporte un cadavre, reçoit du

—473 —

COMMANDEMENT GÉNIAL DES DIVISIONS MILITAIRES DES
CALABRES.
A Messieurs les propriétaires
Catanzaro, 8 septembre 1863.

Convaincu que ce qui fomente principalement le brigandage dans ces provinces est le lucre recueilli dans ce criminel métier;

Le soussigné.

Invite messieurs les propriétaires des Calabres, déclarées en état de brigandage, à une conférence pour objet de s'entendre sur les meilleurs moyens pour atteindre le but qu'il se propose: ces moyens seraient une société d'assurance mutuelle contre les brigands, avec les suivantes obligations:

1° Armer à leurs frais, et à proportion de leurs propriétés, un nombre déterminé de garde» ayant ordre de s'avertir et de s'aider mutuellement contre les brigands et leurs complices.

2° Refuser le honteux tribut que payent actuellement aux brigands beaucoup de propriétaires, pour ne pas dire tous, sous forme de rançon, et refuser tout secours et aide aux familles des brigands, jusqu'à ce qu'ils se constituent prisonniers.

3° Soutenir, solidairement et en proportion des propriétés assurées, les dommages causés par les brigands à chaque associé.

Le traité, les règlements et les garanties de l'association seront arrêtés dans la conférence convoquée, pour le 28 courant, par une circulaire imprimée adressée aux

(3)gouvernement régénérateur trois ou six fois plus que l'homme qui présente un brigand en vie!...

I lini ancor di sangue italo intrisi
Lavano a un fiune che si chiama Dora!.
..

—474 —

maires des provinces infestées par le brigandage, pour qu'ils emploient leur influence à y faire venir leurs administrés propriétaires. La conférence se tiendra dans les appartements du commandement général, le 28, à onze heures du matin.

Chaque propriétaire est prié de considérer la présente invitation comme lui étant personnellement adressée, et le soussigné exprime la confiance que chacun comprendra l'importance du sujet à traiter, au point de vue des intérêts publics et particuliers.

Le lieutenant général, G. Sirtori.
BRIGADE   DE   LIVOURNE 34 régiment d'infanterie
A monsieur le percepteur de Monreale
Monréale, 14 décembre 1863.

En exécution des ordres du commandant général de la province, je soussigné, chargé d'exiger de cette commune la somme de 11.199 francs, dons les journées de3 15 et 16 courant, et ayant besoin, pour la régularisation de ce payement, de l'état de ceux qui doivent payer, vous invite à me l'envoyer dans la journée, pour que j'en forme moi-même un état de recouvrement des sommes.

Je m'en rapporte à votre zèle et à votre activité pour que votre concours ne me fasse pas défaut. Je vous serais reconnaissant encore si vous pouviez afficher, sur les murs de la commune, que le payement doit être fait dans les 48 heures; passé ce temps, je déclare retardataires tous ceux qui n'auront pas payé, et les y forcerai par moyen de plantons, leur faisant fournir les meilleurs vêtements et les meilleurs lits qui se trouveront dans leurs maisons. Le payement commencera à 8 heures du matin et finira à 3 heures après-midi, le 15, et le 16.

—475 —

de huit heures du matin à quatre heures de l'après-midi (1).»

Le capitaine commandant.

Meloni.

GAZETTE OFFICIELLE DU ROYAUME D'ITALIE
(11 août 1863)
Loi sur les réfractaires (2).
ARTICLE PREMIER

Est dévolu aux tribunaux militaires le jugement des réfractaires de Tannée de terre. Les réfractaires de l'armée de mer appartiennent à la juridiction des conseils de guerre maritimes.

ARTICLE 2

Sont également soumis à la juridiction des tribunaux militaires ou des conseils de guerre tous ceux qui ont aidé les réfractaires par un des moyens exprimés dans l'art. 178 de la loi du 20 mars 1854, sur le recrutement de l'armée» et dans l'art. 135 de la loi du 28 juillet 1862 sur le recrutement maritime.

ARTICLE 3

L'observation de la loi du 27 janvier 1862, relative aux désertions militaires, est continuée jusqu'au 1er août 1864.

ARTICLE 4

Les dispositions contenues dans les articles 1 et 2 de la présente loi auront leur effet pendant deux ans, à partir du jour où elle sera mise à exécution. Les dispositions contraires sont suspendues (3).

(1)Quel gâchis! Un capitaine d'infanterie usurpant le ministère d'un percepteur, sur l'ordre d'un lieutenant-général.

(2)Séance parlementaire du 1er août.

(3)Gazette officielle du Royaume d'Italie, 11 août.

—476 —

PRÉFECTURE DE FOGGIA.
Circulaire aux municipes de la Capitanate, à afficher

dans chaque commune.

Foggia, 8 juillet 1863.

ARTICLE PREMIER

Nul ne pourra ferrer des chevaux ailleurs que dans les endroits publics à ce destinés, formellement déclarés à l'autorité de sûreté publique, et spécialement autorisés par elle avec une carte qui ne sera valable qu'après avoir été visée par le commandant de la gendarmerie du lieu.

ARTICLE 2

Aucun individu, faisant métier de ferrer les chevaux, ou fabriquant des fers, des clous et autres instruments destinés à cet usage, ne pourra sortir du pays qu'il habite ordinairement sans un permis écrit de l'autorité locale de sûreté publique, visé par les gendarmes. Sut ce permis devront être indiqués avec précision le lieut)ù le porteur projette de se rendre, le parcours à suivre, le jour et l'heure de son départ, le temps qu'il doit rester absent et le jour et l'heure de son retour.

ARTICLE 3

Nul ne pourra ferrer ou faire ferrer des cnevaux, acheter, garder ou importer des fers, clous et ustensiles servant à ferrer les chevaux, sans un permis écrit de l'autorité susdite, permis valable pour une seule fois, et visé par le commandant de la gendarmerie. Ces permis seront toujours soumis à la condition de n'en user qu'en présence de la force publique désignée par l'autorité qui les expédie, et ils cesseront d'être valables chaque fois qu'ils seront employés en son absence.

—477 —

ARTICLE 4

Quiconque possède des fera, clous ou instruments servant à ferrer les chevaux devra immédiatement les consigner à l'autorité (1).

ARTICLE 5

Les contrevenants seront arrêtés et considérés comme complices des voleurs (2).

Le préfet, De Ferrari.

COMMANDEMENT SUPÉRIEUR DE NAPLES.
Ordre du jour (3).

Naples, 23 janvier 1863.

Tous les employés du gouvernement qui portent l'uniforme de la garde nationale, à quelque classe qu'ils appartiennent, et quel que soit leur grade, sont tenus de porter la moustache et la mouche à l'italienne (4).

Le lieutenant général, Toputi.

Le maire, Colonna.

Le préfet, D'Afflitto.

(1)Il est difficile de garder le sérieux à la lecture de cette burlesque déclaration de guerre d'un préfet piémontais... aux chevaux napolitains.

(2)C'est-à-dire fusillés.

(3)Affiché à profusion dans la capitale.

(4)C'est-à-dire de copier la coupe gracieuse que vous savez, mise à Tordre du jour, en Italie, par le chef de la maison de Savoie. Un journal napolitain, la Campana del Popolo, du 30 août, revenant sur cette ridicule mesure, s'écrie: «Voyez un peu quel genre de liberté l'on goûte sous ces libéraux de la Pagnotta (autrement dit: ces traîtres!) on ne peut môme pas porter la barbe comme on voudrait!»

—478 —

II

Un ordre du général la Marmora, commandant militaire de Naples, enjoint à tous les officiers de l'ancienne armée royale napolitaine, qui n'ont pas pris du service dans l'armée piémontaise, de se rendre dans le lieu de leur naissance et de n'en pas sortir, même s'ils n'y sont nés qu'accidentellement et que leur famille soit fixée ailleurs.

—Un député piémontais ose s'écrier: «S'il existe, dans les Deux-Sicilies, des traditions de brigandage, si l'on y croit que le Bourbon puisse revenir, il faut incarner l'idée que le gouvernement est stable, enraciner dans les populations la pensée que tout est possible; brûler, s'il le faut, toutes les villes; mais, pour Dieu! ne reculons pas (1)!»

—Paroles du député Varese: «Pour peu de chose,j'appellerais enfants ceux qui nous recommandent la mansuétude, et je m'appellerais moi même imbécile parce que j'ai la faiblesse d'y incliner (2).»

(1)Séance parlementaire du 1 août.

(2)Actes officiels de 1863, n. 212, p. 813, col. 1.

—479 —

—Une circulaire du préfet Mayr, en date du 30 janvier, et portant le n° 19, ordonne à toutes les administrations des hospices, maisons de charité, etc., de coopérer spontanément à la souscription nationale pour la destruction du brigandage.

—Le général commandant la 1™ division militaire,par une circulaire adressée à tous les chefs de corps, les exhorte, ainsi que leurs subalternes, à contribuer largement à la souscription pour la répression du brigandage,et leur ordonne de lui adresser une liste portant, pour chaque corps, le nom des souscripteurs et le montant de leur souscription individuelle.

—Le général Sirtori écrit au préfet de Cosenza pour lui demander de faire fabriquer 400 ceppi dont lui envoie le modèle; le nombre de ceux qu'il a apportés du Piémont n'étant pas suffisant. Il est opportun de décrire cet instrument de torture inventé par un ancien garibaldien, actuellement passé en Piémont, pour la régénération et la félicité du peuple des Deux-Sicilies. Le ceppose compose de deux anneaux de fer vissés aux poignets des détenus de manière à ce que la vis pointue pénètre dans la chair (1).

—Le commandant piémontais Frigerio occupe, dans la journée du 15 août, Licata, ville de 22,000 âmes, et, par une chaleur torride, lui impose la privation d'eau potable, menaçant de fusiller dans la minute quiconque sortirait de chez lui.

(1)Malgré tant d'efforts et tant de recherches largement salariés, M. Gladstone ne put jamais retrouver la fameuse coiffe du silence, inventée naguère contre les Bourbons par quelque ingénieux adepte de la révolution anglo-italienne. Plus heureux que M. Gladstone, je peux me faire fort de lui faire parvenir un spécimen du ceppo piémontais. — Voir le journal napolitain l'Azione, 27 octobre.

—480 —

Sur l'interpellation d'un député sicilien, le ministre de la guerre s'appliqua à justifier M. Frigerio, en s'appuyant sur ce que cette menace, dont on faisait si grand bruit, n'avait été suivie de la mort de personne (1).

—Le général commandant Palerme ordonne l'arrestation «en masse de tous les jeunes gens qui, par la physionomie, sont suspects d'être des conscrits,» ainsi que de leurs père et mère, parents et professeurs. Sur les réclamations successives des citoyens, l'autorité civile d'une ville de 230,000 âmes répond ne savoir pas ce dont on veut lui parler (2).

—- Dans la nuit du 14 octobre, le lieutenant Charles Dupuy-Samodet fait brûler, sans raison-aucune, dans la campagne de Petralia, trois paysans innocents de tout crime ou délit: le père, Gennaro-Alberto Bonè, sa fille et son fils (3).

—Il n'est personne aujourd'hui qui ne connaisse,jusqu'au moindre détail, l'histoire de ce pauvre sourd-muet de Palerme, le jeune Antoine Cappello, criblé de cent cinquante-deux blessures au fer rouge par des chirurgiens (4) piémontais, sous prétexte qu'à feignait le mutisme et la surdité pour échapper à la conscription. J ai vu, à Naples, à Palerme, à Messine, à Cosenza, et un peu partout, la photographie du corps de cette victime instructive de la liberté piémontiste.

(1)Séance parlementaire du 5 décembre.

(2)Documents produits dans les séances parlementaire du 5 au 9 décembre.

(3)Idem — Lettre de M. Philippe Santocanale député de Pietralia-Soprana, reproduite par tous les journaux des Deux-Sicilies.

(4)Des charcutiers, plutôt!

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Ceux qui me la vendaient me disaient tous: «Ce la se vend par cent mille; c'est horrible, mais c'est vrai; patience, on le vengera!» Mais ce qu'on ne sait peut-être pas en Europe, c'est que la mère, la pauvre mère de cette infortunée victime sicilienne, Rachel Fuggita-Trischibbi, en est morte de douleur!

—L'autorité piémontaise interdit la vente de la relation des atrocités commises sur le sourd-muet Capello, et, de plus, met des plantons à la porte de l'hôpital pour empêcher qu'on ne visite ce véritable martyr de l'unité italienne (1).

—Le sourd-muet Caterino Todaro, suspect de feindre cette double infirmité pour échapper au recrutement,est mis préventivement en prison pendant plusieurs mois.

—Un commandant de la garde mobile ne se contentait pas de faire la chasse aux brigands, mais il publiait cet ordre du jour dans chaque commune qu'il traversait: «Si les brigands de ce territoire ne se présentent pas dans les vingt-quatre heures, je ferai abattre leurs maisons, arrêter tous leurs parents, saisir et vendre toutes leurs propriétés, et, quand ils seront pris eux-mêmes, je les ferai fusiller immédiatement.» Les persécuteurs même les plus acharnés des brigands ne virent là qu'une simple menace destinée à inspirer la frayeur; mais ce-fut avec horreur qu'ils la virent exécuter avec une barbarie effrénée, Les brigands ne s'étant pas présentés dans les vingt-quatre heures, leurs maisons, leurs meubles, et même leurs châtaignes et leurs pommes de terre furent incendiés; et leurs familles,femmes, vieillards et enfants, furent jetés sur le pavé

(1)Le journal l'Unità italiana, 18 novembre.

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et exposés aux ignobles injures de la force publique (1).

— Chambre des communes d'Angleterre, séance du 8 mai 1803:

«Pour détruire les sympathies des populations en faveur des Bourbons, on a incendié et saccagé seize Tilles, et fusillé, en moins de deux ans, sept mille citoyens. Le commandant Fumel est le symbole des violences piémontaises. Parmi tous ses excès, citons-en un: Une nuit, il va se loger, arec son bataillon, chez un propriétaire de la Calabre, suspect de favoriser le brigandage. Étant à table avec son hôte, il fixe l'horloge et donne à ce malheureux trois minutes pour lui remettre la liste des brigands du voisinage, sous peine de voir immédiatement brûler son palais. Sous le coup de cette terrible menace, la liste fut remise. Fumel fit arrêter tous les individus désignés, les réunit dans la cour du palais, et ordonna qu'ils fussent fusillés tous, sans en excepter son hôte. Cet ordre parvint, on ne sait comment, à l'oreille du gouvernement, qui suspendit l'exécution. Fumel irrité donna sa démission: le gouvernement l'accepta, au lieu de le faire pendre!... 32,000 Napolitains gémissent au bagne, et plus de 80,000 sont entassés dans les prisons.»

Le maire de Polistena, Calabres, fait afficher dans la commune que «quiconque votera pour le candidat catholique César Cantù sera considéré comme bourbonien, et comme tel fusillé.»

(1)La Discussione, 8 décembre.

—483 —

III

M. De Ferrari, préfet de Foggia, fait publier qu'une prime de 20,000 fr. sera accordée à qui livrera mort ou vif le chef de bande Caruso (i).

—Le même préfet, le 17 janvier, fait arrêter les parents et les amis d'environ quatre cents légitimistes.

—M. G. Gemelli, préfet de la terre d'Otrante, offre des primes à ceux qui livreront, mort Ou vif, un partisan légitimiste.

—«Les préfets, principalement dans les provinces méridionales, se tiennent souvent enfermés dans leur cabinet, au lieu Rouvrir leurs salons aux personnes les plus notables de la ville où ils résident, pour chercher à concilier les divers partis On a vu, par exemple, le premier jour de Tan, dans une des villes les plus distinguées, toutes les autorités civiles visiter le préfet, et celui-ci, le soir, garder porte close, bien qu'on donne aux préfets une forte somme pour frais de représentation, qui sert ou contraire à grossir leur bourse, tandis qu'ils devraient l'employer utilement à visiter, une fois

(1)Nous demandons à qui la prime infâme à été pavée?

—484 —

et môme deux par an, tous les lieux de leur province, comme font précisément les évêques... En outre, les préfets jouissent de peu d'autorité sur les populations, dont le sens moral se choque des mutations continuelles auxquelles le ministre les condamne (1).»

—«En général, les préfets sont des ignorants, oui,des ignorants, bien que quelquefois il en soit qui puissent avoir une instruction suffisante (&).»

—M. Falconcini, ancien préfet piémontais dans les Deux-Sicilies, ancien député, propose, pour le repos du royaume, une loi exceptionnelle permanente «qui permette aux préfets d'arrêter et condamner les citoyens à la déportation (la seule peine vraiment redoutée dans l'ile), sans être tenus de fournir au tribunal ordinaire des preuves testimoniales du crime commis.» L'honorable ex-préfet ajoute qu'on ne devrait conserver dans les préfectures aucun employé natif de la province (3).

—Bien que la province de Lecçe (Pouille) n'ait pas été déclarée en état de brigandage, le préfet crée, de sa pleine autorité, une junte extraordinaire qui procède exceptionnellement à une multitude d'arrestations politiques (4).

—Un décret royal (5) proroge jusqu'à la fin de 1863 le pouvoir extraordinaire accordé aux préfets d'approuver les impôts et contributions exceptionnels à percevoir sur les populations soumises à leur juridiction.

—Le marquis d'Afflitto, marquis par la grâce du roi Ferdinand II, actuellement préfet piémontais à Naples.

(1)Séances parlementaires des 11 et 16 avril.

(2)Séance parlementaire du 12 janvier 1864.

(3)Falconcini, ouvrage cité, p. 98 et 39.

(4)La Campana di San Martino, 9 novembre.

(5)Gazette officielle, 23 janvier.

—485 —

insulte les citoyens de la vieille Parthénope, de la noble capitale du royaume, en les qualifiant dans sa première proclamation «d'habitants de la province de Naples.» Aussi tous les exemplaires en sont-ils lacérés par la population.

—Le général Govone, accusé d'avoir décimé la Sicile, s'écrie fièrement: «Je l'ai fait pour le bien de l'Italie; s'il le fallait,  je ferais plus encore.»

—Un ministre piémontais disait en riant à un diplomate anglais qui blâmait sévèrement les ordres du jour des lieutenants subalpins: «Les Deux-Sicilies, ce sont nos Indes, à nous!»

CONCLUSION

La conclusion, ai-je besoin de récrire: elle est dans tous les esprits, — j'allais dire tous les cœurs, — elle est au bord de toutes les lèvres.

Hier encore, au seuil de Tannée 1865, François II, le Roi-Frère, recevait d'innombrables hommages de dévouement et de fidélité et y répondait par une admirable lettre, dont voici les principaux passages:

«Remarquez bien que lorsque le Piémont usurpateur tait de nouveaux essais pour se consolider en Italie, ses excès mêmes et ses intarissables misères ne font que confirmer enfin que son œuvre monstrueuse, née du mensonge et de la trahison, continuée par la violence et la rase, est au moment de s'écrouler. Ne vous laissez pas surprendre par les événements, et par dessus tout, lorsque sonnera pour le royaume l'heure de la délivrance

—486 —

et de la réparation, que cette heure ne vous trouvée pas désunis.

Parmi les vœux que je forme pour votre plus grand bonheur, le plus vif est que vous vous laissiez inspirer par les sentiments de conciliation et de concorde que je vous ai exprimés plusieurs fois. Gardez-vous des insinuations de ceux qui font appel aux partis extrêmes. Tenez-vous-en seulement à mes promesses; qu'elles soient la seule règle de votre conduite. La concorde des idées ne fera que resserrer celle des cœurs, et la concorde est toujours plus que jamais un devoir sacré pour tout citoyen; c'est la véritable et sage politique; c'est la première condition de force pour tous ceux qui aspirent à l'indépendance, à la vraie liberté, au bonheur de la patrie. L'union actuelle est surtout un gage de celle dont-nous jouirons plus tard, et qui sera une garantie infaillible de succès, de paix et de vitalité.»

Oui, il est impossible que ce rare amas de ridicules et de monstruosités ne soit pas balayé par le premier souffle de justice et d'honneur qui passera sur la vieille Europe; il est impossible que le noble bras de la France protège, ou du moins semble protéger plus longtemps cette usurpation imprudente, plus infâme encore dans ses suites que dans son principe; il est impossible que Dieu ne soit désarmé par tant de larmes et tant de sang répandus, qu'il ne chasse de Naples et de Palerme les vendeurs et les vendus, et ne rende à cette noble terre le soleil de la monarchie et de l'indépendance nationale!

Peut-être s'ils savaient, — tous les fauteurs et tous les complices de cet assassinat social, — combien leurs turpitudes et leurs lâchetés soulèvent, chez les hommes d'honneur, de pitié, de mépris et de dégoût, peut-être rougiraient-ils de se sentir si bas dans l'abîme de la honte, et seraient-ils les premiers à s'éloigner du Piémont,

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comme on s'éloigne sagement de l'édifice qui menace ruine, ou seulement d'un immondice. — Le pardon du peuple et du roi, doublé d'un généreux oubli, couvrirait les fautes du passé, et Naples renaîtrait de ses cendres, à l'ombre du drapeau national des Bourbons!

Voilà pourquoi j'ai écrit ce livre.

Oscar de Poli.


TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos............................1
Religion..................................38
Armée.....................................98
Justice...................................150
Finances................................183
Presse....................................231
Morale publique....................261
Prisons...................................287
Les Brigands..........................311
Unité et autonomie................415
Les lieutenants piémontais....468
Conclusion.............................487

RdS, dicembre 2008 – https://www.eleaml.org/











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